Eucher de lyon

Eucher de lyon

Eucher de Lyon

Saint Eucher
Statue de Saint Eucher à Beaumont-de-Pertuis photo par Paul MUNHOVEN.JPG

La statue d'Eucher à l'entrée du village de Beaumont-de-Pertuis
Saint catholique et orthodoxe
Naissance 370
Décès 449 
Lyon
Nationalité gallo-romain
Fête le 19 novembre
Serviteur de Dieu • Vénérable • Bienheureux • Saint

Eucher de Lyon (370-449), issu d'une grande famille gallo-romaine et riche propriétaire en pays dAigues, fut sénateur d'Aquæ Sextiæ, puis moine à Lérins, ermite dans le Luberon puis évêque de Lyon de 435 à 449.

Sommaire

Biographie

Cultivé et pétri de culture latine, le sénateur Eucherius fut marié avec Galla, il a deux filles, Consorce (ou Consortia) et Tulle (ou Tullia), et deux fils, Véran (Veranus), qui fut avec son père à Lérins auprés du moine Hilaire et Salon (Salonius), évêque de Genève.

Contexte historique

Au Ve siècle, lEmpire, en pleine décadence, commença à être ébranlé par la succession des grandes invasions qui déferlèrent sur lEurope occidentale. Obligés par leurs vainqueurs à la règle de lhospitalitécession obligatoire dune partie de leurs domainesnombre de patrices gallo-romains préférèrent fuir linvasion. Ce fut cette solution que choisit le sénateur de la Narbonnaise seconde. Nouveau converti, il préféra partir, en 416, avec son fils Veranus, laissant sur place son épouse Galla enceinte et leurs deux filles. Ils se retirèrent dans lîle de Lérins, Honorat avait fondé une abbaye déjà célèbre[1].

Moine à l'abbaye de Lérins

Labbaye de Lérins, malgré son prestige, nétait pas en odeur de sainteté dans lÉglise. Ses moines avaient repris la doctrine de Pélage qui privilégiait la liberté de lhumanité face à la volonté de la divinité. Comme il ny avait rien de plus urgent, malgré le déferlement des invasions, que de traiter à la racine tout risque de déviation du dogme, les Provençaux furent accusés de semi-pélagianisme par le Magistère et, à ce titre, combattus violemment par lévêque Prosper dAquitaine et surtout par Augustin, lévêque dHippone, qui y gagna ses galons de docteur de l'Église[1].

Article détaillé : Semi-pélagianisme.

Ces querelles nempêchèrent pas les cénobites de mener dans leur île, à labri de la menace barbare, une vie rigoureuse et studieuse. La légende sempara même de leurs faits et gestes. Elle veut, entre autres, que le jeune Véran ayant été chargé de rechercher de leau en creusant un puits et ayant échoué, le vieil Honorat fit, tel Moïse avec sa verge, jaillir une source dun rocher. Paraphrase assez claire de lopposition entre la fougue inexpérimentée de la jeunesse et la sagesse raisonnée de lâge mûr[1].

Ermite dans le Luberon

Mais quand, en 426, Honorat dut abandonner Lérins pour prendre la tête de larchevêché dArles, Eucher et Véran quittèrent aussi ce refuge. Bien que, daprès Jean Cassien, ils aient eu la prime idée de se retirer en Égypte, les deux hommes retournèrent dans leur pays dAigues. Les effusions familiales avec Galla et ses filles Tullia et Consortia furent de courte durée. Il parut même urgent que le dernier- Salonius fut immédiatement amené, par son père et son frère, à Lérins il fut pris en charge et éduqué par les moines Vincent et Salvien. La carrière du jeune homme fut fulgurante puisquil devint, avant 440, évêque de Genève[1].

Son frère Véran sétait, entre temps, retiré dans les Alpes maritimes, au cœur de la vallée du Loup, il fonda un monastère qui portera son nom aux alentours de lan Mil. Après avoir assisté, en 441, en compagnie de son père, au premier concile d'Orange, il devint dix ans plus tard évêque de Vence[1].

Afin de sisoler dun monde quil avait connu civilisé et qui sombrait dans la barbarie, Eucher était resté au pied du Luberon, à Beaumont-de-Pertuis, dans la partie la plus reculée de ses domaines. Il vécut désormais en ermite dans une grotte murée et seules Galla, Tullia et Consortia purent le visiter et lui apporter sa pitance. Autant que la nostalgie du désert dont ont parle certains auteurs, il faut voir dans cette attitude la réaction dorgueil blessé dun noble gallo-romain face à loccupation de sa province par les hordes barbares[1].

Évêque de Lyon

Mais en 434, la réputation de lermite du Luberon était telle, quà la mort de Vivantiolus, lévêque de Lyon, on descendit le chercher dans sa solitude provençale pour le placer sur le trône épiscopal. Un martyrologue lyonnais du VIIIe siècle précise dailleurs quEucher fit de la résistance puisque larchidiacre chargé de cette mission dut casser le mur de la grotte et lobliger à le suivre pour être sacré à Lyon[1].

