- Forêt de Scissy
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La forêt de Scissy ou forêt de Quokelunde est une forêt mythique qui aurait existé dans la baie du mont Saint-Michel avant sa destruction et son engloutissement par les eaux liés au raz de marée de mars 709.
Sommaire
Extension géographique
Elle aurait englobé les zones suivantes :
- Saint-Pair-sur-Mer avec l’abbaye de Scissy.
- Les trois monts :
Dès après le raz de marée, Tombelaine et le Mont Saint-Michel auraient acquis leur caractère insulaire.
Origine du nom
Le nom Scessiacum est mentionné pour la première fois dans la Vita sancti Paterni (la vie de saint Paterne ou saint Pair, ancien évêque d'Avranches) écrite par le poète Venance Fortunat[1]. Cette forme ancienne du toponyme constitue probablement la forme primitive du nom de Scissy, comme le montre, entre autres, celle du village de Sissy dans l'Aisne, mentionné également Sessiacum en 1168[2]. Albert Dauzat et Charles Rostaing[3] interprètent cet archétype toponymique comme « la propriété de Siccius ou Siscius » nom de personne gaulois ou gallo-romain, suivi en cela par Ernest Nègre[4]. Ce nom de lieu n'a pas de rapport avec une dénomination forestière, puisqu'il s'agit vraisemblablement de celui d'un fundus ou d'une villa gallo-romaine caractéristique par sa suffixation en -acum, d'origine gauloise -*āko marquant le lieu à l'origine, puis la propriété. Il a plus généralement abouti à -ey dans l'Avranchin et y est extrèmement répandu.
Une autre interprètation de Sessiacum s'avère possible, par le nom de la déesse gauloise Sessia, protectrice des semailles et de la germination.
Éléments constitutifs du mythe
Il aurait existé un monument druidique sur le Mont-Saint-Michel, lié à la fertilité.
D'après le mythe, le nom des îles Chausey aurait la même racine que Scissy[5]. Cependant, l'ancienne forme de Chausey est Calsoi (1022 - 1026)[6], terme basé sur le germanique *aujō « île » > augia > -ey , finale par ailleurs semblable à celle des autres îles de la Manche, cf. Guernesey (Greneroi), Jersey (Gersoi) et Aurigny (Alneroi)[7], précédé d'un élément cals- de signification obscure. Elle n'entretient, à l'évidence, pas de relation phonétique et sémantique avec Sessiacum.
Une autre dénomination de la forêt de Scissy : forêt de Quoquelunde[8] est plus claire, car si Scissy peut s'expliquer par un nom de fundus gallo-romain sans rapport avec un élément forestier, l'appellatif toponymique -lunde renvoie directement au mot désignant la forêt en ancien normand (cf. la Londe, toponymes en -londe(s), issu du vieux norrois lundr > lunda)[9]. Il est précédé d'un premier élément quoke- obscur que l'on retrouve peut-être dans Coquetot, hameau de l'Eure (composé avec l'appellatif -tot, d'origine norroise -topt). La présence d'un toponyme d'origine scandinave dans l'Avranchin, par ailleurs quasiment exempt de noms de lieux norrois, a intrigué les commentateurs.
Le raz de marée de mars 709 se serait produit bien avant les premiers établissements Vikings dans le Cotentin et il est difficile d'admettre que ce mythe se soit perpétué chez les Normands de souche scandinave avec un vocable de même origine. Il est donc plus vraisemblable de considérer qu'il existait bien une forêt dans la région et qu'elle n'ait pas été engloutie par un évènement naturel de cette importance.
Développements ultimes de la légende
Selon la légende, l’épaisse forêt de Scissy aurait été un lieu de culte païen que le raz-de-marée aurait englouti dans le but de purifier la contrée.
Ce mythe est repris dans le Revelatio ecclesiae sancti Michaelis, rédigé au début du IXe siècle, le Mont Saint-Michel aurait été un mont entouré d’une épaisse forêt à l’époque où les premiers moines ermites s’y sont installés. C'est sur cette source que s'appuie l'Abbé Manet pour élaborer sa thèse de la "fatale marée de mars 709" qui aurait engloutit en une nuit la baie du Mont Saint-Michel.
Ce n’est qu’ensuite – le niveau de la mer augmentant – qu’il aurait acquis peu à peu son caractère insulaire.
Cette thèse a été invalidée de manière scientifique : d'abord par l'étude de ses sources et ensuite par celle des sols, cette dernière ne relevant aucune trace d'un raz-de-marée[10].
Enfin, d'autres études scientifiques menées par le Centre de Recherche Archéologique d’Aleth et le Centre de Documentation des Historiens Locaux de Gévezé ont démontré que l’existence de la forêt de Scissy relève du mythe[réf. souhaitée].
Notes et références
- Formes anciennes du nom Scissy
- Ernest Nègre, Toponymie générale de la France, Librairie Droz 1991. p. 589.
- ISBN 2-85023-076-6). p. 657. Dictionnaire étymologique des noms de lieu en France, Librairie Guénégaud, Paris, 1989 (
- Op. cité.
- [1]
- ISBN 2-7084-0299-4) (OCLC 15314425). p. 100. François de Beaurepaire, Les Noms des communes et anciennes paroisses de la Manche, Paris, A. et J. Picard, 1986, 253 p. (
- F. de Beaurepaire, Op. cité.
- Jean Renaud, Les Vikings et la Normandie, éditions Ouest-France université, 1989 (ISBN 2-7373-0258-7) p. 163.
- Jean Renaud, Op. cité.
- [2] Alexandre Chèvremont, Les Mouvements du Sol sur les côtes occidentales de la France dans le golfe Normand-Breton, chapitre 22.
Voir aussi
- Forêt de Scissy: Légende ou réalité?
- La Revelatio ecclesiae sancti Michaelis et son auteur
- Site sur les légendes liées au Mont-Saint-Michel
- Carte imaginaire de la forêt de Scissy
- Bibliographie du Mont-Saint-Michel
- La forêt de Scissy et les prairies de Cézembre
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