Jules de Polignac (1780-1847)

Jules de Polignac (1780-1847)
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Jules de Polignac, 3ème duc de Polignac
Jules, prince de Polignac
Jules, prince de Polignac

Mandats
7e président du Conseil des ministres français
(8e chef du gouvernement)
8 août 182928 juillet 1830
Monarque Charles X
Gouvernement Polignac
Législature IVe législature
Prédécesseur Vicomte de Martignac
Successeur Casimir Louis Victurnien de Rochechouart de Mortemart
Biographie
Nom de naissance Jules Auguste Armand Marie de Polignac
Date de naissance 14 mai 1780
Lieu de naissance Versailles,
Royaume de France Royaume de France
Date de décès 2 mars 1847 (à 66 ans)
Lieu de décès Paris, Drapeau français Royaume des Français
Nationalité française
Parti politique Ultra-royaliste
Religion catholique

Grand Royal Coat of Arms of France.svg
Présidents du Conseil des ministres français

Jules Auguste Armand Marie de Polignac, né à Versailles[1] le 14 mai 1780 et mort à Paris en 1847, comte de Polignac et prince du Saint-Empire, puis 3e duc de Polignac, est un homme politique français.

Président du Conseil des ministres du 8 août 1829 au 30 juillet 1830, il joue un rôle crucial dans le déclenchement de la révolution de Juillet 1830.

Sommaire

Jeunesse, mariage et famille

Il est élevé parmi les émigrés. Il se marie en 1816 avec Barbara Campbell, puis en 1837 avec Charlotte Boothley-Parkins. Il est le demi-frère d'Armand Jules Marie Héraclius, 2e duc de Polignac, auquel il succède au titre ducal. Jules de Polignac est le fils cadet de Jules de Polignac (1746-1817), capitaine au régiment Royal-Dragons, et de Yolande de Polastron, comtesse puis duchesse de Polignac, amie et ancienne favorite de la reine Marie Antoinette et gouvernante des Enfants de France.

Son fils aîné, Jules-Armand de Polignac, lui succède au titre ducal, en 1847. Son second fils, Alphonse de Polignac, épouse en 1860 Jeanne Émilie, fille du banquier Jules Mirès.

Son ascension politique (1804-1828)

Il est arrêté lors de la conspiration de Georges Cadoudal (1804) et est condamné à une peine de prison. Il s'évade avec son demi-frère en 1813, et intègre les ultras en 1814. Il revient en France avec le comte d'Artois (le futur Charles X de France) en 1814 puis passe à Gand avec la famille royale durant les Cent-Jours.

Partisan d'une restauration intégrale de la monarchie et de l'Ancien Régime et hostile aux tendances libérales de la Charte de 1814, il devient pair de France. C'est également un ardent défenseur du catholicisme (il est fait prince romain en 1820). Ambassadeur à Londres de 1823 à 1829, il participe aux négociations du traité de Londres (1827) qui aboutissent au traité par lequel la France, la Grande Bretagne et la Russie s'imposent comme médiateurs entre le Sultan turc et la Grèce insurgée. Une des conséquences de ce traité est la bataille de Navarin et à terme l'indépendance de la Grèce.

Il devient ministre des Affaires étrangères et président du Conseil en 1829. La crise politique empire rapidement à la fin de cette année 1829. Le roi, qui a formé en août un nouveau ministère entièrement composé d'ultras pour contrebalancer la majorité de députés libéraux élus en 1827, ne désigne qu'en novembre un « président du Conseil ». Polignac est appelé par Charles X à succéder au ministère Martignac (1828), qui est la dernière tentative de compromis du roi avec la majorité parlementaire libérale.

Le retour des ultras (1829- mars 1830)

Jules de Polignac (1829)

Le successeur de Martignac

Avec l'arrivée de Jules de Polignac en tant que Premier ministre de la France le 8 août 1829, la boucle se referme. Pendant l'été 1829, alors que les Chambres sont en vacances, Charles X renvoie subitement le vicomte de Martignac et le remplace par le prince de Polignac. Le choix du prince de Polignac, ultra-royaliste notoire et ministre des Affaires étrangères, souleve une grande émotion et déchaîne la presse de gauche. Celle-ci multiplie les critiques et les diatribes contre « Charles le Simple », ce roi bigot, conservateur, passionné par la chasse et les jeux. Le Globe salue l'événement d'une formule lapidaire qui fait mouche : « Son avènement sépare la France en deux : la Cour d'un côté, de l'autre la Nation. » Les Hommes de 1815 semblent revenir au pouvoir, un choix dont le roi porte l'entière responsabilité. Tant Polignac que ses ministres vont rapidement apparaître aux yeux d'une opinion qui lit une presse libérale en plein essor, comme des individus souhaitant établir une monarchie autoritaire, voire absolue. Il peut toujours être débattu sur la réalité d'une telle tentation chez Charles X (si elle a existé, elle ne s'est véritablement manifestée qu'en juillet 1830).

