Four à réverbère

Four à réverbère
Principe du four à réverbère Schéma effectué à partir de la planche XXIV de l'ouvrage "Description de l'art de fabriquer des canons" de Gaspard Monge(18 pluviôse an 2 : 6 février 1794

Un four à réverbère est un four où la chaleur est réfléchie (réverbérée) par la voûte du four. Dans ce type de four, le combustible (charbon, gaz, fuel, etc.) est en principe brûlé dans une chambre différente de celle des matières traitées. Ces fours au principe très ancien ont fait l'objet de perfectionnements au XVIIIe et XIXe siècle afin d'améliorer notamment les procédés de transformation métallurgique. Cette technologie permet d'augmenter l'efficacité de la chauffe et ainsi d'augmenter la température. Une des applications est le puddlage de la fonte qui est la première grande étape de la production de masse de l'acier pendant la révolution industrielle. Ces fours ont été et sont utilisés dans l'industrie métallurgique, la cuisson des céramiques et la chimie.

Sommaire

Historique

Le terme de fourneau de réverbère est mentionné dans les traités de chimie ou de sculpture du XVIIe siècle pour désigner un four à fondre les émaux ou à décomposer les substances en laboratoire, et dans lequel la flamme n'est pas appliquée directement au produit à chauffer mais réverbérée par une voûte.

En métallurgie, le four à réverbère tel que nous l'entendons aujourd'hui apparaît en Grande-Bretagne, et plus précisément à la limite du pays de Galles et de l'Angleterre, dans le dernier tiers du XVIIe siècle. Il est dès ce moment-là caractérisé par la séparation entre chauffe et produit à chauffer et par une haute cheminée permettant d'activer le foyer par tirage naturel. Le combustible privilégié est la houille. Il est utilisé à la fois pour la métallurgie extractive (réduction des minerais de cuivre ou de plomb, raffinage du plomb argentifère) et pour refondre la fonte de fer (notamment de vieux canons) pour produire des objets moulés.

Il est utilisé en France pour la réduction du plomb dès les années 1730, probablement avec une chauffe au bois ; les températures plus faibles que l'on obtient de cette manière expliquent sans doute que l'on ne l'ait pas alors utilisé pour la fonte.

À partir de 1750, le four à réverbère est associé aux hauts fourneaux au coke pour produire de grosses pièces en fonte (artillerie, corps de cylindres) dans des usines comme Carron (Écosse) ou Bersham (Pays de Galles). En 1775, la Marine française fait venir un maître de forge britannique, William Wilkinson, pour construire un four à réverbère pour la fabrication d'artillerie en fonte de fer : ce sera la fonderie d'Indret. Des fours du même type sont par la suite construits à Ruelle, en Angoumois, et au Creusot (Bourgogne).

Utilisation dans la métallurgie

Le four à réverbère peut être utilisé pour plusieurs types d'opération comme le grillage (chauffage de matière solide comme les minerais), le réchauffage, la fusion.

Les fours à réverbère ont connu diverses formes. Les premiers étaient un perfectionnement des fours à cuve. Ils permettaient l'utilisation de combustibles comme le bois qui produisent des flammes. Dans les fours à réverbère primitif, les flammes occupent toute la cavité du four et les matière à chauffer sont placées au milieu. L'amélioration du four à réverbère a consisté à séparer les combustibles des matières à chauffer et en particulier à réaliser la chauffe sur un côté du four. Ainsi, les combustibles et les matières à chauffer sont séparés. En plus de l'amélioration de la chauffe, cela évite de mélanger les matières métalliques avec les combustibles et donc de polluer ou de modifier le métal. Le four à réverbère est donc constitué d'un foyer où est brûlé le combustible, et d'un laboratoire où l'on place les métaux ou les minerais.

Constitution d'un four à réverbère du XVIIIe au XIXe siècle

schéma du four à réverbère :
a : grille
a1 : tisard
b : autel
c : laboratoire
d : rampant
e : cheminée
f : porte permettant de charger le four en matière première à traiter
Schéma tiré de Manuel théorique et pratique de la métallurgie du fer de Adolf Ledebur 1895

Un four à réverbère est constitué des éléments suivants :

  • Le foyer :
  • la grille sur laquelle sont posés les combustibles solides. Cette grille est absente si l'on utilise des combustibles gazeux ou liquides.
  • Le cendrier en dessous de la grille pour récupérer les cendres.
  • Le tisard : ouverture munie d'une porte permettant de placer le combustible sur la grille.
  • Le laboratoire :
  • L'autel parfois appelé le pont ou le grand autel (Grüner)
  • Sole
  • Porte ou ouverture : munie d'une paroi amovible, elle permet d'introduire les matières métalliques. Elle permet également d'intervenir sur ces matières (dans le cas du puddlage par exemple).
  • L'évacuation des gaz :
  • Le rampant : canalisation située immédiatement après le laboratoire permettant la circulation des gaz.
  • Le registre : sorte de clapet qui équipe parfois le rampant permettant ainsi de réguler le flux gazeux.
  • La cheminée : elle permet l'évacuation des gaz. Ces dimensions sont extrêmement importantes puisqu'elles conditionneront le « tirage ». La plupart des fours à réverbère n'étant généralement pas équipé d'appareil de soufflage, c'est le tirage de la cheminée qui détermine l'efficacité du four. Il peut y avoir une cheminée par four mais dans les ateliers comportant plusieurs fours, il peut y avoir une cheminée commune pour l'ensemble des fours.

