- Le Vicomte de Bragelonne
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Le Vicomte de Bragelonne Auteur Alexandre Dumas
avec la collaboration d'Auguste MaquetGenre Roman historique Pays d'origine France Éditeur Le Siècle Date de parution 1847 Série Les Mousquetaires Chronologie Vingt ans après Le Vicomte de Bragelonne est un roman français, faisant suite aux Trois Mousquetaires et Vingt ans après et constituant le dernier volet de la trilogie des Mousquetaires. Il fut publié de 1847 à 1850 par Alexandre Dumas, d'abord dans le journal Le Siècle, sous le titre Les Mousquetaires, trilogie, indiquant que « Le Siècle a commencé le 20 octobre[1] la publication de la troisième et dernière partie, Le Vicomte de Bragelonne ».
Le roman dépeint la cour du jeune Louis XIV et propose une solution très romanesque au mystère de l'homme au masque de fer. Bien que n'occupant qu'une partie du roman, c'est ce dernier épisode qui en est le plus connu, et a donné lieu à la plupart des adaptations tirées du livre. Le personnage qui donne son titre au roman est Raoul de Bragelonne, fils naturel du mousquetaire Athos.
La parution du roman en feuilleton fut plusieurs fois interrompue, du fait de la révolution de 1848 et de la candidature malheureuse de Dumas aux élections législatives.
Sommaire
Résumé
L'action se déroule entre 1660 et 1673
Dans le Vicomte de Bragelonne, les héros des deux premiers livres ont beaucoup vieilli. D'Artagnan, devenu capitaine des mousquetaires, le plus jeune des quatre, a désormais cinquante ans. Porthos, lui, est baron depuis le précédent volume. Aramis est de plus en plus puissant : il est évêque de Vannes, puis général des jésuites.
Le ton de ce troisième roman est mélancolique : on sent venir la fin. Trahisons, désillusions et intrigues font partie intégrante d'une société dont la valeur fondamentale n'est plus l'honneur et qui n'est plus que l'ombre de celle qui l'a précédée. Raoul, le vicomte de Bragelonne, le fils d'Athos, meurt à la guerre en se portant à la charge lors d'un combat. Il s'agit presque d'un suicide dû à la peine qu'aurait causé la trahison de sa fiancée, Louise de La Vallière, devenue la maîtresse du roi. La nouvelle de sa mort entraîne son père Athos dans la tombe. Porthos, le géant, faisant confiance à Aramis, rejoint la rebellion contre le roi et meurt écrasé sous d'énormes blocs de roc lors de l'assaut des forces du roi à Belle-Île-en-Mer. D'Artagnan meurt au siège de Maastricht, au moment de recevoir son bâton de maréchal de France.
Aramis reste seul : le plus ambigu des mousquetaires est le seul à savoir s'adapter au monde d'intrigues dans lequel il est passé maître. En effet, le roman dépeint le déclin de la noblesse d'épée, représentée par les mousquetaires, et l'avènement d'une noblesse de cour que le jeune Louis XIV entend contrôler. On ne gagnera plus désormais l'attention du souverain par des exploits armés, mais par l'intrigue et la flatterie.
Les dernières paroles de D'Artagnan sont : « Athos, Porthos, au revoir ! Aramis, à jamais, adieu ! »
Les personnages
Le triangle amoureux
- Raoul de Bragelonne : « c’était un jeune homme de vingt-quatre à vingt-cinq ans, grand, élancé, portant avec grâce sur ses épaules le charmant costume militaire de l’époque. [..] D’une de ses mains fines et nerveuses il arrêta son cheval au milieu de la cour, et de l’autre souleva le chapeau à longues plumes qui ombrageait sa physionomie grave et naïve à la fois. » Bragelonne est l'enfant naturel du comte de La Fère, Athos, et de la duchesse de Chevreuse. Au début du roman, il est au service du Grand Condé et vient à Blois solliciter l'hospitalité de Gaston d'Orléans pour le roi et sa suite qui font route vers la frontière espagnole où les attend Marie-Thérèse d'Autriche, fiancée de Louis XIV. Bien que donnant son nom au roman, Raoul de Bragelonne n'en est que l'un des nombreux protagonistes, étant au final moins présent que Louis XIV, d'Artagnan ou Fouquet. Le personnage de Raoul est lointainement inspiré de Nicolas de Bragelonne, cousin de Louise de la Vallière et amoureux de cette dernière, qui mourut de chagrin en apprenant sa liaison avec le Roi[2].
- Louise de La Vallière : « cette belle jeune fille blonde, aux prunelles bleues, aux blanches épaules », est la fille de M. de Saint Rémy, l'intendant du duc d'Orléans. Amoureuse de Raoul, un ami d'enfance, elle l'oublie dès qu'elle croise le roi. Toutefois, elle a alors soin de prévenir le jeune homme qu'elle ne partage plus les sentiments qu'il éprouve pour elle. Elle peut alors vouer au roi un amour unique et absolu. Raoul, élevé par le comte de la Fère dans le respect de valeurs qui paraissent désormais surannées comme la loyauté et la fidélité (il refuse de servir Condé lorsque celui-ci s'oppose au roi), en aura le cœur brisé. La Vallière est la véritable héroïne du roman, personnage féminin positif, au contraire de son amie, la Montalais[2].
