Rigueur scientifique

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Méthode scientifique

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On appelle méthode scientifique l'ensemble des canons guidant ou devant guider le processus de production des connaissances scientifiques, que ce soit des observations, des expériences, des raisonnements, ou des calculs théoriques.

Très souvent, elle engage l'idée implicite de son unicité, tant auprès du grand public que de certains chercheurs, qui de surcroît la confondent parfois avec la méthode hypothético-déductive. L'étude des pratiques des chercheurs révèle cependant une si grande diversité des démarches scientifiques que l'idée d'une unité de la méthode est rendue très problématique.

Ce constat ne doit cependant pas être entendu comme une forme d'anarchisme épistémologique. Si la question de l'unité de la méthode est problématique (et ce problème sera abordé plus en détail ci-dessous), cela ne remet pas en question l'existence d'une pluralité de canons méthodologiques qui s'imposent aux chercheurs dans leurs pratiques scientifiques.

Sommaire

De la découverte à la théorie

Cette brève introduction situe le processus de base de la méthode scientifique au cours du processus de passage d'une théorie vers une autre.[1]

Par rapport à une théorie établie, un chercheur peut observer une anomalie ou explorer de nouvelles conditions expérimentales. Il réalise ses propres expériences et les répète d'abord pour lui-même, puis pour les documenter et les publier. Chacune de ces publications scientifique constitue un constat élémentaire. C'est la méthode expérimentale, le début d'une découverte scientifique.

Lorsque plusieurs chercheurs ont répété des expériences sur un même phénomène avec diverses variations (de conditions expérimentales, de méthodes de mesures, de types de preuves...) ces constats élémentaires se confirment mutuellement sans qu'il n'y ait de limite précise ni de moment particulier qui les valident, c'est l'appréciation de plusieurs chercheurs qui conduit à un consensus progressif. Les expériences et constats élémentaires forment alors un corps confirmé de preuves de l'existence du phénomène.

A la suite de cette découverte scientifique, ou parallèlement, les chercheurs tentent d'expliquer le phénomène par des hypothèses. Une hypothèse, pour être scientifiquement admissible, doit être réfutable, c'est à dire doit permettre des expérimentations qui la corroborent (confirment) ou la réfutent (l'infirment).

Ce sont les preuves répétées et confirmées par d'autres chercheurs, diverses et variées qui confortent une hypothèse. C'est son acceptation par de nombreux chercheurs qui conduit à un consensus sur l'explication du phénomène. L'acceptation de l'hypothèse peut se manifester par la citation de travaux précédents qui servent souvent de repères de validations. Elle devient ainsi la nouvelle théorie consensuelle sur le phénomène considéré et enrichit ou remplace une théorie précédemment admise (ou plusieurs ou une partie).

Des anomalies apparaitront peu à peu et un nouveau cycle commencera.

Évolution de la notion de méthode scientifique

La méthode scientifique est l'objet de l'attention des philosophes. Il s'agit alors, le plus souvent, de décider de la bonne méthode scientifique, qui devient dès lors une notion normative.

Il convient de distinguer ces réflexions philosophiques des pratiques effectives des scientifiques. Cependant, les unes ne sont pas toujours sans influence sur les autres. Les canons édictés par Aristote furent ainsi pendant des siècles au cœur de la démarche « scientifique » (si l'on accepte l'anachronisme que soulignent les guillemets).

Aristote

Aristote (384 av. J.-C., 322 av. J.-C.) est le premier à réfléchir sur l'élaboration d'une méthode scientifique : «Nous estimons posséder la science d'une chose d'une manière absolue, écrit-il, quand nous croyons que nous connaissons la cause par laquelle la chose est, que nous savons que cette cause est celle de la chose, et qu'en outre il n'est pas possible que la chose soit autre qu'elle n'est» (Seconds Anal. I, 2, 71b, 9-11). Il en reste cependant à l'idée d'une science purement déductive.

Roger Bacon

Roger Bacon (1214 - 1294), considéré comme le père de la méthode scientifique, a créé la science expérimentale en faisant de l’expérience la seule source de connaissance scientifique.

