Dodone

Dodone
Localisation du sanctuaire de Dodone

Dodone (en grec ancien Δωδώνη / Dôdốnê) est un sanctuaire oraculaire dédié à Zeus et à la Déesse-Mère, révérée sous le nom de Dioné. Il est situé en Épire sur les pentes du mont Tomaros au sud du lac Pambotis, à 22 km au sud de Ioannina. Cest le plus vieil oracle grec, d'après Hérodote, remontant peut-être au IIe millénaire av. J.-C., et lun des plus célèbres avec ceux de Delphes et dAmmon. Les prêtres et les prêtresses du bosquet sacré interprétaient le bruissement des feuilles de chêne sous le vent. Situé à lécart de la Grèce des cités, il pâtit du développement de loracle de Delphes à l'époque classique mais reste important jusquà lépoque romaine.

Sommaire

Les origines légendaires de loracle

Hérodote rapporte la tradition suivante sur loracle de Dodone, qu'il avait déjà entendue à Thèbes en Égypte (Histoires, II, 52)[1] :

« Les prêtresses des Dodonéens rapportent quil senvola de Thèbes en Égypte deux colombes noires ; que lune alla en Libye, et lautre chez eux ; que celle-ci , sétant perchée sur un chêne, articula dune voix humaine que les destins voulaient quon établît en cet endroit un oracle de Zeus ; que les Dodonéens, regardant cela comme un ordre des dieux, lexécutèrent ensuite. Ils racontent aussi que la colombe qui senvola en Libye commanda aux Libyens détablir loracle d'Ammon, qui est aussi un oracle de Jupiter. Voilà ce que me dirent les prêtresses des Dodonéens, dont la plus âgée s'appelait Preuménia ; celle d'après, Timarété ; et la plus jeune, Nicandra. Leur récit était confirmé par le témoignage du reste des Dodonéens, ministres du temple[2]. »

La vallée de Dodone au temps des premières fouilles (Carapanos 1878, plI, détail)

Le récit mythologique vaut surtout pour le lien quil fait entre les deux grands oracles de Zeus, celui dAmmon dans loasis de Siwah en Libye, et celui de Dodone[3]. Il semble montrer aussi quà lorigine, le service de la divinité est lapanage de prêtresses, et que linstitution de prêtres est postérieure. On sait en effet par Strabon que ce sont les prêtresses qui délivraient les réponses de loracle, sauf dans le cas il sagissait de Béotiens. Les prêtresses de Zeus sont les trois péléiades (en grec αἱ πελειάδες) nommées par Hérodote, Preuménia, Timarété et Nicandre[4].

Au VIIIe siècle, à lépoque dHomère, elles sont rejointes par des divinateurs, les Selles (en grec οἱ Σελλοί). Dans lœuvre d'Homère, Dodone apparaît en effet deux fois dans l'Iliade[5],[6] :

τῷ δἘνιῆνες ἕποντο μενεπτόλεμοί τε Περαιβοὶ' / οἳ περὶ Δωδώνην δυσχείμερον οἰκίἔθεντο
« (...) commandait les Éniènes, les vaillants Perrhèbes, / qui sétaient établis dans lâpre pays de Dodone (...) »

Ζεῦ ἄνα Δωδωναῖε Πελασγικὲ τηλόθι ναίων / Δωδώνης μεδέων δυσχειμέρου, ἀμφὶ δὲ Σελλοὶ / σοὶ ναίουσὑποφῆται ἀνιπτόποδες χαμαιεῦναι
« Zeus tout-puissant, Dodonéen, dieu lointain, Pélasgique, / qui règnes sur Dodone, en ce rude pays des Selles / devins aux pieds jamais lavés, qui couchent sur le sol ! (...) »

Dans lOdyssée, Homère montre encore Ulysse sy rendre pour consulter loracle sur les moyens de retourner à Ithaque (XIV, 327 ; XIX, 296-298:

τὸν δἐς Δωδώνην φάτο βήμεναι, ὄφρα θεοῖο' / ἐκ δρυὸς ὑψικόμοιο Διὸς βουλὴν ἐπακούσαι / ὅππως νοστήσειἸθάκης ἐς πίονα δῆμον
« (...) il me disait qu’[Ulysse] était allé à Dodone / pour apprendre du grand Chêne la volonté de Zeus / et pour savoir comment il rentrerait dans la terre d'Ithaque (...) »

Ce sont donc les Selles qui, maintenant un contact rituel permanent avec la terre, interprétaient la parole de Zeus. Celle-ci leur parvenait de plusieurs manières : le bruissement des feuilles du Chêne sacré, le bruit causé par un ou plusieurs chaudrons de bronze (selon les époques, voir infra), et peut-être aussi le vol de colombes, si on interprète ainsi l'étymologie des péléiades[7].

