- Révolution roumaine de 1989
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Révolution roumaine de 1989
Manifestants roumains.Informations générales Date Du 16 au 25 décembre 1989 Lieu Roumanie Issue Réussite de la Révolution
Exécution de Nicolae et Elena Ceaușescu
Disparition du régime communiste au profit d'un régime semi-démocratique en évolutionBelligérants République socialiste de Roumanie
Fraction loyaliste de la Securitate (très minoritaire)Manifestants anti-Ceaușescu
Armée roumaine
Membres réformistes du Parti communiste roumain et de la Securitate (largement majoritaires).Commandants Nicolae Ceaușescu †, président G-al Victor Stănculescu, G-al Vasile Milea †, Ion Iliescu, Petre Roman Pertes 1 104 morts[réf. souhaitée] modifier La révolution roumaine de 1989 fut une série d'émeutes et de protestations qui se déroulèrent en décembre 1989 et aboutirent au renversement du régime communiste alors dirigé par Nicolae Ceaușescu et à l'exécution du dictateur et de son épouse.
De tous les pays de l'Est ayant renversé les régimes en place après la chute du mur de Berlin au cours de l'automne et l'hiver 1989-1990, la Roumanie fut le seul où cette métamorphose se fit dans le sang : 1 104 morts (dont 564 à Bucarest, 93 à Timișoara, 90 à Sibiu, 66 à Brașov, 26 à Cluj-Napoca) et 3 321 blessés (dont 1 761 à Bucarest).[réf. souhaitée]
La nature exacte de cette révolution continue à alimenter la controverse. Les interprétations divergent fortement, car les différents évènements recensés vont de la révolte populaire spontanée au coup d'État interne monté par des dirigeants du Parti communiste roumain avec l'aide de services secrets étrangers et accompagné d'une manipulation médiatique dans le but de permettre à la nomenklatura de se maintenir aux affaires, de sorte que toutes les interprétations peuvent s'appuyer sur tel ou tel fait. L'enrichissement subit de certaines personnes « bien placées » après cette révolution est un des arguments avancés.
Sommaire
Avant la révolution
Comme dans les autres pays de l’Europe de l'Est, la grande majorité de la population était mécontente de sa situation. L'absence des libertés civiles et la politique économique de Ceaușescu (remboursement de la dette extérieure par l'exportation de la production agricole combiné à des projets de constructions surdimensionnées) avaient mené à l'étouffement de toute vie sociale et à l’appauvrissement de la population. La pénurie alimentaire et l'ambiance de suspicion et de terreur entretenue par la police secrète (Securitate), étaient les principales sources du mécontentement.
Début à Timișoara
Le 17 mars 1989, six anciens membres du Parti communiste roumain critiquent dans une lettre ouverte la politique économique de Nicolae Ceausescu. Mais peu de temps après, ce dernier obtient une victoire d'image en occident, car la Roumanie parvient à rembourser toute sa dette extérieure. Le leader communiste est alors réélu président le 26 novembre 1989.
Le 16 décembre pourtant, une manifestation spontanée a lieu à Timișoara contre l'expulsion par la Securitate d'un pasteur protestant, László Tökés, membre de la minorité hongroise de Roumanie.
Pendant la manifestation, la foule entame des chants libertaires et religieux, jugés anti-communistes par le régime. Les troupes spéciales de la Securitate (USLA) réagissent par des tirs de gaz lacrymogènes et par l'usage de canons à eau, mais la manifestation reprend de plus belle le lendemain. L'armée intervient alors : des combats de rue ont lieu, des voitures sont incendiées, des coups de feu retentissent. La manifestation prend fin après l'envoi des blindés. Le 18 décembre, un groupe de 30 jeunes gens arbore des drapeaux tricolores sans l'insigne communiste et chantent l'ancien hymne national "Réveille-toi, roumain !", interdit sous le régime communiste.
Le 21 décembre, 100 000 ouvriers entrent dans la ville de Timișoara et commencent à manifester contre le gouvernement aux cris de : « Nous sommes le peuple », « L'armée est avec nous ».
