Georges Politzer

Georges Politzer

Georges Politzer, né en 1903 à Nagyvárad (Hongrie) - aujourd'hui Oradea, en Roumanie (région de Transylvanie) - et fusillé en 1942 au Mont-Valérien, est un philosophe et théoricien marxiste français d'origine hongroise, appelé affectueusement par certains[évasif] le « philosophe roux ». Il était marié à Maï Politzer.

Sommaire

Biographie

Hongrie

Engagé dans l’insurrection hongroise de 1919, Georges Politzer s’exile à l’âge de dix-sept ans à la suite de l’échec de la république des Conseils de Hongrie, dirigée par Béla Kun. Le pays entre dans l’ère Horthy.

France

Il s’installe à Paris en 1921 après avoir rencontré Sigmund Freud et Sándor Ferenczi et en cinq ans, il obtient tous ses titres académiques, jusqu’à l’agrégation de philosophie. Il occupe le poste de professeur de philosophie au lycée Marcelin-Berthelot à Saint-Maur-des-Fossés et fait partie du premier conseil d'administration de l'établissement[1].

Critique de la psychanalyse freudienne

Lecteur de Karl Marx et de Lénine, il s’intéresse beaucoup à la psychologie, prônant le côté « concret » de cette dernière, par rapport à la psychologie traditionnelle qu’il qualifie d’« abstraite ». Il édite la Revue de psychologie concrète.

Il s’intéresse vivement à la théorie freudienne naissante et à ses outils, critiquant celle-ci, notamment en 1939 où il affirme :

« On a souvent fait état, dans les milieux psychanalytiques, de l’exil de Freud symbolisant la condamnation de la psychanalyse par les nazis. Certes, il y a eu des déclamations nazies contre la psychanalyse. Il n’en est pas moins vrai que la psychanalyse et les psychanalystes ont fourni pas mal de thèmes aux théoriciens nazis en premier lieu celui de l’inconscient. L’attitude pratique du nazisme à l’égard de la psychanalyse a été déterminée essentiellement par des raisons tactiques.
En prenant des allures d’iconoclastes, les psychanalystes ont profondément heurté les sentiments des masses des classes moyennes. Telle est la spécialité historique de l’anarchisme petit bourgeois. En plus de la question raciale, c’est pour exploiter ce fait que le nazisme a dénoncé quelque peu le freudisme, mais cela ne l’a jamais empêché, ni d’intégrer les psychanalystes parmi le personnel nazi, ni d’emprunter des thèmes à la doctrine freudienne.[2] »

En 1939 il écrit encore :

« Il suffit de feuilleter n’importe quel ouvrage psychanalytique pour se rendre compte à quelles puérilités peut aboutir la sociologie freudienne. Indiquons seulement qu’en fait Freud et ses disciples ont été amenés à proposer les ‘complexes’ à la place des forces motrices réelles de l’histoire. La sociologie à laquelle ils ont abouti ainsi fait apparaître à la surface l’idéalisme que la doctrine contient à la base. Par cet aspect des théories psychanalytiques, le mouvement issu de Freud a rejoint, par-delà la réaction philosophique, la réaction sociale et politique.[3] »

Résistance

Mobilisé à Paris en 1940, il reste aux côtés de la direction clandestine du Parti communiste. Démobilisé en juillet 1940, il dirige l’édition d’un bulletin clandestin. Suite à l’arrestation, en octobre 1940 de son camarade et ami Paul Langevin, physicien de renommée mondiale, il sort le premier numéro de l'Université libre, relatant l’emprisonnement du savant et dénonce toutes les exactions commises par les envahisseurs. L’Université libre paraîtra en 1940 et 1941.

Il est arrêté en février 1942 et fusillé au Mont Valérien en mai par les nazis.

Malgré sa mort tragique et ses prises de positions ouvertement antifascistes, Georges Politzer ne fut reconnu comme « interné résistant » qu’à titre posthume et après une très longue bataille juridique qui ne se termina qu’en 1956.

