Haroun Tazieff

Haroun Tazieff
Haroun Tazieff
Naissance 11 mai 1914
Varsovie
Décès 2 février 1998 (à 84 ans)
Nationalité Drapeau de Pologne Pologne Drapeau de Belgique Belgique Drapeau de France France
Profession Ingénieur agronome, géologue, volcanologue

Haroun Tazieff, né en Pologne (11 mai 1914 à Varsovie - 2 février 1998), est un ingénieur agronome, géologue, volcanologue, naturalisé successivement belge puis français. Personnage médiatique, il a été un pionnier de la communication entre les volcanologues et le grand public et de la recherche sur le rôle des gaz dans les dynamismes éruptifs.

Sommaire

Biographie

Haroun Tazieff né à Varsovie en 1914, alors partie de la Russie tsariste, d'un père tatar, né à Yangi-Yer, docteur en médecine, et d'une mère russe, née à Dvinsk qui était chimiste et docteur en sciences politiques. Son père mourut au front dès le début de la Première Guerre mondiale. Avec sa mère, il émigra en Belgique à la fin de 1921 où il résida quelque temps en apatride, avant de partir en France à la fin des années 1927, puis de revenir en Belgique en 1929 et d'y recevoir la nationalité belge en 1936.

Étudiant, footballeur affilié au Daring Club de Bruxelles (Société Royale) (2) de 1930 à 1932 et, en 1935, à Gembloux Sport (2235) pendant ses études à la Faculté Agronomique, mais surtout joueur de rugby qu'il pratiqua en passionné. En 1958, alors qu'il était en expédition au Congo Belge, il adressa un télégramme d'encouragement à l'équipe de France de rugby à XV dont il connaissait certains membres et qui était en tournée en Afrique du Sud. Il fit aussi de la boxe et fut champion de Belgique universitaire, puis, alors qu'il travaillait au Congo Belge, champion du Katanga. Haroun Tazieff avait suivi ses études primaires en Russie et en Belgique. Après ses études secondaires à Bruxelles, il conquit le diplôme d'ingénieur agronome de la Faculté des Sciences Agronomiques de Gembloux. En 1938, il accomplit son service militaire dans l'armée belge et, en 1939, fut mobilisé dans une unité d'élite de l'armée belge, les chasseurs ardennais (pendant que la France était entrée dans la drôle de guerre). Il milita ensuite dans la résistance et parvint malgré tout, en 1944, à conquérir son diplôme d'ingénieur géologue de l'Université de Liège. Après la guerre, alors qu'il travaillait au Congo Belge, il eut l'occasion d'assister à l'éruption des volcans Kituro, cratère adventice du Nyamulagira et de découvrir le lac de magma du Nyiragongo. Ce lui fut une révélation et, dès lors, il se consacra à la volcanologie, inaugurant avec son ami Armand H. Delsemme, un astronome qu'il connaissait depuis l'université de Liège, d'audacieuses descentes dans la bouches des volcans pour y effectuer des prélèvements de lave et de gaz. C'est alors qu'il réalisa le film Les Rendez-Vous du Diable[1]. Il devint aussi le compagnon de Jacques-Yves Cousteau sur la Calypso, dès 1951.

Attiré par les offres qui lui étaient faites en France sur le plan scientifique, il se décida à demander la naturalisation qu'il obtint en 1971 et perdit automatiquement la nationalité belge. Cela lui valut de devenir ministre de la prévention des catastrophes dans un gouvernement français en 1981. Dénonçant ce qu'il estimait être les excès de l'écologie politique au détriment d'une étude sérieuse de l' écologie et déçu par la politique politicienne, il retourna à ses recherches. Il exposa celles-ci à l'intention du grand public par un livre qui sera le dernier d'une série de vingt-quatre ouvrages publiés depuis 1951 et dans lequel il combattait le catastrophisme en vogue avec le trou de la couche d'ozone et le réchauffement climatique, phénomènes qu'il ne niait pas, mais dont il estimait les causes mal analysées et la menace surfaite. Ce livre, il l'intitula par ironie La Terre va-t-elle cesser de tourner ? [2]

Décédé le 2 février 1998, il est enterré au cimetière de Passy à Paris.

