Le Vieux Cordelier Numéros 6 Et 7

Le Vieux Cordelier Numéros 6 Et 7

Le Vieux Cordelier numéros 6 et 7

Le Vieux Cordelier, numéros 6 et 7, des 6 pluviôse an II (25 janvier 1794) entre le 15 et le 17 ventôse an II (5 au 7 mars 1794).

Dans les camps opposés, on se coalisait pour empêcher Camille Desmoulins de parler.

Numéro 6 du 6 pluviôse an II (25 janvier 1794)

Il allait crier sa profession de foi politique "et les articles de la religion dans laquelle il avait vécu et mourrait soit d'un boulet, soit d'un stylet, soit dans son lit, soit de la mort des philosophes (le suicide qu'il avait justifié en 1792).

Le 6 pluviôse an II (25 janvier 1794), Camille Desmoulins éditait le numéro 6 de son journal Le Vieux Cordelier.

Non, écrivait-il, il ne pactiserait jamais avec les aristocrates et croirait jusqu'à sa mort "que la démocratie est la seule constitution qui convienne à la France".

Mais pour lui la démocratie véritable, quelle que fut l'époque, devait s'accompagner de liberté d'opinion aussi bien à la tribune de l'Assemblée que dans la presse et il revendiquait pour le patriote sincère le droit à l'erreur. Oui, il avait demandé une "guillotine économique" et non pas à la disparition de la machine de mort mais puisque ses amis même prétendaient qu'il était tombé ainsi dans l'hérésie il se tairait. Non sans avoir redit une fois de plus que ceux qui comme Mirabeau avaient prétendu ou prétendaient encore "que la liberté est une garce qui aime à être couchée sur des matelas de cadavres" n'étaient pas de véritables amis de la liberté. Il ne croyait pas non plus - et c'était une attaque directe contre le dirigisme étatique, l'économie de guerre, qui s'installait sous l'égide du gouvernement révolutionnaire - que le règne de la liberté fut celui de la misère, elle devait être celui de "la poule au pot pour tout le monde".

On lui objectait qu'il était un irréaliste, il revendiquait ce titre : oui, il restait fidèle à son vieux système d'utopie : "Tout mon tort est d'être resté à ma hauteur du 12 juillet 1789, et de n'avoir pas grandi d'un pouce non plus qu'Adam ; tout mon tort est d'avoir conservé les vieilles erreurs de la France Libre, de la Lanterne, des Révolutions de Brabant, de la Tribune des Patriotes, et de ne pouvoir renoncer aux charmes de ma République de Cocagne".

On lui reprochait d'avoir pris un virage pour se rapprocher des contre-révolutionnaires, il protestait de l'unité de sa démarche depuis 1789. Les autres avaient changé qui, croyaient sauver la République par des mesures extrêmes, la conduisaient à sa chute. Lui restait le même.

Dans ce numéro 6, Camille Desmoulins reconnaîtra cet échec :"Hébert a eu sur moi un triomphe complet". Il félicitera Jacques-René Hébert de s'être converti au "sans-culotte Jésus".

Numéro 7 rédigé entre le 15 et 17 ventôse an II (5 au 7 mars 1794).

Avant même l'arrestation de ses ennemis hébertistes, Camille Desmoulins composa sans doute entre le 15 et 17 ventôse an II (15 et 17 mars 1794) le numéro 7 du Vieux Cordelier.

D'emblée il annonçait que dans le péril extrême que courait la République, et à l'invite de Maximilien de Robespierre lui-même, il saurait "enrayer sa plume qui se précipite sur les ponts de la satire".

Dans ce numéro 7, Camille Desmoulins y mettait en scène un vieux cordelier dialoguant avec lui, Camille Desmoulins, tandis que celui-ci cherchait à modérer ses propos. L'habileté tactique dont il y faisait preuve était très vite mise à défaut au long de sa faille : Il attaquait avec virulence la faction des Hébertistes et s'en prenait aussi avec vigueur, aux membres du Comité de sûreté générale ou à ses agents, Marc Vadier, aujourd'hui "Saint Dominique du Comité" , rappelait-il avait été jadis traité de renégat, de plus infâme des constituants par Jean-Paul Marat. Jean-Henri Voulland, secrétaire du Comité, était un ancien royaliste prononcé et un ancien membre du Club des Feuillants, "Grégoire Jagot autre frère terrible du Comité" et qu'il rendait quelque peu responsable de l'incarcération d'Étienne-Claude Duplessis, son beau-père qui, le 10 août 1792, avait couru "donner sa démission de membre du Comité de sûreté générale de l'Assemblée législative de peur que la Cour ne gagnât la bataille du lendemain, n'était qu'un lâche". Jean-Pierre-André Amar "dont la musique calme l'orage" avait un sabre qu'il maniait avec autaut d'aveuglement et de vengeance personnelle que ses confrères. Jacques-Louis David , le peintre, était "un homme perdu d'orgueil" qui simulait la rage du terroriste pour faire oublier qu'il avait été l'employé de Louis XVI (Louis XVI de France) et l'ami des Brissotins (ou Girondins). Autour du Comité de sûreté générale , on trouvait encore des hommes comme François Héron, cet ancien corsaire de profession, qui dans la rue désignait et montrait du doigt des suspects et qui s'enrichissait indûment au service de l'État.

