Jean de Gribaldy

Jean de Gribaldy
Jean de Gribaldy Icône cycliste
Jean de Gribaldy et Joaquim Agostinho 1980.jpg
Jean de Gribaldy et le coureur portugais Joaquim Agostinho, 1980
Informations
Nom de Gribaldy
Prénom Jean
Date de naissance 18 juillet 1922
Date de décès 2 janvier 1987 (à 64 ans)
Pays Drapeau de France France
Équipe pro
1945-1949
1951
1951-1954
Peugeot-Dunlop
Mervil
Terrot
Équipe dirigée
1964-1986 Frimatic-Viva-de Gribaldy
Principales victoires
Tour du Doubs

Jean de Gribaldy, à Besançon le 18 juillet 1922 et décédé à Voray-sur-l'Ognon le 2 janvier 1987 était un ancien coureur cycliste professionnel français, devenu ensuite directeur sportif.

Après une modeste carrière de coureur cycliste professionnel (de 1945 à 1954), il devint directeur sportif d'équipes cyclistes (de 1964 jusqu'à la fin de sa vie). Au cours des années 1970 et 80, il se fit notamment connaître comme un "découvreur de talents", et devint l'un des plus fameux directeurs sportifs du monde du cyclisme.

Sommaire

Biographie

Origines, enfance et jeunesse

Jean de Gribaldy descend dune lignée de la noblesse piémontaise, les de Gribaldi (avec un « i » final), établie en Savoie au XVIe siècle. Ses parents, Francis de Gribaldi et Madeleine Garnache-Barthod, étaient fermiers dans le Haut-Doubs.

Jean de Gribaldy était lui-même vicomte en titre ; il était d'ailleurs souvent surnommé "le vicomte" dans le monde du cyclisme.

Jean de Gribaldy effectue ses études au collège de Morteau. Technicien en horlogerie, il enseigne comme maître décole pendant un mois en 1940.

Cest en voyant passer à Morteau Antonin Magne, paré du maillot jaune du Tour de France, que le jeune Jean, alors âgé de neuf ans, décide quil deviendra coureur cycliste.

Du coureur cycliste...

Jean de Gribaldy débute sa carrière en 1939 au Vélo Club de Pontarlier. Coureur de petit gabarit (1,65 m pour 64 kg), il se révèle très vite un excellent grimpeur. Il remporte notamment le Championnat du Doubs et Montereau-Paris en 1944, puis passe professionnel en 1945 au sein de l'équipe Peugeot-Dunlop, aux côtés notamment de Camille Danguillaume et Maurice Demuer. Il se classe deuxième du championnat de France sur route en 1947. Il se classe également à trois reprises dans les dix premiers du championnat de France de cyclo-cross, et participe au Tour de France en 1947, 1948 et 1952.

Manquant probablement un peu de puissance dans les courses plates il faut emmener dimportants braquets, il ne devint jamais un des grands coureurs du peloton. Pourtant sa passion pour la petite reine, ainsi quune grande rigueur dans la préparation physique et diététique que lexpérience de terrain va lui permettre daffiner progressivement, vont faire de lui un coureur respecté et connu de tous.

Au cours de sa carrière, il fut notamment le coéquipier de Ferdi Kübler, Pierre Brambilla, Charly Gaul, Paul Giguet, Emile Idée, Maurice De Muer ou encore Camille Danguillaume et Jean Robic.

Avant même la fin de sa carrière professionnelle, Jean de Gribaldy songe à sa reconversion, conscient qu'un coureur aussi modeste que lui ne pourrait amasser une fortune suffisante pour ne plus avoir à travailler quand l'heure de la retraite sportive sonnerait, et ouvre un magasin de cycles à Besançon.

Après une fracture de lomoplate dans Paris-Valenciennes 1954, Jean de Gribaldy se retire des pelotons comme coureur.

...au directeur sportif

Pendant une dizaine d'années, Jean de Gribaldy se consacre au développement de son commerce, tout en gardant des liens avec le milieu cycliste.

En 1964, Jean de Gribaldy accepte de créer une équipe de coureurs locaux, à la demande, semble-t-il, de son ami Jean Leulliot, organisateur de courses assez connu à l'époque. Léquipe sappellera Grammont - De Gribaldy (Grammont étant une marque de téléviseurs).

Jusquen 1967, il dirige des équipes regroupant des coureurs professionnels, indépendants ou amateurs hors catégories. La dénomination des équipes varie au gré du pays dans lequel ont lieu les courses (France, Suisse, Allemagne).