- Louis XIV : « le roi était petit de taille, à peine avait-il cinq pieds deux pouces ; mais sa jeunesse faisait encore excuser ce défaut, racheté d’ailleurs par une grande noblesse de tous ses mouvements et par une certaine adresse dans tous les exercices du corps. » Le roman suit sa transformation, de jeune souverain timide et peu sûr de lui, en monarque absolu, et de roi capricieux, en grand politique. Louis XIV est un personnage ambigu : parfois juste, parfois cruel et impitoyable (comme en témoigne la conclusion de l'épisode du jumeau, ou l'ingratitude qu'il témoigne à Fouquet), le roi connaît une évolution importante, aidé en cela par les épreuves qu'il subit. Encore dominé par Mazarin au début du roman, Louis XIV apprend véritablement, après la mort de ce dernier, le métier de roi et les responsabilités qui l'accompagnent, pour s'affirmer à la fin comme un futur grand souverain. Dumas dépeint cependant avec une certaine amertume son égoïsme personnel, inhérent à sa charge. Bien que sensible, comme en témoignent ses amours pour Marie Mancini, puis Louise de la Vallière, Louis XIV est inconstant, et le roman s'achève alors que La Vallière est sur le point d'être supplantée par Madame de Montespan. Pour Jean-Yves Tadié, la prise de pouvoir par Louis XIV et son affirmation en tant que souverain sont le véritable sujet du roman[2].
Les mousquetaires
- D'Artagnan : seul des quatre amis à être demeuré mousquetaire, d'Artagnan est à la tête des gardes du roi. Au début du roman, déçu par le manque d'autorité et d'assurance du jeune Louis XIV, il démissionne de sa charge. C'est en indépendant, avec l'aide financière de Planchet, qu'il mène l'opération qui va mener à la restauration de Charles II sur le trône d'Angleterre : D'Artagnan kidnappe Monck et le persuade de trouver un accord avec le souverain en exil. Rendu riche par la récompense accordée par Charles II, d'Artagnan s'ennuie, et accepte finalement de reprendre sa charge quand Louis XIV, désormais plus assuré dans ses fonctions, le rappelle auprès de lui. C'est lui que le roi envoie, comme dans l'histoire réelle, arrêter Nicolas Fouquet. Au terme du roman, il est chargé de la mission douloureuse d'arrêter Aramis et Porthos, et refuse finalement. Désirant à nouveau quitter sa fonction, il finit par être convaincu de la future grandeur de Louis XIV, et demeure au service du roi. D'Artagnan (Charles de Batz-Castelmore, comte d') meurt au siège de Maastricht, après avoir reçu le bâton de maréchal de France.
- Athos : désormais âgé, le Comte de la Fère n'apparaît qu'épisodiquement dans le roman. Il intervient de son côté pour aider à la restauration de Charles II d'Angleterre. Son fils Raoul de Bragelonne lui a apporté le bonheur; il ne survit pas à l'annonce de la mort de ce dernier.
- Porthos : très enrichi, le Baron du Vallon de Bracieux de Pierrefonds vise la charge de Duc. Apprécié de Louis XIV à qui le présente d'Artagnan, il est néanmoins perdu par les manigances dans lesquelles l'entraîne Aramis. Croyant naïvement lutter contre un usurpateur, Porthos participe à l'enlèvement de Louis XIV. Il est ensuite pourchassé par l'armée du roi et, après un combat homérique, meurt au terme de l'épisode de la grotte de Locmaria.
- Aramis : devenu évêque de Vannes, le Chevalier d'Herblay découvre l'existence du frère jumeau de Louis XIV. La connaissance de ce secret lui permet d'accéder à la charge de général des Jésuites. Ami de Nicolas Fouquet, il décide de lui venir en aide contre Louis XIV et Colbert. Autant pour sauver Fouquet que pour devenir le véritable maître occulte de la France, il organise, avec l'aide de Porthos, l'enlèvement de Louis XIV et son remplacement par son jumeau caché. Mais l'opération échoue quand Fouquet refuse d'y participer et délivre le roi de la Bastille. Aramis doit fuir et s'exile en Espagne, où il assume des fonctions de diplomate. Des années plus tard, il est pardonné par Louis XIV et peut revenir en France.
Autres personnages
- Nicolas Fouquet : le surintendant des finances est dépeint avec sympathie par Dumas, qui défend la thèse de son innocence. Menacé par les manœuvres de Colbert, Fouquet se ruine en organisant des fêtes somptueuses pour plaire au roi. Il refuse le complot d'Aramis de remplacer le roi par son jumeau, et délivre le souverain de la Bastille. Mais Louis XIV, ingrat, en veut d'autant plus à Fouquet d'avoir été témoin de son humiliation; il fait arrêter le surintendant par d'Artagnan.