La capitale Bucarest
De retour d'un voyage en Iran, Ceaușescu trouve une situation déjà instable en Roumanie. Les événements de Timișoara ont été décrits par les radios étrangères – qui parlent de massacre de masse et de charniers – et écoutées clandestinement par les Roumains. La rébellion se propage le 21 décembre 1989 à Bucarest, à l'occasion d'un rassemblement de masse organisé par la Securitate, à la demande de Ceaușescu, pour montrer le soutien populaire au régime. Ce rassemblement, diffusé en direct à la télévision, se transforme en une démonstration massive de protestation contre le régime: huit minutes après le début du discours de Ceaușescu la foule crie « Timișoara ». Les tentatives de Ceaușescu de calmer son auditoire restent célèbres : « a-lo ! a-lo ! a-lo ! Alo, attendez tranquillement, chacun à sa place ! a-lo ! a-lo ! ». Les gens crient « Changez le dictateur ». Ceaușescu interrompt son discours tandis que la transmission télévisée est interrompue. Dans le même temps, de plus en plus de gens sortent dans la rue. L'armée commence à réprimer le mouvement avant 3 heures de matin. Un journaliste français, Jean-Louis Calderon, est tué accidentellement. Le lendemain, les manifestants envahissent le siège du Comité Central du Parti Communiste Roumain.
Télédiffusion
La révolution roumaine de 1989 est la première révolution de l'histoire à avoir été télédiffusée en direct. Les principaux événements ont eu lieu à Timișoara et Bucarest dans la semaine précédant Noël 1989. Les manifestations et des actions armées ont eu un caractère anti-communiste et la tentative de répression a été brutale.
Bilan
De tous les pays de l'Est ayant renversé le régime communiste après la chute du mur de Berlin au cours de l'automne et l'hiver 1989-1990, la Roumanie a été le seul où cette métamorphose s'est faite dans le sang : 1 104 morts (dont 564 à Bucarest , 93 à Timișoara, 90 à Sibiu, 66 à Brașov, 26 à Cluj-Napoca) et 3 321 blessés (dont 1 761 à Bucarest).
Les services secrets
En 1978, le lieutenant général Ion Mihai Pacepa, vétéran de la Securitate (les services secrets roumains), qui avait fait défection et s'était réfugié aux États-Unis, a porté un coup sévère au régime en contraignant Ceaușescu à revoir toute l'organisation de la Securitate. En 1986, Pacepa devait révéler, dans son livre Red Horizons: Chronicles of a Communist Spy Chief[1], divers détails sur le régime de Ceaușescu, tels que sa collaboration avec des terroristes arabes, ses entreprises d'espionnage industriel aux États-Unis et ses efforts constants et élaborés pour obtenir le soutien des pays occidentaux.
La mort du dictateur
Selon la version officielle, Nicolae et Elena Ceaușescu prirent la fuite le 22 décembre 1989 du siège du Comité Central du Parti Communiste Roumain en hélicoptère, prétendument en prenant en otage son pilote menacé à l'aide d'une arme à feu. À cause de manque de carburant, le pilote posa l'hélicoptère dans la campagne, à proximité des bâtiments d'une ferme. S'en serait suivi une fuite erratique du couple présidentiel, au cours de laquelle il aurait notamment été pris en chasse par des citoyens insurgés tentant de les arrêter, avant de parvenir à trouver un répit de courte durée dans une école. Ils auraient finalement été retenus prisonniers pendant plusieurs heures dans une voiture de police, les policiers restant dans l'expectative et écoutant la radio pour deviner dans quel sens le vent allait tourner, avant d'être livrés aux forces armées.
Selon d'autres sources[2] les généraux Stănculescu (armée) et Opruță (aviation) auraient œuvré pour la partie "réformiste" de l'appareil du Parti et de la Securitate (en accord avec la CIA et le KGB qui voulaient tous deux se débarrasser d'un dictateur jugé incontrôlable et facteur d'instabilité). Le pilote de l'hélicoptère présidentiel, obéissant à leurs ordres en pleine connaissance de cause, aurait tout simplement "livré" le couple présidentiel à 50 km de Bucarest, dans une école des environs de Târgoviște tenue par des officiers et des hommes de troupe acquis aux "réformistes", où Ceaușescu et son épouse furent internés (c'étaient les vacances scolaires d'hiver) avant d'être transférés dans la base militaire de Târgoviște.
