Alberto Giacometti

Alberto Giacometti
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Dessin représentant Alberto Giocametti par Reginald Gray en 1965

Alberto Giacometti, né à Borgonovo dans le Val Bregaglia le 10 octobre 1901 et mort à Coire le 11 janvier 1966, est un sculpteur et peintre suisse.

Sommaire

Biographie

Alberto naît en 1901 dans le canton des Grisons, l'ainé de quatre enfants. Son père, Giovanni Giacometti, lui-même peintre, le pousse à s'intéresser à l'art. Il peint ses premières œuvres dans le domicile familial, essentiellement des portraits des membres de sa famille ou de ses condisciples, reprenant le style post-impressionniste paternel. Au terme de ses écoles obligatoires, Alberto part étudier à l'École des beaux-arts de Genève avant d’arriver à Paris en janvier 1922. Il fréquente l'atelier d’Antoine Bourdelle à l’Académie de la Grande Chaumière à Montparnasse. Il découvre le cubisme, l’art africain et la statuaire grecque et s'en inspire dans ses premières œuvres. Ses sculptures sont en plâtre, parfois peintes secondairement, ou coulées en bronze, technique qu'il pratiquera jusqu'à la fin de sa vie.

Il emménage en décembre 1926 au 46 rue Hippolyte-Maindron (14e arrondissement) dans « la caverne-atelier » qu'il ne quittera plus, malgré sa petite taille et son inconfort. Son frère Diego le rejoint de façon permanente en 1930. Bien que l'essentiel de sa production soit fait à Paris, Giacometti retourne régulièrement en Suisse où il travaille dans les ateliers de son père, à Stampa et Maloja. En 1927, Giacometti expose ses premières œuvres au Salon des Tuileries (Femme cuillère, 1927).

Giacometti et les surréalistes

Une sculpture de la série l'Homme qui marche à la fondation Maeght

Après avoir créé des sculptures « plates » (Femme, 1929) et « ouvertes » (Homme et Femme, 1929), Giacometti se rapproche des surréalistes et expose à partir de 1930 aux côtés de Joan Miró et Jean Arp à la galerie Pierre, avec laquelle il passe un contrat en 1929. Il rencontre Tristan Tzara, René Crevel, Louis Aragon, André Breton, Salvador Dalí, André Masson. Il adhère officiellement au groupe surréaliste parisien en 1931. Il y créée diverses œuvres ainsi que des gravures et des dessins servant d'illustration pour des livres de René Crevel, Tristan Tzara et André Breton. Il participe à la rédaction des revues du groupe.

Avec La Boule suspendue, Giacometti crée le premier « objet à fonctionnement symbolique » (1930) et une série de sculptures surréalistes qui enchantent Breton : L’Objet invisible (1934), Le Palais à 4 heures du matin, à propos duquel il publie un texte capital. « Depuis des années, je n'ai réalisé que des sculptures qui se sont offertes tout achevées à mon esprit ; je me suis borné à les reproduire dans l'espace sans y rien changer, sans me demander ce qu'elles pouvaient signifier. [...] Rien ne m’est jamais apparu sous la forme de tableau, je vois rarement sous la forme de dessin. Les tentatives auxquelles je me suis livré quelquefois, de réalisation consciente d'une table ou même d'une sculpture ont toujours échoué. [...] L’objet une fois construit, j’ai tendance à y retrouver transformés et déplacés des images, des impressions, des faits qui m’ont profondément ému (souvent à mon insu), des formes que je sens m’être très proches, bien que je sois souvent incapable de les identifier, ce qui me les rend toujours plus troublantes... » (Minotaure, 1933).

L'inquiétude, l'onirisme, l'incertitude, la violence sont les caractéristiques des sculptures de cette époque : Cube, Femme qui marche, Femme couchée qui rêve, Femme égorgée, Cage, Fleur en danger, Objet désagréable à jeter, Table, Tête crâne. La plupart de ses œuvres de jeunesse ou surréalistes sont connues par l'édition en bronze commencée dans les dix dernières années de la vie de l'artiste.

Exclu du groupe surréaliste en 1935, Giacometti garde toutefois des relations amicales avec Michel Leiris et Georges Limbour, et ses sculptures ne cesseront d'être présentées dans les diverses expositions surréalistes.

L'art de la maturité

À partir de 1935, Giacometti délaisse l'anecdote et les titres littéraires pour poursuivre une quête de la représentation de la réalité, produisant des séries de têtes pour lesquelles posent un modèle et son frère.

