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Bombardement de Guernica
Bombardement de Guernica
Guernica après le bombardement - Fonds des archives fédérales (Allemagne). Informations générales Date 26 avril 1937 Lieu Guernica, Biscaye, Espagne Issue Incendie et destruction de la ville Belligérants République espagnole Allemagne
Corpo Truppe Voluntarie
Camp nationalisteCommandants Wolfram von Richthofen Forces en présence Aucune défense aérienne 23 bombardiers Junkers Ju 52
1 bombardier Dornier Do 17
4 bombardiers Heinkel He 111
10 chasseurs-bombardiers Heinkel He 51
6 chasseurs-bombardiers Messerschmitt Bf 109
3 bombardiers Savoia-Marchetti SM.81
10 chasseurs-bombardiers Fiat CR.32Pertes entre 120 et 3 000 civils tués aucune Guerre d'Espagne Batailles Guerre d'Espagne Coup d'État · Alcázar de Tolède · Gijón · Oviedo · Guipúzcoa · Mérida · Badajoz · Majorque · Sierra Guadalupe · Irún · Monte Pelato · Talavera de la Reina · Cap Espartel · Madrid · Route de La Corogne · Málaga · Jarama · Campagne du nord · Guadalajara · Guernica · Bilbao · Brunete · Santander · Belchite · El Mazuco · Cap de Cherchell · Teruel · Cap de Palos · Aragon · Èbre · Catalogne ·
Le bombardement de Guernica, le lundi 26 avril 1937, fut un événement majeur de la guerre d'Espagne, qui contribua à internationaliser la médiatisation du conflit, par l'intermédiaire notamment du célèbre tableau de Pablo Picasso représentant la scène.
Sommaire
Les raisons du bombardement
Une ville symbolique
La ville de Guernica avait une valeur symbolique pour les Basques, dont l'autonomie juridique et fiscale était représentée par l'arbre de Guernica où les rois de Castille allaient prêter serment de respecter les fors basques.
D'après Pío Moa[1], l'arbre de Guernica que les nationalistes voulaient abattre aurait été protégé par les requetes navarrais.
La situation militaire
En raison de l'apparente faible valeur stratégique militaire que représentait la ville et de l'énorme disproportion entre les capacités de riposte des défenseurs et la violence de l'attaque, ce bombardement a souvent été considéré comme un des premiers raids de l'histoire de l'aviation militaire moderne sur une population civile sans défense, et dénoncé pour cela comme un acte terroriste.
Cependant, d'après certains historiens, Guernica aurait été un objectif militaire de première importance. Pío Moa affirme que trois bataillons (7.000 hommes) des forces républicaines y stationnaient le jour du bombardement[1].
Le bombardement
Le plan
Voir la section sur Les responsables du bombardement.
Le déroulement des opérations
Le lundi 26 avril 1937, jour de marché, quatre escadrilles de Junkers Ju 52 de la Légion Condor allemande ainsi que l'escadrille VB 88 de bombardement expérimental (composée de Heinkel He 111 et de Dornier Do 17), escortées par des bombardiers italiens (Savoia-Marchetti SM.79) et des avions de chasse allemands (Messerschmitt Bf 109), procèdent au bombardement de la ville afin de tester leurs nouvelles armes. L'attaque commence à 16h30, aux bombes explosives puis à la mitrailleuse et enfin aux bombes incendiaires. Après avoir lâché quelques 50 tonnes de bombes incendiaires, les derniers avions quittent le ciel de Guernica vers 19h45. Après le massacre, 20% de la ville était en flammes, et l'aide des pompiers s'avérant inefficace, le feu se propagea à 70% des habitations.
Les victimes : un bilan controversé
Le bilan officiel
Le nombre officiel de victimes, toujours maintenu depuis par le gouvernement basque, fait état de 1 654 morts et de plus de 800 blessés[2]. Il s'accorde avec le témoignage du journaliste britannique George Steer, correspondant à l'époque du Times, qui avait estimé qu'entre 800 à 3 000 des 5 000 habitants de Guernica périrent[3].
Les révisions du bilan officiel
Cependant, certains historiens, dont le controversé Pío Moa, affirment que le Times, proche de Churchill, a volontairement exagéré le nombre de victimes et nié toute implication de l'aviation italienne (alors que celle-ci était avérée), afin de contrer les thèses pacifistes du parti britannique de gauche, le Labour Party, et convaincre l'opinion internationale qu'il fallait déclarer la guerre contre l'Allemagne d'Adolf Hitler, en insistant sur la menace que ce pays représentait.
