- Guerre éclair
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Blitzkrieg
Pour les articles homonymes, voir Blitzkrieg (homonymie).La blitzkrieg (signifiant en allemand « guerre éclair ») désigne une offensive à vocation stratégique caractérisée par l'emploi massif de chars coopérant avec l'aviation et des unités terrestres spécialisées.
Sommaire
Étapes
La phase initiale de cette doctrine implique la rupture rapide du système défensif ennemi en un point précis, ainsi que l'acquisition immédiate de la supériorité aérienne dans la zone concernée par l'offensive. Elle s'accompagne également d'actions commandos ou aéroportées pour détruire certains points d'appuis adverses (fortifications) ou s'emparer des ouvrages d'art indispensables au succès de la phase exploitation.
Une fois cette rupture obtenue, la phase d'exploitation peut être entreprise. Celle-ci consiste pour les unités blindées et motorisées à s'enfoncer le plus rapidement et le plus loin possible dans la profondeur du dispositif ennemi afin de le paralyser. Cette action est accompagnée d'un pilonnage constant par l'aviation d'appui tactique des mouvements de troupes adverses ainsi que les points de résistance désignés par les troupes au sol.
Une fois les arrières de l'ennemi atteint, les blindés effectuent un mouvement d'encerclement pour piéger les troupes ennemies. Les unités terrestres se déploient pour consolider cet encerclement pendant que les unités blindés commencent à se réapprovisionner et que des reconnaissances en profondeurs sont menées.
Enfin, suite aux reconnaissances menées, l'assaut blindé reprend sur les points faibles détectés. Parallèlement, les poches de résistance ennemies sont éliminées, leur force combattive étant fortement réduite par la rupture, précédemment obtenue, de la chaine de commandement et de tout support logistique.
Naissance de ce nouveau concept
La Première Guerre mondiale
Les bases de la cette doctrine naissent avec l'apparition des premiers chars lors de la Première Guerre mondiale. À cette époque, les chars, armes nouvelles, vont réussir à percer le front allemand. Cependant, ces percées ne seront pas exploitées à l'époque car les alliés ne croient pas dans le potentiel du char qui reste une arme de rupture. En effet, les premiers chars sont lourds et très lent. Disposant d'une faible autonomie et d'une fiabilité hasardeuse, ils arriveront à percer le front en de nombreuses occasions, sans pour autant pouvoir aller plus loin car n'ayant pas dans leur sillage les troupes permettant l'exploitation des percées.
Mais dès cette époque quelques jeunes officiers français et britanniques vont voir le potentiel de ces armes et vont soumettre l'idée géniale qu'une fois la percée faite, les tanks (ou en tout cas certains tank spécialement conçu) pourraient foncer derrière les lignes ennemies pour attaquer et s'emparer ou détruire certains objectifs stratégiques voire bloquer l'acheminement des renforts ennemis.
L'entre deux guerre
Durant l'entre deux guerres, deux positions se développent. Pour les Britanniques et les Français, persuadés de la supériorité de leur doctrine, le char reste une arme de rupture qui accompagne l'infanterie au combat. Ceux-ci les développent donc en conséquence. Le blindage et la puissance de feu prédomine sur la vitesse et la manœuvrabilité. Le char avance au rythme du fantassin.
Pour les Allemands, réduits à une armée de 100 000 hommes par le traité de Versailles, il importe de trouver une solution pour rééquilibrer les forces. Avec l'aide et le concours secret des Soviétiques, les Allemands vont développer de nouvelles idées, armements et équipements qui aboutiront à la naissance de la blitzkrieg du côté allemand et du concept « d'opération en profondeur » pour les Russes. L'objectif cherché est de renouer avec une guerre de mouvement rendue impossible - car trop meurtrière - par la force d'arrêt des armements utilisés lors de la Première Guerre mondiale (artillerie plus puissante, mitrailleuse).