Jouant de la formule du dialogue avec son interlocuteur supposé, Camille Desmoulins se montrait moins vif dans ses attaques portées contre le Comité de Salut public. Il reprochait bien à Maximilien de Robespierre de limiter la liberté d'opinion mais il reconnaissait ou feignait de reconnaître que "si un pouvoir tel et de si longues durée que celui du Comité de salut public était entre d'autres mains que les siennes, et celles de Georges Couthon et de Robert Lindet, je croirais que la République menace ruine". Il lançait toutefois des piques à Louis Antoine Léon de Saint-Just et ne ménageait pas ses coups à Bertrand Barère de Vieuzac.

S'il reconnaissait toute une pureté d'attentions à Maximilien de Robespierre, il stigmatisait la politique du Comité de guerre menée par le Comité de salut public et par Maximilien de Robespierre. Voilà, disait-il, qu'on attaquait plus les rois mais les peuples et il tirait pour ceci argument d'un discours de Maximilien de Robespierre au sujet de la guerre avec l'Angleterre. Maximilien de Robespierre s'était moqué de Cloots qui voulait municipaliser l'Europe et il se chargeait maintenant de son apostat, voulant démocratiser le peuple anglais.

Cette nationalisation de la guerre ne pouvait qu'être néfaste à la République. Il dénonçait aussi avec la force du jansénisme républicain de Maximilien de Robespierre qui voulait, fonder la République sur la vertu des citoyens comme contrepoids à la Terreur dont on voyait partout les excès. "Pourquoi avons-nous en horreur la monarchie et chérissons-nous la république ? c'est qu'on suppose avec raison que les hommes n'étaient pas tous vertueux, il faut que la bonté du gouvernement supplée à la vertu et que l'excellence de la république consiste en cela précisément qu'elle supplée à la vertu. En effet, à la différence des monarchies, où un seul homme fait jouer selon ses caprices et son égoïsme ce double ressort, la crainte et l'espérance qui lui asservit les hommes et en fait autant d'esclaves : dans les républiques au contraire, les citoyens étant égaux, et les pouvoirs partagés, si les nations manque de vertu comme dans les monarchies, du moins il s'établit une balance de vices, la nature du gouvernement les oppose les uns aux autres ; et dans cet équilibre, c'est l'intérêt général qui départage".

L'excellence de la République, dépendant aussi du respect qu'avaient les hommes en place de la liberté des citoyens, tout au moins des citoyens patriotes. il y avait là le cœur même de l'article de Camille Desmoulins, un plaidoyer pour la liberté de la presse. Il écivit alors ses plus belles pages et les arguments qu'il développa, les mots qu'il sut trouver, résonneront longtemps dans les siècles à venir.

"Qu'est-ce qui distingue la république de la monarchie ? C'est une seule chose, la liberté de parler et d'écrire. Ayez la liberté de la presse à Constantinople, et demain le faubourg de Pera sera plus républicain que le faubourg Saint-Marceau" [...] on objectait que cette liberté rendait possibles toutes les dénonciations et même les calomnies ? Eh ! bien, "j'aime mieux cela, répodait-il, que de voir que nous avons retenu cette politsse bourgeoise, cette civilité puérile et honnête, ces ménagements pusillanimes de la monarchie, cette circonspection, ce visage de caméléon et de l'antichambre, ce B...isme (sur l'épreuve corrigée, il avait d'abord mis "barrérisme"), en un mot, pout les plus forts, pour les hommes en crédit et en place, ministres ou généraux, représentants du peuple ou membres influents des Jacobins, tandis qu'au fond avec lourde raideur sur le patriotisme en défaveur et disgracié" [...]

Faudrait-il opiner encore et toujours dans le sens de ceux qui gouvernait ? Camille Desmoulins demandait à la République naissante s'il n'était pas permis de lui faire les très humbles remontrances que souffrait autrefois la monarchie. Quand toute vérité n'est plus bonne à dire, la République existe-t-elle encore ? Le journaliste servile qui acceptait la censure ouvrait la voie au despotisme. Ne se souvenait-il pas de l'exemble du peuple le plus démocrate de l'Univers, celui des Athéniens ? Railleur et malin, non seulement il avait permis de parler et d'écrire de tout. Il avait mis en scène ses généraux, ses ministres, ses philosophes et ses comités ne leur épargnant pas les moqueries et les critiques. Ce qui était bien plus fort encore, ce peuple avait voulu se représenter au théâtre, s'y voir jouer lui-même pour dire ses fautes.

"Je suis même persuadé, écrivait Camille Desmoulins, que chez un peuple lecteur, la liberté illimitée d'écrire, dans aucun cas, même en temps de révolution, ne pourrait suffisamment gardée contre tous les vices, toutes les friponneries, toutes les intrigues, toutes les ambitions" [...] Liberté de la presse illimitée même en temps de révolution ? Camille Desmoulins admettait toutefois au détour de sa plaidoirie, que celle-ci pouvait être utilisée par les ennemis de la Révolution mais disait-il, c'était au journaliste patriote d'interroger sa conscience pour savoir jusqu'où il pouvait allait trop loin. Ce n'était pas en tout cas aux gouvernants d'indiquer au journaliste ce qu'il devait censurer dans ses articles:

"Brûler n'est pas répondre" redisait-il à l'adresse de Maximilien de Robespierre, et celui qui se conduit ainsi est "un despote".

Le numéro 7 du Vieux Cordelier ne fut jamais vendu.

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