- Olympia (Manet)
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Olympia Artiste Édouard Manet Année 1863 Type Huile sur toile Dimensions (H × L) 130 5 cm × 190 cm Localisation Musée d'Orsay, Paris modifier Olympia est un tableau réalisé par Édouard Manet en 1863 et conservé au musée d'Orsay. Initialement prévue pour le Salon des Refusés de la même année, l'œuvre ne sera finalement dévoilée par le peintre que deux ans plus tard.
L'œuvre, qui allait susciter une controverse encore plus féroce que le Déjeuner sur l'herbe, représente une prostituée semblant issue d'un harem à l'orientale et s'apprêtant visiblement à prendre un bain. Le tableau, qui associe et fait ressortir avec puissance le contraste entre la femme blanche et la femme noire, s'inscrit en réalité dans la longue tradition artistique et très académique dite de « l'odalisque à l'esclave » : ainsi des Odalisques d'Ingres, ou encore de l'Odalisque de Benouville et de celle de Jalabert dans les années 1840.
Bien que Manet ait à l'évidence cherché le scandale, l'avalanche de récriminations dont il fut la victime l'accabla assez fortement, et le soutien de son ami Charles Baudelaire l'aida à passer ce cap difficile de sa vie.
Analyse
Olympia, avant tout, se veut une référence audacieuse à la Vénus d'Urbin (119 × 165 cm) du Titien. Manet s'inspire aussi pour cette toile de La Maja nue (97 × 190 cm) de Francisco Goya. Le modèle de l'Olympia adopte une pose identique à celle de la Vénus d'Urbin, mais cette reprise de la posture va être transformée. Effectivement, dans la première œuvre, l'on a une figure chaste et innocente, le chien est un symbole de fidélité et les deux servantes rangent des affaires dans un coffre de mariage. La présence de l'Olympia est troublante avec son regard qui fixe le spectateur. Si la main cache le sexe, elle présente un modelé vigoureux. L'atmosphère générale d'érotisme, surtout, est renforcée par la présence du chat noir à la queue relevée, aux pieds de la jeune fille. L'animal fut ajouté par Manet, non sans humour, afin de remplacer l'innocent chien figurant dans la Vénus d’Urbin, et peut-être également afin de désigner par métaphore ce que la jeune fille cache précisément de sa main. Ce chat traduit une présence vraisemblablement masculine. Cette version est renforcée par la présence du bouquet de fleurs apporté par la servante. Cependant la femme n'a pas un regard aussi froid que le modèle de Manet. L'on peut ainsi dire que l'amour passion est dans l'Olympia remplacé par l'amour vénal. En effet, la toile représente une scène qui évoque la prostitution sous le Second Empire et le sujet va être d'autant plus strident que le traitement va être réaliste.
Le caractère désintéressé et hautain de l'Olympia est traduit par le fait que la femme de chambre au second plan se fond avec la couleur du mur. Tandis qu'elle manifeste un intérêt certain à apporter à l'Olympia les fleurs qu'elle vient de recevoir, celle-ci n'y prête aucune attention et continue à poser et à aguicher les spectateurs que nous sommes d'un regard franc et provocant.
Outre qu’elle soit entièrement nue, le modèle (Victorine Meurent) s'affiche avec une insolence et une provocation indéniables. D'autres éléments de la composition ont longtemps perturbé les critiques : c'est le cas du bouquet de fleurs, nature morte s'invitant de manière incongrue dans un tableau de nu, mais aussi du bracelet (qui appartenait à la mère du peintre) et de l'absence d'une perspective construite[1]. De plus, au XIXs siècle le nu n'est concevable que s'il est dans un autre espace temps. Dans cette toile, le modèle est fortement individualisé ce qui s'oppose à la traditionnelle idéalisation des nus. Effectivement, Manet peint ici Victorine avec ses jambes courtes, sa petite poitrine, son menton pointu et son visage carré. Cette individualisation va de pair avec une certaine dureté dans le nu. Ce personnage ne présente aucune sensualité et la tendresse, la pudeur, l'abandon sont écartés au profit d'une représentation non expressive qui s'observe dans le rendu des chairs.
On remarque également une sorte de mélange de couleurs sur les motifs du mur à l'arrière plan, ce qui donne un aspect non terminé, contrairement à ce que veulent les normes de l'académisme.
Contrairement au Déjeuner sur l'herbe, Olympia n'est donc pas tant choquante par son thème que par la manière dont ce thème est traité et les critiques d'art vont être véritablement choqués par le caractère iconoclaste du tableau qui inaugure la modernité. Ainsi, Paul de Saint Victor parle de « l'Olympia faisandé de monsieur Manet ».
Notes et références
- Daniel Arasse) En cela il s'approche encore plus du tableau du Titien (voir l'analyse de
Bibliographie
Voir Histoires de peinture de Daniel Arasse pour le parallèle analytique avec la Vénus d'Urbin du Titien et surtout l'absence de perspective.
Catégories :- Tableau d'Édouard Manet
- Tableau des années 1860
- Œuvre conservée au Musée d'Orsay
- Nu féminin
- 1863 en France
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