Histoire du sanctuaire

Sanctuaire de Dodone vu du théâtre

Larchéologie na pas encore apporté de réponse satisfaisante sur la date de création du sanctuaire. Aucune trace détablissement néolithique na pour linstant été trouvée à Dodone. Les plus anciennes traces archéologiques doccupation (céramique, épées et couteaux de bronze) datent de lépoque mycénienne et ne sont pas antérieures au XVe siècle avJ.‑C.[7] Le culte de Zeus Dodonéen serait arrivé en Épire avec les Thesprotes à lHelladique récent vers -1200. Mais il existait alors déjà sur le site un culte chtonien pré-hellénique dune déesse de labondance et de la fertilité liée aux racines du grand chêne. Les deux divinités, le dieu ouranien du tonnerre et de lorage, et la divinité chtonienne de la végétation forment ainsi à Dodone un couple révéré sous les noms de Zeus Naïos (littéralement « Zeus résidant ») et Dioné Naïa (la forme féminine du nom Zeus), en relation avec un chêne sacré[7].

Bien quexcentré par rapport à la Grèce des cités, loracle jouit dune grande renommée dès le VIe siècle : il est régulièrement consulté par les Athéniens qui lui envoient une ambassade annuelle. Sophocle le mentionne dans les Trachiniennes (v. 1164 sq.) et Eschyle dans Prométhée enchaîné (v829 sq.). Le roi de Lydie Crésus[8] le consulte, de même plus tard, que les spartiates Agésilas et Lysandre[9].

Cette célébrité ne se traduit pas par un programme architectural ambitieux, contrairement à ce qui se passe pour le sanctuaire de Delphes, qui supplante progressivement Dodone comme la source principale des oracles pour les cités grecques. Au IVe siècle avJ.‑C. encore, le sanctuaire semble se réduire à un modeste temple érigé auprès du Chêne sacré.

Lapogée du sanctuaire correspond à celle du royaume dÉpire sous le règne de Pyrrhus qui, entre -297 et -272, reconstruit presque tous les édifices de Dodone, sur une échelle monumentale plus en rapport avec son rôle de sanctuaire national épirote : le temple de Zeus, ceux dHéraclès et de Thémis bénéficient de ses largesses, ainsi que les édifices civiques, le bouleuterion et le prytanée. Cest aussi Pyrrhus qui fait construire le théâtre pour accueillir les concours dramatiques et musicaux accompagnant la fête des Naïa en lhonneur de la triade constituée par Zeus et ses deux parèdres, Dioné et Thémis.

Inscription oraculaire sur une lamelle de plomb (Carapanos 1878, plXL, 1)

La mort soudaine de Pyrrhus à Argos en -272 et l'affaiblissement du royaume dÉpire qui sensuit, pris dans létau constitué par ses deux puissants voisins, la Macédoine à lest et lÉtolie au sud, entraînent le déclin du sanctuaire. En -219--218, il est pillé par les Étoliens sous le commandement de leur nouveau stratège Dorimachus qui fait détruire le temple de Zeus, mais épargne, semble-t-il, le Chêne sacré. Lhistorien romain Polybe[10] est la source indirecte de cette information : il précise que les Étoliens brûlèrent le sanctuaire, sauf la Hiéra Oikia quils démantelèrent. Selon l'archéologue S. Dakaris[11], la différence de traitement sexplique par la volonté de ne pas risquer de brûler le Chêne sacré, ce qui aurait constitué un sacrilège beaucoup plus important. Les fouilles de la Hiéra Oikia ont montré l'absence de niveau de destruction par incendie à cette époque, ce qui paraît confirmer le témoignage de Polybe. Le jeune roi de Macédoine Philippe V, allié des Épirotes, venge le sacrilège en mettant à sac la capitale fédérale étolienne Thermos lannée suivante (-218). Avec le butin pris sur les Étoliens, il fait ensuite reconstruire le sanctuaire de Dodone et y ajoute un stade pour les jeux annuels.