Le 25 décembre 1989, après que la quasi-totalité des forces militaires et policières a été informée du changement de pouvoir, un procès expéditif de 55 minutes a lieu dans cette base, devant un tribunal secret improvisé selon une procédure d'urgence jusqu'alors utilisée par la Securitate contre les dissidents ou les manifestants à exterminer[3]. Ce "procès" est filmé. Nicolae Ceaușescu et son épouse Elena Petrescu furent déclarés « coupables de génocide », condamnés à mort et aussitôt fusillés. L'exécution est également filmée. Le soir même, les images des corps du couple Ceaușescu furent diffusées à la télévision. Le procès filmé fut quant à lui diffusé quelques jours plus tard. L'exécution, seulement au bout de plusieurs années. Les Ceaușescu sont enterrés dans un cimetière de Bucarest. Plus tard, des rumeurs laisseront entendre que le couple a été torturé avant d'être exécuté.
Le nouveau pouvoir
Aussitôt après la fuite des Ceaușescu, dans la nuit du 22 au 23 décembre, Bucarest tombe aux mains des insurgés qui envahissent le siège du Comité Central du Parti Communiste Roumain dont les bureaux sont vandalisés. Les portraits du dictateur sont arrachés. Le lendemain, la télévision roumaine recommence à émettre. Le journaliste Mircea Dinescu et l'acteur Ion Caramitru y apparaissent avec un groupe de personnalités, annoncent la fuite du dictateur et la formation d'un nouveau gouvernement comprenant à la fois des personnalités culturelles et des membres du parti communiste, dont Ion Iliescu qui affirme vouloir passer à « un socialisme scientifique et à visage humain ». Mais la foule demande un gouvernement sans communistes. Dans le centre et autour de la télévision, apparaissent alors de mystérieux snipers embusqués qui tirent sur la population : la télévision parle de « terroristes à la solde de Ceaușescu » et demande à l’armée de « défendre la révolution ». À l’aéroport Henri Coandă d'Otopeni, deux compagnies de l’armée tirent l’une contre l’autre, chacune persuadée de lutter contre les « terroristes ». Il y a des nombreux morts et des dégâts matériels.
Dans l'après-midi du 23 décembre 1989, Ion Iliescu, Petre Roman et Gelu Voican-Voiculescu annoncent à la télévision la création d'un « Front du Salut national ». Les snipers, dénommés « terroristes », apparaissent dans les lieux importants de la vie socio-politique : la bibliothèque centrale universitaire, le palais présidentiel, la radio, la télévision, le centre de presse, les aéroports et le ministère de la défense. Les citoyens qui occupent les rues et les alentours des institutions sont victimes de leurs tirs.
Les journalistes agitent les rumeurs les plus folles : Ceaușescu serait en train de rassembler une armée pour noyer la révolte dans le sang ; la toute-puissante Securitate aurait construit un gigantesque labyrinthe sous la ville de Bucarest, ce qui lui permettrait de se déplacer secrètement et d'intervenir par surprise n'importe où. La presse internationale relaie ces rumeurs avec complaisance : le téléspectateur occidental assiste alors à des progressions en caméra subjective dans des couloirs souterrains toujours déserts, mais susceptibles de receler des compagnies entières de jusqu'au-boutistes du régime.
A partir du 24 décembre 1989, le « Front du Salut national » renonce au « socialisme scientifique à visage humain » et se convertit à la démocratie à l'occidentale, tandis que Dumitru Mazilu lance aux manifestants le slogan : « A bas le communisme, mort aux terroristes ». La capture de Ceaușescu (et, le lendemain, son exécution) est annoncée. Le slogan « Aujourd'hui nous avons reçu notre portion de liberté » tracé en grandes lettres blanches apparaît un peu partout dans le centre de Bucarest. Comme personne ne parvient à identifier les fameux « terroristes » (quelques policiers, membres présumés de la Securitate et passants sont pris à partie, tabassés et arrêtés), des journalistes répandent la rumeur qu'il s'agirait de « moudjahiddin » prêtés à Ceaușescu par Mouammar Khadafi. On ne trouve pas plus de « moudjahiddin » libyens que de « terroristes » roumains, et la question « Qui nous a tiré dessus ? » tracée en grandes lettres rouges par les étudiants sur un mur au carrefour de l'Université, restera sans réponse.
