Conseil national consultatif

Conseil national consultatif

Conseil national (gouvernement de Vichy)

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Le Conseil national est une assemblée consultative créée le 22 janvier 1941[1] par le gouvernement de Vichy, en France, à l'initiative de Pierre-Étienne Flandin. Il s’agit d’une « vaste cellule de réflexion du Régime de Vichy destinée à rechercher les moyens d’améliorer la situation précaire dans laquelle se trouve le pays après la défaite »[2] de 1940.

Sommaire

Historique

Création

Le régime de Vichy, qui avait mis un terme à la démocratie et au parlementarisme, a cherché une forme de représentation pour remplacer le suffrage universel égalitaire. La crise du 13 décembre 1940 entre le Chef de l'État, le maréchal Pétain, et le vice-président du Conseil Pierre Laval entraîne une volonté de rallier les élites politiques du pays au gouvernement de Vichy, notamment dans la zone occupée, où Laval bénéficie du soutien des Allemands et de la presse parisienne. Les nouvelles autorités ont pu également chercher à présenter un « visage politique plus décent » aux démocraties anglo-saxonnes[3]. Cette recherche aboutit à l'annonce par Flandin, le 22 janvier 1941, de la création d'une « assemblée consultative »[4], avec une première liste de conseillers nationaux faisant la part belle aux parlementaires et aux hommes d'affaires. Toutefois, sous la pression de l'amiral Darlan, Flandin démissionne le 9 février 1941. Nommé à sa place, Darlan modifie le projet initial, en revenant notamment sur la suppression de l'indemnité de fonction. Le Conseil national se réunit à partir de mars 1941[5].

Composition

C'est une assemblée mixte, où voisinent des parlementaires et des conseillers socio-professionnels. Elle est composée de 213 conseillers: 77 parlementaires - 28 sénateurs et 49 députés - et 136 représentants des élites sociales, économiques et culturelles. Un peu plus de 10% des parlementaires disponibles y siègent, mais ils représentent presque un tiers du conseil[6],[7].

Les membres sont choisis par le gouvernement, et l'on y trouve un certain nombre de personnalités comme le pianiste Alfred Cortot, le physicien Louis de Broglie, Louis Lumière, le diplomate André François-Poncet, l'écrivain catholique membre de l'Institut Henri Massis, directeur de La Revue universelle, des anciens ministres de la Troisième république : Georges Bonnet, Germain Martin, Lucien Lamoureux, deux académiciens, Joseph de Pesquidoux et Abel Bonnard, des hommes d'église, Mgr Beaussart, coadjuteur de l'archevêque de Paris, le pasteur Boegner, président de la Fédération protestante de France, quelques présidents de la chambre de commerce, des sénateurs et députés ainsi que des dirigeants de sociétés agricoles ou de coopératives, comme Antoine Boude, président de la Chambre de commerce de Marseille, et des industriels comme Thiriez, Georges Laederich, industriel vosgien du textile, Joseph Merceron-Vicat, industriel français dans le domaine du ciment (groupe Vicat)[8] et Marcel Boussac, familier de Pierre-Étienne Flandin[4],[9]. Les élus de droite et du centre-droit dominent, avec notamment Jacques Bardoux et Antoine Pinay; des radicaux-socialistes et des socialistes, issus de la mouvance pacifiste de l'avant-guerre, sont cependant nommés, comme les radicaux Georges Bonnet, Jean Mistler, Lucien Lamoureux et Albert Chichery, ou les socialistes Paul Faure, secrétaire général de la SFIO et René Brunet. Des syndicalistes de la mouvance pacifiste en sont aussi membres : Pierre Vigne, secrétaire général de la Fédération du sous-sol, Alfred Savoie, de la Fédération de l'alimentation, Liochon, secrétaire général des travailleurs du livre, et Georges Dumoulin. On relève des conseillers issus du monde agricole ou théoriciens du corporatisme chrétien comme Louis Salleron[10]. Jacques Doriot et le colonel de La Rocque représentent, quant à eux, les publicistes[11]. Pressenti, André Siegfried refuse de siéger[12].

Fonctionnement

Tout a été prévu pour empêcher la reconstitution d'une vie parlementaire : pas d'assemblée plénière, aucune publicité des débats, des commissions temporaires, un conseil uniquement consultatif. Il s'est réuni de mai 1941 à mars 1942. Il élabore des textes constitutionnels et des avis[13].