René Descartes et Francis Bacon

Raisonnement bayesien

Conventionnalisme

Le conventionnalisme est une doctrine stipulant une séparation fondamentale entre les données de l'intuition et des sens, et les constructions intellectuelles permettant de fonder les théories scientifiques ou mathématiques.

Cette notion a été développée notamment par Edouard Le Roy, Pierre Duhem et Henri Poincaré, sous des formes assez différentes, à la frontière du XIXe et du XXe siècle (bien que aucun de ces auteurs n'aie employé le terme de « conventionnalisme »). Elle trouve son origine profonde dans la séparation kantienne entre intuition et concept.

Vérificationnisme

Réfutationnisme

Article détaillé : réfutabilité.

Le réfutationnisme (ou falsificationisme, ou faillibilisme) est présenté par Karl Popper dans son livre La logique de la découverte scientifique. Il y critique l'inductivisme et le vérificationnisme, qui selon lui ne sont valides ni d'un point de vue logique ni d'un point de vue épistémologique pour produire des connaissances scientifiques fiables[2].

Selon Popper, plutôt que de rechercher des propositions vérifiables, le scientifique doit produire des énoncés réfutables. C'est cette réfutabilité qui doit constituer le critère de démarcation entre une hypothèse scientifique et une pseudo-hypothèse. C'est en s'appuyant sur un tel critère que Popper critique le marxisme ou la psychanalyse, qui selon lui ne répondent pas à cette exigence de réfutabilité, ces théories reposant sur des hypothèses ad hoc qui les immuniseraient contre toute critique[3].

C'est sur cette base que Popper développe sa méthode critique, qui consiste à éprouver de toutes les manières possibles les systèmes théoriques.

Pluralité de la méthode

Contexte de justification et contexte de découverte

Hans Reichenbach, qui était proche du positivisme logique, distinguait entre contexte de justification et contexte de découverte. Le contexte de découverte se rapporte à la démarche qui aboutit à proposer un résultat théorique, tandis que le contexte de justification concerne la vérification de la vérité d'une théorie ou d'une hypothèse donnée, indépendamment de la façon dont elle a été obtenue.

Reichenbach écrit qu'il « n'existe pas de règles logiques en termes desquelles une "machine à découverte" pourrait être construite, qui se charge de la fonction créative du génie »[4], signifiant ainsi que seul le contexte de justification peut être justiciable d'une analyse méthodologique, tandis que le contexte de découverte reste hors de portée d'une telle investigation.

Le philosophe des sciences Dominique Lecourt ajoute ainsi « qu'il n'y a pas de méthode scientifique, du moins considérée abstraitement comme un ensemble de règles fixes et universelles régissant l'ensemble de l'activité scientifique » (Lecourt, 1999, article « méthode » [réf. incomplète]).

Cette question de l'unité profonde de la méthode, et donc de la science, est encore aujourd'hui l'objet de discussions. Mais chacun s'accorde à reconnaître, tant parmi les analystes que les acteurs de la science, qu'il n'existe aucune « recette » générale que suivraient ou devraient suivre les chercheurs pour produire de nouvelles connaissances.

On peut cependant repérer dans l'activité scientifique différentes méthodes applicables selon les situations, tant dans le contexte de justification que dans le contexte de découverte.

Il faut également souligner que la distinction même entre contexte de découverte et contexte de justification est l'objet de critiques. Il offre cependant un cadre conceptuel permettant de penser la méthode scientifique.

Méthodes dans le contexte de justification

Il s'agit dans ce cas des méthodes permettant de distinguer le vrai du faux. La logique retenue est celle de l'implication, dont on peut extraire trois façons dans l'étude du raisonnement.

Déduction

Article détaillé : Déduction logique.

Induction

Articles détaillés : Induction logique et Consilience.

Abduction

Article détaillé : Abduction (épistémologie).

Liste des méthodes

Il ne s'agit pas tant ici de décrire un ensemble cohérent et fixe de règles d'élaboration de la connaissance scientifique, une « recette », que de décrire les différents canons méthodologiques qui participent à cette élaboration.

