- Sahara français
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Le Sahara français est la partie du Sahara qui a été sous souveraineté de la France à la suite de la victoire du détachement du corps expéditionnaire français commandé par le lieutenant Georges Guillo Lohan sur la confédération touareg Kel Ahaggar en 1902. Les Territoires du Sud algérien créés en 1902 et placés sous administration militaire deviennent les départements français du Sahara en 1957 jusqu'à 1962; année de l'indépendance de l'Algérie et du Sahara.
Explorations & exploitations du Sahara (1822-1971)
Article connexe : Territoires du Sud.L'exploration du Sahara par les Européens commence au XIXe siècle, la traversée nord-sud est ainsi réalisée en 1822 par les deux explorateurs anglais Hugh Clapperton et Dixon Denham. L'explorateur français René Caillié les imite en 1828[1].
Dès l'année 1879 la région du Sahara, territoire désertique hostile indépendant de la régence d'Alger et placé sous l'autorité de tribus nomades, constitue un centre d'intérêt majeur pour les autorités parisiennes. Les premières missions d'exploration après la conquête de l'Algérie ont lieu de 1857 à 1861 (Henri Duveyrier), en 1880 et 1881 (Paul Flatters), suivis de deux autres en mai et décembre 1902; date à laquelle le lieutenant Georges Guillo Lohan de la Compagnie des Oasis sahariennes parvient à faire reconnaître l'autorité du gouverneur des Territoires du Sud nouvellement créés sur la population indigène[2].
Le lobby de l'hydrocarbure en Algérie (lobbies pétrolier & gazier) naît au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et est à l'origine de la renégociation des Accords d'Évian, connue sous le nom d'Accords d'Alger de 1965. Lors de la tractation des Accords d'Évian avec le Gouvernement provisoire de la République algérienne, le président Charles de Gaulle a refusé de reconnaître la souveraineté de la future Algérie sur le Sahara, essayant à la place d'en faire une région autonome, sans succès[3]. L'échec de la treizième réunion, établie dans le cadre de la première conférence d'Évian débutant le 20 mai 1961, entre Krim Belkacem, principal responsable du G.P.R.A. et Louis Joxe, Ministre des Affaires algériennes, est directement lié à la question du statut du Sahara[3]. Lors de la conférence de presse consécutive, Belkacem déclare alors:
- « nous nous sommes trouvés en face d'un gouvernement français qui veut bien décoloniser mais à moitié; c'est-à-dire maintenir l'Algérie sous une domination coloniale à peine déguisée »[3].
Le président de Gaulle avait émis des recommandations à ses délégués[4]. Déjà durant la IVe République un Président du Conseil avait publiquement déclaré:
- « La France est et demeure une Grande Puissance. Elle mobilisera ses forces pour que se réalise le miracle saharien. De grandes richesses, en charbon, en fer, en pétrole, en gaz naturel, des Territoires du Sud, seront mises en valeur. La Métropole apportera sa technique et ses investissements; l'Algérie apportera sa main d'œuvre de plus en plus qualifiée et demain ses cadres. La mise en valeur du désert c'est la grande tâche de notre génération »[5].
De fait, l'Histoire lui a donné raison en 1956 avec la découverte par la compagnie française C.F.P.A. d'importants gisements de pétrole et gaz dans le Sahara nommés respectivement Hassi Messaoud et Hassi R'Mel. Plus tard un Ministre de la Ve République ajoute « la France ne pourrait poursuivre son extension sans l'Afrique et les richesses du sous-sol africain ne pourraient être exploitées sans la France »[3].
Pourtant les affaires pétrolières franco-algériennes ont survécu à l'Algérie française jusqu'en 1971, année de la nationalisation des installations françaises du Sahara par Houari Boumédiène, président de la nouvelle République algérienne[6].
Étude du chemin de fer transsaharien (1879-1881)
Article détaillé : Paul Flatters.En 1879, les autorités françaises décident de créer une nouvelle route commerciale par l'établissement d'une ligne de voie ferrée (chemin de fer transsaharien) entre l'Algérie française et le Soudan français, une commission d'étude est nommée par Charles de Freycinet, ministre des Travaux publics[7]. Le lieutenant-colonel Paul Flatters mène une première mission d'exploration dans le Sahara en 1880, suivie d'une seconde en 1881 au cours de laquelle il tombe dans un traquenard, son guide indigène le trahit et les guerriers touaregs lui tendent une embuscade le 16 février 1881; il périt avec son équipe dans le massacre qui s'ensuit[8].