Carrière scientifique

Il fut successivement :

De 1984 à 1986, cet homme de gauche fut secrétaire d'État chargé de la prévention des risques technologiques et naturels majeurs auprès de Laurent Fabius, Premier ministre de François Mitterrand. Ce poste de secrétaire d'État sera supprimé dans le gouvernement Chirac en 1986.

Il fut président du Comité supérieur des risques volcaniques de 1988 à 1995, et membre de la société Philomatique et de l'Explorers club de New York. Il obtint le Prix André de Saint-Sauveur de l'Académie des sports en 1971, pour exploit sportif exceptionnel et de caractère original.

Dès 1948, il se lance dans l'étude sur le vif de la phénoménologie des éruptions. Il révèlera l'importance des éruptions sous-marines, qu'il fut le premier à observer, décrire et analyser de 1957 à 1963 aux Açores (Faïal, Capelinhos), expérience reprise lors de la formation de l'île de Surtsey en 1963, en Islande, puis lors de l'exploration de l'Afar (Ethiopie) et en Polynésie. Il fit de même pour les lacs de magma qu'il a découverts (Nyragongo, Erta Ale) et à l'Erebus ainsi que pour les éruptions phréatiques (Indonésie, Afar, Soufrière de la Guadeloupe, Dieng, lac Nyos). Il est l'un des fondateurs de la volcanologie moderne, science dont il s'est fait l'apôtre du développement multidisciplinaire. Les innovations qu'il a apportées, suscitées ou favorisées portaient autant sur les concepts que sur les instruments de mesure, dont plusieurs sont restés des éléments de référence, ou sur les moyens d'accès aux bouches éruptives actives et la méthodologie de la protection des chercheurs de terrain, comme de la prévention des risques pour les populations locales.


Haroun Tazieff fut aussi l'un des pionniers de la validation de la théorie de la tectonique des plaques. À partir de 1967, les expéditions Tazieff en Afar (Ethiopie), ont apporté la démonstration de l'origine océanique des systèmes volcaniques axiaux actifs de la région. Initié dans les années 40 aux travaux de Wegener par son professeur le tectonicien belge Paul Michot, Haroun Tazieff cherchait depuis 1948-49, après sa découverte du volcanisme dans la branche sud-occidentale du grand rift africain dans le Kivu, à en explorer la partie septentrionale, qu'il ne put explorer qu'en 1967, après plusieurs tentatives avortées. Les travaux de recherche décrivant les mécanismes d'expansion en Afar se sont poursuivis de 1967 à 1976, donnant lieu à une multitudes de publications. Franco Barberi et Jacques Varet, prenant le relais d'Haroun Tazieff et de Giorgio Marinelli, se sont vu décerner le Prix L.R. Wager par la Royal Society et l'Asscociation Internationale de Volcanologie et de Chimie de l'Intérieur de la Terre (AIVCIT, 1972).

Tazieff et ses équipiers ont réalisé en Afar les premières mesures directes d'écartement des lèvres d'un rift océanique. Si l'ouverture augmente de 2cm en moyenne par an, il s'agit en réalité d'une succession d'ouvertures brutales de segments actifs, à compter en mètres sur des espaces de temps de l'ordre de 100 ans. Les événements récents mesurés par interférométrie sur images satellites le long de la chaîne axiale de Manda Harraro sont venus confirmer ce type de phénomène en 2006.

L'apport de Barberi et Varet a été de démontrer que les chaines volcaniques axiales de l'Afar étaient de type océaniques (au plan tectonique et magmatique) et assuraient le relais entre les vallées axiales de la Mer Rouge et celles du Golfe d'Aden. De sorte que la frontière des plaques entre l'Afrique et l'Arabie ne passe pas « en mer » par le détroit de Bab-el-Mandeb, mais à terre à travers l'Afar. La nature de la tectonique et du volcanisme de l'Afar se distingue ainsi de celle du rift africain, qui reste un « rift continental » n'ayant pas donné lieu à la génération de croute océanique nouvelle.

