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Pays de Cocagne
Pour les articles homonymes, voir Cocagne (homonymie).Le Pays de Cocagne est, dans l'imaginaire européen, une sorte de paradis terrestre, une contrée miraculeuse dont la nature déborde de générosité pour ses habitants et ses hôtes. Loin des famines et des guerres, Cocagne est une terre de fêtes et de bombances perpétuelles, d'inversion des valeurs et des lois naturelles, où l'on prône le jeu et la paresse, et où le travail est proscrit.
Sommaire
Origine
Dans son livre La faim et l’abondance, Massimo Montanari situe la naissance du mythe de Cocagne entre le XIIe et le XIVe siècle. On trouverait une des plus anciennes références dans les Carmina Burana, ces chants de clercs vagabonds rebelles et défroqués qui célébraient le vin, l'amour libre, le jeu et la débauche (les Goliards). Un personnage s’y présente comme l’abbé de Cocagne : « Ego sum abbas cucaniensis ». En 1250 environ, un texte en ancien français intitulé le Fabliau de Coquaigne décrit ce pays de fêtes continuelles, du luxe et de l’oisiveté, où plus on dort et plus on gagne.
Cocagne vient selon les uns du canton de Cuccagna en Italie, sur la route de Rome à Loreto ; selon d'autres, du poète macaronique Teofilo Folengo, surnommé Merlin Coccaie, qui dans ses vers aurait décrit ce pays délicieux ; ou enfin d'une fête instituée à Naples sous un nom analogue, dans laquelle on distribuait au peuple des comestibles et du vin.
Étymologie
Le pays d’abondance avait le même nom ou presque dans beaucoup de langues européennes, comme en anglais « the Land of Cockaigne », ou « Cokaygne », en italien « Cuccagna ». Les Flamands l’appelaient tantôt « Het Luilekkerland » (« Pays des douces friandises »), tantôt « Kokanje », mais aussi « Cockaengen ».
L’étymologie du nom a été très discutée :
- Aux Pays-Bas, on a dit qu’il venait de celui de la ville de Kockengen dans la province d’Utrecht, ou bien de l’expression « het land van de honingkoeken » : « le pays des gâteaux de miel ».
- Le mot anglais « cockaigne » serait attesté dès 1305 environ, issu de l’ancien français « coquaigne ». Lui-même est d’origine obscure : provient-il de mots hérités du latin « coquere », « cuisiner » (par exemple l’anglais « to cook ») ou bien d’autres mots germaniques désignant les gâteaux, comme l’anglais « cake », le wallon « couque », etc ?
- Mais les « coques » ou « coquaignes » désignent aussi des petits pains de pastel fabriqués dans le Lauragais en Languedoc pour la teinture bleue dont ils sont la dernière phase de traitement, et qui firent la fortune de ce pays et lui donnèrent le surnom de Pays de cocagne. Cette couleur est aussi dite "bleu de Cocagne".
Une représentation picturale : Le Pays de Cocagne de Bruegel l'Ancien
En 1567, peut-être alors même que Bruxelles était déjà mise à feu et à sang par le duc d'Albe et ses 60 000 soldats, venus au nom de Philippe II d'Espagne persécuter l’hérétique anabaptiste, le protestant luthérien ou calviniste et mater la révolte des Gueux, Pieter Bruegel se réfugiait dans la peinture de son Pays de Cocagne.
Le tableau montre trois personnages endormis ou somnolant, repus, sous un arbre qui porte une table couverte de mets. Un clerc, un chevalier et un paysan y représentent les trois ordres de la société médiévale : le clergé, la noblesse d’arme et la paysannerie, tous trois ici égaux dans la bombance et la quiétude opulente.
Les frontières terrestres du Pays de Cocagne sont faites de montagnes de bouille ou de gelée. Une fois arrivé dans cette contrée paradisiaque, on peut s’attendre à ce que les cailles nous tombent toutes rôties dans le gosier, comme le fait le soldat situé à gauche du tableau, bouche grande ouverte, et néanmoins protégé par un toit couvert de tartes. On y voit des oies qui viennent se jeter toutes cuites sur les plats, des cochons qui accourent vers nous lardés d’un couteau et des cactus formés de galettes, des œufs à la coque qui courent…
Ici les soldats ont déposé leurs armes, les agriculteurs leur fléau, les étudiants se couchent sur leurs livres, pour une trève perpétuelle sous les auspices d’une nature généreuse. Le pays de Cocagne peut être vu comme une expression de l’aspiration à la prospérité universelle, à la paix et à l’égalité, un paradis terrestre, une utopie.
Le pays de Cocagne en Musique
Edward Elgar a écrit en 1901 une ouverture de concert, Cockaigne décrivant une place londonienne idéalisée.
Voir aussi
Catégories : Pays de fiction | Utopie
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