Il est prévu une chambre de 200 membres désignés par le chef de l'État et une autre de 300 membres dont la moitié serait également choisie par le chef de l'État, et l'autre moitié élue par les assemblées provinciales, parmi les anciens combattants, les pères de famille nombreuses et des représentants de groupements professionnels et autres unités organiques « réelles »[4].

Un certain nombre de commissions sont créées. Le long de 1941, ces commissions rédigent les dispositions essentielles de la nouvelle constitution, constitution qui ne sera jamais ratifiée. La première commission qui siège du 6 mai au 11 juin 1941 élabore un projet visant à rétablir les anciennes provinces. Après le 10 juin, une autre commission se penche sur l'administration municipale. En juillet, une troisième commission étudie les structures politiques. En septembre, une autre commission étudie les moyens d'améliorer la compréhension entre le pays et le gouvernement[4].

Fin

Le 2 novembre 1941, 18 conseillers sont radiés et remplacés par de nouveaux membres[13]. Sont radiés: André Siegfried, le cardinal Suhard, Eugène Frot, à leur demande, L-O Frossard, Ferrasson, Ehlers, gasnier-Duparc, maire de Saint-Malo, le général de La Laurencie, Marcel Boussac, le docteur Rougier, Beltrémieux, Ferdinand Morin, maire de Tours, Cresp, Dumoulin, Rauzy.

En 1943, revenu aux affaires, Pierre Laval réforme le Conseil national, en introduisant les présidents des conseils départementaux, mais la réforme n'est pas appliquée et le Conseil national n'est plus réuni[13].