Éruption de la Soufrière

Suite à des manifestations inquiétantes du volcan de la Soufrière en Guadeloupe en 1976, une violente polémique opposa Haroun Tazieff à Michel Feuillard, directeur de l'observatoire volcanologique de la Guadeloupe, et à Claude Allègre, alors son supérieur à l'Institut de physique du globe de Paris. Feuillard, Allègre et le professeur Brousse, sur place, se fondant sur des analyses alarmantes montrant de la présence de magma frais dans les laves et cendres recueillis après les éruptions du volcan, conseillaient l'évacuation de 70 000 habitants proches, tandis que Tazieff, de retour d'un déplacement en Équateur, et se fondant sur son expérience de terrain après une visite sur le site (où il faillit être tué par un jet de gaz) affirmait que le volcan n'avait pas de magma frais, et qu'il n'y avait par de risque imminent de nuées ardentes, ajoutant que la surveillance du volcan permettrait d'avoir 24 heures pour évacuer la zone habitée en cas de remontée de magma. Des mots peu aimables furent échangés, Claude Allègre cherchant à empêcher Tazieff et les membres de son équipe de communiquer les résultats de leurs analyses. Dans le doute les pouvoirs publics préférèrent évacuer. Finalement, il s'avéra que les analyses montrant la présence de magma frais étaient erronées, et la Soufrière n'explosa pas, mais se calma sans provoquer de dégâts.

La polémique rebondit en partie quatre ans plus tard, en 1980, lors de l'explosion spectaculaire du Mont Saint Helens (État de Washington, États-Unis) survenue le 18 mai, qui tua 57 personnes. Haroun Tazieff avait en effet, quelques mois plus tôt, qualifié le Mont Saint Helens de « Petite Soufrière » mais s'était contenté d'un survol du volcan, à l'encontre de ce qu'il a toujours préconisé en matière de diagnostic : la répétition de longues observations au plus près du volcan. De même qu'il avait préconisé la surveillance de la Soufrière , indiquant que l'on aurait certainement 24 heures pour évacuer en cas de remontée de magma frais, lorsqu'il a affirmé que le St Helens était une petite Soufrière, c'était à la suite d'une éruption phréatique, bien avant la catastrophe. Ce n'était à l'évidence pas pour nier le risque ultérieur de remontée de magma, puisque telle était son appréciation des risques à la Soufrière de Guadeloupe. Ses adversaires le tinrent aussi à tort pour moralement responsable de la gestion de la crise du Nevado del Ruiz, en 1985, en Colombie, car cette crise fut en partie gérée par un conseiller qui avait vécu la polémique de la Soufrière, et qui ne voulait pas reproduire « l'erreur de 1976 ». L'éruption du volcan provoqua un lahar, entraînant la mort de 25 000 personnes. En réalité, le conseiller en question, le volcanologue italien Franco Barberi, avait informé les autorités colombiennes sur les mesures à prendre mais il ne fut pas écouté. Tazieff fut ensuite appelé par le président colombien pour évaluer le risque de nouveaux lahars. Il conclut de son inspection qu'il n'y avait plus de risque. Il n'y eut pas de second lahar.

Actualité

Les apports d'Haroun Tazieff à la volcanologie et à la politique de prévention des risques naturels et technologiques majeurs et l'actualité des enjeux au centre desquels il s'est trouvé fortement impliqué, font l'objet des travaux d'une association née en juillet 2008, le « Centre Haroun Tazieff pour les Sciences de la Terre », dont le siège social est à Arette, commune des Pyrénées Atlantiques où se trouve le célèbre gouffre de la Pierre Saint-Martin dont Tazieff fut l'un des explorateurs en 1951 et 1952, et dont le siège administratif est à Chaudeyrolles, en Haute-Loire, au coeur du massif volcanique du Mézenc-Gerbier-des-Joncs. Une autre implantation majeure de l'association est prévue à Borée, sur le versant ardéchois du mont Mézenc, pour 2013. Soutenue par de nombreux scientifiques, dont plusieurs anciens des équipes Tazieff, cette association inscrit son travail dans le terrain du développement local en zone rurale de moyenne montagne, notamment par des actions d'éducation populaire aux enjeux des sciences de la Terre.


Anecdote

  • Haroun Tazieff était un ami proche du dessinateur belge Hergé qu'il avait bien connu à Bruxelles. Il le comparait à Jules Verne[3].
  • Haroun Tazieff a également été maire de la commune de Mirmande dans la Drôme Provençale.

Bibliographie

Il a écrit de nombreux ouvrages et réalisé plusieurs films documentaires.