En décembre 1941, il quitte Paris pour Genève. Il travaille dans une chambre d'hôtel, poursuivant la production des sculptures minuscules commencée à Paris. L'impossibilité de réaliser une sculpture de grande taille le hante, et ce n'est qu'après avoir vaincu cet obstacle avec la Femme au chariot en 1944-45 qu'il décide de quitter la Suisse.

En septembre 1945, Giacometti revient à Paris, où il est rejoint en 1946 par Annette Arm, qu'il l'épouse en 1949. En octobre 1946, André Breton, de retour des États-Unis, déclare à la presse : « Au terme de ses nouvelles recherches, j’ai vérifié avec enthousiasme qu’en sculpture Giacometti était parvenu à faire la synthèse de ses préoccupations antérieures, de laquelle m’a toujours paru dépendre la création du style de notre époque. » Néanmoins Giacometti décline la proposition de Breton de le rejoindre et de participer activement à l'exposition que Breton prépare à la galerie Maeght, Le Surréalisme en 1947. Certaines de ses œuvres font néanmoins écho au surréalisme (Le Nez (1947-49), La Main (1947)).

C'est pendant cette période (1946-1947) que s'affirme le nouveau style de Giacometti, caractérisé par des hautes figures filiformes. Sa production est stimulée par les relations qu'il renoue avec le marchand new-yorkais Pierre Matisse, qui accueille sa première exposition personnelle d'après-guerre en janvier 1948. Grâce à la reconduction des accords passés en 1936 avec le galeriste, Giacometti peut faire fondre en bronze en 1947 huit de ses nouvelles sculptures, dont L'Homme qui pointe et le premier Homme qui marche. Suivent en 1948 Les Trois hommes qui marchent et les Places. Mais c'est pour l'exposition qui ouvre en décembre 1950 dans la galerie de Pierre Matisse que Giacometti produit quelques-unes de ses plus fameuses sculptures, dont commence l'édition en bronze, parmi lesquelles : Quatre femmes sur socle, Quatre figurines sur piédestal, La Forêt, La Clairière, La Cage, Le Chariot, La Femme qui marche entre deux boîtes qui sont des maisons.

C'est seulement en juin 1951 qu'a lieu sa première exposition d'après-guerre à Paris, à la galerie Maeght, où son ami Louis Clayeux l'a convaincu d'entrer. Il y présente des œuvres déjà montrées chez Matisse, et plusieurs œuvres nouvelles, toutes en plâtre, dont Le Chat et Le Chien. Contrairement à la légende qui veut qu'Aimé Maeght ait permis à Giacometti de faire fondre ses œuvres en bronze, Giacometti peut faire fondre ce qu'il veut depuis 1947, grâce à Pierre Matisse.

Plaque commémorative au no 46 de la rue Hippolyte-Maindron à Paris.
Tombe d'Alberto Giacometti dans le cimetière de son village natal.

En 1948, Jean-Paul Sartre avait signé la préface de sa première exposition à New York, La recherche de l'absolu. En 1951, ce sont Leiris et Ponge qui accompagnent l'exposition chez Maeght. En 1954, Sartre écrit un autre texte de référence sur l'artiste. La même année, Giacometti rencontre Jean Genet, dont il fait le portrait, et c'est pour la publication de la galerie Maeght, Derrière le miroir, que Genet écrit en 1957 un des plus brillants essais sur l'artiste, L'Atelier d'Alberto Giacometti.

À partir du milieu des années 1950, Giacometti réduit ses motifs à des têtes, des bustes et des figures. Représentant la France à la Biennale de Venise en 1956, Giacometti expose une série de figures féminines un peu moins grandes que nature, connues par la suite sous l'appellation de Femmes de Venise, même si certaines furent montrées pour la première fois à Berne la même année. À la fin de 1958, il obtient grâce à Pierre Matisse une commande pour une place à New York devant la Chase Manhattan Bank, projet qu'il abandonnera. Pour ce monument, il crée trois éléments : une grande femme, un homme qui marche, une grande tête, poursuivant ses recherches antérieures en grande taille. Ce monument ne sera installé finalement que dans la cour de la Fondation Maeght. Il comprend alors deux Hommes qui marchent, deux Grandes femmes et une tête monumentale.

À la fin de sa vie, Giacometti est comblé d'honneurs. Il remporte le prix Carnegie International en 1961, le grand prix de sculpture de la Biennale de Venise en 1962, le prix Guggenheim en 1964, et le Grand Prix international des Arts décerné par la France en 1965.