A son retour en France, les pourparlers en vue de la formation d'un nouveau ministère s'engagent avec le concours du fondateur des Chevaliers de la Foi, Ferdinand de Bertier de Sauvigny, sur la base d'une entente entre les divers courants de la droite. Mais de fait, la constitution de l'équipe ministérielle du prince de Polignac n'est pas des plus habiles.

Un Ministère de combat

En effet Polignac est flanqué de deux hommes qui suscitent une vive hostilité depuis le début de la Restauration. Le choix de François Régis de La Bourdonnaye (un acteur de la deuxième Terreur blanche légale, sous la chambre introuvable), que son ancien ami Chateaubriand qualifie dans les Mémoires d’outre tombe de « plus mauvais coucheur qui fut oncques », acerbe et arrogant, intransigeant parmi les intransigeants dans le domaine politique devient ministre de l’Intérieur. Louis de Bourmont, ministre de la Guerre, avait lui trahi[2] Napoléon Ier le 18 juin 1815, veille de la bataille de Ligny, trois jours avant la défaite française de Waterloo, pour rejoindre Louis XVIII à Gand. Cela engendre une violente attaque du Journal des débats qui, dans une formule restée célèbre, résume ainsi le nouveau ministère : « Coblenz, Waterloo, 1815 ! » Comprenons : émigration , trahison, répression. Plus modérés apparaissent Jean de Courvoisier à la Justice et Martial de Guernon-Ranville aux Affaires Ecclésiastiques et à l'Instruction publique mais qui apparaissent comme des ministres plutôt maladroits à l'exception de Chabrol aux Finances et de Charles Lemercier de Longpré, baron d'Haussez, à la Marine. La fin de l’année 1829 se passa sans que fût prise la moindre décision d’importance. La démission de La Bourdonnaye le 17 novembre, hostile à la nomination de Polignac à la présidence du Conseil, fut le seul fait politique notable. Polignac se rendit rapidement impopulaire par des mesure politiques autoritaires et réactionnaires. Il y a, dans cette véhémence, une part de mise en scène. Polignac, présenté comme un bigot fanatique obsédé par le droit divin des rois, est en réalité favorable à une monarchie constitutionnelle, mais considère que celle-ci n’est pas compatible avec une liberté de la presse sans limite ni mesure. Les élections de 1828 montrèrent que les électeurs n’appréciaient guère de tel retours en arrières. Il y a une opposition de plus en plus vive entre le Ministère Polignac (1829-1830), et la Chambre. La politique ultra-royaliste, qui consiste à revenir sur toutes les avancées de la période révolutionnaire, suscite l’opposition des libéraux.

Crise politique et dissolution de la Chambre

Jules de Polignac

La réunion de la Chambre le 2 mars 1830 allait montrer la force du conflit qui couvait. C’est à la suite de son discours du Trône que le conflit éclate ouvertement entre la Chambre et le pouvoir. Dans son discours d'ouverture de la session, Charles X évoqua l’existence de « coupables manœuvres » envers son gouvernement, ajoutant qu’il saurait trouver la force de les surmonter. Il annonce l’expédition militaire d’Alger et menace implicitement l’opposition de gouverner par ordonnances en cas de blocage des institutions. La gauche libérale, majoritaire, comprit ce passage comme l’annonce d’un possible coup d’État. En effet, l’adresse votée par la majorité des députés, tout en mettant en avant, avec une déférence appuyée, des sentiments monarchiques, affirme face au ministère, les droits de la Chambre. Sous la direction de Royer-Collard, elle rédigea, le 16 mars 1830, une Adresse au roi que signèrent 221 députés sur 402, signifiant à Charles X leur défiance : « La Charte consacre comme un droit l’intervention du pays dans la délibération des intérêts publics […]. Elle fait du concours permanent des vues politiques de votre gouvernement avec les vœux de votre peuple la condition indispensable de la marche régulière des affaires publiques. Sire, notre loyauté, notre dévouement, nous obligent à vous dire que ce concours n’existe pas. »