Le journaliste Vicente Talón dans son « Arde Guernica » (San Martín, 1970), est arrivé à la conclusion qu'il n'y aurait pas eu plus de 200 morts, estimation reprise par Ricardo de la Cierva, puis, en 1987, par le général franquiste Jesús Salas Larrazábal, dans son livre intitulé Guernica (éd. Rialp), Pío Moa et même la chaîne de télévision publique allemande ARD en avril 1998[4]. Les chiffres avancés par Vicente Talón ne prennent pas en compte les morts de l'hôpital de Bilbao (592 personnes), mais c'est surtout, d'après Pío Moa, parce qu'il est difficile de distinguer les civils morts dans le bombardement des autres, parmi lesquels se trouvaient de nombreux combattants de la guerre d'Espagne.
Il a été prétendu que les photos des ruines de Guernica auraient pu être des photos de Madrid.
Après consultation des archives des deux camps de l'époque, pour expliquer sa révision du nombre de victimes liées au bombardement de Guernica, Pío Moa en est venu aux conclusions suivantes[1] :
- Il n'aurait pas pu y avoir de mitraillage aérien dans le centre-ville en raison de l'étroitesse des rues.
- Il n'y aurait eu que trois vagues de bombardement de quelques minutes chacune, échelonnées entre 16 h 30 et 18 h 30.
- La ville n'aurait été bombardée que par des Junkers Ju 52, bombardiers légers.
- Le marché aurait été annulé à midi sur ordre de la municipalité.
- Les pompiers de Bilbao ne seraient intervenus que le lendemain vers 9 h 30, d'où l'extension de l'incendie. Ils auraient fait preuve, ainsi que la troupe républicaine, d'une passivité et d'une incompétence totale, qui expliquerait la destruction de Guernica à 71 %.
- Le chiffre des 592 morts à Bilbao serait une légende colportée par Euzko Deya en mai. Les chiffres retrouvés dans les archives seraient de 2 morts sur 30 blessés apportés.
- L'essentiel des victimes, comptabilisées au refuge Santa Maria, à l'asile Calzada et au dépôt de la route de Luno, n'atteindrait que le chiffre de 120 morts dont 50 non identifiés, selon les registres mortuaires de la commune.
Les réactions
Ce bombardement a marqué les esprits non seulement à cause de l'ampleur du massacre mais aussi et surtout à cause de la valeur terroriste qui lui a été attribuée, du fait de l'apparente faible valeur stratégique militaire que représentait la ville et de l'énorme disproportion entre les capacités de riposte des défenseurs et la violence de l'attaque. S'il a longtemps été considéré comme le premier raid de l'histoire de l'aviation militaire moderne sur une population civile sans défense, alors que la Légion Condor avait en fait déjà commencé en février 1937 à bombarder des civils[5], c'est aussi parce que la valeur symbolique de la ville renforça le sentiment qu'il s'agissait d'un acte terroriste exemplaire de la répression des anti-franquistes.
Les responsables du bombardement
La négation de Franco
Franco, sous la pression internationale faisant suite aux révélations du Times, affirme que la Luftwaffe n'aurait pu voler le 26 avril pour des raisons climatiques, et que la destruction de Guernica est due aux Basques républicains qui auraient incendié et dynamité la ville dans leur fuite. Ce mensonge du futur Caudillo fut plus tard reconnu unanimement.
En 2004, sur demande expresse d'un député basque, le gouvernement espagnol a même reconnu officiellement la responsabilité du gouvernement de l'époque[6].
La thèse accidentelle
Adolf Galland, pilote de la Légion Condor arrivé en Espagne le 8 mai 1937, a admis en 1953 que la ville avait été bombardée par les avions allemands, mais « par erreur ». Selon Galland, la Légion Condor avait été chargée de détruire le pont Rentería, utilisé par les républicains, mais comme la visibilité était mauvaise et les équipages sans expérience, le pont était resté intact, et c'est la ville proche qui avait été gravement affectée.
Cependant, comme l'a fait remarquer l’historien Southworth, « les bombes incendiaires n'ont pas été chargées par erreur » dans les avions, et l'objectif réel du bombardement était par conséquent, de toute évidence, la population de Guernica, et non le pont.
