- Ker-Ys
-
Ys
Pour les articles homonymes, voir YS .Ys (ou Is), parfois appelée « Ker Ys » (« Ker Is » en breton), est une ville légendaire de Bretagne, qui est censée avoir été construite dans la baie de Douarnenez ou au large de celle-ci, puis engloutie par l'Océan.
Sommaire
Légende de la ville d'Ys
Gradlon et Malgven
La rencontre de Gradlon et Malgven
Le roi Gradlon de Cornouaille possédait de nombreux navires qu'il utilisait pour faire la guerre aux lointains pays du Nord. Stratège hors pair, il gagnait la plupart des batailles et pillait les vaincus. Il amassait les richesses.
Mais un jour, ses marins fatigués de tous ces combats refusèrent de continuer à assiéger un château. Le roi les laissa repartir en Cornouaille et il resta seul dans le Nord. Quand il fut seul il vit une femme rousse : Malgven, la reine du Nord, se tenait devant lui. Elle lui dit : « Je te connais, tu es courageux et adroit au combat. Mon mari est vieux, son épée est rouillée[1]. Toi et moi allons le tuer. Ensuite, tu m'emmèneras dans ton pays de Cornouaille. » Ils tuèrent le roi du Nord et enfourchèrent Morvarc'h (« cheval de mer » en breton), le cheval magique de Malgven. Il était noir, crachait du feu par ses naseaux et était capable de galoper sur la mer[2]. Ils rattrapèrent les navires de Gradlon mais l'élan de Morvarc'h éloigna du reste de la flotte le navire où il s'arrêta.
Le voyage de retour et la naissance de Dahut
Gradlon et Malgven restèrent longtemps en mer, si bien que Malgven donna naissance à une fille, Dahut.
Selon certaines versions de l'histoire, la reine en mourut.
Selon d'autre versions, elle ne mourut pas mais, quelque temps après la naissance de Dahut, elle demanda à Gradlon ce qu'il pensait de Dahut. Celui-ci répondit "je la chéris déja comme je te chéris". Malgven lui annonça alors que le visage de Dahut garderait l'apparence du sien pour qu'il ne l'oublie pas car le temps était venu pour elle de retourner dans son monde puis ajouta qu'ils verraient une île peu après et qu'il devait la laisser partir là car, sinon, ils ne pourraient jamais revoir la terre. Peu après, ils aperçurent une île et Malgven y partit seule.
Quoi qu'il en soit Gradlon arriva peu après en Cournouaille avec Dahut mais sans Malgven.
Ys
Origines
Selon une variante de l'histoire, Dahut était passionnée par la mer et demanda à son père de lui bâtir une cité marine. Ainsi fut fait et la ville d'Ys fut construite sur le fond de la baie de Douarnenez.
Une autre variante affirme que la Bretagne s'enfonce très lentement dans la mer et que la ville d'Ys aurait été fondée plus de 2000 ans avant Gradlon à un endroit qui se trouve au large de l'actuelle baie de Douarnenez et qui, à l'époque, était encore émergé mais, au début du règne de Gradlon, la ville se trouvait en dessous du niveau de la mer à marée haute.
Par conséquent, une très haute digue empêchait l'eau d'y pénétrer et seule une porte de bronze, dont l'unique clef était en permanence avec le roi, permettait d'entrer ou de sortir de la ville.
Chute
Ys était la plus belle et la plus impressionnante ville du monde[3] mais devint rapidement, malgré les sermons de Saint Guénolé, la ville du péché sous l'influence de Dahut (aussi appelée Ahès). Celle-ci organisait des orgies et avait l'habitude de faire tuer ses amants une fois le matin venu, si bien que Dieu décida de la punir.
Un jour, un chevalier vêtu de rouge vint à Ys. Dahut lui demanda de venir auprès d'elle et un soir, il accepta. Une tempête éclata en pleine nuit, on entendait les vagues frapper avec violence la porte de bronze et les murailles. Dahut dit au chevalier : « Que la tempête rugisse, les portes de la ville sont solides et c'est le Roi Gradlon, mon père, qui en possède l'unique clef, attachée à son cou », à quoi il répondit : « Ton père le roi dort, tu peux maintenant t'emparer facilement de cette clef. » Dahut vola la clef à son père et la donna au chevalier, qui n'était autre que Satan. Le diable ouvrit la porte de la ville. — Une autre version prétend que ce fut Dahut elle-même qui les ouvrit.
