Correction du Rhône

Correction du Rhône

Correction du Rhône en amont du lac Léman

Cours du Rhône en amont du lac Léman.

Dans sa partie située en Suisse, le Rhône a subi de nombreux aménagements visant à maîtriser son cours et diminuer les effets néfastes de ses crues. En 1860, une crue fait de très gros dégâts sur toute la vallée du Rhône, cet évènement va déclencher la décision de réaliser la première correction du Rhône entre 1863 et 1894. Une seconde correction est réalisée entre 1930 et 1960. En 2008, la Confédération suisse annonce la levée de fonds pour la troisième correction qui devrait durer entre 25 et 30 ans.

Sommaire

Situation géographique

Bassin versant du Rhône en amont du lac Léman.

Le Rhône prend sa source dans le massif du Saint-Gothard, dans les Alpes. Il naît de la fonte du glacier du Rhône. Il emprunte une longue vallée étroite dans le Valais pour rejoindre le lac Léman à la hauteur de la commune du Bouveret. Entre sa source et le lac, le Rhône reçoit les eaux d'environ 200 torrents.

Les principaux affluents du Rhône en amont du lac Léman sont sur sa rive droite d'amont en aval : la Massa alimentée par le glacier d'Aletsch, la Lonza dans la vallée de Lötschental ou la Grande Eau qui prend sa source dans le massif des Diablerets. Sur la rive gauche du Rhône depuis la source et jusqu'au lac Léman, ses principaux affluents sont la Vispa, la Navizence alimentée par le Cervin, la Borgne dans le Val d'Hérens, la Dranse rejoignant le Rhône à Martigny ou la Vièze passant à Monthey.

Première correction

Histoire des crues en amont du Léman

Barrage formé par le glacier du Giétro en 1818.

Avant les différentes corrections, le Rhône recevait les eaux de ses affluents (des torrents de montagne) sans aménagement particulier. Les torrents charrient de grandes quantités d'eau et d'alluvions de toutes tailles allant jusqu'à de gros blocs solides. Aux différentes confluences, des amas se forment à partir des matériaux charriés par les affluents. Le Rhône ne pouvant entraîner ces matériaux en aval ceux-ci se déposent dans son lit. Ce dernier monte et le fleuve inonde les rives avoisinantes. Des cônes de déjection se forment aussi aux zones de confluence. En effet, les apports d'alluvions des torrents déplacent ces zones de confluence, ainsi le cours du Rhône à travers le Valais oscille de part et d'autre de la vallée.

La première inondation dont il est fait mention date de 563[1]. Un éboulement crée un barrage dans la vallée du Rhône, le niveau de l'eau monte en amont jusqu'à ce que le barrage cède avec la pression de l'eau. L'écoulement de l'eau provoque des dégâts en aval mais aussi sur les rives du Léman. Selon Vischer, le site de l'éboulement serait localisé dans la région de Saint-Maurice. D'autres inondations ont pour origine les glaciers. On parle d'inondations glaciaires quand le mouvement d'un glacier obstrue le cours d'une rivière et que celle-ci forme une retenue d'eau derrière le glacier, la rupture du glacier sous la force de l'eau pouvant causer d'importants dégâts. En 1818, le glacier du Giétro entrave le cours de la Dranse (affluent du Rhône), un lac de 18 millions de m3 d'eau se forme, le glacier cède le 16 juin 1818, le déversement de l'eau fait 44 morts et de nombreux immeubles sont détruits dans la vallée[2].

Cependant, l'essentiel des inondations sont le fait d'un épisode de précipitations importantes survenu lors d'une saison chaude ; niveau déjà haut des rivières de part la fonte des neiges. Vischer cite les inondations de 1740, 1778, 1846 et 1860 comme particulièrement graves, ces inondations provoquant la destruction des récoltes mais aussi celle de plusieurs villages. Les habitants de la vallée du Rhône tentent de se protéger des crues. Cependant, leurs moyens étant limités, les travaux ne se limitent qu'aux périmètres des communaux et sont réalisés sans grande coordination.

Concertation entre Berne et le Valais

Il est fait mention de travaux de protection contre les crues du Rhône au milieu du XVIe siècle. À cette époque, les Bernois occupent la rive droite du Rhône en aval de Saint-Maurice, et les Valaisans la rive gauche. Les travaux réalisés à cette époque se focalisent plus sur les affluents que sur le fleuve lui-même[3]. En 1756, une carte du Rhône, de ses affluents et des différents ouvrages s'y trouvant est réalisée ; elle est suivie en 1768 par un plan directeur.

Changements politiques en Suisse

Le glacier du Rhône à la naissance du Rhône.

Pendant la période de domination française, le canton de Vaud est formé en 1803 et reprend le territoire bernois en aval de Saint-Maurice. Le canton du Valais intègre la Confédération en 1815. Ces changements politiques ont pour conséquence une volonté de développer le Valais, notamment par un développement de l'agriculture. Ainsi, des routes sont tracées et des ponts construits à travers le canton. En 1850, une ligne de chemin de fer est construite pour relier le lac Léman et Sion. La protection de la vallée du Rhône contre les crues du fleuve est donc de plus en plus envisagée[3].