Opéré d'un cancer de l'estomac en février 1963, Giacometti en guérit. À cette époque, il participe activement au projet de la Fondation Maeght, en faisant cadeau pour le prix de la fonte d'un nombre important de bronzes (« Il y a un certain intérêt à ce que ces sculptures existent groupées ensemble », écrit-il à Pierre Matisse). Dans ses dernières années, il suit attentivement le projet de Fondation à son nom qui est créée en Suisse pour recueillir la collection de G. David Thompson, un industriel de Pittsburgh qui avait le projet d'ouvrir un musée aux États-Unis.

Alberto Giacometti meurt à l’hôpital cantonal de Coire, en Suisse, le 11 janvier 1966. Son corps est transféré à Borgonovo, et inhumé près de la tombe de ses parents.

Sa veuve se consacre à la défense de son œuvre et crée par testament une Fondation Alberto et Annette Giacometti, reconnue d'utilité publique en 2003, dont le siège se situe à Paris. Elle comprend de nombreux tableaux et sculptures de l'artiste, ainsi qu'un centre de recherche et de documentation.

Peintures et dessins

Il s'agit d'un pan important de l'œuvre de l'artiste. Il est connu essentiellement pour ses portraits, même s'il a fait quelques paysages ou natures mortes dans sa jeunesse. Il a également peint des tableaux abstraits dans les années 1920 et 1930.

Ses portraits sont faits soit d'après modèles, soit de mémoire. Le nombre de ses modèles est relativement limité. Les plus connus sont son frère Diego et sa femme Annette. Il a également utilisé des modèles professionnels ainsi que certains de ses amis (dont le professeur de philosophie Yanaihara à partir de 1955).

Les portraits de Giacometti se caractérisent par l'absence de décor, le caractère quasi monochrome et sombre de la palette, l'attitude figée du modèle, toujours de face, qui contraste avec l'abondance des retouches au niveau du visage, jusqu'à en effacer l'esquisse initiale.

Principales œuvres

Sculptures

  • Torse, 1926
  • Femme cuillère, 1927
  • Le Couple, 1927
  • Composition cubiste. Homme, 1927, bronze[1]
  • Tête qui contemple, 1927
  • Femme couchée qui rêve, 1929
  • Homme et femme », 1929
  • La Boule suspendue, 1930-1931
  • Projet pour un couloir, 1932
  • Cage, 1933
  • Objet désagréable à jeter, 1931
  • Pointe à l’œil, 1932
  • On ne joue plus, 1932
  • Femme égorgée, 1932
  • Main prise, 1932
  • Table surréaliste, 1933
  • Le Palais à quatre heures du matin, 1932
  • Fleur en danger, 1933
  • L’Objet invisible ou Mains tenant le vide, 1934
  • La Femme qui marche, 1932
  • Nuit, 1946
  • L’Homme au doigt, 1947
  • Le Nez, 1947 et 1949
  • Tête sur tige, 1947
  • Homme qui marche, 1947
  • Femme au chignon,1948
  • Grande figure, 1949
  • La Place, 1949
  • Le Chariot, 1950
  • Le Chien, 1951
  • Le Chat, 1951
  • Tête de Diego sur socle, 1953
  • Femme debout, 1953, bronze à patine brune signé et numéroté[2].
  • Le Petit Lustre avec figurine, années 1950, adjugée pour 1,86 M€ aux enchères en octobre 2007 chez Artcurial Paris. Œuvre réalisée pour le critique et éditeur Tériade de la revue surréaliste Le Minotaure.
  • Bust of Diego, 1954
  • Femmes de Venise, 1956
  • Grande femme IV, 1960
  • Grandes figures II et III, 1960
  • L'Homme qui marche I, 1960 ; Palais de l'UNESCO, Paris
  • Arbre, sculpture pour le décor d’En attendant Godot de Samuel Beckett, 1961

Peintures

  • Auto-portrait, 1921
  • Le Couple, 1926
  • La Mère de l’artiste, 1937
  • Pomme sur un buffet, 1937
  • Stehende Figur, 1947
  • La rue, 1952
  • Paysage à Stampa, 1952
  • Diego in a Plaid Shirt, 1954
  • Rue d'Alésia, 1954
  • Annette dans le studio, 1954
  • Yanaihara, 1958
  • Annette, 1962
  • Jean Genet
  • Michel Leiris

Écrits

  • Écrits, préfaces de Michel Leiris et Jacques Dupin, éd. Hermann, 1991 ; édition revue et augmentée, 2007
  • Ecrits, nouvelle édition revue et augmentée sous la direction de la Fondation Alberto et Annette Giacometti, Paris, Hermann Éditeurs des sciences et des arts, 2008