Les portes ayant été ouvertes en pleine tempête et à marée haute, une vague aussi haute qu'une montagne s'abattit sur Ys. Le roi Gradlon et sa fille montèrent sur Morvarc'h, le cheval magique. Saint Guénolé vint près d'eux et dit à Gradlon : « Repousse le démon assis derrière toi ! » Gradlon refusa d'abord, mais il finit par accepter et poussa sa fille dans la mer. L'eau recouvrit Dahut qui devint une sirène. (la légende précise que cette sirène avait une apparence parfaitement humaine et, donc, n'avait pas l'apparence chimérique que l'on attribue aujourd'hui aux sirènes)
Gradlon se réfugia à Quimper, qui fut sa nouvelle capitale. Une statue équestre de Gradlon fut faite et elle est toujours aujourd'hui entre les flèches de la cathédrale Saint Corentin à Quimper. On dit que les cloches des églises d'Ys peuvent encore être entendues en mer par temps calme. Une légende dit que quand Paris sera engloutie, resurgira la ville d'Ys : Pa vo beuzet Paris, Ec'h adsavo Ker Is (Par Is signifiant en breton « pareille à Ys »).
Interprétation
On retrouve des récits semblables dans trois grands rameaux de la civilisation celte (les bretons, les gallois et les irlandais). Les légendes se fondant généralement sur une histoire vraie (comme la guerre de Troie par exemple), il est probable qu'une telle catastrophe ait eu lieu lorsque les Bretons, Gallois et Irlandais ne formaient qu'un seul et même peuple.
L'écrivain Iman Wilkens affirme, dans son livre Où jadis était Troie, que la guerre de Troie et les autres événements des poèmes épiques de l'Iliade et de l'Odyssée d'Homère auraient eu lieu dans l'Océan Atlantique et la mer du Nord. Il affirme que la ville d'Ismara, pillée par les hommes d'Ulysse après avoir quitté Troie, serait, en fait, Ys. Cette thèse n'a pas attiré l'attention des grands savants.
Selon certaines variantes de cette légende, la Bretagne s'enfonce lentement dans la mer. Ce détail évoque un réchauffement climatique car un tel phénomène a pour conséquence une montée du niveau des mers. Ce phénomène aurait très bien pu être constaté au début du Moyen Âge ,voire dès la fin de l'antiquité, vu que, selon certaines sources, le climat aurait été particulièrement chaud au Moyen Âge.
D'après Grégoire de Tours, le roi Childebert Ier portait lui aussi une clef d'or autour du cou[4].
Place d'Ys dans la tradition
Depuis son engloutissement par la mer, la ville d'Ys occupe un rôle central dans les légendes bretonnes. On dit qu'Ys renaîtra le jour où une messe y sera célébrée. D'autres légendes mettent en scène la ville engloutie, telle celle où Sainte-Marie du Ménez-Hom ouvre tous les cent ans les flots pour contempler la ville. Également, dans son livre la Légende de la Mort (recueil de récits et croyances sur la mort), Anatole Le Braz consacre un chapitre à la ville d'Ys.
Is et Paris
Une légende dit aussi que les Francs, cherchant un nouveau nom pour leur capitale, l'appelèrent Par-Is (Pareille à Is) parce que ces deux villes, à l'époque, se disputaient le titre de ville d'Isis[5] mais que jamais elle n'égala la ville d'Is au temps de sa splendeur.
Mais l'Histoire nous apprend que cette « légende » est probablement fausse car Paris doit son nom à la tribu gauloise des Parisii, ces derniers ayant pour capitale Lutetia Parisiorum, qu'on nomme actuellement « Lutèce », l'ancêtre de Paris. Cela dit, selon Voltaire, cette ville se serait appelée « Parisis » avant de devenir « Paris » en raison de la venue du culte d'Isis dans cette ville[réf. nécessaire] : ce qui va dans le sens de la légende.
Une autre interprétation possible est que la ville appelée Paris dans la légende ne désignait pas forcément dès l'origine la ville que nous connaissons aujourd'hui sous ce nom mais n'importe quelle ville pouvant être vue comme l'égale d'Ys. Dans ce cas Paris pourrait aussi désigner Quimper, Nantes, Rome, voire Rennes, Bruxelles, Berlin ou toute autre ville pouvant ou ayant pu être vue comme l'égale d'Ys.