Ouvrages

  • Cratères en feu - éd. Arthaud, 1951.
  • L'Eau et le Feu - éd. Arthaud, 1954.
  • Les rendez-vous du diable illustrations de Jean Reschofsky - éd. Hachette, c.1961.
  • Histoires de volcans, illustrations de Jean Lavachery - éd. Le Livre de poche, 1978.
  • 15 aventures sous terre en collaboration avec Clément Borgal et Norbert Casteret, illustrations de Georges Pichard - éd. Gautier-Languereau, c.1970.
  • L'Etna et les volcanologues éd. Arthaud, c.1971.
  • Vingt-cinq ans sur les volcans du globe, dessins de Pierre Bichet,2 volumes - éd. Nathan, 1974-1975.
  • L'odeur du soufre : expédition en Afar - éd. Stock, c.1975.
  • Cordillères, séismes et volcans - éd. Laffont, c.1975, coll. Laffont des grands thèmes
  • Niragongo, ou, Le volcan interdit illustrations de Pierre Bichet - éd. Flammarion, c1975.
  • Le gouffre de la Pierre Saint-Martin - éd. Arthaud, 1952. Téléchargement gratuit : Association de recherches spéléologiques internationales de la Pierre Saint-Martin
  • Jouer avec le feu, entretiens avec Jeau Lacouture et Marine Barrere, 1976
  • Cratères en feu (IVe édition) - éd. Arthaud, 1978.
  • Erebus, volcan antarctique - éd. Arthaud, c.1978.
  • La Soufrière et autres volcans - éd. Flammarion, c.1978.
  • Ouvrez donc les yeux : conversations sur quelques points brûlants d'actualité conversations avec Claude Mossé - éd. Laffont, c.1980.
  • Ça sent le soufre en collaboration avec Claude Villers - éd. Nathan, c.1981.
  • Les volcans et la dérive des continents - éd. Presses universitaires de France, 1984 (3e édition).
  • Quand la terre tremble documentation Valérie Thomas, IIIe édition - éd. Fayard. 1986.
  • La prévision des séismes - éd. Hachette, 1989.
  • Le volcanisme et sa prévention, en collaboration avec Max Derruau - éd. Masson, 1990.
  • Sur l'Etna IIIe édition avec la collaboration de Bernard Amy et Florence Trystram - éd. Flammarion, 1991.
  • Les défis et la chance : ma vie - éd. Stock - L. Pernoud, c.1991-1992. - 2 volumes.
  • La terre va-t-elle cesser de tourner? : pollutions réelles, pollutions imaginaires, II édition - éd. Seghers, 1992.
  • Volcans - éd. Bordas, 1996.

Filmographie

  • Les Rendez-vous du Diable, production indépendante, Bruxelles, 1958-1959.
  • Le Volcan interdit, 1966
  • La Terre, son visage de Jean-Luc Prévost - éd. Société nationale de télévision française, 1984, série Haroun Tazieff raconte sa terre, vol.1.
  • La Mécanique de la Terre de Jean-Luc Prévost - éd. Société nationale de télévision française, 1984, série Haroun Tazieff raconte sa terre, vol.2.
  • Les Colères de la Terre de Jean-Luc Prévost - éd. Société nationale de télévision française, 1984, série Haroun Tazieff raconte sa terre, vol.3.
  • Les Déserts arides de glaces de Jean-Luc Prévost - éd. Société nationale de télévision française, 1984, série Haroun Tazieff raconte sa terre, vol.4.
  • Les Eléments naturels qui façonnent le paysage de la Terre de Jean-Luc Prévost - éd. Société nationale de télévision française, série Haroun Tazieff raconte sa terre, vol.5.
  • Haroun Tazieff et les volcans de Jean-Luc Prévost - éd. Société nationale de télévision française, 1984, 2 films, série Haroun Tazieff raconte sa terre, vol. 6 et 7.
  • Volcans d'Europe et de France - éd. Radio-France, 1984, série Haroun Tazieff raconte sa terre, vol.8.
  • Retour à Samarkand - 1991 (série télévisée)

Notes et références

  1. Cinémathèque Royale de Belgique
  2. Éditions Seghers, Paris, 1989-1992.
  3. Hors-série À Suivre Special Hergé, mars 1983, p.17

Liens externes


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Haroun Tazieff de Wikipédia en français (auteurs)

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