- Arabo-berbère
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Les Arabo-berbères forment une population issue du brassage des Berbères ou Imazighen, l'ensemble d'ethnies autochtones d'Afrique du Nord, et des Arabes venus répandre l'Islam au Maghreb.
Sommaire
Étymologie
Le nom de Berbère apparait pour la première fois explicitement après la fin de l'Empire romain. La pertinence de son usage pour la période précédente n'est pas admise par tous les historiens de l'antiquité[1]. Les historiens arabes adopteront à leur tour plus tard le mot « barbares[2] » (en arabe : بَربَر , prononcé berbères).
L'islamisation et l'arabisation de cette population a donné naissance à la population Arabo-berbère, terme utilisé par extension à tout le Maghreb lors des croisades. En 1978, dans la constitution mauritanienne le terme même d'arabo-berbère pour désigner les maures a été remplacé par arabe.
Conquête arabo-musulmane
Article détaillé : Conquête musulmane du Maghreb.La première expédition arabe sur la Tunisie est lancée en 647[3]. En 661, une deuxième offensive se termine par la prise de Bizerte. La troisième, menée en 670 par Oqba Ibn Nafi Al Fihri, est décisive : ce dernier fonde la ville de Kairouan au cours de la même année[4] et cette ville devient la base des expéditions contre le nord et l’ouest du Maghreb[5]. L’invasion complète manque d’échouer avec la mort d’Ibn Nafi en 683[6]. Envoyé en 693 avec une puissante armée arabe, le général ghassanide Hassan Ibn Numan réussit à vaincre l’exarque et à prendre Carthage[7] en 695. Seuls résistent certains Berbères dirigés par la Kahena[7]. Les Byzantins, profitant de leur supériorité navale, débarquent une armée qui s’empare de Carthage en 696 pendant que la Kahena remporte une bataille contre les Arabes en 697[7]. Ces derniers, au prix d’un nouvel effort, finissent cependant par reprendre définitivement Carthage en 698 et par vaincre et tuer la Kahena[6].
Contrairement aux précédents envahisseurs, les Arabes ne se contentent pas d’occuper la côte et entreprennent de conquérir l’intérieur du pays. Après avoir résisté, les Berbères se convertissent à la religion de leurs vainqueurs[6], principalement à travers leur recrutement dans les rangs de l’armée victorieuse. Des centres de formation religieuse s’organisent alors, comme à Kairouan, au sein des nouveaux ribats. On ne saurait toutefois estimer l’ampleur de ce mouvement d’adhésion à l’islam. D’ailleurs, refusant l’assimilation, nombreux sont ceux qui rejettent la religion dominante et adhèrent au kharidjisme, hérésie née en Orient et proclamant l’égalité de tous les musulmans sans distinction de race ni de classe[8]. La région reste une province omeyyade jusqu’en 750, quand la lutte entre Omeyyades et Abbassides voit ces derniers l’emporter[8]. De 767 à 776, les kharidjites berbères sous le commandement d’Abou Qurra s’emparent de tout le territoire, mais ils se retirent finalement dans leur royaume de Tlemcen, après avoir tué Omar ibn Hafs, surnommé Hezarmerd, dirigeant de la Tunisie à cette époque[9].
En 800, le calife abbasside Haroun ar-Rachid délègue son pouvoir en Ifriqiya à l’émir Ibrahim ibn Al-Aghlab[10] et lui donne le droit de transmettre ses fonctions par voie héréditaire[11]. Al-Aghlab établit la dynastie des Aghlabides, qui règne durant un siècle sur le Maghreb central et oriental. Le territoire bénéficie d’une indépendance formelle tout en reconnaissant la souveraineté abbasside[11]. La Tunisie devient un foyer culturel important avec le rayonnement de Kairouan et de sa Grande mosquée, un centre intellectuel de haute renommée[12]. À la fin du règne de Ziadet Allah Ier (817-838), Tunis devient la capitale de l’émirat jusqu’en 909[13].