La famille d'Eucher

Il nen fut pas mois un redoutable pater familias. Dès son arrivée à Lyon, son premier souci fut décrire à sa fille Tullia pour lui ordonner de prendre sa place dans sa grotte :

« Si tu ne veux pas me déplaire commence par te tondre la tête et décide de mener une vie de recluse sur nos terres appelées Mont Mars, près de la Durance, car telle est la volonté de Notre Seigneur[1]. »

Sur ses ordres, sa seconde fille Consortia dut se retirer à Mocton, près du village de lEscale, dans les Alpes provençales. Elle y fit bâtir une église consacrée à Étienne, le proto-martyr et un hospitaletum. Elle sy éteignit en odeur de sainteté et fut inhumée dans un sarcophage percé dun trou ce qui permettait aux fidèles dy glisser un bras pour toucher ses reliques. Ses restes furent transportés, au Xe siècle, à Cluny, dont elle devint la sainte patronne. Les bénédictins ont donné son nom à un village, entre Lyon et lArbresle : Sainte-Consorce, tandis quAix-en-Provence lhonorait comme une thaumaturge anti-pesteuse[1].

Tulle, sa sœur, donna son nom à Sainte-Tulle, un village voisin de Beaumont. Décédée peu après sa claustration, elle fut ensevelie dans une crypte rupestre, sur un site appelé depuis lors Tullæ, qui fut ensuite transformé en Sainte-Tulle. Au Moyen Âge, son sépulcre fut recouvert par une chapelle. Elle est aussi honorée comme sainte anti-pesteuse à Cucuron, dans le Vaucluse. La vox populi lui attribua même la fin des ravages de la grande peste de 1720. Depuis chaque année, pour sa fête, on lui dresse un Mai, peuplier de plus de 20 mètres de haut, dont le transport a nécessité jusquà plus de 60 porteurs[1].

Leur frère Véran (400-465) a eu aussi lhonneur de donner son nom à quelques villages. Mais parmi les nombreux Saint-Véran, il demeure difficile de faire la part entre un Véran qui fut archevêque de Lyon, celui qui sillustra en tant quévêque de Cavaillon et le fils aîné dEucher[1].

Galla, leur mère, prit le voile à Valence. Originaire des Baronnies, elle donna son nom à Sainte-Jalle, site quelle aurait débarrassé de la présence des barbares Alains. Elle y fut ensevelie, sur lemplacement dun ancien temple dédié à Jupiter-Baginus, dans une église consacrée à saint Étienne, devenue aujourdhui Notre-Dame de Beauvoir. Un manuscrit du XIe siècle en fait « une vierge dont la foi aurait déplacé la montagne » et qui aurait grâce à cet exploit fait fuir les envahisseurs[1].

De son illustre famille, larchevêque de Lyon reste donc le seul avec son fils Salonius, a ne pas avoir donné son nom à une commune. Ce ne fut pas toujours le cas. On sait, en effet quen 1698, la chapelle de Saint-Eucher, à Beaumont, fut reconstruite par François de Margaillet, qui était seigneur de Saint-Paul-le-Fougassier et de Sant-Auquille (francisation dAuqueri, nom provençal dEucher)[1].

Culte d'Eucher dans le Luberon

Cest de cette époque que date le tableau visible dans léglise paroissiale de Beaumont représentant Eucher, Jalle, Tulle et Consorce et que la porte de la chapelle Saint-Eucher fut ornée du blason des Margaillet. Elle surplombe la Durance que longe à cet endroit la route des Alpes[1].

À une soixantaine de mètres au-dessus se trouve toujours la grotte de lermite dans laquelle le père obligea sa fille à se cloîtrer. Elle reste dailleurs connue dans la région sous le nom de grotte de sainte Tulle et fut le lieu de rendez-vous dune procession jusquau XIXe siècle chaque 16 novembre pour la fête du saint. Si la réputation dEucher natteint pas celle de Sidoine Apollinaire, son voisin et disciple de Clermont-Ferrand, cest quil a consacré sa plume plus à lapologie chrétienne quaux événements de son siècle ou à chanter ses vignes du pays dAigues[1].

Œuvres

Ce commentateur des Écritures, dont la langue et le style furent admirés par Érasme lui-même, est resté célèbre dans lÉglise par ses écrits. Un an après son retour de lîle de Lérins, il composa de Laudes Eremi pour louer les bienfaits de la solitude et chanter la gloire de son abbaye. Trois ans plus tard, en 430, afin de convertir son cousin païen le patrice Valérien, il écrivit de Contempti Mundi. Dans cette Lettre à Valérien sur le mépris du monde, Eucher a cette formule, ô combien appropriée, pour résumer la tragédie que vit alors le monde romain :

« On a vu et lon voit encore, dans ce monde aux cheveux blancs, la famine, la peste, la dévastation, les guerres et la terreur[2]. »

Pour son fils Salonius, il commenta la Bible dans une série de textes intitulés Instructionum Libri et fit de même pour Véran avec ses Formulæ. Son œcuménisme lui fit prendre ses références aussi bien chez Jean Cassien et Jérôme que chez leur contempteur Augustin[2].