Malgré tout, le sanctuaire ne se relève jamais tout à fait du sac étolien, dautant plus quil est une nouvelle fois détruit un demi-siècle plus tard, cette fois par les Romains, lors de la Troisième guerre de Macédoine (-168--167)[12]. On retrouve ensuite mention du sanctuaire dans les sources à loccasion de linvasion de la Grèce par les armées de Mithridate en -88. Lorsque Octave séjourne en Épire lors de la guerre contre Marc Antoine en -31, il fait probablement reconstruire en partie le sanctuaire que le géographe contemporain Strabon décrit comme ruiné. Cest aussi à lépoque impériale que le théâtre est transformé en arène. Lempereur Hadrien visite loracle vers 132, de même que Pausanias[13], peu après. Le festival des Naïa est toujours célébré vers 240[14].

La ruine définitive de loracle intervient en 391 lorsque le Chêne sacré est coupé suite aux édits de Théodose Ier interdisant les cultes païens. Ce nest toutefois pas la fin de loccupation du site : la construction, en partie sur les vestiges du temple dHéraclès, dune grande basilique chrétienne au Ve siècle témoigne de loccupation de Dodone dans lAntiquité tardive, de même que la mention de la ville dans la liste de Hiéroklès (VIe siècle), et la présence de plusieurs évêques de Dodone aux conciles œcuméniques, notamment celui dÉphèse en 431.

Organisation du sanctuaire

Plan du sanctuaire de Dodone (daprès Dakaris 1996)

Le sanctuaire était clos dès la seconde moitié du IVe siècle avJ.‑C. par une enceinte prolongeant dans la vallée les fortifications de l'acropole (plan, no 1). Cette dernière englobe le sommet de la petite colline (altitude : 350 m) dominant le site. Construite en appareil isodome, lacropole était le refuge fortifié de la cité des Dodonéens, garni de 10 tours quadrangulaires, et accessibles par deux entrées, lune au nord-est, lautre au sud-est. Elle possédait une citerne pour alimenter les habitants en eau en cas de siège. À partir des angles sud-ouest et sud-est de lacropole, deux courtines descendaient dans la vallée pour enclore laire du sanctuaire. Trois portes y étaient percées, dont deux, à lest et au sud (hors plan), étaient protégées par des tours. La porte ouest (plan no 19) dut être déplacée vers l'ouest (no 18) lors de la phase dagrandissement du sanctuaire au début du IIIe siècle avJ.‑C., pour dégager lespace suffisant à la construction du bouleuterion (no 4) et du prytanée (no 6). La nouvelle courtine occidentale (no 17) les contournait pour venir rejoindre le bâtiment identifié à la maison des prêtres (no 5).

Les édifices de culte

Les différents monuments du sanctuaire étaient répartis au pied de la colline dans cet espace fortifié. Au centre se trouvait le téménos de Zeus Dodonéen, la Hiéra Oikia ( Ἱερά Οἰκία, « Maison sacrée », plan no 11) mentionnée par Polybe (IV, 67, 3)[15]. La plus ancienne phase monumentale identifiée est un petit temple rectangulaire (20,80 x 19,20 m) construit dans la première moitié du IVe siècle à côté du chêne sacré, lorsque les Molosses prennent le contrôle du sanctuaire thesprote. Il ny avait alors pas de clôture, mais le chêne était entouré dune série de trépieds supportant des chaudrons de bronze en contact les uns avec les autres : lorsque lon heurtait lun deux, le son était réverbéré par toute la série. Cest ce bruit que les prêtres interprétaient, avec celui du vent dans les feuilles, comme manifestant la volonté de Zeus. Des fragments de chaudron remontant au VIIIe siècle ont été retrouvés, confirmant cette tradition et lancienneté de l'oracle.