En 1990, Ion Iliescu, fondateur du Front du Salut national, dignitaire du régime communiste converti à la démocratie, remporte la première élection présidentielle de l'ère post-communiste. Aux yeux de l'Occident et des pays voisins, il passe pour un démocrate modéré par contraste avec le rôle assumé par d'anciens laudateurs du régime Ceaușescu reconvertis dans l'ultra-nationalisme xénophobe: Adrian Păunescu et Corneliu Vadim Tudor.
Analyse
En 2010, on ne connaît toujours pas toute la vérité. Il y a plusieurs hypothèses, pas forcément contradictoires :
- une révolution spontanée,
- un coup d’État interne,
- un coup d’État avec l'aide de services secrets étrangers.
L’identité des « terroristes » est resté un mystère jusqu'à présent, ainsi que leur relation avec le régime du Front du Salut national. Aucun « terroriste » n’a jamais été retrouvé ou condamné. D’après certaines recherches[4], il s'agissait principalement d'un coup d’État interne (mais en accord avec Moscou et l'Occident) durant lequel le général Stănculescu aurait créé des scénarii avec des tireurs d'élite, pour maintenir la peur et faire passer les ex-communistes pour des « défenseurs de la Révolution », afin d'empêcher l'émergence d'un « pouvoir des dissidents ». C'est aussi pour éviter pareille évolution que les ex-communistes passèrent d'eux-mêmes du marxisme à la démocratie, au libéralisme, au nationalisme et au christianisme. Quant au slogan : « Aujourd'hui nous avons reçu notre portion de liberté » tracé le 25 décembre 1989 dans Bucarest, à la peinture routière au latex, il serait l'œuvre et exprimerait l'état d'esprit de la branche "réformiste" de la nomenklatura, pour qui la liberté s'octroie par portions, comme du fromage[5].
Les monographies, les manuels scolaires d'histoire et les émissions télévisées présentent des opinions divergentes sur la révolution de 1989. Avec le temps qui passe, les choses deviennent de plus en plus floues pour les nouvelles générations, bien que les recherches historiques apportent aux spécialistes de plus en plus de détails. Le seul point d'accord est le culte des « victimes de la Révolution », dont la mémoire est unanimement honorée, sans que nul ne doute que toutes soient mortes au nom du désir de liberté et de justice du peuple, et du fait des agissements du pouvoir... quel qu'il soit.
Références
- Roumanie, vingt ans après : la "révolution revisitée", Catherine Durandin (dir.) Livre téléchargeable gratuitement au format pdf
- La révolution roumaine de 1989 (Adrian Balan)
- Victor Loupan, La Révolution n'a pas eu lieu : histoire d'un coup d'État, Robert Laffont, 1990
- Transcription du procès
- Domnița Ștefănescu, Cinq ans, 1995, Editura "Mașina de Scris", București.
- Viorel Patrichi, "Le sosie de Nicolae Ceaușescu", Lumea Magazin Nr. 12, 2001.
- Marian Oprea, "Apres 15 ani", Lumea Magazin Nr. 10, 2004.
- "Suicide ?" , Jurnalul Național du 30 décembre 2004.
- Mark Almond, Uprising: Political Upheavals that have Shaped the World (Răscoală: Schimbări politice care au cutremurat lumea), 2002. Mitchell Beazley, London.
- Liens Vidéos :
- Înregistrare video din 20 décembre 1989 de la Timișoara
- Faceți culoarul liber să treacă tovarășul Bălan! - înregistrare video din 22 decembrie 1989 de la Timișoara
- Înregistrarea video cu ultimul discurs al lui Nicolae Ceaușescu în Piața Republicii
- Eseu foto anonim despre Revoluția Română din 1989
Notes et références
- publié en France en 1988, sous le titre Horizons rouges (Paris, Presses de la Cité. 323 p.)
- Radu Portocală, Autopsie du coup d'état roumain, Calmann-Lévy, Paris, 1994 - 194 pages
- http://www.ina.fr/archivespourtous/index.php?vue=notice&id_notice=CAB02036560 Journal télévisé d'Antenne 2 du 26 décembre 1989 qui relate l'exécution des Ceaușescu (Archive INA)
- Radu Portocala: « Roumanie, le pays du mensonge triomphant », Calmann-Lévy, 1994
- Mircea Dinescu, Pamflete vesele și triste (Pamphlets gais et tristes), Ed. Seara, Bucarest, 1996
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