Campagne française du Sahara (1900-1903)
La traversée du Sahara en auto-chenilles (1922-1923)
Articles connexes : Georges-Marie Haardt et Louis Audouin-Dubreuil.Dans les années 1920 les deux industriels français Renault et Citroën rivalisent pour la conquête automobile du Sahara et ainsi s'attirer les faveurs des commandes de l'armée française avec l'élaboration d'un nouveau matériel de transport adapté aux conditions extrêmes du désert[9]. L'industrie cinématographique relie les prouesses technologiques nationales avec « le grand film documentaire » intitulé Raid Citroën : La traversée du Sahara en auto-chenilles diffusé dans les cinémas Gaumont et narrant la Mission Haardt-Audouin Dubreuil[9].
L'aboutissement ultime de cette mission transsaharienne en est sa version sportive contemporaine le rallye-raid, et plus particulièrement le rallye Paris-Dakar créé en 1978 à l'initiative de Thierry Sabine, en remplacement de sa Croisière verte, avec le soutien du pétrolier Total et dont le logo est un touareg.
Compagnie Générale Transsaharienne Citroën (1924-1925)
Article détaillé : Compagnie Générale Transsaharienne Citroën.En 1924, l'industriel automobile français, André Citroën, se lance dans une opération de promotion internationale jumelée destinée à promouvoir à la fois sa nouvelle automobile, l'autochenille dont l'inventeur Adolphe Kégresse a cédé les droits d'exploitation, et l'empire colonial français. À cette fin il organise un projet de « services réguliers par automobiles et par avions » devant relier la Méditerranée au golfe de Guinée et passant par la création de la Compagnie générale transafricaine (CEGETAF), puis de la Compagnie Générale Transsaharienne Citroën (CITRACIT), toutes deux à des fins de transport et de tourisme de luxe à travers le Sahara.
Le départ de cette expédition devant relier le sud de l'Algérie française au nord du Soudan français (A.O.F.) est fixé au 6 janvier 1925 mais est finalement annulé, ce qui constitue un échec financier pour l'entreprise Citroën perdant à hauteur de 15 millions de francs[10] dans l'affaire. Si André Citroën met un terme définitif à sa ligne régulière transsaharienne il en adapte le concept pour créer les fameuses croisières Citroën, de 1924 à 1934, nommées respectivement Croisière noire, Croisière jaune puis Croisière blanche.
Société Nationale de Recherche et d'Exploitation de Pétrole en Algérie (1946-1965)
Article principal : SN REPAL.La Société nationale de recherche et d'exploitation de pétrole en Algérie ou SN REPAL (qui devient par la suite ELF Aquitaine) est créée en 1946 par la IVe République française dans le but de disposer d'un approvisionnement national en pétrole.
Compagnie Française des Pétroles "Algérie" (1949-1971)
Article principal : Compagnie française des pétroles Algérie.En 1949, la Compagnie française des pétroles ou C.F.P. (renommée Total en 1985) débute son activité dans le Sahara algérien[6]. Le 21 juin 1951, celle-ci signe un accord préliminaire avec la SN REPAL en prévision du partage des gisements répartis sur un périmètre de 250 000 km2[6]. La Compagnie française des pétroles "Algérie" (C.F.PA.), filiale de la C.F.P., est créée en 1953[6]. Avec 35% des parts de son capital, l'État français est l'actionnaire majoritaire de la C.F.P.A.[6] dont les travaux mettent à jour Hassi Messaoud ("le puits du bonheur") en 1956. De cette date à 1970, ce seul gisement produit 128 millions de tonnes d'or noir[3].
Complexe militaro-énergétique du Hoggar (1957-1978)
Articles connexes : Algérie française#Installations militaires du Sahara (1947-1978) et Algérie française#Contrat à bail (1962-1977).En réponse à la crise de Suez de 1956 qui a mis à jour, à la fois, les limites de la coopération entre Alliés au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les prétentions internationales des nouvelles superpuissances États-Unis et Union Soviétique, ainsi que le passage au second rang des obsolètes Grandes Puissances coloniales britannique et française, le gouvernement français décide la création d'un champ d'expérimentation au Sahara en 1957[11]. La France consacre ainsi à sa défense nationale l'exploitation d'un terrain de 108 000 km2 afin d'y mener des expériences[11].
