- Lugus
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Lug (dieu)
Pour les articles homonymes, voir Lug.Lug est le dieu suprême de la mythologie celtique, non seulement parce qu'il est au sommet de la hiérarchie mais aussi parce qu'il est panceltique : il fait partie des rares divinités à se retrouver sous le même nom, selon nos connaissances, chez tous les peuples celtes. Comme la Morrigan, il apparaît parfois sous la forme d’un corbeau.
Sommaire
Un dieu panceltique
Gaule
L'importance de Lugos en Gaule est notamment attestée par un certain nombre de toponymes dont le plus connu est Lugdunum (dunon en gaulois, qui signifie forteresse et colline - voir article dun), la ville de Lyon et aussi celle de Laon.
Pays de Galles
Son équivalent au Pays de Galles se nomme Llew Llaw Gyffes (« à la main adroite »), il apparaît dans la littérature dans les récits des Mabinogion[1].
Irlande
C'est dans les sources irlandaises qu'il en est le plus question, en particulier dans le « Cath Maighe Tuireadh » (la « Bataille de Mag Tured »). De nos jours, Lug est présent dans la fête du 1er août : Lugnasad (Lûnasa en graphie moderne).
Les Tuatha Dé Danann
Selon les sources irlandaises, la société divine est structurée de la même manière que la société humaine, et l'organisation des Tuatha Dé Danann (les Gens de la tribu de Dana) est hiérarchisée en trois classes fonctionnelles :
- la fonction sacerdotale dont le rôle recouvre le Sacré, incarnée par le Dagda le dieu-druide
- la fonction guerrière qui se charge notamment de la souveraineté, représentée par Ogme le dieu guerrier et Nuada le dieu-roi
- la fonction artisanale qui doit produire pour l'ensemble de la communauté, figurée par Goibniu, Credne et Luchta
Organisation de la société divine[2]
- hors classe (le roi représente la société entière) :
- Lug Samildanach (dieu-roi)
- fonction sacerdotale :
- Dagda (dieu-druide)
- fonction guerrière :
- fonction artisanale :
- participent aux trois fonctions :
– divinité féminine unique :
- Brigit (déesse des poètes, des forgerons et des médecins)
Ce schéma correspond à l'idéologie tripartite des Indo-Européens telle qu’elle a été étudiée par Georges Dumézil. Lug n'appartient à aucune classe en particulier, mais à toutes, il est au-dessus car il peut assumer toutes les fonctions (il est le dieu-roi). L'un de ses surnoms est Samildanach, le « polytechnicien » en ce sens qu'il maîtrise tous les arts, toutes les sciences.
Genèse et initiation
Lug est le fils de Cian et Eithne, il est aussi apparenté aux Fomoires par son grand-père maternel Balor, qu'il tue avec son lance-pierre, conformément à une prophétie[3].
Alors qu'il se présente à la résidence du roi Nuada, à l'occasion d'une fête, le Portier[4] lui refuse l'accès. Lug affirme qu'il peut être utile, on lui répond par la négative ; c'est ainsi qu'il est successivement charpentier, forgeron, échanson, guerrier, magicien. C'est en qualité de joueur d'échecs qu'il est accepté, et dispute une partie avec le roi qu'il bat. Cette partie est purement symbolique puisqu'il s’agit d’une joute intellectuelle à l'issue de laquelle, Lug prend le pouvoir du monde.
On le retrouve combattant avec son fils Cúchulainn, lors de l'invasion de l'Ulster par la reine Medb[5].
Le polytechnicien aux multiples fonctions
Jules César, dans ses Commentaires sur la Guerre des Gaules le compare à Mercure :
« Le dieu qu’ils honorent le plus est Mercure : ses statues sont les plus nombreuses, ils le considèrent comme l’inventeur de tous les arts, il est pour eux le dieu qui indique la route à suivre, qui guide le voyageur, il est celui qui est le plus capable de faire gagner de l’argent et de protéger le commerce. »— Jules César, Commentaires sur la Guerre des Gaules, Livre VI, 17[6].
Son nom même, en rapport avec la lumière en fait un dieu solaire.
Un autre de ses nombreux surnoms est « lamfada » ce qui signifie « au long bras », ce qui confirme l'universalité de ses pouvoirs. Il maîtrise la création, les échanges, la pensée et la beauté, c'est un druide, un guerrier et un artisan qui peut aussi se montrer vindicatif et obscur.