Littérature
Lionel Courtot livre dans Ys, adaptation théâtrale de la légende de la ville, aux Éditions Alain Bargain, un portrait fort et émouvant des différents protagonistes de la légende d’YS.
Le pays d’Ys est également un des mondes dans lesquels les héros du Livre des Étoiles d’Erik L’Homme évoluent.
Martial Caroff, auteur des Quatre Saisons d’Ys, fait bourlinguer ses personnages dans la cité d’Ys autour d’enquêtes passionnantes.
Dans Les Bienveillantes, Jonathan Littell, l’auteur, évoque la légende de Vineta, cité située sur la côte de la Baltique dans l’actuelle Pologne, et la compare à Ys.
Le chapitre XI du recueil La Légende de la Mort d’Anatole Le Braz contient plusieurs histoires sur la ville d’Ys. fiche lecture
LE PETIT ROI D'YS (Georges G. Toudouze) Bibliothèque verte L'auteur des "cinq jeunes filles"Georges G. Toudouze nous fait revivre une légende bretonne, celle de la ville d'Ys qui aurait disparu voici plusieurs siècles, engloutie par les flots. Un roi bon et généreux, Gradlon épousa une méchante princesse Ahès qui ouvrit les écluses qui protégeaient la ville de la fureur des flots qui s'engouffrèrent dans la brèche pour engloutir la cité et tous ses habitants.
Dans la Dérive des incontinents, Gordon Zola évoque la persistance de la famille régnante d'Ys.
Musique
- Claude Debussy (1862 - 1918) : La Cathédrale Engloutie (Préludes pour piano, 1er livre)
- Paul Le Flem (1881 - 1984) : La Magicienne de la mer (opéra)
- Wig A Wag : Le morceau Babylone Kêr-Is de leur album éponyme sorti en 2006 s'inspire également de cette légende.
- Edouard Lalo (1823 - 1892) : Le Roi d'Ys (opéra)
- Alan Stivell (1944 - ) : Le morceau Ys sur l'album Renaissance de la Harpe Celtique (1972).
- Tri Bleiz Die: la chanson Ar Gêr a Is (en français La ville d'Is) dans l'album "Dalc'homp Mat!"
- Joanna Newsom: l'album Ys (voix/harpe)
Jeu vidéo
La légende d'Ys a inspiré une série de jeux vidéo du même nom de la société japonaise Falcom. Cette série, entamée dans les années 1980, s'est vue déclinée sur pratiquement toutes les plateformes du MSX à la PlayStation 2. Voir l'article dédié.
Voir aussi
Liens externes
Notes
- ↑ le fait qu'une épée soit rouillée veut dire qu'elle n'a pas servi pendant longtemps. Ici, Malgven sous-entend que son mari ne s'est pas servi de son épée depuis longtemps et ne sait plus se battre. D'ailleurs, certaines versions de la légende précisent que ce mari était également un ivrogne qui ne pensait qu'à son vin. Si bien que, selon une variante, qui dit que les soldats de Gradlon ne se sont mutinés qu'après plusieurs mois de siège, il ne s'est, à aucun moment, rendu compte que la ville était assiégée (le siège avait pourtant duré tout l'été et les quelques premiers jours de l'automne).
- ↑ La légende dit que cela était dû au fait qu'il courait tellement vite que ses sabots n'avaient pas le temps de s'enfoncer dans l'eau
- ↑ à égalité avec la ville où Gradlon a rencontré Malgven qui, elle, se trouvait à l'extrémité nord du monde connu (quelque part sur les rivages de l'Océan Arctique) mais dont le nom est, aujourd'hui, oublié (Ys se trouvait alors à l'extrémité ouest du monde connu)
- ↑ on ne sait pas ce qu'ouvrait cette clé mais il est fort peu probable qu'elle fût aussi importante que celle de Gradlon car cette dernière était symbole, plus que le titre de roi, du pouvoir sur la ville d'Ys.
- ↑ à l'époque, beaucoup de villes étaient sous la protection d'une divinité. Deux des exemples les plus connus sont Athènes, la ville d'Athéna, et Menphis, l'antique capitale de l'Égypte, qui était la ville de Ptah.
Catégories : Mythologie celtique bretonne | Ville de fiction | Légende | Ville disparue
Wikimedia Foundation. 2010.