Claude de Rebé

Claude de Rebé

Claude de Rebé, né à Amplepuis en 1587[1], mort à Narbonne le 17 mars 1659[2], est un prélat français qui fut archevêque de Narbonne. Suivant Jacques Michaud, il « est considéré comme l'une des grandes figures de l'épiscopat du XVIIe siècle, tant par son activité politique que par son zèle religieux »[3].

Blason de Claude de Rebé

Sommaire

Biographie

Claude de Rebé est le huitième fils de Claude, seigneur de Rebé, baron d'Amplepuis, et de Jeanne de Meysé[4],[5].


Carrière ecclésiastique

Il était chanoine, chantre et comte de Lyon, prévôt de Saint-Pierre de Mâcon[5]. Il devint coadjuteur de Louis de Vervins en 1622 et fut nommé au même moment archevêque d’Héraclée en Europe[1],[2]. Il succéda à Louis de Vervins sur le siège de Narbonne à sa mort le 8 ou 9 février 1628. Urbain VIII lui envoya le pallium le 28 septembre de la même année[5]. Il devenait par la même occasion président-né des États de Languedoc, mais 30 000 livres furent prélevés sur les revenus de l'archidiocèse et attribués au jeune archevêque de Reims Henri II de Guise[7], ce qui fit l'objet d'un procès entre les deux protagonistes au Grand Conseil[Note 4]. Il eut aussi, par économat, l'abbaye de Fontfroide de 1646 à 1650[8].

Un prélat de la Contre-Réforme

Claude de Rebé s'investit particulièrement dans son rôle pastoral, épousant la cause de la Contre-Réforme[3] : il resta dans Narbonne en 1629-1632, organisant les secours, alors que la région était ravagée par la peste[2]. Très actif, il créa une chaire de théologie dans le collège dirigé par les prêtres de la doctrine chrétienne, à qui il demanda aussi d'ouvrir un établissement à Limoux[5] ; il établit en 1646 dans cette même ville une confrérie de cinquante dames de la Charité, à qui il donna des statuts[9]. Il augmenta les revenus de l'hôpital de la Charité de Narbonne[5] ; en 1641 il introduisit dans sa cité les Visitandines et les chargea de l'éducation des jeunes filles[5],[10], puis les Ursulines en 1654[2]. Il réforma la liturgie narbonnaise et fit imprimer en 1658 un nouveau missel pour son diocèse, très proche du rite romain[2]. Comme son successeur, François Fouquet, il fut proche de saint Vincent de Paul[2]. Soucieux de diffuser la morale chrétienne parmi ses ouailles, il interdit en 1641 aux pèlerins de Notre-Dame de Marceille de passer la nuit dans l'église[9].

Administrateur et bâtisseur

Blason de Claude de Rebé, marbre, XVIIe siècle.
Escalier du palais des archevêques de Narbonne.

Claude de Rebé enrichit et décora la collégiale Saint-Sébastien de Narbonne. Il fit réparer le palais épiscopal : un dessus de porte de la salle des Gardes est orné d'un grand cartouche de gypserie à ses armes, et il fit exécuter un magnifique plafond à caissons sur le thème des neuf muses par les frères Antoine, Jean-Paul et Jean Rodière (1632)[11],[5]. En 1652 il fit démolir la tour mauresque[Note 5] dont les pierres furent utilisées pour bâtir le couvent des Carmélites[2].

Il fit mettre en ordre les archives de l'archevêché : on lui doit la copie du livre vert de Pierre de La Jugie[10], un des seuls et précieux documents à avoir échappé aux destructions révolutionnaires de décembre 1793.

Nicolas Jarry calligraphia en 1648 pour cet archevêque un Officium Beatæ Mariæ Virginis aujourd'hui à la bibliothèque de Besançon[12].

Rôle politique

Il s'opposa fermement au duc de Montmorency, gouverneur de Languedoc, qui entraînait les États de la province dans sa révolte (1632) ; il fut même enfermé le temps de faire voter la délibération que Montmorency demandait. Il évita néanmoins que Narbonne ne tombât entre les mains du duc[13]. Il en fut récompensé par le collier de commandeur de l'ordre du Saint-Esprit lors de la promotion du 14 mai 1633. Il reçut Louis XIII à Narbonne lors du siège de Perpignan (printemps 1642)[Note 6],[5],[14]. Ce fut à lui que l'on confia en 1652 le soin d'abattre le château de Termes, devenu une menace pour le pouvoir royal, ce qu'il fit faire l'année suivante aux frais du diocèse[15].

