- Groupe parfait
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En théorie des groupes (mathématiques), un groupe est dit parfait s'il est égal à son dérivé.
Sommaire
Exemples et contre-exemples
Dans ce qui suit, le dérivé d'un groupe G sera noté D(G).
- Si un groupe G est parfait, l'image de G par un homomorphisme est un groupe parfait. En particulier, tout groupe quotient d'un groupe parfait est parfait.
- En effet, si f est un homomorphisme d'un groupe G (quelconque) dans un autre groupe, on a toujours D(f(G)) = f(D(G)).
- Si un groupe parfait G est sous-groupe d'un groupe H, il est contenu dans le dérivé de H.
- En effet, si un groupe G (quelconque) est sous-groupe de H, D(G) est contenu dans D(H). Si, de plus, G est parfait, ceci revient à dire que G est contenu dans D(H).
- Tout groupe simple non commutatif est parfait.
- En effet, le groupe dérivé d'un groupe G est un sous-groupe normal de G, donc si G est simple, son dérivé D(G) doit être réduit à 1 ou égal à G. Puisque G est supposé non commutatif, D(G) n'est pas réduit à 1, donc D(G) = G.
- Un groupe résoluble non réduit à l'élément neutre n'est pas parfait.
- En effet, si G est un groupe parfait, la suite dérivée de G, c'est-à-dire la suite G, D(G), D(D(G)), ... plafonne à G, donc si, de plus, G n'est pas réduit à l'élément neutre, cette suite ne prend pas la valeur 1, donc G n'est pas résoluble.
- Aucun groupe G tel que n'est parfait.
- En effet, un tel groupe est résoluble[1], d'où la conclusion par le point précédent.
- Soient K un corps commutatif et n un nombre naturel. Sauf dans le cas où n est égal à 2 et à 2 ou à 3, le groupe spécial linéaire SL(n, K) est parfait[2].
- Un groupe parfait non réduit à l'élément neutre n'est pas forcément simple.
- En effet, on sait[3] que si K est un corps commutatif et n un nombre naturel, le centre SZ(n, K) de SL(n, K) est formé par les matrices scalaires de déterminant 1. Si n > 1, ce centre n'est pas SL(n, K) tout entier : considérer par exemple une matrice triangulaire distincte de la matrice identité mais dont tous les coefficients diagonaux sont égaux à 1; une telle matrice appartient à SL(n, K) mais non à SZ(n, K). Si, de plus, il existe un élément a de K distinct de 1 tel que (ce qui est le cas si n divise , alors la matrice scalaire de coefficients diagonaux égaux à a appartient au centre SZ(n, K) et est distincte de la matrice identité, donc le centre SZ(n, K) de SL(n, K) n'est pas réduit à l'élément neutre. Ainsi, dans le cas considéré, SZ(n, K) est un sous-groupe normal de SL(n, K) qui n'est ni réduit à l'élément neutre ni égal à SL(n, K) tout entier, donc SL(n, K) n'est pas simple. Pourtant, d'après le point précédent, SL(n, K) peut être parfait dans le cas considéré. Par exemple, (où désigne « le » corps à 5 éléments) est simple et non parfait.
- Soient K un corps commutatif et n un nombre naturel non nul. Le groupe linéaire GL(n, K) n'est parfait que dans le cas où et .
- En effet, (par exemple parce que l'application de G dans le groupe multiplicatif de K qui applique M sur son déterminant est un homomorphisme arrivant dans un groupe commutatif, de sorte que son noyau contient D(GL(n, K)). (On a vu, d'ailleurs, que, dans la plupart des cas, SL(n, K) est parfait, ce qui entraîne , d'où, dans la plupart des cas, .) Si , alors donc GL(n, K) n'est pas parfait. Si maintenant K est « le » corps à 2 éléments alors donc, d'après le point précédent, est parfait si et seulement si n est distinct de 2.
Lemme de Grün
Otto Grün (de) a énoncé et démontré[4] que si G est un groupe parfait, si Z(G) désigne le centre de G, alors le centre du groupe G/Z(G) est réduit à l'élément neutre.
- Première démonstration[5]
Soit G un groupe (que nous ne supposons pas encore parfait).
Pour tous éléments x, y de G, définissons le commutateur [x, y] de x et y comme étant l'élément de G.
D'après le théorème de correspondance, il existe un et un seul sous-groupe de G contenant Z(G) tel que le centre de G/Z(G) soit égal à . (Le sous-groupe est celui qui vient après Z(G) dans la suite centrale ascendante de G.) On vérifie facilement qu'un élément c de G appartient à si et seulement si, pour tout élément g de G, [g, c] appartient à Z(G).
Étant donné un élément c de , nous pouvons donc considérer l'application de G dans Z(G).
D'autre part, d'après une relation classique entre commutateurs, on a, pour tous éléments x, y, z de G,(où désigne le conjugué de ).
Faisons . D'après ce qui a été noté plus haut, [x, c] appartient à Z(G), donc , d'oùCeci montre que l'application de G dans Z(G) est un homomorphisme de G dans Z(G). Comme le groupe d'arrivée est commutatif, D(G) est contenu dans le noyau de , autrement dit, tout élément de D(G) commute avec c.
Nous avons donc prouvé que, pour tout groupe G, tout élément de commute avec tout élément de D(G). Si maintenant G est parfait, notre résultat revient à dire que tout élément de commute avec tout élément de G, c'est-à-dire que est réduit au centre de G. D'après notre définition de , ceci signifie que le centre de G/Z(G) est réduit à l'élément neutre.- Seconde démonstration[6]
Soit G un groupe quelconque.
Nous avons vu que si c est un élément de , alors, pour tout élément g de G, [g, c] appartient à Z(G). Il en résulte que est contenu dans le centre de G, d'oùet
D'après le lemme des trois sous-groupes, ceci entraîne
c'est-à-dire que tout élément de commute avec tout élément de D(G). On conclut comme dans la première démonstration.
Notes et références
Notes
- Rotman, exerc. 5.21, p. 107
- Rotman, démonstration du théorème 9.46, p. 280, ou encore Marc Hindry, Université Paris 7, Cours d’algèbre au magistère de Cachan, en ligne, pp. 65-66. Voir par exemple
- Rotman, théorème 8.9, p. 222
- le site de l'université de Göttingen. Otto Grün, « Beiträge zur Gruppentheorie. I », dans Journal für Reine und Angewandte Mathematik, vol. 174 (1935), pp. 1-14, théorème 4, p. 3, consultable sur
- On trouve cette démonstration dans J.S. Rose, A Course on Group Theory, 1978, réimpr. Dover, 1994, p. 61, et dans J. Delcourt, Théorie des groupes, Paris, Dunod, 2001, pp. 141 et p. 146.
- Rotman, exerc. 5.49, p. 118. On trouve cette démonstration dans
Références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Perfect group » (voir la liste des auteurs)
- (en) Joseph J. Rotman, An Introduction to the Theory of Groups [détail des éditions], 4e édition
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