Restent quelques-uns unes de ses Lettres dans lesquelles il rend compte de ses voyages. La plus célèbre dentre elles est lépître quil envoya à Salvius, lévêque dAlbi, après sa visite dans le Valais à labbaye dAgaune, fondée par les moines de Lérins. Il y décrit les Alpes, le Rhône, le massacre de la légion thébaine, le martyre de Mauricius et de ses compagnons, ordonné par Maximien Hercule, à la fin du IIIe siècle, avant daller châtier les Bagaudes, paysans gaulois révoltés. Bien quEucher y affirme : « Jai demandé la vérité sur ces points à des gens capables de me lapprendre », il aurait, daprès les spécialistes, fait plus œuvre littéraire quœuvre dhistorien[2].

Ce qui nempêcha pas que son influence fut immense si on en juge ce quen rapporte son contemporain Claudius Mamertus :

« Dâge jeune et desprit mûr, méprisant la terre et naspirant quau ciel, profondément humble et dun mérite éminent, doué dune intelligence pénétrante, dune science étendue et dune éloquence débordante, il fut sans conteste le plus grand parmi les plus grands évêques de son temps[2]. »
  • Éloge du désert de Lérins ;
  • Traité du mépris du monde, en latin (ces deux ouvrages ont été traduit par Arnauld d'Andilly, 1672) ;
  • Histoire des martyrs de la légion thébaine, traduit par Jean-Armand Dubourdieu, 1705.

Notes et références

  1. a, b, c, d, e, f, g, h, i, j, k, l, m, n et o Jean-Pierre Saltarelli, opcit., p. 15.
  2. a, b, c et d Jean-Pierre Saltarelli, opcit., p. 16.

Bibliographie

  • Jean-Pierre Saltarelli, Eucher (370-449), ou l'aristocratique refus de la barbarie, La Fontaine de Pétrarque, n° 21, Avignon, mai-juin 2008,

Voir aussi

Liens internes

Liens extérieurs

  • Portail de Vaucluse Portail de Vaucluse
  • Portail de la Provence Portail de la Provence
  • Portail du catholicisme Portail du catholicisme
Ce document provient de « Eucher de Lyon ».

Wikimedia Foundation. 2010.

Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Eucher de lyon de Wikipédia en français (auteurs)

Игры ⚽ Поможем сделать НИР

Regardez d'autres dictionnaires:

  • Eucher De Lyon — Saint Eucher …   Wikipédia en Français

  • Eucher de Lyon — Saint Eucher La statue d Eucher à l entrée du village de Beaumont de Pertuis Saint catholique et orthodoxe Naissance …   Wikipédia en Français

  • Saint Eucher de Lyon — Eucher de Lyon Saint Eucher …   Wikipédia en Français

  • Eucher — • Eucher de Lyon, marié à Galla, dont il eut deux enfants, Véran et Salonius, moine à Lérins vers 410, évêque de Lyon vers 434, mort vers 450. Fête le 16 novembre. • Eucher d Orléans (20 février), moine de Jumièges vers 714, évêque d Orléans, sa… …   Dictionnaire des saints

  • Saint Eucher — Cette page d’homonymie répertorie les différents sujets et articles partageant un même nom. Pour les articles homonymes, voir Eucher. Saint Eucher désigne plusieurs saints chrétiens nommés Eucher : Saints catholiqu …   Wikipédia en Français

  • Liste de personnalités liées à Lyon — Article principal : Lyon. Ils sont de Lyon ou ont marqué la ville de leur influence : Sommaire 1 Autorités civiles Militaires Religieux 1.1 Souverains 1.2 Gouvernants, hommes politiques …   Wikipédia en Français

  • Histoire de Lyon — Armes actuelles de la ville de Lyon L histoire de Lyon concerne l histoire de l agglomération présente sur le site de l actuelle ville de Lyon. Si le lieu est occupé depuis la Préhistoire, la première ville, nommée Lugdunum, date de la Rome… …   Wikipédia en Français

  • Liste des archevêques de Lyon — Saint Irénée Cité capitale de la Gaule romaine depuis Auguste et à la croisée des chemins du monde, romain, Lugdunum accueille dès le IIe siècle les doctrines chrétiennes rapportée d Asie Mineure par Rome. La petite communauté se structure… …   Wikipédia en Français

  • Ligne de Lyon-Perrache à Marseille-Saint-Charles (via Grenoble) — Ligne Lyon Marseille (via Grenoble) La ligne dans la Drôme : Lus la Croix Haute Pays …   Wikipédia en Français

  • Église Saint-Nizier (Lyon) — Église Saint Nizier Façade Saint Nizier Présentation Culte Catholique romaine Type Église paroissiale …   Wikipédia en Français

Share the article and excerpts

Direct link
https://fr-academic.com/dic.nsf/frwiki/599941 Do a right-click on the link above
and select “Copy Link”