La chaleur créée par la combustion passe au-dessus de l'autel, passe à travers le laboratoire en suivant la voûte et est en suite évacuée par le rampant et la cheminée.

Four à réverbère utilisé pour le puddlage. Sur la coupe verticale, on distingue l'autel séparant le foyer du laboratoire avec sa sole en fonte. Sur le plan coupe, on voit le tisard et la porte permettant d'intervenir dans le four, le rampant et la cheminée à droite)
Schéma tiré de Manuel théorique et pratique de la métallurgie du fer de Adolf Ledebur 1895

La grille

La grille est présente uniquement dans les fours utilisant des combustibles solides : charbon, bois. Elle permet de supporter le combustible. L'écartement des barreaux et leurs formes permettant l'écoulement des cendres dans la partie inférieure appelée le cendrier, où il sera aisé de les retirer. Cette espace permettant également la circulation de l'air.

Les grilles peuvent être horizontales, inclinées ou à gradins. La grille horizontale présente le grand désavantage d'un chargement manuel discontinu. Il faut que le « chauffeur » ouvre le ringard pour charger le four. Cette ouverture entraînant un refroidissement du four. Grüner mentionne une expérience de comparaison entre la conduite d'un four par différents opérateurs. Le résultat montre une différence de 25% de consommation de combustible entre les divers opérateurs. Les grilles inclinées ou à gradins peuvent être alimentées automatiquement par un dispositif placé à l'extérieur du four permettant l'écoulement du charbon par gravité ou par l’action d’une personne.

L'autel

L'autel est le muret qui sépare la sole (donc les matières à traiter) du combustible. Il existe parfois une certaine ambiguïté sur la définition exacte de cette partie. Gaspard Monge dans son ouvrage sur la fabrication des canons la définit comme : « ...la partie du fourneau sur laquelle on pose la masse du métal » et non pas comme la séparation. Grüner l'appelle dans son traité de métallurgie le pont ou le grand autel. L' autel (ou le petit pont) étant une petite digue qui sépare la sole du rampant. Cette séparation existe dans le cas où la sole est concave et évite ainsi que le métal liquide s'écoule dans le rampant.

L'autel est exposé à de fortes températures, il est donc fabriqué en matériaux réfractaires. Il peut être éventuellement équipé de moyens de refroidissement. Sa hauteur dépend de son utilisation. Quand on veut protéger le métal de la flamme et éviter ainsi une action chimique qui modifierait sa nature, il est construit plus haut. Mais en contrepartie, le four perd de son efficacité calorifique.

La sole

La sole est également fabriquée en matériaux réfractaires. Sa nature, sa forme, ses dimensions dépendent étroitement de l'utilisation du four.

Pour le puddlage, à partir de 1818, la sole est faite en fonte refroidie par une circulation d'eau. Elle est recouverte de scorie basique qui améliore l'affinage de la fonte.

La sole est plate quand le four est uniquement utilisé pour le réchauffage. Elle est creuse (ou concave) quand le four est destiné à la fusion du métal. La forme peut être rectangulaire, si l’opérateur n’a pas d’action à mener pendant le chauffage ou ovale s'il doit intervenir (cas des fours de puddlage).

Dans certains cas, on utilise la chaleur résiduelle après la sole en équipant le four d'autres soles ou en faisant passer le flux dans des chaudières à vapeur.

« ...Pour faire cette expérience, plaçons des morceaux de charbons rouges dans un tube de grès. Chauffons ce tube sur toute sa surface extérieure au moyen de morceaux de charbon rouges disposés dans un fourneau en terre muni d'un dôme (fourneau à réverbère). » (Leçons élémentaires de chimie de l'enseignement secondaire des jeunes filles page 46

La voûte

Utilisation en chimie

Les manuels de chimie du XIXe siècle mentionnent pour des expériences l'utilisation de four à réverbère de laboratoire.

Bibliographie

  • Jacques Corbion – Le savoir...fer : glossaire du haut fourneau – 4e édition – 11/2003 – édité par l'association Le savoir...fer (ISBN 2-9520787-0-X), en particulier les articles Four à réverbère (page 1609, Tome II), Pont de chauffe (page 2627 Tome IV), Autel (page 299, Tome I), Petit autel (page 2517, tome III), Grand autel (page 1736, Tome III), Tisard (page 3216, Tome IV).
  • Gaspard Monge -Description de l'art de fabriquer des canons – Imprimerie du comité de salut public – an II (1793-1794) de la république française.
  • E.L. Grüner : Traité de métallurgie, tome premier, agent et appareils métallurgiques, principe de la combustion. 1875, Dunod Éditeur
  • A. Ledebur (traduit de l'allemand par Barbary de Langlade revu et annoté par F.Valton) - Manuel théorique et pratique de la métallurgie du fer - Tome I - Librairie polytechnique Baudry et Cie, éditeur - 1895.
  • B.Bussard, H.Dubois, Leçons élémentaires de chimie de l'enseignement secondaire des jeunes filles, cinquième édition, Librairie classique Eugène Belin, 1906

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