Au milieu du IVe siècle, le téménos est matérialisé par un mur de maçonnerie. Les chaudrons ont alors laissé la place à un dispositif plus sophistiqué : au sommet dune colonne sélevait une statue de bronze représentant un jeune garçon (une offrande des Corcyréens) tenant un fouet à trois chaînes dastragales. Le vent agitait ces chaînes contre un chaudron de bronze disposé lui aussi sur une colonne, produisant encore un son continu, interprété par les prêtres pour répondre aux questions qui leur étaient posées[16]. Celles-ci étaient transmises sur des lamelles de plomb, dont les fouilles ont mis au jour un grand nombre.

Téménos de Zeus Dodonéen

Sous le règne du roi Pyrrhus, le mur de clôture est remplacé par un portique ionique sur trois côtés de la cour, en pi, entourant le chêne. En guise doffrande de reconnaissance au dieu, Pyrrhus fait suspendre sur les colonnades les boucliers romains pris lors de sa victoire dHéraclée en -280[16]le Musée national dAthènes possède le fragment de lun de ces boucliers, identifié par un fragment dinscription. Il réitéra ce geste en -274 après une victoire sur Antigone II Gonatas, comme latteste cette fois une inscription trouvée au bouleuterion.

Après le démantèlement systématique de la Hiéra Oikia par les Étoliens en -219, le Macédoniens font reconstruire le sanctuaire sur une échelle plus grandiose : le temple est un édifice tripartite (pronaos, naos, adyton) tétrastyle ionique[14].

Plusieurs temples secondaires entouraient la Hiéra Oikia. Au Nord-Est, se trouvait le premier temple de Dioné (plan no 13), un petit monument doté d'un pronaos tétrastyle ionique abritant, à l'arrière de la cella la statue de la déesse[17]. On sait de manière indirecte que le temple existait déjà dans la seconde moitié du IVe siècle : les Athéniens y envoyaient chaque année une ambassade honorer la statue de Dioné, une pratique quOlympias, la mère d'Alexandre le Grand condamna comme une ingérence dans les affaires du royaume molosse dÉpire, quelle gouverna entre -330 et -324. Le sanctuaire est abandonné après sa destruction en -219 : un nouveau temple de Dioné est construit une dizaine de mètres plus au Sud (plan no 12). Il sagit dun petit temple prostyle tétrastyle ionique comprenant un pronaos et une cella[18].

Entre ces deux temples et la porte Est de l'enceinte se trouvait le temple dHéraclès (plan no 14), élevé sous le règne de Pyrrhus (-297--272) en l'honneur du héros considéré comme lancêtre mythique de la dynastie des Argéades, la maison royale de Macédoine : celle-ci était alliée à la dynastie éacide dÉpire depuis le mariage dOlympias et de Philippe II de Macédoine. C'est un petit temple tétrastyle doriquele seul du sanctuairequi fut détruit en -219 puis reconstruit en partie avec des matériaux pillés à Thermos. Il fut en partie recouvert par la basilique paléochrétienne dans lAntiquité tardive. Le temple a pu être identifié grâce à la découverte dun métope représentant Héraclès contre lHydre de Lerne, ainsi que par diverses offrandes. Une base dautel découverte à l'Est du temple lui est probablement associée[19].

Deux autres temples ont été mis au jour à louest de la Hiéra Oikia : le temple de Thémis (no 10) est très proche par son plan du nouveau temple de Dioné[20]. Lassociation cultuelle des deux déesses parèdres de Zeus est confirmée par une inscription oraculaire de plomb, datée de la première moitié du IIIe siècle, qui mentionne cette triade qualifiée de dieux naïens.

Un peu plus loin au sud-ouest, un dernier édifice cultuel (no 8) est identifié à un temple dAphrodite : le culte de cette déesse est attesté à Dodone par une inscription ainsi que par des offrandes de petites statuettes dargile la représentant tenant dans sa main droite une colombe devant sa poitrine. Deux tambours de colonne provenant de ce temple ont été remployés dans lédifice voisin (no 9), de fonction inconnue, à l'époque romaine[20].