De Besançon, il résidait, il allait souvent voir des courses régionales amateurs et nhésitait pas à franchir régulièrement la frontière pour observer les coureurs suisses. Ceci explique que, durant les premières années on retrouve dans la composition de ses équipes une proportion forte de coureurs de lest de la France (notamment un certain Maurice Izier, futur vainqueur d'étape sur le Tour de France, ainsi que des Suisses et des Luxembourgeois).

Cest en 1968, avec léquipe Frimatic-Viva-de Gribaldy, quil dirige sa première formation composée en majorité de professionnels. Dès cette année-, il commence à obtenir quelques résultats marquants.

1969 sera lannée de la consécration. Léquipe Frimatic - Viva - de Gribaldy mise en place par le Vicomte a fière allure avec dans ses rangs Willy et Walter Planckaert et Jean Jourden.

Pourtant, c'est un jeune Portugais, totalement inconnu en France, que le Vicomte a découvert au Brésil, lors du Tour de Sao Polo 1968, qui va simposer comme le grand leader de léquipe : Joaquim Agostinho. Celui-ci, pour sa première saison professionnelle, sadjuge 13 victoires dont le Trophée Baracchi et 2 étapes du Tour quil termine à la 5e place. Ce sont les succès inattendus du Portugais Joaquim Agostinho qui valent à Jean de Gribaldy sa réputation de dénicheur de talents. Plus tard, Jean de Gribaldy expliqua dans quelles conditions il recruta Joaquim Agostinho :

"A la fin de ma vie, sil ne me fallait conserver que le souvenir dun seul endroit au monde, je nhésiterais pas longtemps : je choisirais ce petit hôtel brésilien, insignifiant, discret, de Sao Paulo javais donné rendez vous à Joaquim. Cétait en 1968. Je lavais remarqué deux mois plus tôt à Imola, au championnat du monde, mais cest que je lui ai parlé pour la première fois. Je lui ai demandé simplement : "Voudrais-tu venir courir en France" ? Il ne connaissait aucun mot de français, mais dans son sourire jai compris tout de suite ce quil voulait me répondre. Que de chemin parcouru ensemble depuis... Que de souvenirs nous rattachent lun à lautre. Jappréhende ce jour, très proche, il dira adieu à cette bicyclette avec laquelle il a connu les joies les plus immenses et les peines les plus profondes. Car ce jour , et il le sait bien, lexistence naura plus du tout pour moi la même signification. Alors pour atténuer ma peine, je fermerai les yeux et je recommencerai à zéro, avec Joaquim".

En cette année 1969, Jean de Gribaldy connaît des joies, avec les nombreux succès de ses coureurs, mais aussi la douleur de perdre un de ses hommes : Joseph Mathy (vainqueur dune étape des 4 jours de Dunkerque et du Grand Prix de Denain, décédé dun accident de la circulation alors quil venait tout juste davoir 25 ans.

Par la suite, le Vicomte demeurera fidèle à sa réputation de dénicheur de talents, en découvrant notamment lIrlandais Sean Kelly et ses 193 victoires, le Néerlandais Steven Rooks, qui remporte en quasi inconnu Liège-Bastogne-Liège en 1983, ou le Français Eric Caritoux (vainqueur du Tour dEspagne à la surprise générale en 1984). Il découvre également d'autres coureurs comme les Français Mariano Martinez, René Bittinger, Serge Beucherie et Marcel Tinazzi.

Découvreur de talent sans aucun doute, mais ce directeur sportif atypique et omniprésent a su aussi redonner une chance à de nombreux coureurs délaissés par les autres équipes. Souvent à tort, tant leur carrière prit une nouvelle dimension sous limpulsion de Jean de Gribaldy. Et quel palmarès : Jean Jourden vainqueur des Quatre Jours de Dunkerque en 1968, Michel Laurent victorieux à Paris-Nice en 1976, et Jean-Claude Leclercq champion de France sur route. Idem pour Serge Beucherie, champion de France sur route en 1981 alors qu'il était sans employeur lannée précédente.

Jean de Gribaldy conduira ses équipes au plus haut niveau, jusqu'à sa disparition accidentelle en 1987.

En dehors du cyclisme

La vie de Jean de Gribaldy ne se résumait pas au petit monde des courses cyclistes.

Ainsi, malgré ses multiples activités, il avait trouvé le temps de passer son brevet de pilote davion et il aimait de temps en temps prendre les commandes.

Il côtoya également de nombreuses stars : Johnny Hallyday, dont il devint un proche dès 1959 et qu'il transporta parfois dun concert à un autre dans son petit avion, mais également Sylvie Vartan, Michel Sardou, Thierry Le Luron, Jean-Paul Belmondo, Michel Audiard, Jean Carmet, Jean Rochefort, Louis Nucéra, Carlos, Marcel Amont, Lino Ventura et Jacques Brel.