Du côté britannique, les maîtres à penser de la blitzkrieg anglaise, Liddel-Hart et Fuller, n'arriveront pas à imposer leurs idées. Ils les éprouveront quand même en grandeur nature en créant une unité blindé interarme embryonnaire. Ces recherches seront mises de côté à la suite de la crise financière de 1929 et n'aboutiront sur rien de très concret si ce n'est un remarquable outil de réflexion pour les Allemands.
Les Allemands, au travers de Manstein et Guderian, vont faire aboutir cette idée, lui donnant la forme de chars révolutionnaires autour desquels évolueront l'ensemble des armements terrestres et aériens disponibles.
Une tactique d'invasion
L'objectif de la Blitzkrieg est de neutraliser l'ennemi avant qu'il n'ait eu le temps d'opposer un front solide aux attaques de l'agresseur. Les trois éléments essentiels sont l'effet de surprise, la rapidité de la manœuvre et la brutalité de l'assaut. Celui-ci a pour but de percer le front (objectif atteint lors de la percée de Sedan), afin d'encercler l'armée ennemie dans une poche qui, coupée de son ravitaillement, sera obligée de se rendre après épuisement des munitions et du carburant.
La concentration massive des Panzers en quelques pointes a fait la différence par rapport à la dispersion des chars Alliés durant la bataille de France où ceux-ci n'étaient là que pour soutenir l'infanterie selon la doctrine alors en vigueur. Les chars allemands avaient ainsi pu former la fameuse poche de Dunkerque qui acheva l'armée française.
C'est grâce à cette tactique très offensive que la Wehrmacht a réussi à vaincre les armées alliées durant la première partie de la Seconde Guerre mondiale.
Cette nouvelle tactique a payé car elle était nouvelle, et ceci en situation d'infériorité numérique au niveau des chars, mais comme toute nouveauté une fois comprise elle put être appliquée à son tour par les Alliés et contrée.
Les limites
Cependant, cette tactique de combat a commencé à montrer ses limites à partir de 1942. En effet, cette stratégie de guerre-éclair n'était applicable que sur des théâtres d'opération réduits et dans des durées courtes. C'est une des raisons qui expliquent l'affaiblissement de la Wehrmacht à partir de 1942. Il y a aussi la compréhension de cette tactique par les Alliés, qui explique en partie le début des défaites allemandes en 1942.
On estime que la bataille de Stalingrad fut le tournant décisif de la guerre, justement, car le maréchal Joukov appliqua cette technique des pinces d'encerclement à l'armée de Friedrich Paulus qui se rendit en février 1943 car affamée et sans munitions, et non pas parce qu'elle fut détruite.
D'autres part, il n'y a pas de doctrine défensive dans la blitzkrieg ce qui, dans le cas d'Hitler, l'a incité à interdire les replis, nécessaires quand on est encerclé et donc coupé de son ravitaillement. C'est ce qui explique la ou les premières défaites allemandes. En effet, dans les premiers jours, il était totalement envisageable pour l'armée de Paulus située à Stalingrad en novembre 1942 comme pour l'armée de Rommel située en Afrique du Nord en mai 1943, de se replier au lieu de se rendre.
Mythe de la Blitzkrieg selon Frieser
L'étude récente d'un historien allemand, Le Mythe de la Blitzkrieg (éditions Belin) de Karl-Heinz Frieser suggère que cette technique fut moins le résultat d'une préparation que le fruit des événements sur le terrain et du zèle de quelques généraux (Heinz Guderian ou Erwin Rommel, par exemple). Les forces allemandes sont en effet moins motorisées en 1940 que les forces britanniques. Les chefs politiques et militaires sont divisés en deux camps : conservateurs fidèles aux principes de la guerre de position (comme sous la Première Guerre mondiale) et progressistes plus enclins à la guerre de mouvement.