  • Méthode axiomatique
    • Méthode critique
    • Méthode déductive : méthode qui consiste à partir du général pour arriver au particulier.
  • Méthodes inductives
  • Méthodes de test
  • Méthodes par hypothèse
  • Reproductibilité : la reproductibilité est le meilleur test de la validité d'une expérimentation scientifique.
  • Approche nomothétique : dans ce cas, le chercheur vise la détermination de lois naturelles.
  • Création de modèles : le modèle est un objet dépouillé de tout ce qui ne concerne pas les propriétés étudiées. Toute la difficulté est justement de sélectionner les éléments importants, tous et rien qu'eux. L'abstraction est la base de la conception d'un modèle : un objet réel, un phénomène, est analysé afin de n'en garder que les caractéristiques essentielles, celles qui ont une influence sur ce que l'on veut étudier. Très souvent, on dispose de modèles généraux qu'on peut spécialiser.
  • Méthode analytique : division d'un problème complexe en sous-problèmes plus simples. Cette méthode fut énoncée par René Descartes dans son Discours de la méthode : « …diviser chacune des difficultés que j'examinerais, en autant de parcelles qu'il se pourrait, et qu'il serait requis pour les mieux résoudre. »
  • Abstraction : L'abstraction consiste à isoler par la pensée une propriété particulière d'un objet, pour former sur cette base une représentation particulière de cet objet.
  • Grandeurs et mesure

Méthodes dans le contexte de découverte

Les principales méthodes mobilisées dans le contexte de découverte sont l'expérimentation, l'observation, la modélisation et aujourd'hui la simulation numérique, qui se retrouvent à des degrés divers dans la plupart des disciplines scientifiques. À ces méthodes générales s'ajoutent des méthodes plus singulières, propres à une pratique scientifique particulière.

Observation

Article détaillé : Observation.
L'observation scientifique passe par des instruments, ici des alambics pour la chimie.

L’ observation est l’action de suivi attentif des phénomènes, sans volonté de les modifier, à l’aide de moyens d’enquête et d’étude appropriés. Les scientifiques y ont recours principalement lorsqu'ils suivent une méthode empirique. C'est par exemple le cas en astronomie ou en physique. Il s'agit d'observer le phénomène ou l'objet sans le dénaturer, ou même interférer avec sa réalité. Certaines sciences prennent en compte l'observation comme un paradigme explicatif à part car influant le comportement de l'objet observé, comme la physique quantique ou la psychologie. L'astronomie est l'une des disciplines scientifiques où l'observation est centrale.

Expérimentation

Article détaillé : Méthode expérimentale.

Dans Léviathan et la pompe à air. Hobbes et Boyle entre science et politique (1985; 1989), Shapin et Schaffer analysent la naissance de la méthode expérimentale.

L'expérimentation est également un instrument au service de la découverte. Certaines types d'expériences, dites cruciales, permettent, selon Francis Bacon, d'infirmer ou de confirmer une hypothèse (Novum Organum, livre II, aphorisme 36). Selon cette méthode expérimentale, on imagine une hypothèse avant l'expérience proprement dite, puis on met celle-ci à l'épreuve, afin de la vérifier ou de l'infirmer.

Issue de la physique, étendue à la chimie et à d'autres sciences expérimentales, cette méthode a fait l'objet d'un essai d'adaptation à la médecine par Claude Bernard (1866). Or, en ce qui concerne les sciences de la vie, notamment la biologie et la médecine, celles-ci se heurtent au défi d'une multitude de paramètres qu'il est difficile d'isoler, et dont, de surcroît, l'isolation même nous éloigne de la réalité naturelle. Dans toutes les sciences expérimentales, le laboratoire joue en effet un rôle de purification de l'expérience: l'expérimentation se distingue ainsi de l'expérience, en ce que si celle-ci est naturelle (donnant ainsi lieu, en termes de philosophie de la connaissance, aux doctrines empiristes), celle-là est artificielle, ou construite (voir par exemple les expériences de Galilée sur la chute des corps). L'expérimentation requiert une théorie préalable qui puisse permettre de formuler celle-ci.