Le souvenir de Jean de Gribaldy

Depuis 1994, lune des rues de Besançon porte son nom : "la Montée Jean de Gribaldy", qui vous amène au sommet de la colline de Chaudanne sur laquelle domine le fort du même nom. Bel hommage au très bon grimpeur quil fut ! Il dirigeait dans la capitale comtoise, Place de la Révolution (ancienne place du Marché), un magasin qui demeure bien inscrit dans lhistoire de cette ville. Cest grâce à lui, que du 3 au 7 septembre 1980, y sont organisés les Championnats du monde de cyclisme sur piste. Chaque année au mois de juillet sont organisées autour de Montbéliard dans le Doubs "la Jean de Gribaldy", rendez-vous incontournable du cyclotourisme et à Besançon, la "Montée Jean de Gribaldy", organisée par l'Amicale Cycliste Bisontine, qu'il fonda en 1964.

Témoignages

De Sean Kelly

  • Quand vous êtes passé dans les rangs des professionnels, cest Jean de Gribaldy qui vous a fait signer. Est-il vrai quil est venu jusquà la ferme de vos parents avec un contrat en main ?

Oui, cest vrai ! Je suis allé courir en France en 1976. Je suis resté pendant peut-être 6 mois dans un club à Metz, jai eu de bons résultats et jai gagné beaucoup de courses. Jai participé au Tour de Bretagne (en 1975) sous le maillot de léquipe nationale irlandaise. Jai été suspendu de léquipe après être allé participer à une course en Afrique du Sud, jaurais certainement été sélectionné pour les Jeux olympiques de 1976, que jai manqué de ce fait. Alors jai décidé de retourner courir en France, et fin 76 on ma proposé un contrat avec léquipe de Jean de Gribaldy. Il avait pris contact avec moi par lintermédiaire de mon club alors que je ne lavais jamais rencontré ! Jai refusé, en répondant que je voulais rester amateur et que jétais encore trop jeune. Je suis retourné à la maison en Irlande, et effectivement il est venu me voir jusquen Irlande en octobre avec un contrat à la main.

  • Il était un personnage étonnant, à quoi ressemblait-il ?

Comme directeur sportif, il était très en avance sur son époque. Il a eu quelques grandes idées. Par exemple, il était en avance de 10 ans sur tout le monde en matière de régime. Il savait, 10 ans avant que les autres équipes se préoccupent de cette question, ce que vous pouviez manger ou non. Pour lentraînement, il était aussi un précurseur. À lépoque, les coureurs parcouraient des distances incroyables sur leur vélo. Ils faisaient des sorties journalières de 5 à 6 heures, de vrais marathons. Cest lui qui ma incité à faire des sorties plus courtes alternées avec une longue en milieu de semaine. aussi, cétait 10 ans avant les programmes dentraînement pointus. Jai vite réalisé quil possédait des qualités incroyables, car javais déjà pratiqué lentraînement !

De Robert Chapatte (1987)

"Le grand vent, même ne le décoiffait pas. Lallure superbe, le visage angélique, il allait son chemin, insouciant de ceux qui occupaient la tête. Lui, courait sa course personnelle sans inquiétude de son classement.

Un marginal ne pouvant cependant se passer de la vie sans cette société du peloton.

Il recherchait lanonymat mais il assurait sa présence. Un témoin plus quun acteur. Mais que lon ne sy trompe pas, "de Gri" tenait en lui toutes les qualités dun champion. Vers la montagne allait sa préférence... et souvent il y accompagnait les plus grands. Dans cette facilité parfois insolente qui désespérait ses amis, car il nattaquait pas. Pour quelles raisons ne fut-il pas lun des tout meilleurs grimpeurs de son époque ? Je crois que son ambition ne se situait pas ... Bavarder avec Paul Giguet, Maurice De Muer ou Camille Danguillaume, ses copains de Peugeot ou avec Raphaël Géminiani lintéressait davantage. Et quand il remontait de larrière, la pédale haute et quenfin son talent pouvait sexprimer il sarrêtait à la hauteur de Rémy ou de Néri pour leur raconter la dernière misère de lineffable Giguet.

Devenu patron déquipe, toujours fidèle à ses amitiés et à ses principes, le coup dœil du dénicheur, laffection prête à se manifester auprès de ses coureurs, Jean était un personnage hors série, indispensable au cyclisme français. Tout le monde na pas su le comprendre."