La réaction de Charles X fut sans surprise. Pour couper court à l' Adresse des 221 du 18 mars 1830 qui refuse d‘accorder sa confiance en Polignac et qui dénonce son ministère, et pour se reconstituer une majorité parlementaire favorable, Charles X prorogea la Chambre dans un premier temps. Ensuite il procède à la dissolution de la Chambre des députés le 16 mai 1830 et annonça de nouvelles élections les 23 juin et 3 juillet. Opposés à la dissolution, Chabrol et Courvoisier démissionnèrent, remplacés par Guillaume Isidore de Montbel aux Finances et Pierre-Denis, Comte de Peyronnet, à l'Intérieur : le ministère Polignac prenait une teinte réactionnaire encore plus marquée. Depuis le printemps 1830, nombreux était ceux qui s’attendaient à un affrontement avec le roi : mais rares, au total, étaient ceux qui envisageaient une révolution et un changement de dynastie. Charles X, quant à lui, espérait trouver un appui populaire, notamment rural, qui lui donnerait une majorité parlementaire. Il comptait aussi sur le prestige que son gouvernement retirerait de l’expédition d’Alger.

La fin de la branche ainée des Bourbons (avril 1830-juillet 1830)

L’expédition d’Alger

L'expédition d'Alger en 1830

Charles X et Polignac espèrent que l’expédition d’Alger, lancée le 25 mai, leur donnera un prestige suffisant pour remporter la bataille électorale. L’expédition d’Alger s’inscrit dans un double contexte international et national. Sur le plan international, il s’agit pour la France de participer au démembrement de l’Empire ottoman. D’autre part, un contentieux existe entre la France et le Dey d'Alger, qui aurait frappé d’un coup d’éventail au visage le consul de France, Deval, le 30 avril 1827, pour une sombre histoire de livraison de blé algérien impayé par les français. Charles X et Polignac répliquent aussitôt en établissant un blocus devant Alger, mais ils n’obtiennent pas réparation de l’offense. C’est sous ce prétexte que l’expédition est lancée en mai 1830, mais on voit bien qu’il s’agit surtout de faire diversion aux problèmes politiques intérieurs rencontrés par Charles X et Polignac. Le corps expéditionnaire, commandé par Bourmont, se compose de plus de 450 navires, sous les ordres de Duperré, et de près de 75000 marins et fantassins, qui débarquent en terre algérienne le 13 juin 1830. Mais la nouvelle de la prise d’Alger par le corps expéditionnaire, le 5 juillet, n’arrive en France que le 9 juillet, alors que les élections ont déjà eu lieu dans la plupart des départements. C’est trop tard pour modifier le cours des élections. Du reste cette conquête laisse l’opinion française presque indifférente et ne correspond à aucun projet politique d’envergure.

La défaite électorale

En juin et juillet, Peyronnet et Polignac multiplient les interventions. Ils font notamment ajourner les élections dans vingt départements aux 13 et 19 juillet, exaspérant les mécontentements. Le 14 juin, le roi en personne publie une proclamation contresignée par Polignac, afin de convaincre les électeurs. Pour leur part, les libéraux, autour de la société « Aide-toi, le ciel t'aidera », alors dirigée par Odilon Barrot, mènent une campagne active. En dépit de pressions multiples exercées par les préfets sur les électeurs, le résultat des scrutins confirme la poussée de l’opposition. Étalées du 23 juin au 19 juillet, elles donnent une majorité renforcée à l’opposition libérale. Les "221" (parmi lesquels dix-neuf seulement ne sont pas réélus) se retrouvent 274, les ultras 145. L’échec est cuisant pour Polignac, plus encore pour Charles X qui avait dissout la chambre précédente. Le blocage constitutionnel apparaît dans toute sa force : soit la Chambre impose ses vues au roi, obtenant la démission de Polignac et la nomination d’un ministre libéral - et on entrera alors dans une monarchie de type parlementaire -, soit le roi tente l’épreuve de force, manifestant clairement sa défiance envers le choix fait par les électeurs. Le roi choisit la seconde hypothèse. Charles X répond avec hauteur que « [ses] résolutions sont immuables ». Le lendemain, une ordonnance ajourne la session au 1er septembre, ce qui met le Parlement en vacances pour six mois. À ce moment, le roi est déterminé à aller jusqu’au bout : « J’aime mieux monter à cheval qu’en charrette » aurait-il déclaré.

Les quatre ordonnances de Saint-Cloud

Se fondant sur l’article 14 de la Charte, lui conférant le droit de promulguer les ordonnances « nécessaires pour l’exécution des lois et la sûreté de l’État », Polignac et son ministère commettent la maladresse de préparer quatre Ordonnances de Saint-Cloud, signées le 25 juillet et publiés dans Le Moniteur du lendemain.