Ainsi, avant l'expérience proprement dite, on cherche une hypothèse qui pourrait expliquer un phénomène déterminé. On élabore ensuite le protocole expérimental qui permet d'effectuer l'expérience scientifique qui pourra valider, ou non, cette cette hypothèse. En fonction des résultats de cette expérience, on validera, ou non, l'hypothèse.

Ce schéma, apparemment simple, est demeuré en vigueur dans les sciences expérimentales de Bacon jusqu'au XXe siècle, date à laquelle certains l'ont remis en cause (Pierre Duhem en 1906 [5]. En effet, selon l'article célèbre de Quine, Les deux dogmes de l'empirisme, il n'existe aucune « expérience cruciale », qui puisse permettre de confirmer, ou non, un énoncé scientifique. Quine soutient en effet une position holiste, qui ne dénie pas tout rôle à l'expérience, mais considère que celle-ci ne se rapporte pas à un énoncé scientifique, ou hypothèse, en particulier, mais à l'ensemble de la théorie scientifique. Aussi, à chaque fois qu'une expérience semble apporter un démenti à l'une de nos hypothèses, nous avons en fait toujours le choix entre abandonner cette hypothèse, ou la conserver, et modifier, à la place, un autre de nos énoncés scientifiques. L'expérience ne permet pas, ainsi, d'infirmer ou de confirmer une hypothèse déterminée, mais impose un réajustement de la théorie, dans son ensemble; et nous avons toujours le choix de procéder au réajustement que nous préférons:

« On peut toujours préserver la vérité de n'importe quel énoncé, quelles que soient les circonstances. Il suffit d'effectuer des réajustements énergiques dans d'autres régions du système. On peut même en cas d'expérience récalcitrante préserver la vérité d'un énoncé situé près de la périphérie, en alléguant une hallucination, ou en modifiant certains des énoncés qu'on appelle lois logiques. Réciproquement (...), aucun énoncé n'est à tout jamais à l'abri de la révision. On a été jusqu'à proposer de réviser la loi logique du tiers exclu, pour simplifier la mécanique quantique. » [6]

Modélisation

Beaucoup de sciences de la Terre et de l'Univers (notamment : astrophysique, sismologie, météorologie) reposent en grande partie sur l'élaboration de modèles et sur leur confrontation avec des observations de phénomènes. La modélisation physique consiste spécifiquement à utiliser un autre phénomène physique que celui observé, mais en y appliquant des lois ayant les mêmes propriétés et les mêmes équations.

Simulation numérique

Article détaillé : Simulation.

La simulation est la « reproduction artificielle du fonctionnement d'un appareil, d'une machine, d'un système, d'un phénomène, à l'aide d'une maquette ou d'un programme informatique, à des fins d'étude, de démonstration ou d'explication » [7].

Simulation d'une collision de particules.

La simulation numérique utilise elle un programme spécifique ou éventuellement un progiciel plus général, qui génère davantage de souplesse et de puissance de calcul. Les simulateurs de vol d’avions par exemples permet d'entraîner les pilotes. En recherche fondamentale les simulations que l'on nomme aussi modélisations numériques permettent de reproduire des phénomènes complexes, souvent invisibles ou trop ténus, comme la collision de particules.

Un rôle pour l'analogie ?

Imagination et intuition

Les méthodes régionales

Médecine et méthode du double aveugle

Certaines personnes guérissent spontanément, d'autres réagissent plus ou moins bien aux médicaments, et par ailleurs, le fait même de prendre un traitement peut parfois avoir des effets bénéfiques ou négatif même si le traitement lui-même est sans effet (effet placebo). Il faut donc mener des études dites « randomisées en double aveugle ».