- Philippe : le frère jumeau de Louis XIV, qui ignore son existence. Il a été toute sa vie détenu au secret. Au début du roman, il est prisonnier à la Bastille, sous le nom de Marchiali. Dans la dernière partie, Aramis tente de le mettre sur le trône en séquestrant Louis XIV. Philippe est roi de France durant quelques heures, avant d'être démasqué par un Louis XIV délivré de sa prison. Il est à nouveau emprisonné et son visage couvert, sur ordre du Roi, par un masque d'acier. À noter qu'il porte le même prénom que le Duc d'Orléans, autre frère de Louis XIV.
- Jean-Baptiste Colbert : représenté par Dumas comme un personnage antipathique, Colbert est l'ennemi de Fouquet, et ses manœuvres pour supplanter le surintendant des finances et assurer la perte de ce dernier occupent une partie du roman. La conclusion montre cependant, des années plus tard, un Colbert vieilli, changé et plus bienveillant, devenu un grand ministre. Le traitement de Colbert par Dumas est à l'image de l'ambiguïté du roman qui, au contraire des précédents ouvrages de la trilogie, ne présente pas de personnage de "méchant" intégralement mauvais.
Réception
Dans un essai intitulé Art of Writing, Robert Louis Stevenson cite le roman de Dumas comme une des lectures de jeunesse qui l'ont profondément marqué : « Mon plus cher et meilleur ami en dehors de Shakespeare est sans doute d'Artagnan, le d'Artagnan vieillissant du Vicomte de Bragelonne. Je n'ai jamais rencontré d’âme plus humaine, et même, à sa façon, plus admirable ; je plaindrai sincèrement l'homme trop imbu de ses principes pour ne pas être capable d’apprendre du capitaine des mousquetaires[3]. »
Adaptations
Théâtre
Alexandre Dumas lui-même a adapté son roman en 1861, dans une pièce intitulée Le Prisonnier de la Bastille, fin des mousquetaires, qui ne traite que de l'épisode du frère jumeau de Louis XIV. Raoul de Bragelonne est mentionné, mais n'apparaît pas sur scène[4].
Cinéma
L'histoire de Raoul de Bragelonne a peu inspiré les metteurs en scène. En revanche l'épisode du masque de fer a donné lieu à de nombreuses adaptations, souvent très libres.
- 1909 : Masque de fer, italien, réalisateur Piero Fosco
- 1922 : Der Mann mit der eisernen Maske, Allemand, réalisateur Max Glab
- 1929 : The Iron Mask, États-Unis, réalisateur Allan Dwan, et dans le rôle de d'Artagnan Douglas Fairbanks
- 1939 : L'Homme au masque de fer, États-Unis, réalisateur James Whale
- 1952 : The Lady in the Iron Mask, États-Unis, réalisateur Ralph Murphy
- 1954 : Le Vicomte de Bragelonne (Il Visconte di Bragelone), réalisateur Fernando Cerchio, avec Georges Marchal dans le rôle de Raoul de Bragelonne et André Falcon dans celui de Louis XIV : l'une des rares adaptations du roman à être centrée sur l'histoire de Raoul. L'adaptation n'en demeure pas moins assez libre.
- 1954 : Le Prisonnier du roi, italien, réalisateur Richard Pottier
- 1961 : La Vengeance du masque de fer, franco-italien, réalisateurs : Henri Decoin et Francesco de Feo.
- 1976 : L'Homme au masque de fer, anglais, réalisateur Mike Newell, avec Richard Chamberlain dans le double rôle de Louis XIV et de son jumeau et Louis Jourdan dans celui de d'Artagnan.
- 1979 : The Secret of the Iron Mask, austro-anglais, avec Cornel Wilde dans le rôle de d'Artagnan, Beau Bridges dans celui de Louis XIV, Ursula Andress dans le rôle de La Vallière, Olivia de Havilland dans celui d'Anne d'Autriche et Rex Harrison dans celui de Colbert.
- 1997 : L'Homme au masque de fer, États-Unis, réalisateur Randall Wallace avec Leonardo DiCaprio dans le double rôle de Louis XIV et de son jumeau et Peter Sarsgaard dans le rôle (secondaire) de Raoul.
Influence
Alexandre Dumas étant une figure emblématique des auteurs de fiction francophone, le héros éponyme du roman prête son nom aux éditions Bragelonne qui se consacrent à la littérature de l'imaginaire.
Voir aussi
Liens internes
- Suzanne du Plessis-Bellière, modèle du personnage d'Élise
Liens externes
- Texte intégral : sur dumaspere.com ou sur Wikisource
- (fr) Le livre sur Ebooks libres et gratuits
Notes et références
- [1],Le Siècle au 20 octobre 1847
- Préface et annotations de J-Y Tadié au Vicomte de Bragelonne, Gallimard, 1997
- Robert Louis Stevenson, Art of Writing : « Perhaps my dearest and best friend outside of Shakespeare is D'Artagnan - the elderly D'Artagnan of the VICOMTE DE BRAGELONNE. I know not a more human soul, nor, in his way, a finer; I shall be very sorry for the man who is so much of a pedant in morals that he cannot learn from the Captain of Musketeers. »
- Le prisonnier de la Bastille, fin des mousquetaires
Catégories :- Les Trois Mousquetaires
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