Malade, fatigué, Claude de Rebé abandonna dès la session de 1656 la présidence des États de Languedoc, qui fut alors assurée par le second ecclésiastique de la province, l'archevêque de Toulouse Pierre de Marca[16]. C'est à ce moment-là que François Fouquet lui fut adjoint comme coadjuteur, avec promesse de succession. Cela fut l'occasion d'une plus vaste transaction qui touchait les familles Rebé et Fouquet : François Fouquet résigna son évêché d'Agde et son abbaye de Saint-Sever, le premier en faveur de son frère Louis[17], la seconde pour François de Rebé[18]. Ce dernier reçut aussi l'abbaye de Sorèze, qui reviendra plus tard à Louis Fouquet[19].

Il mourut le 17 mars 1659 et fut enterré dans la chapelle de Bethléem de la cathédrale Saint-Just-et-Saint-Pasteur[5],[20],[2]. Son oraison funèbre fut prononcée par Esprit Fléchier[21],[Note 7].

Notons que les Rebé s'assimilèrent à la noblesse languedocienne : petit-neveu de l'archevêque, Claude de Rebé acheta en 1646 la baronnie de Couiza à la dernière héritière des Joyeuse, Henriette Catherine, duchesse de Guise. La seigneurie d'Arques, qu'il acquit en même temps, lui donnait droit de prendre place aux États de Languedoc.

Bibliographie

  • Anonyme, Catalogus bibliothecae selectissimae... Claudii de Rebé,... quae venalis reperitur, C. Audium Bourgeat, Lyon, 1668 Ouvrage numérisé sur Gallica.
  • Jean-Loup Abbé (s.d.), Histoire de Limoux, Toulouse, Privat, coll. « Histoire des villes », 2009 (ISBN 978-2-7089-8343-4) 
  • Rémy Cazals, Daniel Fabre (s.d.), Les Audois, Dictionnaire biographique, Carcassonne, Association des Amis des Archives de l'Aude, Fédération Audoise des Œuvres Laïques, Société d'études scientifiques de l'Aude, 1990 (ISBN 2-906442-07-0) 
  • Dom Claude Devic, dom Joseph Vaissète, Histoire générale de Languedoc, vol. IV, Toulouse, Privat, 1876 (réimp. 2003) (ISBN 2-84575-165-6) 
  • Dom Claude Devic, dom Joseph Vaissète, Histoire générale de Languedoc, vol. XI (1443-1642), Toulouse, Privat, 1889 (réimp. 2004) (ISBN 2-84575-172-9) 
  • Dom Claude Devic, dom Joseph Vaissète, Histoire générale de Languedoc, vol. XIII (1643-1789), Toulouse, Privat, 1877 (réimp. 2005) (ISBN 2-84575-174-5) 
  • Paul Laurent, Livre vert de l'archevêché de Narbonne, A. Picard, Paris, 1886 Ouvrage numérisé sur Gallica.
  • André Mècle, Narbonne, palais des archevêques et cathédrale, Moisenay, Gaud, coll. « Monuments et Histoires », 1999 (ISBN 2-84080-067-5) .
  • Jacques Michaud et André Cabanis, Histoire de Narbonne, Toulouse, Privat, coll. « Pays et villes de France », 1981 (ISBN 2-7089-8339-3) 


Iconographie

  • Anonyme, Portrait de Claude de Rebé, archevêque de Narbonne, peinture (huile sur toile), XVIIe siècle. Conservée dans l'ancienne cathédrale Saint-Just-et-Saint-Pasteur de Narbonne. Classée monument historique.
  • Anonyme, Portrait de Claude de Rebé, archevêque de Narbonne, peinture (huile sur toile rapportée sur bois), XVIIe siècle s. Conservée au Musée d'art et d'histoire de la ville de Narbonne.
  • Il serait l'évêque représenté sur le tableau du retable du maître-autel de l'église Saint-Saturnin de Palairac[22].