De cette entreprise d'élaboration d'une force de dissuasion atomique au sein des départements français du Sahara (Territoires du Sud) découle la politique énergétique nucléaire de la France. L'exploitation des quatre installations militaires françaises principales, Colomb-Béchar, Hammaguir, Reggane et In Ekker s'achève en 1967. La dernière, à Namous, bénéficie d'une couverture civile la Sodéteg, et poursuit ses activités jusqu'en 1978.
Diplomatie française (1961)
« Le pétrole, c'est la France et uniquement la France, le Sahara algérien est une fiction juridique et nationaliste sans fondement historique. On peut accepter beaucoup de choses, on ne peut pas abandonner le Sahara purement et simplement au F.L.N. » Charles de Gaulle, président de la Ve République française, instructions à la délégation française en mai 1961[12],[13],[4]
Cette instruction du président Charles de Gaulle à sa délégation participante à la première conférence d'Évian en mai 1961 peut se comprendre à la lumière de l'analyse contemporaine de la diplomatie française par la Commission de publication des documents diplomatiques français (Documents diplomatiques français, 1961)[14]:
« L'organisation des Territoires du Sud, comme leur conquête, fut graduelle ainsi que l'établiront l'analyse des textes qui les concernent et l'examen de leur évolution. Les richesses du Sahara, dès 1936 mais surtout depuis 1950 et 1951, ont provoqué les convoitises du colonialisme, et d'abord du colonialisme français : de là, la tentative de distraire de l'Algérie sa partie saharienne au moyen de quelques subterfuges juridiques inopérants et à l'aide de slogans tel que celui de « Dunkerque à Tamanrasset ». »
Contrat à bail (1962-1978)
Cinq installations militaires françaises restent actives au Sahara après l'indépendance de l'Algérie. Quatre d'entre elles sont évacuées en 1967, la dernière B2-Namous n'est abandonnée par l'armée française qu'en 1978.
Références
- Portail Sahara, Généralités Sahara (Histoire)
- Dossier 2009: Campagne au Sahara (1900-1903) - Ministère de la Défense - ECPAD
- Yves Courrière & Philippe Monnier, Reganne Films, 1972 La Guerre d'Algérie,
- La Guerre d'Algérie : Des complots du 13 mai à l'indépendance Par Henri Alleg, page 352, Temps actuels, 1981
- SAHARA: Terre de demain, page 248, Par PIERRE CORNET, Nouvelles Editions Latines, 1956
- Les Accords d'Évian: en conjoncture et en longue durée, Par René Gallissot, Chapitre 6 : Les intérêts pétroliers en Algérie : la Compagnie Française des Pétroles (1953-1965) par Marie-Bénédicte DESJUZEUR, page 59
- Mission Flatters
- Campagne de reconnaissance dans le Sahara (1900-1903), Ministère de la Défense - ECPAD
- L'avancée automobile au Sahara
- Le tourisme Citroën au Sahara (1924-1925), Alison Murray, 2000, Vingtième Siècle, Revue dHistoire, Volume 68, Numéro 68, pages 95-108
- Délégation à l'Information et à la Communication de la Défense: Dossier de présentation des essais nucléaires et leur suivi au Sahara, Ministère Français de la Défense, Janvier 2007
- L'honneur de la guerre, Par Déodat Puy-Montbrun, page 255, Albin Michel, 2002
- La guerre d'Algérie Tome IV : Les feux du désespoir, Par Yves Courrière, page 383, Fayard, 1971
- Documents diplomatiques français 1961, Volume 19, Partie 1, Par Commission de publication des documents diplomatiques français, page 831, Imprimerie Nationale, 1997
Voir aussi
Articles connexes
- Départements français du Sahara
- Ministère du Sahara
- Algérie française
- Second espace colonial français
- Colonisation européenne du Maghreb
Webographie
- Dossier thématique ECPAD sur la campagne au Sahara (album photos et notice documentaire)
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