- Rapsodie nègre
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Rapsodie nègre Le Nègre au turban du peintre Eugène Delacroix. L'œuvre de Poulenc suit la mode de l’Art nègre qui fait fureur à Paris au début du XXe siècle.Nb. de mouvements 5 Musique Francis Poulenc Effectif 2 violons, alto, violoncelle, flûte, clarinette en si ♭, piano. Langue originale Français Durée approximative 11 minutes Dates de composition 1917 Dédicataire Erik Satie Création 11 décembre 1917
Paris (théâtre du Vieux-Colombier), FranceLa Rapsodie nègre[n 1] de Francis Poulenc est une œuvre vocale pour baryton et petit ensemble instrumental composée au printemps 1917.
Éditée en 1919 à Londres par Chester Music, elle s'appuie sur le poème d'un prétendu écrivain du Liberia, Makoko Kangourou, vraie-fausse supercherie littéraire. Cette première œuvre conservée du compositeur témoigne d'une instrumentation déjà personnelle et reçoit les critiques les plus chaleureuses à sa création en décembre 1917.
Sommaire
Genèse
Alors que son père exige qu'il suive des études classique et passe son baccalauréat excluant une orientation vers le Conservatoire, la mère de Francis Poulenc prend en charge l'éducation musicale du jeune homme et l'oriente tout d'abord vers Mlle Boutet de Monvel pour qu'il apprenne le piano[1]puis à l'âge de quinze ans, vers le célèbre pianiste Ricardo Viñes[1]. Mais le jeune homme ne se contente pas de jouer et se met à la composition. Viñes le recommande en 1921 à Charles Koechlin pour qu'il approfondisse ce domaine.
Ses deux premières œuvres sont aujourd'hui perdues mais la première, Processionnal pour la crémation d'un mandarin pour piano[2] évoque son goût précoce pour l'exotisme et suit la mode parisienne qui s'enthousiasme pour l’Art nègre[3]. En 1917, il trouve chez un bouquiniste un recueil de poèmes d'un soi-disant auteur nègre du Liberia, Les Poésies de Makoko Kangourou[2]. Cette supercherie littéraire lui donne le prétexte d'une mélodie. Il choisit celle écrite en pseudo-nègre, Honoloulou dont la première strophe est :
Honoloulou, poti lama !
Honoloulou, Honoloulou,
Kati moko, mosi bolou
Ratakou sira, polama !En septembre 1917, il présente l'œuvre à Paul Vidal du Conservatoire de Paris qui l'accueille avec colère. Poulenc, dans une lettre adressée à Ricardo Viñes rapporte la réaction de Vidal : « Il la lit attentivement, plisse le front, roule des yeux furibards en voyant la dédicace à Erik Satie, se lève et me hurle exactement ceci : « Votre œuvre est infecte, inapte, c'est une “couillonnerie” infâme. Vous vous foutez de moi, des quintes partout ; et cela est-ce cul cet Honoloulou ? Ah, je vois que vous marchez avec la bande de Strawinsky, Satie et cie, eh bien, bonsoir ! » et il m'a presque mis à la porte ; me voilà donc sur le carreau, ne sachant que faire, qui aller consulter [...][4]. »
Création
Malgré cet accueil pour le moins défavorable, l'œuvre est créée au théâtre du Vieux-Colombier à Paris le 11 décembre 1917 lors d'un concert « d'avant-garde » organisé par Jane Bathori[5]. Le baryton qui doit créer l'œuvre, Freiner, se désiste au dernier moment et Francis Poulenc le remplace « sans le moindre émoi » selon Henri Hell[5]. L'œuvre est reprise dès le 15 janvier 1917 lors d'un concert qui réunit certains des compositeurs qui formeront plus tard le « groupe des Six »[n 2],[6].
