Cuve de bruxelles

Cuve de bruxelles

Cuve de Bruxelles

Cuve de Bruxelles (traduction de Kuype van Brussel en ancien néerlandais), que l’on pourrait traduire aujourd’hui par bassin bruxellois, est l’appellation utilisée pour désigner du XIIIe siècle à la fin du XVIIIe siècle le lien qui unit la ville de Bruxelles aux villages qui l’entourent, préfigurant les futures agglomération et région bruxelloises.

Sommaire

Constitution de la cuve

Au Moyen Âge, il est courant que les princes en échange des services rendus par les villes fortifiées, défense du territoire, commerce, manufacture, leurs octroient des chartes de franchises, qui précise les droits et privilèges que les autorités exercent sur les bourgs qui constituent la banlieue.

La zone de franchise de Bruxelles correspond à la Cuve. Les habitants des hameaux et villages agricoles qui en font partie, dépendent sur le plan commercial, administratif et judiciaire de la ville, à laquelle ils payent des taxes et des accises. En échange, ils bénéficient des mêmes droits et libertés que les habitants de la cité. Les services de la ville entretiennent les cours d’eau et les routes principales, l’Amman[1] assisté d’un échevin local règles les affaires civiles, les poids et mesures et apporte aide et protection à la population. Celle-ci peut en outre se rendre en ville pour vendre ses produits et se faire soigner gratuitement dans les hôpitaux et hospices.

La cuve de Bruxelles apparaît au XIIIe siècle et s’étend progressivement aux villages et hameaux situé sur les territoires actuels des communes de Saint-Josse-ten-Noode, Ixelles, Molenbeek-Saint-Jean (1295) et Saint-Gilles (1296), puis au cours du XIVe siècle, à ceux de Schaerbeek (1301), Laeken (1331), Anderlecht (1393), et Forest (1394).

Cette époque correspond à la période d'accroissement de l’influence politique de la ville, bouleversant les anciens rapports de force traditionnels de la société seigneuriale du duché de Brabant. Cela ne se fait pas sans heurts, comme en témoigne l'épisode qui précède l’incorporation des terres d’Anderlecht. Pour la première fois, la ville pour qui le contrôle de ce qui est une des localités les plus prospère des environs est une nécessité stratégique, est en mesure d’affronter un personnage influent du duché, le seigneur de Gaasbeek, lequel a sollicité auprès de la duchesse Jeanne l’acquisition de territoire supplémentaire, dont Anderlecht fait partie. L’échevin bruxellois Everard t'Serclaes parvient à faire échouer ce projet, il le paiera de sa vie, mortellement blessé dans une embuscade, ce qui provoque le siège du château de Gaasbeek par les Bruxellois. Seule l’intervention de la duchesse permet de trouver un accord, évitant l’extension du conflit.

Les villages plus lointains ne font pas partie de la cuve, mais certains entretiennent cependant des liens avec la ville. Etterbeek par exemple, qui est administré par la seigneurie de Rhode dépend pour la justice, comme Boitsfort, Auderghem, Woluwe-Saint-Pierre et Crainhem de l’échevinage[2] de Watermael, mais à partir du XIVe siècle, les autorités de Bruxelles ont l’autorisation de prélever des accises sur la bière qui y est produite.

Abolition de la cuve

La cuve de Bruxelles est abolie de manière unilatérale en 1795 (14 fructidor an III) par décret du Comité de salut public de la République française.

Le but des autorités françaises est de réduire l’influence et les privilèges d'Ancien Régime de la ville de Bruxelles, ancienne capitale des Pays-Bas espagnols[3], en la réduisant au rang de préfecture, chef-lieu du département de la Dyle. Le territoire est divisé arbitrairement en arrondissements et cantons, un canton est délimité par l'ancienne ville tandis que les villages de l'ancienne cuve sont regroupés en trois autres cantons. Des paroisses anciennes sont coupées en deux, les anciens villages d’Ixelles, de Vleurgat et de Boendael sont enclavées dans le canton d’Uccle, le découpage des cantons a pour objectif de supprimer l'influence qu'exerçait sur la région le clergé, les abbayes, la noblesse et les Lignages. Quelques années plus tard les limites territoriales seront rectifiées, et les cantons redécoupés, deviendront des communes.