  • La première suspend la liberté de la presse, traitée d' « instrument de désordre et de sédition ».
  • La seconde dissout la Chambre, qui n’aura pas eu le temps de siéger.
  • La troisième modifie le calcul du cens, afin de diminuer le nombre d’électeurs (on supprime la prise en compte de la patente, excluant ainsi des listes électorales nombre de commerçants et d’artisans hostiles au régime) et d'augmenter le nombre des députés élus par les électeurs les plus riches, siégeant dans les collèges de départements.
  • La quatrième fixe la date des élections aux 6 et 13 septembre.

Rédacteur dans le journal le National et l’une des meilleures plumes de son temps, Armand Carrel écrit : « La France retombe en révolution par le fait même du pouvoir ». Aux yeux de l’opinion publique, ces ordonnances apparaissent comme un véritable coup d’État. Pour sa défense, Polignac dira avoir agi par conviction et pour empêcher l’opposition de mener la France à un nouveau 1793 : la question sociale l’aurait emporté sur la rivalité politique dans les motivations de sa décision. Il s’agit pourtant d’un coup d’État en bonne et due forme, à moins de considérer qu’être minoritaire à la chambre représente, pour un gouvernement, une atteinte à la sûreté de l’État. En quelques jours, la publication des ordonnances entraîne la chute du régime. Incrédule face aux avertissements, Polignac demeure très optimiste. La période appelée les Trois Glorieuses va faire tomber les Bourbons et amener au trône les Orléans, issus du régicide Philippe-Egalité. Le débat, dès lors, va se déplacer sur le terrain d’une opposition entre monarchistes (divisés) et républicains.

Les Trois Glorieuses et la déchéance

Eugène Delacroix, La liberté guidant le peuple

Les 17 et 18 octobre 1830, une émeute éclate à Paris, afin de demander que soient livrés les quatre ministres de Charles X - dont Polignac - qui ont été arrêtés à la fin de septembre, n’ayant pu se dérober aux recherches dont ils étaient l’objet. Arrêté alors qu’il tente de passer en Angleterre, Polignac est traduit devant la Chambre des pairs et condamné à la prison perpétuelle et à la mort civile. Sa peine est commuée en vingt années de bannissement hors de France le 23 novembre 1836, par une mesure de grâce décidée à l'instigation du premier ministère de Louis-Mathieu Molé.

Notes

  1. Certaines sources le donnent pour fils naturel de Charles X.
  2. Louis de Bourmont quitte son commandement le 15 juin 1815 (3 jours avant Waterloo), veille de la bataille de Ligny, traverse les lignes ennemies de Blücher et rejoint Louis XVIII à Gand. C'est la parution de « l'acte additionnel aux constitutions de l'empire » et son article 67, article qui prononçait la déchéance des « Bourbons » qui fit prendre à cet ancien chef chouan, cette décision afin de rester fidèle à la famille royale.

Bibliographie

  • M. LE VICOMTE DE MARTIGNAC, DEFENSE DE M. LE PRINCE JULES DE POLIGNAC, Paris J. Pinard, 1830
  • CARON, J.-C., La France de 1815 à 1848, Paris, A. Colin, coll "cursus", 2002
  • El GAMMAL, Jean , Histoire politique de la France de 1814 à 1870, Paris, Nathan, coll. "Histoires", 1999
  • GARRIGUES, Jean, LACOMBRADE, Philippe, La France au 19e siècle, 1814-1914, Paris, A. Collin, coll. "Campus", 2002
  • GILMORE Jeanne, La République clandestine, 1818-1848, Paris, Aubier, coll. "Histoires", 1997
  • JARDIN, A., TUDESQ, A.-J., La France des notables, 1815-1848, 2 vol., Paris, Seuil, Points-Histoire, coll. "Nouvelle Histoire de la France contemporaine", 1973
  • Yvert Benoît (dir.), Premiers ministres et présidents du Conseil. Histoire et dictionnaire raisonné des chefs du gouvernement en France (1815-2007), Paris, Perrin, 2007, 916 p.

Voir aussi

Considérations politiques de Jules de Polignac

Études historiques, politiques et morales de Jules de Polignac

Chronologies

Précédé par Jules de Polignac (1780-1847) Suivi par
Joseph Marie Portalis
Ministre des affaires étrangères
1829-1830
Casimir Louis Victurnien de Rochechouart de Mortemart
Jean-Guillaume Hyde de Neuville
Meuble héraldique Ancre 02.svg Ministre de la Marine et des Colonies (intérim) Héraldique meuble Palmier.svg
8 août 1829 - 23 août 1829
Charles Lemercier de Longpré, baron d'Haussez

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