Université ouvrière

Suite à la fondation par le Parti communiste français au début des années 1930, de l'Université ouvrière de Paris, qui sera dissoute en 1939 avec les organisations du parti communiste sur application du décret Sérol, Georges Politzer s’investit et est chargé du cours de matérialisme dialectique. L’Université ouvrière renaîtra malgré tout après la Libération sous le nom d’Université nouvelle.

Censure

Son ouvrage posthume, Principes élémentaires de philosophie, réalisé à partir de notes prises par ses élèves, fut le premier ouvrage interdit par le régime militaire instauré en Turquie en 1980.

Hommages

Rue

En 1998, une rue du 12e arrondissement de Paris prend son nom et celui de son épouse.

Collèges

Il existe des collèges à son nom dans les villes de Dammarie-les-Lys[4], de La Courneuve[5], de Bagnolet[6], de Montreuil, d'Ivry sur Seine[7] et d'Evreux[8].

Citations

  • « Tant qu’on dira : il y a dans l’histoire de la philosophie des philosophies sans matière et des philosophies s’épuisant dans une débauche d’artifices honnêtes ou pharisiens, avec l’inconscience parfaite d’être privés de matière, on ne discutera plus que sur les dates ; tant qu’on dira : les renaissances de l’esprit correspondent à la découverte d’une matière nouvelle et les nuances sont alors balayées parce qu’on pose les problèmes en grands termes, ils nous féliciteront de l’ingéniosité de nos vues. Mais quand on dira : il faut que dès maintenant les problèmes soient posés en grands termes ; il faut que dès maintenant les nuances soient balayées, car voici la matière nouvelle : alors nous ne seront plus que des simplistes et des ignorants et par-dessus le marché, des énergumènes. Et toute la bonne disposition qu’on pouvait avoir pour nos idées s’évaporera, tout de suite, du seul fait que nous voulons leur donner la précision qu’elles comportent. Car telle est la loi de la situation. Les philosophes de la philosophie sans matière sont inconscients et le comique qui pèse sur eux c'est qu’ils savent de science certaine qu’il y a eu des philosophes inconscients d’être privés de matière et qu’ils sont parfaitement impuissants à diagnostiquer chez eux la maladie qu’ils reconnaissent pourtant chez les autres. » L’Esprit, cahiers, mai 1926
  • « Et il faut avouer que, pour la philosophie nouvelle, il ne peut pas y avoir de dualisme entre la certitude et la sécurité, puisque les spéculations rattachent ceux qui la préconisent à ceux qu’on appelle les ennemis de la société. Et se trouvant ainsi, heureusement, en désaccord avec l’État, les nouveaux philosophes n’auront plus que la certitude. Philosopher véritablement sera de nouveau une occupation dangereuse comme dans les temps héroïques. Les philosophes seront de nouveau amis de la vérité, mais par là même ennemis des dieux, ennemis de l’État et corrupteurs de la jeunesse. La philosophie comportera de nouveau un risque. Une sélection se produira donc. Ne viendront à la vérité que ceux qui l’aiment au point d’oser transformer les aventures spirituelles en aventures matérielles. » Ibidem

Œuvres

  • Critique des fondements de la psychologie, 1928 ; rééd. : Critique des fondements de la psychologie. La psychologie et la psychanalyse, 2003, Presses universitaires de France, coll. Quadrige (ISBN 2130535488)
  • Le Bergsonisme, une mystification philosophique, Éditions sociales
  • Sang et or, ou l’Or vaincu par le sang, novembre 1940
  • Révolution et contre-révolution au XXe siècle, Éditions sociales, mars 1941
  • Principes élémentaires de philosophie[9], Éditions sociales, notes prises aux cours professés à l'Université ouvrière de 1935-1936 ; réédition Éditions Delga, 2008
  • Écrits, 1. La Philosophie et les Mythes, Éditions sociales, 1973
  • Écrits, 2. Les Fondements de la psychologie, Éditions sociales

Liens externes

Notes et références


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