Membres

  • André Amiaud [ Seine ], professeur à la Faculté de droit de Paris
  • Paul Bacquet [ Pas-de-Calais ], député
  • Bahon-Rault [Ille-et-Vilaine ], président de région économique
  • René Bard, secrétaire général de la Fédération des mineurs
  • René Bardin [ Nièvre ], président de la Fédération des syndicats d'élevage
  • Jacques Bardoux , [Puy-de-Dome ], sénateur, membre de l'Institut
  • Léon Baréty [ Alpes-Maritimes ], député, conseiller général
  • Roger Barrault [ Eure-et-Loire], ouvrier agricole
  • Edouard Barthe [ Hérault ], député
  • Mgr Baussart [ Seine ], coadjuteur du cardinal-archeveque de Paris
  • Benquet [ Lot-et-Garonne ], médecin
  • Gaston Bergery, ambassadeur de france, député
  • Etienne Berthé [ Creuse ], directeur de coopérative agricole
  • Albert Blanc [ Corrèze ], conseiller général, président du comité des céréales de la Corrèze
  • Blanchard, [ Isère ], professeur à la faculté des lettres de Montpellier, membre du comité directeur de la Légion française des combattants
  • René Blondelle [ Aisne ], président de l'Union des syndicats agricoles de l'Aisne
  • Marc Boegner, pasteur, président de la Fédération protestante de France
  • Jean Boivin-Champeaux [ Calvados ], sénateur
  • Abel Bonnard, Académicien
  • Georges Bonnet, ambassadeur, député
  • Bonnet, syndicaliste
  • Gustave Bonvoisin [ Seine ], directeur général du comité central des allocations familiales et des assurances sociales
  • Bordères [ Alger ], président des délégations financières de l'Algérie et de l'Union des colons
  • Antoine Boude, président de la Chambre de commerce de Marseille
  • Charles Bouissoud, sénateur
  • Paul Brasseau, sénateur
  • prince Louis-Victor de Broglie, membre de l'Académie des sciences
  • René Brunet, député
  • Louis Buyat [ Isère ], député
  • Gratien Candace, député
  • Joseph Carrier, directeur général des Eaux et forets
  • Antoine Cayrel [ Gironde ], député
  • Lucien Chambron [ Allier ], président de la caisse de crédit agricole de l'Allier
  • Pierre Champion [ Seine ], membre de l'Institut, maire de Nogent-sur-Marne
  • Alain de Chanterac [ Tarn ], président de l'Union nationale des syndicats agricoles du Tarn
  • Elie Chapion [ Oise ], président du syndicat des maréchaux et charrons de l'Oise
  • P. Charbin, président de la chambre de commerce du Rhone
  • Albert Chichery [ Indre ], député
  • Georges Claude, chimiste membre de l'Institut
  • Gabriel Cognacq [ Seine ], gérant de la Samaritaine, président du comité de l'Entr'aide d'hiver de la région parisienne[14]
  • Victor Constant [ Seine ], sénateur
  • Henri Corbière [ Orne ], agriculteur
  • Louis Cornillac [ Vaucluse ], conseiller général
  • Alfred Cortot [ Seine ], compositeur, pianiste
  • Joseph Darnand [ Alpes-Maritimes ], président de la Légion française des combattants de Nice
  • Paul Daum, industriel
  • Henri Decault [ Loir-et-Cher ], président de la Fédération des syndicats horticoles de France
  • André Demaison, écrivain
  • Stanislas Devaud [ Constantine ], député PSF
  • Louis de Diesbach de Belleroche [ Pas-de-Calais ], député
  • Pierre Dignac [ Gironde ], député
  • Docteur [ Seine ], amiral
  • Henri Dorgères [ Seine ], délégué à la propagande du Comité central d'action et de défense paysanne
  • Jacques Doriot [ Seine ], chef du Parti populaire français
  • Maurice Drouot [ Haute-Saone ], député
  • Alfred Duault [ Cotes-du-Nord ], industriel
  • Albert Dubosc [ Seine-Inférieure ], député
  • Escallier [ Basses-Alpes ], président de la fédération des familles nombreuses des Basses-Alpes
  • Joseph Esquirol [ Haute-Garonne ], président de la commission départementale de Haute-Garonne
  • Claude-Joseph Gignoux, président de la Confédération générale de la production française en 1936
  • Louis Guillon, fondateur du Parti républicain agraire et social.
  • Edmond Hannotin [ Ardennes ], sénateur
  • Georges Hersent [ Seine ], industriel
  • Alfred Heurteaux [ Seine ], lieutenant-colonel, inspecteur de l'aviation de chasse, membre du Comité directeur de la Légion française des combattants
  • Marcel Hovaere, industriel
  • Jean Jacquy [ Marne ], sénateur
  • Privat Janot [ Jura ], membre de la Chambre d'agriculture du Jura
  • Labeyrie [ Seine ], maire de Pantin ( automne 1941 )
  • Gaston Lacoin [ Seine ], président de la Plus Grande Famille
  • Georges Laederich [ Vosges ], industriel du textile
  • Lucien Lamoureux [ Allier ], député, ancien ministre
  • François de La Rocque [ Seine ], lieutenant-colonel, chef du Parti social français
  • Lucien Lassalle [ Seine ], président de la Chambre de commerce de Paris ( automne 1941 )
  • René Le Bigot [ Cotes-du-Nord ], commerçant
  • Jean Le Cour-Grandmaison [ Loire-Inférieure ], député, président de la Fédération nationale catholique
  • Lefort-Lavauzelle [ Haute-Vienne ], éditeur, président de la Chambre de commerce de Limoges
  • Le Gouvello [ Loire-Inférieure ], président de l'Union des syndicats agricoles de Loire-Inférieure
  • René Leriche [ Seine ], professeur de médecine, président dun Conseil de l'ordre des médecins
  • Louis L'Hévéder, député socialiste du Morbihan
  • Louis Linyer [ Loire-Inférieure ], sénateur
  • Liochon, du syndicat du livre
  • Louis Lumière, membre de l'Académie des sciences, industriel
  • Paul Maulion, sénateur radical du Morbihan
  • Joseph Merceron-Vicat, industriel cimentier français (groupe Vicat )[15]
  • Georges Ripert, juriste
  • Louis Salleron [ Seine ], délégué de l'Union nationale des syndicats agricoles
  • Ferdinand Sarraz-Bournet [ Pas-de-Calais ], armateur
  • Paul Saurin [ Oran ], député
  • Savoie, du syndicat de l'alimentation
  • Robert Sérot [ Moselle ], député
  • Louis Sorel, prêtre catholique, abattu par la Résistance en décembre 1943[16]
  • Emile Taudière [ Deux-Sèvres ], député
  • Emmanuel Temple [ Aveyron ], député
  • Pierre Thiriez [ Nord ], industriel du textile, président de la Chambre de commerce du Nord
  • Isidore Thivrier [ Allier ], député
  • Touchon [ Isère ], général
  • Aimé Tranchand [ Vienne ], député

Bibliographie

  • Michèle Cointet-Labrousse:
    • Le Conseil national de Vichy : Vie politique et réforme de l'État en régime autoritaire, 1940-1944, Éditions Libris, 1989.
    • Vichy et le fascisme, les hommes, les structures et les pouvoirs, Éditions Complexe, 1991, 288 pages, p. 53 à 65 (ISBN 287027212X).
  • « Un conseiller national de Vichy : l’abbé Louis Sorel (1880-1943) », Annales du Midi, revue de la France méridionale, tome LXXVIII, n°201, juillet - septembre 1989, p. 261 à 273.
  • Henry Coston, "Partis, journaux et hommes politiques d'hier et d'aujourdhui", Lectures françaises, décembre 1960 ( liste des membres du conseil national pp. 166-171 )