Les édifices civiques

Le plus grand édifice intra muros du sanctuaire est le bouleuterion (plan no 4) construit au début du IIIe siècle avJ.‑C. à côté du théâtre[21]. Cest une grande salle rectangulaire (43,60 x 32,35 m) précédée en façade dune stoa dorique. Le toit de cette imposante construction était supporté par huit colonnes ioniques disposées en trois rangées dans la salle. Il fut toutefois nécessaire de renforcer les murs par 14 contreforts pour supporter la pression du toit. Cétait le lieu de réunion des membres du conseil (bouleutes) de la cité des Dodonéens : ils prenaient place sur des bancs de pierre dont il reste quelques traces en place, sur le côté nord. Les orateurs prenaient place dans la partie sud de la pièce, on a aussi retrouvé en place un autel dédié à Zeus Naïos et Bouleus, un élément décisif dans lidentification fonctionnelle du bâtiment. Lauteur de cette dédicace était un certain Charops fils de Machatas, un Thesprote mentionné par Plutarque pour avoir aidé Flamininus lors de la campagne de -198 contre Philippe V[22].

À lextérieur du bouleuterion, le long de sa façade est, ont été trouvées quatre bases gravées de décrets honorifiques de la Ligue épirote. Lobjet de deux dentre eux était de récompenser, en leur élevant une statue de bronze, des généraux pour avoir combattu, lun les Illyriens vers -230, lautre les Éacides, au moment de la proclamation de la République épirote (entre -234 et -168). Divers fragments de ces statues ont été retrouvés à proximité des bases.

Lautre grand édifice civique, le prytanée (plan no 6 et 7) était à quelque distance au sud du bouleuterion, de lautre côté de la voie sacrée et de lancienne porte ouest des remparts quil fallut déplacer pour construire ce monument[23]. Cest dans ce bâtiment que se réunissaient les prytanes et les archontes, les magistrats supérieurs de Dodone, et quétaient conservées les archives de leurs décisions. Le bâtiment, ordonné autour dune cour péristyle, fut agrandi à la fin du IIIe siècle par ladjonction dune série de petites pièces carrées sur son côté nord : cet agrandissement fut très probablement rendu nécessaire par lextension de la Ligue épirote vers le sud à cette époque. Détruit en -167, il fut tant bien que mal réparé, mais la partie nord resta en ruine[24].

Les édifices de spectacle : le théâtre et le stade

Théâtre de Dodone

Les deux édifices les plus massifs de Dodone sont situés à lextérieur de lenceinte du sanctuaire, sur les pentes sud-ouest de la colline.

Le théâtre (plan no 2) est lun des plus vastes de Grèce, avec une capacité estimée à 17 000 spectateurs[25]. Il fut construit sous le règne de Pyrrhus sur les pentes sud de la colline, pour accueillir la fête quadriennale des Naïa. La colline nétant pas assez large pour cet édifice, un mur de soutènement fut construit pour retenir le remblai, renforcé en façade par des contreforts massifs, dapparence similaire à des tours, qui contribuent à lapparence monumentale impressionnante de la façade. Lauditorium est divisé par des allées (diazomata) en trois zones respectivement de 9, 15 et 21 rangées de sièges, elles-mêmes séparées par des escaliers en 9 secteurs (cunei) dans la partie inférieure, et 18 dans la partie supérieure. Les rangées inférieures de sièges étaient réservées aux titulaires du privilège de proédrie[26].

Elles furent supprimées, de même que le proskenion et la façade de lédifice de scène, lors de la transformation du théâtre en arène à lépoque augustéenne : on construisit alors un mur haut de 2,80 m pour convertir l'orchestra en une vaste arène ovale, pouvaient être organisés des combats de bêtes sauvages sans danger pour le public.

Au sud-ouest du théâtre se trouve le stade (plan no 3), comportant 21 ou 22 rangées de sièges, et construit au début du IIIe siècle avJ.‑C. pour accueillir les jeux athlétiques qui accompagnaient la fête des Naïa[27].

Théâtre de Dodone ; à gauche, gradins et emplacement du stade

Exploration archéologique

Plan du sanctuaire après les premières fouilles (Carapanos 1878, plII)

Le site de Dodone est repéré par les voyageurs (Leake, François Pouqueville) au début du XIXe siècle du calendrier grégorien sans toutefois être formellement identifié avec loracle.

Les premières fouilles systématiques du sanctuaire ont lieu dès 1873-1875 sous la direction de lantiquaire et homme politique Constantin Carapanos[28] : entreprises sur une échelle considérable, elles dégagent lessentiel des structures sur une surface de 20 000 m2, mais natteignent pas partout les niveaux doccupationpour le bonheur des archéologues postérieurs. Elles permettent toutefois, grâce à la découverte de décrets épirotes gravés sur des plaques de bronze, ainsi que de nombreuses lamelles de plomb oraculaires, de confirmer lidentification du site avec le célèbre sanctuaire oraculaire. La mise au jour dun dépôt important de ce matériel dans les ruines de la basilique paléochrétienne conduit alors larchéologue à lidentifier à tort avec le temple de Zeus.