À cette époque, les environs de la ville sont encore très peu peuplés, le territoire correspondant actuellement à la commune de Schaerbeek dont le nombre d’habitant est le plus important parmi celles qui entourent l’ancienne ville de Bruxelles n’atteint pas, en y incluant le hameau de Helmet et les habitations isolées, les trois mille habitants.

Dès la fin du régime français en 1813, les nouvelles autorités envisagent de réassocier la ville à son ancienne cuve, examinée à plusieurs reprises, le projet n’aboutit pas.

Après l'indépendance de la Belgique

En 1836 le conseil communal de Bruxelles réaffirme son souhait unanime de voir la cuve rétablie par la fusion avec la ville des communes périphériques. Ce n’est qu’en 1853 que le gouvernement, considérant que cette fusion est de l’intérêt de la capitale comme de ses faubourgs, dépose un projet de loi allant dans ce sens. La Chambre des députés le rejettera un an plus tard. Plusieurs fois proposée, jusqu’au début du XXe siècle la fusion sera à chaque fois refusée par le parlement, dont la majorité catholique, régulièrement en conflit politique avec le conseil communal libéral de Bruxelles, ne veut pas augmenter son influence par l’incorporation des communes également de cette tendance. Les élus des autres grandes villes du pays ne voient pas non plus favorablement une fusion qui accroîtrait l’influence relative de la capitale.

Les faubourgs de Bruxelles, qui jusqu’au XVIIIe siècle ne sont constitués que de quelques habitations à l’extérieur de chacune des portes de la ville (fors le bourg), ou le voyageur attardé arrivé après la fermeture des portes de la ville peut trouver le gîte, sont devenus au cours de la première moitié du XIXe siècle de véritables quartiers, excroissances urbaines séparés des villages ruraux, avec lesquels ils constituent pourtant des communes, par des champs et un mode de vie différent. Leurs noms, font d’ailleurs référence aux départ des routes où ils sont installés plutôt qu’aux villages auxquels ils sont rattachés, le faubourg de Namur fait partie de la commune d’Ixelles, celui de Louvain de Saint Josse ten Noode, ou celui de Flandres de Molenbeek. L’explosion démographique et l’urbanisation des villages dits de la première couronne, se produit à partir de 1860 date de l’abolition de l’octroi.

La ville de Bruxelles à l’étroit dans ses anciennes limites, s’accroît cependant par acquisitions ou annexion de territoire non encore bâtis :

Les grands travaux effectués en ville provoquent également le départ de populations vers les communes voisines qui créent des nouveaux quartiers, dont des cités-jardins.

Contrairement au reste du pays, Bruxelles et les communes qui l’entourent ne participent pas aux fusion de communes des années 1970, avec le temps, un sentiment fort d’appartenance communale s’est créé parmi une partie de la population et la classe politique municipaliste. Certaines des communes bruxelloises sont devenues des municipalités importantes. Au contraire, certaines communes se sont scindée depuis leur création, en 1841, Ganshoren se sépare de Jette, et Koekelberg de Berchem-Sainte-Agathe, en 1863 c’est au tout d’Auderghem d’être coupée de Watermael-Boitsfort.

Les 19 communes bruxelloises, qui forment à présent du point de vue géographique un grand centre-ville, seront cependant réunies, tout en gardant leur autonomie au sein de l’Agglomération bruxelloise en 1971 , puis de la Région de Bruxelles-Capitale en 1993.

Notes

  1. L’Amman, est chargé de la police et de contrôler l’observance des ordonnances du duc, il désigné par celui-ci parmi la noblesse locale.
  2. Échevinage, désigne ici une cour de justice accordée à une localité par un seigneur
  3. «Bruxelles, où siège le gouvernement des Archiducs Albert et Isabelle, se retrouve capitale des Pays-Bas catholiques.» Serge Govaert, Bruxelles en capitales: de l'expo à l'euro, Éd. De Boeck Université, Bruxelles, 2000, (ISBN 2804134733), p. 14.

Sources

  • Jean d'Osta : Dictionnaire historique des faubourgs de Bruxelles, éditions Le Livre/Paul Legrain, Bruxelles, édition 1996, 310 p., ISBN 2-930135-10-7
  • Sous la direction de Claire Billen et Jean-Marie Duvosquel : Bruxelles, coll. L’esprit des villes d’Europe – fonds Mercator, 2000, 301 p., ISBN 90-6153-450-X
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