Appuyée par les tribus Kutama qui forment une armée fanatisée, l’action du prosélyte ismaélien Abu Abd Allah ach-Chi'i entraîne la disparition de l’émirat en une quinzaine d’années (893-909)[14]. En décembre 909, Ubayd Allah al-Mahdi se proclame calife et fonde la dynastie des Fatimides, qui déclare usurpateurs les califes omeyyades et abbassides ralliés au sunnisme. L’État fatimide s’impose progressivement sur toute l’Afrique du Nord en contrôlant les routes caravanières et le commerce avec l’Afrique subsaharienne. En 945, Abu Yazid, de la grande tribu des Banou Ifren, organise sans succès une grande révolte berbère pour chasser les Fatimides. Le troisième calife, Ismâ`îl al-Mansûr, transfère alors la capitale à Kairouan et s’empare de la Sicile[15] en 948. Lorsque la dynastie fatimide déplace sa base vers l’est en 972, trois ans après la conquête finale de la région, et sans abandonner pour autant sa suzeraineté sur l’Ifriqiya, le calife Al-Muizz li-Dîn Allah confie à Bologhine ibn Ziri — fondateur de la dynastie des Zirides — le soin de gouverner la province en son nom. Les Zirides prennent peu à peu leur indépendance vis-à-vis du calife fatimide[15], ce qui culmine avec la rupture avec ce suzerain devenu lointain et inaugure l’ère de l’émancipation berbère[14]. L’envoi depuis l’Égypte de tribus arabes nomades sur l’Ifriqiya marque la réplique des Fatimides à cette trahison[14]. Les Hilaliens suivis des Banu Sulaym — dont le nombre total est estimé à 50 000 guerriers et 200 000 bédouins[14] — se mettent en route après que de véritables titres de propriété leur ont été distribués au nom du calife fatimide. Kairouan résiste pendant cinq ans avant d’être occupée et pillée. Le souverain se réfugie alors à Mahdia en 1057 tandis que les nomades continuent de se répandre en direction de l’Algérie, la vallée de la Medjerda restant la seule route fréquentée par les marchands[14]. Ayant échoué dans sa tentative pour s’établir dans la Sicile reprise par les Normands, la dynastie ziride s’efforce sans succès pendant 90 ans de récupérer une partie de son territoire pour organiser des expéditions de piraterie et s’enrichir grâce au commerce maritime.
Les historiens arabes sont unanimes à considérer cette migration comme l’événement le plus décisif du Moyen Âge maghrébin, caractérisé par une progression diffuse de familles entières qui a rompu l’équilibre traditionnel entre nomades et sédentaires berbères[14]. Les conséquences sociales et ethniques marquent ainsi définitivement l’histoire du Maghreb avec un métissage de la population. Depuis la seconde moitié du VIIe siècle, la langue arabe demeurait l’apanage des élites citadines et des gens de cour. Avec l’invasion hilalienne, les dialectes berbères sont plus ou moins influencés par l’arabisation, à commencer par ceux de l’Ifriqiya orientale[14].
Articles connexes
Notes et références
- (fr)Journée d'étude Africa Antiqua sur l'historiographie de l'Afrique du Nord. Voir les remarques de M. Lenoir en fin de compte rendu
- Ibn Khaldoun, Histoire des Berbères et des dynasties musulmanes de l'Afrique septentrionale
- http://www.clio.fr/BIBLIOTHEQUE/la_conquete_musulmane_de_loccident.asp
- Yves Lacoste et Camille Lacoste-Dujardin, op. cit., p. 42
- (fr) Article sur la Tunisie (Encarta)
- ISBN 2747528863) Michel Quitout, Parlons l’arabe tunisien : langue et culture, éd. L’Harmattan, Paris, 2002, p. 11 (
- Ephrem-Isa Yousif, op. cit., p. 358
- Yves Lacoste et Camille Lacoste-Dujardin, op. cit., p. 43
- ISBN 9961690277) Ibn Khaldoun, Histoire des Berbères et des dynasties musulmanes de l’Afrique septentrionale, traduit par le baron de Slane, éd. Berti, Alger, 2003 (
- Michel Quitout, Parlons l’arabe tunisien : langue et culture, p. 12
- ISBN 9789068317398) Jacques Thiry, Le Sahara libyen dans l’Afrique du nord médiévale, éd. Peeters Publishers, Louvain, 1995, p. 166 (
- (fr) [PDF] Rafik Saïd, La Politique culturelle en Tunisie, éd. Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture, Paris, 1970, p. 14
- ISBN 2738466109) Paul Sebag, Tunis. Histoire d’une ville, éd. L’Harmattan, Paris, 2000, p. 87 (
- (fr) François Decret, « Les invasions hilaliennes en Ifrîqiya », Clio, septembre 2003
- ISBN 9782035202505) Collectif, L’encyclopédie nomade 2006, éd. Larousse, Paris, 2005, p. 707 (
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