Histoire et approche idiographique

Par essence, le fait historique est singulier : il semble qu'il n'y ait qu'une seule Révolution russe, qu'une seule Égypte antique. L'analyse de ces événements singuliers repose donc sur une approche idiographique. Certains auteurs, dont Karl Marx et Carl Hempel, ont cependant tenté de développer une approche nomothétique de l'Histoire, en soutenant qu'il existe des « lois de l'Histoire ». Cette conception de l'Histoire fut notamment critiquée par Karl Popper dans « Misère de l'historicisme ».

Voir aussi les articles sur la Consilience, Darwin puis la mise en forme des idées de la Théorie de l'évolution pour un autre exemple de science de type historique[8] Elle est également critiquée et rejetée comme science, un moment donné, par Popper comme le montre son article.

Or, cela montre que les sciences de types historiques bien qu'aussi puissantes que les autres méthodes scientifiques sont tout autant très mal comprises, mal maitrisées et souvent rejetées par beaucoup de spécialistes. Ces derniers préférent les méthodes stéréotypes telle que la physique ou autres sciences expérimentales. Or, ils ne font souvent que confirmer (et spychologiquement valider) les résultats de la méthode de type historique. Ce fut également le cas pour Alfred Wegener et sa théorie de la dérive des continents confirmées par la physique et ainsi reconnues par tous les scientifique après une forte polémique qui a durée 40 ans, allant des simples perturbations des cours par les professeurs "contre la dérive" au tire de carabine dans la porte de bureau vide du collègue[9]; bien que les sources diverses et multiples tout aussi scientifique qui ont été apportées pendant toute cette période l'avaient validées bien avant la preuve par la physique.

Études quantitatives et qualitatives en Sciences humaines

Les études sur le comportement humain (psychologie, anthropologie) permettent parfois des observations et même des expérimentations.

Sciences sociales

Deux grands courants de méthodologie viennent rendre compte de la réalité en sciences sociales. Les méthodes qualitatives et les méthodes quantitatives. Ces méthode d'analyses peuvent être utilisées seules ou indépendamment l'une de l'autre, en complémentarité, elles peuvent apporter chacune des éléments de réponses différents ou peuvent encore être utilisées conjointement pour analyser deux fois un même aspect et ainsi le valider. Selon Gilles-Gaston Granger, dans « Modèles qualitatifs, modèles quantitatifs dans la connaissance scientifique »[10] les méthodes qualitatives, habituellement perçues comme excluant la scientificité, ont apporté significativement aux sciences contemporaines en permettant de rendre compte des structures qui peuvent être observées et ces formes, bien que mesurables, sont d'abord de l'ordre de l'évaluation qualitative :

« L'évolution de la prise de conscience de la nature profonde de la pensée scientifique pourrait être symbolisée très schématiquement, par trois devises, dont chacune réinterprète d'une certaine manière et rectifie la précédente. On a d'abord proclamé qu'il n'y avait de science que l’universel ; puis qu'il n'y avait de science que du mesurable. Nous devrions dire aujourd'hui : il n'y a de sens que le structurable. Profession de foi qui ne récuse nullement les deux précédentes, mais les relativise, et donne un nouveau sens à l'universel et au mesurable.[11] »

Ainsi, il convient de reconnaître l'apport de ces méthodologies en sciences sociales. Il est d'ailleurs possible de faire des expériences en analyse des réseaux sociaux. L'étude du petit monde représente l'expérience la plus popularisée du genre.

La majorité des économistes contemporains admet que les méthodes utilisées en économie doivent s'approcher autant que possible des méthodes des sciences physiques. Les économistes de l'École Autrichienne soutiennent au contraire que l'économie doit, comme les mathématiques et la logique, être construite par pure dérivation logique à partir d'axiomes irréfutables.

Question de l'unité de la méthode

Dans les « sciences » humaines (économie, ethnologie, psychologie, etc.), la démarche expérimentale est délicate, l'aspect prédictif de la méthode appliquée aux phénomènes humains étant souvent mis en défaut.