La thèse de la responsabilité nazie
Une interprétation différente et plus tardive, émanant de Carlos Rojas et surtout de Ricardo de la Cierva, ne nie pas le bombardement, mais en fait porter l'entière responsabilité au régime nazi :
- À en croire le journal personnel du général allemand Wolfram von Richthofen, chef de la Légion Condor, le bombardement de Guernica a été décidé par le seul général allemand, et sans l'aval de Franco. Le général Emilio Mola avait d'ailleurs émis des consignes strictes à la Luftwaffe, interdisant les bombardements, a fortiori sur les civils. Certains articles de presse de l'époque publiés à Bilbao et certains témoignages semblent accréditer cette thèse.
- Même si cela ne prouve pas que les dirigeants franquistes n'étaient pas impliqués dans l'organisation de ce massacre, l'intérêt que portaient les Nazis à ce type d'action a été mis en exergue par l'historien de l'Espagne Bartolomé Bennassar : il cite dans une synthèse récente sur la Guerre Civile que lors des « conférences » que donna Göring, aux Américains qui l'avaient capturé à la veille de l'effondrement du régime nazi en 1945, le maître de la Luftwaffe affirmait que l'épisode de Guernica constituait pour les nouvelles techniques de bombardement des Heinkel He 111 qui y participèrent, le seul moyen de les tester en condition réelles et d'éprouver leur capacité incendiaire. D'un point de vue stratégique, la Luftwaffe expérimentait donc à Guernica de nouveaux types de bombardement terrorisant les populations, le tapis de bombes et le bombardement en piqué, utilisé pour le Blitz sur Londres.
Bibliographie
- Gordon Thomas et Max Morgan-Witts (trad. Marianne Véron), Les dernières heures de Guernica, Nouveau Monde, 2007, 344 p. (ISBN 9782847362251).
Édition originale : (en) The day Guernica died, Hodder and Stoughton, Londres, 1975.
- Herbert Southworth, La destruction de Guernica : journalisme, diplomatie, propagande et histoire, Ruedo Ibérico, Paris, 1975, 535 p.
- (de) Klaus Autbert Maier, Guernica, 26.4.1937 : Die deutsche Intervention in Spanien und der Fall Guernica, Freiburg, Rombach, 1975, 166 p. (ISBN 9783793001768).
Ouvrage considéré par Raymond L. Proctor comme la meilleure source pour les aspects militaires du bombardement (Whealey 2005, p. 207).
- (en) John F. Coverdale, Italian Intervention in the Spanish Civil War, Princeton University Press, 1975, 455 p. (ISBN 9780691052250)
- (es) Gérard Brey, « La destrucción de Guernica », dans Tiempo de Historia, no 29, avril 1977 [texte intégral (page consultée le 25 mars 2009)]
- (es) Vicente Talón, Arde Guernica, Servicio Comercial del Libro, 1973, 398 p. (ISBN 8431201738)
- (en) Raymond L. Proctor, Hitler's Luftwaffe in the Spanish Civil War, Greenwood Press, 1983, 289 p. (ISBN 0313222460)
- (en) Institut allemand de recherche en histoire militaire (dir.), Germany and the Second World War, vol. 1 (Germany's Initial Conquests in Europe), Oxford University Press, 1990 (ISBN 9780198228851)
- (es) Pío Moa, Los mitos de la Guerra Civil, La Esfera de los Libros, Madrid, 2003 (ISBN 9788497340939)
- (en) Whealey, Hitler And Spain: The Nazi Role in the Spanish Civil War, 1936-1939, University Press of Kentucky, 2005, 280 p. (ISBN 9780813191393)
Notes et références
- ↑ a , b et c La Nouvelle Revue d'Histoire no 25 (juillet-août 2006)
- ↑ La destruction de Guernica, Gérard Brey
- ↑ Voir aussi le premier article de George Steer (les chiffres alors évalués à « des centaines »)
- ↑ Bombardeo de Gernika. Críticas al «revisionismo» en el 61º aniversario.
- ↑ En février 1937, la Légion Condor, appuyée par la Marine insurgée nationaliste a mitraillé et bombardé des colonnes de réfugiés civils pendant une dizaine de jours sur la route entre Málaga et Almería. Les historiens actuels avancent les chiffres de 100 000 à 150 000 réfugiés civils fuyant Málaga sur le point d'être prise par les troupes italiennes alliées aux nationalistes. Ces faits n'ont été révélés que tardivement à travers des publications historiques, des expositions de photos de l'époque et des vidéos basées sur les archives de l'Armée italienne (cf. Neila Majada & Bueno Pérez : Carretera Málaga-Almería -febrero de 1937-, 2006)
- ↑ Rapport de 2004 des Cortes Generales
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