Principales expositions

  • Rétrospective à Londres, New-York et Copenhague en 1965
  • Première rétrospective française au Palais de l'orangerie à Paris en 1969
  • Rétrospective au musée d’Art moderne de Paris en 1991
  • L'Atelier d'Alberto Giacometti, exposition au Centre Pompidou à Paris, du 17 octobre 2007 au 11 février 2008
  • Fondation Maeght à Saint Paul de Vence, du 27 juin au 31 octobre 2010

Cote de l'artiste

Le 3 février 2010, L'Homme qui marche I est vendu pour 74,2 millions d'euros chez Sotheby's à Londres, trois fois plus cher que son estimation la plus élevée[3]. Deux petites sculptures, intitulées Projet pour un monument pour Gabriel Péri et Projet pour une place ont été vendues en 2007 à Cologne, chez Lempertz Kunsthaus, pour une valeur de 1 590 000 euros frais compris. L'estimation était de 1 300 000 euros[4].

Bibliographie

  • Yves Bonnefoy, Alberto Giacometti : biographie d’une œuvre, Paris, Flammarion, 1991
  • Jean Clair, Le Nez de Giacometti, Paris, Gallimard, 1992
  • Jean Clair, Le résidu de la ressemblance. Un souvenir d’enfance d’Alberto Giacometti, Paris, l’Échoppe, 2000
  • Claude Delay, Giacometti, Alberto et Diego, l’histoire cachée, Paris, Fayard, 2007
  • Georges Didi-Huberman, Le cube et le visage, Paris, Éditions Macula, 1993, réédition 2007
  • André Du Bouchet, Alberto Giacometti. Dessins, Paris, Maeght éditeur, 1969, réédition 1991
  • Thierry Dufrêne, Giacometti, Genet : masques et portrait moderne, Paris, l’Insolite, 2006
  • Thierry Dufrêne, Alberto Giacometti. Les dimensions de la réalité, Genève, Éditions d’art Albert Skira, 1994
  • Thierry Dufrêne, Le Journal de Giacometti, Paris, Hazan, 2007
  • Jacques Dupin, Alberto Giacometti, Tour, Farrago, 1999.
  • Jean Genet, L’atelier d’Alberto Giacometti, Décines (Isère), L’Arbalète, 1958. Rééditions 1963 et 2007, Paris, Gallimard
  • Reinhold Hohl, Alberto Giacometti, Stuttgart, Gerd Hatje Verlag, 1971
  • Charles Juliet, Giacometti, POL, 1995
  • Michel Leiris, Pierre pour un Alberto Giacometti, dans Derrière le miroir, n° 39-40, juin-juillet 1951, réédition 1991 (Paris, L’Échoppe).
  • James Lord, Giacometti : biographie, New York, 1983 ; Nil éditions, 1997.
  • Suzanne Pagès (directrice de publication), Alberto Giacometti. Sculptures - peintures - dessins, catalogue de l’exposition du Musée d'art moderne de la Ville de Paris, 1991-1992
  • Jean Soldini, Alberto Giacometti. Le colossal, la mère, le sacré, préface de René Schérer, Lausanne, Éditions L'Âge d'Homme, 1993
  • David Sylvester, Looking at Giacometti, éd. Henry Holt & Co., 1996
  • Véronique Wiesinger, Alberto Giacometti, Paris, Gallimard, coll. « Découvertes », 2007
  • Véronique Wiesinger, L'Atelier d'Alberto Giacometti. Collection de la Fondation Alberto et Annette Giacometti, cat. exp., Paris, Centre Georges Pompidou, 2007
  • Casimiro Di Crescenzo, Thierry Dufrêne, Marco Franciolli, Donat Rütimann, Nadia Schneider, Alberto Giacometti : Rétrospective, coédition du Musée d'art et d'histoire de Genève et des Presses du réel, Dijon, , 2009

Voir aussi

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Liens externes

Notes et références

  1. Reproduction dans Beaux-Arts magazine, n° 70, juillet-août 1989, p. 5
  2. Afin de donner un ordre d'idée de la cote de l'artiste, lors de la vente publique chez Artcurial (Paris) en octobre 2007, cette œuvre a été adjugée pour 616 000 euros.
  3. http://www.lefigaro.fr/culture/2010/02/04/03004-20100204ARTFIG00417-vente-aux-encheres-record-mondial-pour-un-giacometti-.php
  4. Catalogue, Die 900 Auktionen, Lempertz, Cologne, 2007.



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