L'armée allemande de 1940 était bien inférieure en nombre et en qualité aux armées de l'Ouest[1]. Frieser relève qu'à peine la moitié des forces allemandes (5,4 millions d'hommes mobilisées en 1940) étaient normalement équipées. Le répit donné par la drôle de guerre a profité aux Allemands qui s'entraînaient pendant que beaucoup de soldats français restaient cantonnés dans la Ligne Maginot. Hitler n'était pas, en dépit de la propagande, un chef éclairé. Avant la victoire en France, la construction de blindés n'aurait pas été une priorité, Hitler préférant l'artillerie lourde.
La réussite de l'attaque allemande de mai 1940 tient surtout à un coup stratégique important, le « coup de faucille » au travers des Ardennes, renouvelant ainsi un des concepts fondamentaux de l'art militaire : attaquer - ici, en violation de la neutralité belge - là où l'ennemi ne s'y attend pas. Lorsque les panzerdivisions mettent en déroute les armées alliées, le reste des forces allemandes traverse péniblement à pied ou à cheval (l'armée allemande utilise deux fois plus de chevaux que lors de la Première Guerre mondiale c'est-à-dire 2,5 millions environ) les Ardennes, ne rencontrant aucune résistance et ne tirant souvent aucun coup de feu, se contentant d'occuper le terrain et prenant simplement la Ligne Maginot à revers.
Quand l'Allemagne attaque en 1940, elle concentre 75 % de ses forces dans la bataille, tandis que les Alliés ne font face qu'avec 25 % de leurs forces (gardant des troupes en réserve dans l'optique d'une guerre longue).
Toujours pour Frieser, la Blitzkrieg se serait révélée un échec dès qu'elle fut théorisée, après la campagne de France, et notamment à l'Est.
Pionniers de la Blitzkrieg chez les alliés
Avant que la Seconde Guerre mondiale ne débute, il y a eu des militaires alliés qui ont compris l'utilisation concentrée de chars et d'avions, bien qu'ils furent peu écoutés.
- Liddell Hart, capitaine anglais retraité de la Première Guerre mondiale. Il a théorisé une approche souple et latérale de la guerre moderne, en opposition avec les attaques frontales et rigides de 1914-1918. Ses écrits, bien qu'encore éloignés de la Blitzkrieg, ont fortement influencé les théoriciens militaires allemands.
- Charles de Gaulle, colonel de cavalerie, commandant une division cuirassée en 1940, s'illustre lors de la bataille de Montcornet face à la colonne allemande. Autant en Afrique du Nord que sur le front de l'Italie, les Forces françaises libres remportèrent ses victoires grâce à son habileté. Sur le front de l'Italie par exemple, ce sont les forces coloniales marocaines qui brisèrent la ligne Gustave, et c'est seulement après que Monte Cassino fut pris, déjà évacué car le front avait justement déjà été percé.
- le général russe Joukov a infligé des défaites décisives aux Japonais justement grâce à son utilisation massive des chars BT7, facteur qui incita les Japonais à diriger plutôt leur offensive vers le sud de l'Asie. Joukov a par la suite planifié la bataille de Stalingrad, la bataille de Koursk, etc.
- le lieutenant-général (général 3 étoiles) Patton lui aussi fut totalement conscient de la potentialité des chars dans l'armée américaine, et conséquemment fut à l'origine des percées des alliés en Sicile, de la percée d'Avranches, et enfin de celle de la ligne Siegfried en février 1945.
On peut à titre anecdotique rappeler que Jules César, dans sa Guerre des Gaules, mentionnait déjà l'embryon d'une sorte de Blitzkrieg : première frappe de l'ennemi à distance avec les pilums et « blindage » des troupes qui avancent sous la carapace des boucliers formant une « tortue ».
Notes et références
- ↑ Ce qui avait possiblement motivé le « Nous vaincrons parce que nous sommes les plus forts » de Paul Reynaud.
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- Karl-Heinz Frieser, Le Mythe de la guerre-éclair : La Campagne de l’Ouest de 1940, Ed. Belin, 2003
- Basil Sir H. Liddel Hart, Histoire de la Seconde Guerre mondiale, Ed. Fayard, 1973
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