Références

  1. Selon Joseph Barthélemy, Ministre de la justice: Vichy 1941-1943 : mémoires, Pygmalion/G. Watelet, 1989, 643 pages, p. 109 (ISBN 2857042841); Michèle Cointet-Labrousse, Vichy et le fascisme, p. 60; Le gouvernement de Vichy, 1940-42: institutions et politiques, Fondation nationale des sciences politiques, A. Colin, 1970, 372 pages, p. 320; Gilles-Jean Portejoie, La réaction absolue ou le régime de Vichy, G. Portejoie, 1980, 166 pages, p. 31. En revanche, la date du 24 janvier 1941 est retenue par Robert Aron, Georgette Elgey, Histoire de Vichy, 1940-1944: 1940-1944, Les Productions de Paris, 1960, 550 pages, p. 257; Serge Berstein, Pierre Milza, Histoire de la France au XXe siècle, tome 2: « 1930-1945 », Éditions Complexe, 2003, 400 pages, p. 317 (ISBN 2870279957)
  2. Annik Le Guen, Le Morbihan sous le Régime de Vichy, décembre 1993 (ISBN 2-909750-27-2)
  3. Michèle Cointet, op. cit., pp. 53-59.
  4. a , b , c  et d Robert Paxton, La France de Vichy, Éditions du Seuil, 1972 ; édition 1977, collection de poche p. 243-245
  5. Michèle Cointet, op. cit., pp. 60-61.
  6. Michèle Cointet-Labrousse, op. cit., pp. 61-62.
  7. Selon Annik Le Guen, Le Morbihan sous le Régime de Vichy , décembre 1993 (ISBN 2-909750-27-2), cette assemblée est « composée de 188 membres dont 81, soit près de la moitié, émanent des anciennes chambres d’avant-guerre ».
  8. Arnaud Berthonnet, docteur en histoire économique et sociale, Université de Paris-Sorbonne (Paris IV), « L’histoire d’une épuration : l’industrie du bâtiment et des travaux publics en région parisienne (1944-1949) » article paru sur le site du CAIRN : [1].
  9. Michèle Cointet, op. cit., pp. 64-65.
  10. Nicolas Kessler, Jean Louis Loubet del Bayle, Histoire politique de la Jeune Droite (1929-1942): une révolution conservatrice à la française, L'Harmattan, 2001; Véronique Auzépy-Chavagnac, Jean de Fabrègues et la jeune droite catholique: aux sources de la révolution nationale, Presses Universitaires Septentrion, 2002; Antonin Guyader, La revue « Idées », 1941-1944: des non-conformistes en révolution nationale, L'Harmattan, 2006; Guillaume Gros, Philippe Ariès: un traditionaliste non conformiste: de l'Action française à l'école des hautes études en sciences sociales: un traditionaliste non-conformiste (1914-1984), Presses Universitaires Septentrion, 2008.
  11. Michèle Cointet, op. cit., pp. 63-64.
  12. André Kaspi, La Deuxième Guerre mondiale: Chronologie commentée, Éditions Complexe, 1999, p. 171-172 (ISBN 2870275919).
  13. a , b  et c Michèle Cointet, op. cit., p. 65.
  14. G. Cognacq (1880-1951) est le petit-neveu d'Ernest Cognacq. Elu membre de l'Institut en 1938
  15. Pendant la Deuxième Guerre Mondiale, Joseph Merceron-Vicat collabora fortement avec la Milice et la Gestapo : sa cimenterie de Genevrey-de-Vif servit même de cache d'armes à la Gestapo pour lutter contre les résistants français du Vercors. A la Libération, en 1945, menacé d'être fusillé, Joseph Merceron-Vicat ne dut son salut qu'au paiement d'un colossal pot-de-vin aux autorités françaises auto-proclamées "légitimes". Joseph Merceron-Vicat fut finalement incarcéré jusqu'en 1953. Encore aujourd'hui, le groupe cimentier Vicat reste très connoté "gestapiste" ( de Gestapo). André Kaspi, La Deuxième Guerre mondiale: Chronologie commentée, Éditions Complexe, 1999, p. 195-198 (ISBN 2870275919).
  16. Musée de la Résistance et de la Déportation, Haute-Garonne

Voir aussi

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