Face à cette difficulté deux attitudes opposées ont vu le jour :

  • L'émergence des sciences humaines et sociales à partir de la fin du XIXe siècle et au XXe siècle a conduit à remettre en question le modèle vieillot de la méthode scientifique, qui définit de façon réductrice la notion de science.
  • Pour d'autres auteurs, comme Michel Foucault dans Les mots et les choses, il faut au contraire se méfier de la tautologie qui consiste à définir une discipline comme scientifique parce que son nom contient le mot science. Il serait donc souhaitable, qu'à l'instar de la philosophie, ces disciplines s'assument en tant que démarche rationnelle d'étude du réel sans expérimentation possible.

Histoire de la méthode

Indépendamment des querelles philosophiques se développant autour de la notion de méthode scientifique, les pratiques des scientifiques ont grandement évolué au cours des siècles. Les chercheurs n'administrent plus la preuve aujourd'hui comme on le faisait il y a cinq siècles.

Universalité de la méthode

La méthode évolue dans le temps. Elle évolue également dans l'espace.

Les activités exercées dans les différentes sciences expérimentales sont tellement diverses qu’il serait vain de chercher à les modéliser. En revanche les démarches scientifiques, censées créer des connaissances, ont des caractères communs et universels qu’il est possible d’exhiber. Le modèle de la démarche expérimentale comporte deux descriptions complémentaires et indissociables :

  • La démarche expérimentale passe obligatoirement par trois étapes. Ce sont :
  1. une phase de questionnement ;
  2. une phase de recherche de réponse à la question posée ;
  3. une phase de validation de la réponse trouvée.

Les champs de validités des réponses trouvées étant limités, la validation ne peut pas se faire par une confirmation directe, mais par une successions de non infirmations.

  • La démarche expérimentale fait obligatoirement intervenir trois domaines :
  1. le domaine « réel » : pour la physique il s’identifie au monde matériel qui comporte des « objets » participant à des événements dont on veut décrire l’évolution ;
  2. le domaine théorique comporte les outils intellectuels forgés pour répondre aux questions : théories, concepts etc. ;
  3. le domaine technique comporte les dispositifs expérimentaux, appareils de mesures etc. Les mesures ou les déterminations d’indicateurs mesurables font partie intégrante de la démarche.

Notes et références

  1. Synthèse Théorie et expérience, Académie de Grenoble,
    http://www.ac-grenoble.fr/PhiloSophie/logphil/notions/theo_exp/esp_prof/synthese/theo_exp.htm
  2. Il n'est pas dans ses attentions premières de critiquer l'idée reçue de la connaissance scientifique comme connaissance irréfutable, mais sa position revient à renverser ce lieu commun
  3. Il remarque ainsi que dans la théorie freudienne, l’opposition entre le principe de plaisir-déplaisir, de réalité, et le principe de compulsion, de répétition, fait qu’aucun comportement humain ne peut être exclu de la théorie
  4. The Rise of Scientific Discovery, 1951, p. 231
  5. Pierre Duhem, L’expérience cruciale est impossible en physique, extrait de La théorie physique, son objet et sa structure, 1906, 1914, seconde partie, chapitre VI, § III. — L’« Experimentum crucis » est impossible en Physique
  6. Quine, Les deux dogmes de l'empirisme, in De Vienne à Cambridge, trad. P. Jacob, Gallimard, 1980.
  7. Définition de simulation dans le Trésor de la Langue Française Informatisée.
  8. Stephen Jay Gould, La Vie est belle, éd Point, 470p. 2001
  9. Université de Montpellier, années 60
  10. GRANGER, G.G. (1982) Sociologie et sociétés, vol. 14(1), p. 7-13
  11. GRANGER, G.G. (1982) Sociologie et sociétés, vol. 14(1), p. 12, et dans le résumé

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Dominique Lecourt (dir.), Dictionnaire d’histoire et philosophie des sciences, Paris, 4e réed. «Quadrige»/PUF, 2006.
  • Dominique Lecourt (dir.), Dictionnaire de la pensée médicale, Paris, réed. PUF/Quadrige, 2004.
  • Jean-Marie Nicolle, Histoire des méthodes scientifiques, du théorème de Thalès au clonage
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