En 1825, les deux ingénieurs cantonaux Ignace Venetz (Valais) et Adrien Pichard (Vaud) décident l'élaboration d'un plan de correction du Rhône pour sa partie en aval de Saint-Maurice. Une convention est signée entre les deux cantons en 1836. En 1860, dans le cadre d'un mandat pour le Conseil fédéral et l'élaboration d'un « rapport à l'intention du Conseil fédéral suisse sur l'étude des torrents suisses », Carl Culmann travaille en Valais. Dans son rapport, il estime que les ouvrages ne sont pas combinés avec pertinence et que, sur seules deux portions du cours du Rhône, les corrections sont bonnes : une portion de 3,5 km à Rarogne et un tronçon à Martigny.

En 1855 et en 1857, la vallée du Rhône est touchée par des inondations mais la crue de 1860 a « probablement dépassé tous les événements des temps modernes par son ampleur entre la vallée de Conches et Martigny »[4]. En 1860, le comité genevois pour la souscription en faveur des inondés de la Suisse, dirigé par le général Guillaume-Henri Dufour, fait réaliser un rapport sur ces inondations, les dégâts qui en découlent ainsi que leurs causes. Le comité demande au Conseil fédéral de lancer des travaux pour une correction globale du Rhône et verse une somme importante aux communes touchées. La même année, le gouvernement valaisan s'adresse au Conseil fédéral en se basant sur les travaux d'Ignace Venetz mort en 1859.

À cette époque, les autorités fédérales n'ont pas de service en charge de l’aménagement des cours d’eau. Elles demandent donc à deux experts de rendre un avis sur le projet de correction. Friedrich Wilhelm Hartmann et Leopold Blotnitzki rendent leurs conclusions entre avril 1862 et décembre 1863. À la fin de l'année 1863, l'Assemblée fédérale prend sa décision qui prévoit que la Confédération paye un tiers des frais, la direction supérieure des travaux du ressort du Conseil fédéral s'en remettant aux avis de Hartmann et Blotnitzki pour les questions techniques. La direction du projet est confiée au canton du Valais.

Travaux de 1863 à 1894

Travaux de correction du Rhône à Rarogne, peinture à l'huile de Raphaël Ritz.

Les travaux de correction débutent en 1863 à l'initiative du canton du Valais, puis par décision fédérale. Ces travaux se focalisent sur la partie située en aval de la confluence avec la Massa. Ces travaux concernent un tronçon long de 120 kilomètres et coupé par deux obstacles naturels : le cône de déjection de l'Illgraben (entre La Souste et Sierre) et le cône de déjection du torrent de Saint-Barthélemy (en amont de Lavey). Ces deux cônes de déjection ne font pas partie des travaux de correction.

Entre la confluence avec la Massa et Sion, un nouveau lit est creusé pour le Rhône. Le lit est resserré et le tracé est tendu avec de longues lignes droites et des virages à grand rayon de courbure. Les berges sont constituées de digues de protection. Sur le tronçon situé entre Sion et Lavey, le même type de correction est réalisé. Entre Saint-Maurice et le lac Léman, le même type de correction est aussi adopté, mais en concertation avec le canton de Vaud, le Rhône marquant la frontière entre les deux cantons sur une trentaine de kilomètres.

Seconde correction

Malgré les travaux de la première correction, le Rhône déborde à nouveau. Par conséquent, une seconde correction a lieu entre 1930 et 1960 avec le but essentiel d'améliorer certains ouvrages réalisés lors de la première correction.

Troisième correction

La vallée du Rhône a subi de nouvelles inondations en 1987, 1993 et 2000. De plus, l'occupation de la plaine du Rhône a grandement augmenté. Aussi, en 2000, les autorités valaisannes ont lancé le projet de troisième correction du Rhône[5].

En mai 2008, la Confédération annonce qu'elle décide de cofinancer les travaux pour une troisième correction du fleuve. Dans la seconde moitié de l'année 2008, le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) doit élaborer une proposition pour le partage du financement entre la Confédération et les cantons concernés et ce pour les six premières années des travaux. Ceux-ci concernent différents tronçons du Rhône situés entre Gletsch et le lac Léman. Les travaux devraient s'écouler sur une période comprise entre 25 et 30 ans.

La Confédération estime les dégâts à 10 milliards de francs en cas de crue extrême. Des mesures prioritaires ont été programmées et doivent s'étendre sur une période de 12 ans (entre 2009 et 2020) pour concerner les secteurs les plus exposés : Viège, Sierre, Sion et Fully en Valais et Aigle dans le canton de Vaud. Le coût de ces mesures prioritaires est estimé à 700 millions de francs[6].

Annexes

Bibliographie

  • Daniel L. Vischer, Histoire de la protection contre les crues en Suisse, Rapports de l'Office fédéral des eaux et de la géologie (OFEG), 2003.
  • Service fédéral des routes et des digues, La correction du Rhône en amont du lac Léman, Berne, 1964
  • Amédée Zryd, Les glaciers en mouvement, Presse polytechniques et universitaires romandes « Le savoir suisse », Lausanne, 2008 (ISBN 1661-8939).

Notes et références

  1. Compilation de Lütschg (1926), citée dans Histoire de la protection contre les crues en Suisse, p. 97.
  2. A. Zryd, Les glaciers en mouvement, p. 53.
  3. a  et b Vischer, Histoire de la protection contre les crues en Suisse, p. 98.
  4. Selon Fischer dans Histoire de la protection contre les crues en Suisse, p. 99.
  5. L'aménagement des eaux sur l'encyclopédie en ligne du Valais, consulté le 14 septembre 2008.
  6. Message de la Confédération au sujet du crédit pour les travaux de la troisième correction sur le site du DETEC, consulté le 14 septembre 2008.

Articles connexes

Liens externes

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