De Raphaël Géminiani, en (1987)

"En 1945, alors que nous étions jeunes coureurs, javais dans les courses régionales fait connaissance du bisontin Jean de Gribaldy. Dans le Tour de France 1947, Jean courait sous le maillot Nord-Est, jétais sous les couleurs Sud-Ouest-Centre. Depuis cette époque, nos routes ont été parallèles, et une saine, sincère, et longue amitié nous unissait.

Aussi depuis sa disparition, je ne cesse dêtre triste et songeur en pensant que durant ces 40 années -un temps énorme- il lui a fallu toujours se battre sans convaincre, entreprendre sans succès, lutter sans gagner, pour ce sport cycliste quil connaissait et aimait mieux que tout le monde. Il ladorait aussi, comme peu peuvent le prétendre aujourdhui.

Ces dernières années avaient été bien meilleures, et çà et enfin, mais trop rarement ou chichement à mon goût, on lui reconnaissait des réelles compétences et qualités. Alors que lon ne manquait pas d’"abreuver" déloges certains dans ce même métier beaucoup plus jeunes, qui navaient encore que peu entrepris, et surtout très peu réussis. Cétait cette furieuse injustice quil ne manquait pas, avec justes raisons, dinvoquer parfois.

Je reste songeur de constater et de voir ces nombreux témoignages tardifs lui revenant, surtout de la part de ceux qui ne le ménagèrent guère durant son long parcours. Même si jen suis ravi, je ne peux que constater que cest trop peu, et trop tard, car Jean de Gribaldy aurait mieux aimé de son vivant sentir dans le milieu cycliste un peu plus damitié, de justice, et surtout de la reconnaissance.

Demeure la joie de constater que dorénavant, son exemple, son travail, son souvenir ne sont pas prêts dêtre oubliés. Avec ce sourire qui nappartenait quà lui, je suis sûr que Jean savoure enfin cette grande victoire".

De Jacques Beaufils (Est-Républicain, 4 janvier 1987)

"La disparition dun homme de cette envergure, de ce calibre, qui anéantit les espoirs de bien des candidats au professionnalisme, et qui va compliquer la tâche de ceux déjà en place, la disparition de cet homme aux allures de gentilhomme, à la fois déroutant et attachant, et qui ne laissait personne indifférent, cest comme la fin dun bel été, avec ses coups de chaleur, ses orages soudains, ses soirées de réflexion. Nous attendrons sans doute longtemps un nouvel été".

De Raymond Poulidor (septembre 2006)

« Jai un souvenir très précis de « Monsieur Jean de Gribaldy », cest ainsi que je lai toujours appelé, moi qui lai connu dès 1960, alors que je débutais ma carrière professionnelle. Nous évoquons souvent entre amis ses méthodes à lancienne, souvent moquées, mais qui fonctionnaient, et son incroyable aptitude de dénicheur de talents. Je pense à Sean Kelly en particulier, qui ne la pratiquement jamais quitté, à Joaquim Agostinho aussi. Il avait un flair hors du commun, et ne restait jamais bien longtemps sans sponsor. Il avait ses entrées dans les boîtes se croisait le Tout Paris, et cest bien souvent quil réussissait à convaincre un sponsor de se lancer dans laventure. Il faisait beaucoup avec des budgets serrés, et disait souvent quil était inutile davoir autant de monde autour des coureurs, autant de véhicules... Quand je vois larmada que draine aujourdhui derrière elle une équipe cycliste, je suis bien souvent sceptique sur lutilité de tout ça... aussi, il avait raison.

Je lai croisé peu avant sa disparition, à Combloux, il organisait chaque année en janvier la semaine arc-en-ciel : une période privilégiée de remise en forme et doxygénation de ses coureurs. Il quittait la station pour, ma-t-il dit, revenir le lendemain. Je ne lai jamais revu. Il était notre maître à tous. Nous pensons à lui très souvent

Équipes

En tant que coureur

  • 1945-1949 : Peugeot - Dunlop
  • 1950 : Mervil
  • 1951 : Terrot - Wolber / Tigra
  • 1952 : Terrot - Hutchinson
  • 1953 : Terrot - Hutchinson / Schlegel Cycles
  • 1954 : Terrot - Hutchinson

En tant que directeur sportif

En tant que sponsor

  • 1968 : VC Poudrette Maison-Neuve -Wolhauser - Café Ravis - de Gribaldy
  • 1972 : Möbel Märki - Bonanza - Ramona - de Gribaldy
  • 1973 : Rokado - de Gribaldy
  • 1974 : Mic - Ludo - de Gribaldy
  • 1975 : Alsaver - Jeunet - de Gribaldy

Palmarès (en tant que coureur)

  • 1944
    • Champion du Doubs
    • Montereau-Paris

Résultats sur le Tour de France

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