Réception
Selon l'expression de la violoniste Hélène Jourdan-Morhange, l'œuvre recèle des « naïvetés charmeuses »[5]. Le compositeur Maurice Ravel est présent à la création et se serait exclamé avec humour : « Ce qu'il y a de bien avec Poulenc, c'est qu'il invente son propre folklore »[3]. L'œuvre est accueillie triomphalement, et dès le lendemain, la nouvelle se propage qu'un nouveau talent musical vient d'éclore en la personne de Francis Poulenc[7]. Serge de Diaghilev se penche sur le jeune compositeur et songe à la création d'un ballet. Ce sera chose faite avec Les Biches, en 1924[7]. Igor Stravinsky félicite la composition et se charge de la faire éditer à Londres par Chester, avec les Mouvements perpétuels pour piano[7],[8], ce dont Poulenc lui sera reconnaissant jusqu'à la fin de sa vie[9].
Structure et analyse
L'œuvre est composée pour baryton, quatuor à cordes (deux violons, alto, violoncelle), flûte, clarinette en si ♭ et piano. Elle comprend cinq mouvements :
- Prélude – 4/4, « Modéré » (2'10)
- Rondo – 8/8, « Très vite » (1'20)
- Honoloulou (intermède vocal) – 2/4, « Lent et monotone » (2'20)
- Pastorale – 3/4, « Modéré » (2'20)
- Finale – 2/4, « Presto et pas plus » (3'10)
Les deux premiers et le quatrième mouvement ne sont qu'instrumentaux. Le troisième, l'intermède vocal, composé des trois strophes du poème Honoloulou, est écrit pour chant et piano. Le Finale réunit tous les participants.
Discographie sélective
- Le Bal masqué, Le Bestiaire, Le Gendarme incompris, Rapsodie nègre, etc., François Le Roux, Dominique Visse, Lambert Wilson, Orchestre national de France, Charles Dutoit – Decca, 1996
- Poulenc, Complete Chamber Music, vol. 4, Naxos
Bibliographie
- Henri Hell, Francis Poulenc, Paris, Fayard, 1978, 388 p. (ISBN 2-213-00670-9)
- Francis Poulenc, Journal de mes mélodies, Paris, Cicéro Éditeurs, Salabert, 1993, 159 p. (ISBN 2-908369-10-9)
- Renaud Machart, Poulenc, Paris, Seuil, 1995, 252 p. (ISBN 2-02-013695-3)
- Josiane Mas (dir.), Centenaire Georges Auric - Francis Poulenc, Centre d'études du XXe siècle - Université de Montpellier III, 2001, 338 p. (ISBN 2-84269-445-7)
- Association Francis Poulenc, Les Cahiers de Francis Poulenc, no 2, septembre 2008, éd. Michel de Maule, 2009, 149 p. (ISBN 978-2-87623-245-7).
Notes et références
- Notes
- Ou Rhapsodie selon l'orthographe de certains catalogues d'éditeurs, mais pas des partitions, ni des écrits de Poulenc.
- Francis Poulenc, Georges Auric, Darius Milhaud, Germaine Tailleferre, Louis Durey et Arthur Honegger
- Références
- Association Francis Poulenc, Les Cahiers de Francis Poulenc, no 2, septembre 2008, op. cit., pp. 38-39.
- Henri Hell, Francis Poulenc, op. cit., p. 33.
- Renaud Machart, Poulenc, op. cit., p. 18.
- Henri Hell, Francis Poulenc, op. cit., p. 62.
- Henri Hell, Francis Poulenc, op. cit., p. 34.
- Francis Poulenc, Journal de mes mélodies, op. cit., p. 80.
- Henri Hell, Francis Poulenc, op. cit., p. 35.
- Francis Poulenc, Correspondance 1910-1963, réunie et annotée par Myriam Chimènes, Fayard, Paris, 1994.
- « Il a été admirable pour moi. Songez que c'est Stravinsky qui m'a fait éditer à Londres chez Chester, mon premier éditeur, l'éditeur des Mouvements perpétuels, de la Sonate pour deux clarinettes, de ma Sonate pour quatre mains ; toutes ces petites œuvres de début, assez balbutiantes, ont été publiées grâce à la gentillesse de Stravinsky, qui a été vraiment pour moi un père » in Francis Poulenc, Moi et mes amis. Confidences recueillies par Stéphane Audel, La Palatine, Paris, 1963.
Catégories :- Œuvre de Francis Poulenc
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