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Fonction réglée
En mathématiques, une fonction réglée est une application réelle qui est limite uniforme d'une suite de fonction en escalier.
Sommaire
Approche intuitive et positionnement du problème
Un enjeu majeur des mathématiques est la mesure d'une aire. Commençons par le cas du plan réel. Soit a et b deux nombres réels tels que a < b soit une fonction f réelle définie sur l'intervalle . On définit l'intégrale de f sur l'intervalle comme l'aire limitée par les droites d'équation x = a, x = b, par l'axe des abscisses et par le graphe de la fonction f. L'aire est mesurée négativement là où f est négative et positivement sinon. Si S est la mesure de cette aire, on utilisera la notation suivante:
On parlera alors de l'intégrale de la fonction f sur l'intervalle est égal à . L'enjeu est alors de définir l'intégrale sur un ensemble de fonctions le plus vaste possible.
Il existe un ensemble de fonctions pour lequel l'intégrale se définit simplement, ce sont les fonctions en escalier. L'article sur l'Intégrale de Riemann indique de manière rigoureuse comment ces fonctions ainsi que leurs intégrales sont définies.
Pour prolonger la définition de l'intégrale à un espace plus vaste, il existe une méthode un peu différente de celle de Riemann et qui dérive de la topologie. Cette méthode consiste à considérer l'adhérence de l'ensemble des fonctions en escalier pour la norme de la convergence uniforme.
Définition
Soit E un espace de Banach et soit a et b deux nombres réels tels que a < b. Soit l'ensemble des fonctions en escaliers de dans E. L'ensemble est un sous-ensemble de , l'ensemble des applications de [a,b] à valeurs dans E, muni de la norme de la norme infinie . L' adhérence de ce sous-ensemble est appelé ensemble des fonctions réglées de dans E.
Propriétés
- est un - sous-espace vectoriel de
Démonstrationest non vide car il contient la fonction constante 0.
Soit f et g deux éléments de et soit λ un réel quelconque. Il nous suffit de montrer que . Il nous suffit pour cela de montrer qu'il existe une fonction en escalier arbitrairement proche de λf + g.
Soit un réel strictement positif et arbitrairement proche de 0. Soit M un réel vérifiant M > 1 et M > | λ | . Comme f (resp. g) sont des fonctions réglées, il existe une fonction en escalier fe (resp. ge) tel que:
donc
Nous avons donc démontré qu'il existe une fonction en escalier λfe + ge arbitrairement proche de la fonction λf + g, ce qui démontre la proposition.
- La forme linéaire intégrale définie sur se prolonge par continuité sur .
DémonstrationPour cela démontrons la continuité de la fonction intégrale sur l'ensemble des fonctions en escalier. Pour montrer qu'une forme linéaire est continue, il faut et il suffit de montrer que l'image de la boule unité (c'est-à-dire les fonctions de norme inférieures ou égales à 1) par l'intégrale est bornée. Soit f une fonction de la boule unité. Dire que f est élément de la boule unité, c'est dire que:
et
La boule unité à donc une image bornée, ce qui prouve que l'intégrale est continue. Or toute forme linéaire continue est uniformément continue. De plus toute fonction uniformément continue se prolonge sur son adhérence par continuité.
- Le sous-ensemble des fonctions continues de est inclus dans .
DémonstrationC'est essentiellement une conséquence du théorème de Heine. Soit f une fonction continue sur , alors le théorème de Heine nous indique qu'elle est uniformément continue. Si l'on reprend la définition de la continuité uniforme, on obtient:
Cette valeur η va nous permettre de construire une fonction en escalier proche de f au sens de la norme de la convergence uniforme.
Soit (bi) (avec une suite finie croissante tel que b1 = a, bn = b et .
Soit alors la fonction fe comme une fonction en escalier de dans E définie par:
On remarque alors que la distance entre f et fe est plus petite que . Ce qui montre la proposition.
Intérêt des fonctions réglées
La notion de fonctions réglées permet de construire de manière élégante une théorie de l'intégrale un peu moins générale que l'Intégrale de Riemann. Deux théorèmes puissants sur les fonctions uniformément continues : celui de Heine et celui du prolongement, ont permis de définir l'intégrale.
Il est cependant possible de définir la notion d'intégrale sur une classe de fonctions plus vaste que celle des fonctions réglées. Ainsi la fonction f définie sur par si n est un entier strictement positif et sinon, n'est pas une fonction réglée mais elle est intégrable au sens de Riemann.
On peut légitimement se demander si l'intégrale de fonctions étranges comme celle citée ci-dessus correspond à un besoin pertinent. La réponse est clairement oui. De manière générale, est-il possible de prolonger par continuité des intégrales qui ne se définissent que sur un espace restreint de fonctions ? Malheureusement, le monde des fonctions réglées est par trop limité et si une suite fn de fonctions réglées converge dans un sens plus restreint que la convergence uniforme, alors la limite n'est pas toujours une fonction réglée. En fait, même l'espace des fonctions intégrables au sens de Riemann est bien trop petit pour que ce type de méthode soit fructueuse. C'est donc d'autres approches, celle de l'Intégrale de Lebesgue ou celle de l'intégrale de Kurzweil-Henstock, qui permettent de généraliser convenablement l'espace des fonctions intégrables. Comme ce type d'approche est depuis le XXe siècle une des méthodes les plus productives, c'est l'Intégrale de Lebesgue qui est très généralement utilisée par les mathématiciens.
Il existe néanmoins un cas ou l'on doit se contenter de la construction de l'intégrale par les fonctions réglées. C'est le cas ou l'espace d'arrivée est trop complexe pour utiliser les méthodes de Riemann ou Lebesgue. Ces deux méthodes supposent en effet que l'espace d'arrivée soit ordonné. Dans le cas général ou l'espace d'arrivée est un espaces de Banach un peu complexe, alors seule l'approche par les fonctions réglées reste opérationnelle.
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