Il possède une lance magique, arme mortelle à chaque coup mais qui sert aussi à l'adoubement royal ; elle est inséparable du Chaudron du Dagda rempli de sang, il faut qu'elle y soit plongée pour éviter qu'elle ne détruise tout autour d'elle ; il se sert aussi d’une fronde redoutable.
Pour les arts, il a une harpe qui joue de la musique toute seule, mais dont il sait se servir admirablement : elle peut endormir, faire pleurer ou rire.
Dieu magicien, il protège son camp en gesticulant d'un bras, sautant à cloche-pied et en fermant un oeil. C'est un dieu borgne proche du védique Varuna, à l'instar du scandinave Odin.
Postérité
Note : l'omnipotence de Lug a fait dire à certains que le druidisme était une religion relevant du monothéisme, tous les autres dieux n'étant que ses avatars. Cette thèse est contestable et invérifiable. Elle est par ailleurs incompatible avec les travaux de mythologie comparée sur le domaine des dieux indo-Européens, dont les structures des panthéons polythéistes sont relativement similaires.
Articles connexes
Textes mythologiques irlandais
- Táin Bó Cúailnge - La Razzia des vaches de Cooley
- Lebor Gabála Érenn - Livre des Invasions d’Irlande
- Cath Maighe Tuireadh - La Bataille de Maighe Tuireadh
- Oidheadh Chlainne Tuireann - La Mort des enfants de Tuireann
- Compert Con Culainn - La Conception de Cúchulainn
- Dindshenchas métrique - Antiquités
Notes
- ↑ 'Les Quatre branches du Mabinogi et autres contes gallois du Moyen-Age traduit du gallois, présenté et annoté par Pierre-Yves Lambert, Éditions Gallimard, collection « L'aube des peuples », Paris, 1993, (ISBN 2-07-073201-0).
- ↑ Voir Christian-J. Guyonvarc'h et Françoise Le Roux, Les Druides, page 422
- ↑ Venceslas Kruta, Les Celtes, histoire et dictionnaire, page 712.
- ↑ Le Portier (en irlandais dorsaide) est un personnage important puisque c’est un druide, dont la mission est, non seulement de recevoir les visiteurs, mais surtout de voir s’ils sont dignes d’être reçus. Guyonvarc’h et Le Roux, Les Druides, page 413.
- ↑ La Rafle des vaches de Cooley, récit celtique irlandais traduit de l'irlandais, présenté et annoté par Alain Deniel, L’Harmattan, Paris, 1997, (ISBN 2-7384-5250-7)
- ↑ Wikisource : Jules César, Commentaires sur la Guerre des Gaules, Livre VI.
Bibliographie
- Paul-Marie Duval, Les Dieux de la Gaule, éditions Payot, Paris, février 1993, 169 p. (ISBN 2-228-88621-1).
Réédition augmentée d'un ouvrage paru initialement en 1957 aux PUF. Paul-Marie Duval distingue la mythologie gauloise celtique du syncrétisme dû à la civilisation gallo-romaine.
- Albert Grenier, Les Gaulois, Petite bibliothèque Payot, Paris, août 1994, 365 p. (ISBN 2-228-88838-9).
Réédition augmentée d'un ouvrage paru initialement en 1970. Albert Grenier précise l’origine indo-européenne, décrit leur organisation sociale, leur culture et leur religion en faisant le lien avec les Celtes insulaires.
- Christian-J. Guyonvarc'h, Magie, médecine et divination chez les Celtes, Bibliothèque scientifique Payot, Paris, 1997, (ISBN 2-228-89112-6).
- Christian-J. Guyonvarc'h et Françoise Le Roux, Les Druides, Ouest-France Université, coll. « De mémoire d’homme : l’histoire », Rennes, 1986, (ISBN 2-85882-920-9).
- Christian-J. Guyonvarc'h et Françoise Le Roux, La Civilisation celtique, Ouest-France Université, coll. « De mémoire d’homme : l’histoire », Rennes, 1990, (ISBN 2-7373-0297-8).
- Christian-J. Guyonvarc'h et Françoise Le Roux, Les Fêtes celtiques, Ouest-France Université, coll. « De mémoire d’homme : l’histoire », Rennes, 1995, (ISBN 2-7373-1198-7).
- Philippe Jouët, Aux sources de la mythologie celtique, Yoran embanner, Fouesnant, 2007, (ISBN 978-2-914855-37-0)
- Venceslas Kruta, Les Celtes, Histoire et Dictionnaire, Éditions Robert Laffont, coll. « Bouquins » , Paris, 2000, (ISBN 2-7028-6261-6).
Consulter aussi la Bibliographie de la mythologie celtique et la Bibliographie sur les Celtes.
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