Notes et références

Notes

  1. Il acheta la seigneurie d'Arques et de Couiza. Une lettre de Sublet des Noyers à Plessis-Besançon datée du 12 janvier 1641 signale parmi les régiments que Louis XIII faisait passer en Catalogne, un régiment de Rebé ; Du Plessis-Besançon, Mémoires, Société de l'histoire de France, Renouard, Paris, 1892 [1].
  2. Claude-Hyacinthe de Rebé était marquis d'Arques et de Couiza, seigneur de Mourenard, Chavigny, Lombard, colonel du régiment de Piémont, lieutenant-général du roi en Roussillon. Il mourut le 4 août 1693 des blessures qu'il avait reçu à la bataille de Neerwinden. Paul Courrent, « Excursion du 18 avril 1927 à Fa, Espéraza et Couiza (Aude), II. Histoire et archéologie », dans Bulletin de la Société d'études scientifiques de l'Aude, no XXXII, 1928 [texte intégral] , pp.52-53, 57 ; J. François d'Hozier, L'impôt du sang, ou la noblesse de France sur les champs de bataille, publié par Louis Paris, tome 3, partie 2, Au Cabinet historique, Paris, 1874-1881, p. 20.
  3. Il fut le parrain en 1659 de Catherine, fille des comédiens Du Parc et Mlle Du Parc, de la troupe de Molière. Henry Lyonnet, Dictionnaire des comédiens français, ceux d'hier, tome I, Bibliothèque de la Revue universelle internationale illustrée, Genève, 1902-1908.
  4. À ce sujet deux mémoires anonymes ont été publiés : Factum du procès pendant au grand Conseil du Roy entre messire Henry de Lorraine. Archevesque Duc de Rheims..., défendeur en requeste afin d'opposition, et en lettres en forme de requeste civile, contre Messire Claude de Rebé, archevesque de Narbonne, demandeur, vers 1622, et Faict du procez pendant au grand Conseil, pour... Claude de Rebé, archevesque... de Narbonne, deffendeur & demandeur, contre... Henry de Lorraine, archevesque... de Reims demandeur & deffendeur, pour raison de la pension de trente mil livres, que le dit... archevesque de Reims prétend par chacun an, sur les fruicts & revenus de l'archevêché de Narbonne... ; [Contre-promesse de Monsieur & Madame de Guise; & acte de recognoissance d'icelle, mentionné cy-dessus...], vers 1631.
  5. Selon l’Histoire générale de Languedoc (Tome I, p. 259) ce serait Louis XIII lors de son séjour qui aurait demandé que l'on abatte la tour et plusieurs maisons voisines pour jouir d'une vue plus agréable.
  6. C'est alors qu'eut lieu l'arrestation de Cinq-Mars, que le roi vit pour la dernière fois dans sa chambre du palais.
  7. Notons qu'Esprit Fléchier fut professeur de rhétorique à Narbonne.

Références

  1. a et b (en) Claude de Rebé sur le site Catholic-Hierarchy.
  2. a, b, c, d, e, f, g et h R. Cazals, D. Fabre, ..., Les Audois ..., 1990, p. 277.
  3. a et b J. Michaud, Histoire de Narbonne, 1981, p. 209.
  4. Louis Moréri, Grand dictionnaire historique, nouvelle édition par Étienne François Drouet, tome 9, Les libraires associés, 1759, p. 90.
  5. a, b, c, d, e, f, g, h et i C. Devic, J. Vaissète, Histoire générale de Languedoc, IV, 1876, p. 259.
  6. Adrien Martinet, Armorial du chapitre noble ... de Saint-Pierre de Mâcon de 1559 à 1689, seconde partie, in Mémoires de la Société éduenne, tome 23, Autun, 1895 ; p. 93-98 et 129-131.
  7. (en) Jonathan Sprangler, The Society of Princes. The Lorraine-Guise and the Conservation of Power and Wealth in Seventeenth-Century France, Franham, Ashgate Publishing, 1971 (ISBN 978-0-7546-5860-3), p. 200  [Texte en ligne sous Google Books (page consultée le 4 octobre 2009)]
  8. C. Devic, J. Vaissète, Histoire générale de Languedoc, I, 1876, p. 620.
  9. a et b Jean-Louis Abbé, Histoire de Limoux, 2009, p. 120-123.
  10. a et b Paul Laurent, Livre vert ..., 1886, p. xii.
  11. André Mècle, Narbonne, palais des archevêques ..., 1999, p. 55.
  12. Berthelot, Hartwig Derenbourg, F.-Camille Dreyfus, A. Giry, [et al.] La grande encyclopédie : inventaire raisonné des sciences, des lettres et des arts., tome 21, H. Lamirault, 1885-1902.p. 53.
  13. C. Devic, J. Vaissète, Histoire générale de Languedoc, XI, p. 1055-1060.
  14. André Mècle, Narbonne, palais des archevêques ..., 1999, p. 56.
  15. C. Devic, J. Vaissète, Histoire générale de Languedoc, XIII, 1877, p. 345-347.
  16. C. Devic, J. Vaissète, Histoire générale de Languedoc, XIII, 1877, p. 363.
  17. C. Devic, J. Vaissète, Histoire générale de Languedoc, IV, 1876, p. 311.
  18. Louis Duval, Un frère de Nicolas Foucquet, François, archevêque de Narbonne, exilé à Alençon, Henri Delesque, Caen, 1894 (Extrait des Mémoires de l'Académie nationale des Sciences, Arts et Belles-Lettres de Caen), p. 6.
  19. C. Devic, J. Vaissète, Histoire générale de Languedoc, IV, 1876, p. 514.
  20. Paul Laurent, Livre vert ..., 1886, p. xiii.
  21. Charles-Augustin Sainte-Beuve, Introduction aux Mémoires de Fléchier sur les grands jours d'Auvergne en 1665, L. Hachette, Paris, 1856, p. IV.
  22. Site sur l'église Saint-Saturnin de Palairac : comparaison des tableaux du musée de Narbonne et du retable de Palairac ; Site sur l'église Saint-Saturnin de Palairac : vue d'ensemble du tableau du retable.


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