Les fouilles reprennent une première fois après 1921 sous légide de la Société archéologique d'Athènes, dirigées par GSoteriades, et doivent sarrêter en raison de la guerre gréco-turque. Après une première série de campagnes en 1929-1932, cest larchéologue DEvangelides qui relance de façon décisive lexploration systématique du site après la création de lautorité archéologique régionale, la XIIe Éphorie des Antiquités préhistoriques et classiques dÉpire[28] : dans les années 1950, il poursuit la fouille du sanctuaire, dont il montre la continuité de fonctionnement depuis lÂge du Bronze jusqu'à lAntiquité tardive. Après sa disparition, cest son collaborateur SDakaris qui reprend la direction des fouilles, de nouveau avec le concours (depuis 1981) de la Société archéologique, jusquà sa mort en 2004.

Notes

  1. Dakaris [1996], p. 6.
  2. Extrait de la traduction de Larcher (1850), accessible en ligne.
  3. Dakaris [1996], p. 6-9.
  4. Dakaris [1996], p. 9.
  5. Le texte grec des extraits dHomère provient du TLG Canon ; la traduction française provient de la traduction de Frédéric Mugler pour La Différence, parue en 1989.
  6. Autre lien vers le texte grec : Hodoi Elektronikai
  7. a, b, c et d Dakaris [1996], p. 7.
  8. Hérodote, I, 46. Il sagit bien sûr de la célèbre consultation des oracles par Crésus pour déterminer sil devait faire la guerre à la Perse. La réponse de Zeus Dodonéen nest pas conservée.
  9. Diodore de Sicile, XIV, 3. Lysandre aurait essayé de corrompre la prêtresse de Zeus pour obtenir une réponse favorable. L'anecdote figure aussi chez Plutarque (Vie de Lysandre) qui précise la devoir à Éphore de Cumes.
  10. Polybe, IV, 67, 3
  11. Dakaris [1996], p. 15.
  12. Les fouilles du temple de Zeus nont pas découvert d'éléments permettant de confirmer cette destruction (Dakaris 1996, 16).
  13. Pausanias, Description de la Grèce [détail des éditions] [lire en ligne], I, 17, 5.
  14. a et b Dakaris [1996], p. 16.
  15. Dakaris [1996], p. 13-15.
  16. a et b Dakaris [1996], p. 14.
  17. Dakaris [1996], p. 18-19.
  18. Dakaris [1996], p. 19.
  19. Dakaris [1996], p. 19-20.
  20. a et b Dakaris [1996], p. 20.
  21. Dakaris [1996], p. 20-21.
  22. Dakaris [1996], p. 21.
  23. Dakaris [1996], p. 22-28.
  24. Dakaris [1996], p. 28.
  25. Dakaris [1996], p. 30-33.
  26. Dakaris [1996], p. 33.
  27. Dakaris [1996], p. 33-34.
  28. a et b Dakaris [1996], p. 11.

Voir aussi

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Articles connexes

Bibliographie

  • (en) Yves Béquignon, s. v. Dodona Princeton Encyclopedia of Classical Sites (en ligne), 1986, p279-280.
  • (en) Sotiros Dakaris, Dodona, Athènes, 1996, 2e édition (ISBN 9602141247).
  • Constantin Carapanos, Dodone et ses ruines, 2 vols., Hachette, Paris, 1878.
  • (en) H. W. Parke, The Oracles of Zeus : Dodona, Olympia, Ammon, Oxford, 1967.
  • (el) B. Petrakou, Δωδώνη, Τὸ Ἔργον τῆς Ἀρχαιολογικῆς Ἑταιρείας κατὰ τὸ 2004, Athènes, 2005, p38-44.
  • (en) J. H. Philpot, The Sacred Tree, Courier Dover, 2004 (ISBN 0486436128).

Liens externes

  • (en) Dodone, Odysseus : site officiel

39°3248N 20°4716E / 39.54667, 20.78778

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