Interruption volontaire de grossesse en France

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En France, l'interruption volontaire de grossesse (IVG) est autorisée sous certaines conditions.

Sommaire

Statistiques

Évolution du devenir des grossesses en France (hors fausse-couche précoce) entre 1965 et 2005.
Légende :      IVG clandestine (estimation haute)      IVG clandestine (estimation basse)      IVG déclarée      Fausse couche tardive (> 20 semaines)      Naissance

En France, chaque année il y a environ 200 000 interruptions volontaires de grossesse[1] (227 054 en 2007[2]), soit 14 pour mille femmes de 15 à 49 ans. Dans les années 1975-1985, le taux d'IVG par naissance était de l'ordre de grandeur de 33 %, mais il a chuté depuis et se rapproche lentement de 25 % dans les années 2000. Après le pic de 1982 la tendance est à une baisse régulière. L'avortement clandestin est resté un phénomène significatif jusqu'en 1995, où il a commencé à régresser. Ce n'est qu'en 2003 que ces cas, jugés marginaux, ont disparu des statistiques officielles[3].

Le nombre d’avortements n’a pas baissé en France depuis 30 ans : malgré la diffusion massive de la contraception médicale (pilule et stérilet), le recours à l’IVG est resté étonnamment stable depuis 1975. On estime que près de 40 % des femmes y auront recours dans leur vie. Cette stabilité globale semble, toutefois, masquer une hausse des taux chez les moins de 25 ans[4].

Elle précède de quelques années la dépénalisation de l'avortement de 1975 (loi Veil).

Droit français

En France, l'avortement a longtemps été pénalisé, passible des travaux forcés à perpétuité, voire de la peine de mort (Marie-Louise Giraud, dite « la faiseuse d'anges », avorteuse pendant la guerre, a été guillotinée le 30 juillet 1943).

La dépénalisation de l'avortement et l'encadrement légal de l'interruption volontaire de grossesse (IVG) se firent en 1975, à l'époque où Simone Veil était ministre de la santé du gouvernement Chirac sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing. La majorité de la droite a voté contre le projet de loi, mais le soutien de la gauche à la proposition de Simone Veil lui permet d'obtenir la majorité. Elle défend son avis devant une assemblée composée d'une majorité d'hommes. Mais au bout de 3 jours de débat elle gagne son "combat" et fait apparaître la loi qui porte son nom : loi Veil.


Cette décision arrivait après un mouvement mené dans les débuts des années 1970 par les mouvements féministes, qui se fondaient sur plusieurs arguments :

  • le droit à l'avortement relevait du droit à disposer de son corps ;
  • les IVG clandestines se déroulaient dans des conditions sanitaires préoccupantes ;
  • l'accès à la contraception était insuffisant.

En 1972, le procès de Bobigny, où fut jugée une jeune fille mineure qui avait avorté après un viol, devient un procès politique autour de l'avortement, qui suscite de larges débats et aboutit à l'acquittement de la prévenue.

La loi n° 75-17, du 17 janvier 1975, relative à l'interruption volontaire de grossesse (JO, 18 janvier 1975, p. 739) posa deux formes d'interruption de grossesse (avant la fin de la dixième semaine et thérapeutique) [5]. Elle fut adoptée à titre expérimental, mais la loi n° 79-1204, du 31 décembre 1979, relative à l'interruption volontaire de grossesse (JO, 1er janvier 1980, p. 3) la confirma.

La dernière tentative pour limiter l'impact de cette loi sur l'avortement échoua devant le conseil d'État le 31 octobre 1980[6]. Mme Lahache avait subi un avortement sans en informer son mari. Ce dernier avait attaqué devant le Conseil d'Etat l'administration hospitalière qui l'avait pratiqué, estimant que son avis était requis pour autoriser cet acte, d'autant que sa femme n'était pas, selon lui, dans une situation de détresse. Le Conseil d'État a statué comme suit : « les articles L162-1 à L162-11 du code de la santé publique permettent à toute femme enceinte qui s'estime placée par son état dans une situation de détresse et qui s'est soumise aux consultations prévues par certains de ces articles d'obtenir l'interruption de la grossesse avant la fin de la 10e semaine. Si, d'après le dernier alinéa de l'article L162-4, « chaque fois que cela est possible, le couple participe à la consultation et à la décision à prendre », il ressort de ce texte, éclairé par les travaux préparatoires de la loi, que cette disposition, qui présente un caractère purement facultatif, n'a ni pour objet, ni pour effet de priver la femme majeure du droit d'apprécier elle-même si sa situation justifie l'interruption de sa grossesse. »

L'avortement est remboursé par la Sécurité sociale depuis la loi du 31 décembre 1982. La période légale pendant laquelle une femme peut pratiquer de sa seule volonté une interruption de grossesse avait été initialement fixée aux dix premières semaines de grossesse, soit douze semaines d'aménorrhée. La loi n° 2001-588, du 4 juillet 2001, relative à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception (JO, 7 juillet 2001, p. 10823) allongea la période de dix à douze semaines de grossesse. En revanche, l'avortement pour motif thérapeutique peut être pratiqué au-delà du délai des douze premières semaines et ce jusqu'au dernier moment de la gestation. Une période d'une semaine de réflexion, qui peut être raccourcie à 2 jours si elle place la femme hors des délais légaux d'IVG, est respectée entre le premier rendez-vous où la femme a exprimé son souhait de pratiquer une IVG et le jour de l'IVG.

Jusqu'à la promulgation du nouveau Code pénal en 1992, le droit français connaissait l'infraction d'avortement. Ainsi, jusqu'à cette date, l'interruption légale de grossesse était comprise juridiquement comme une dérogation à un délit. La loi de 1975 n'avait que créé un fait justificatif qui permettait d'éviter les poursuites pénales. Désormais, l'interruption volontaire de grossesse est défendue comme un droit (cf. l'exposé des motifs de la loi du 4 juillet 2001), voire une liberté pour la femme dans la limite des douze premières semaines de gestation (12 semaines de grossesse, soit 14 semaines d'aménorrhée[7])[8]. À l'appui de cette analyse, on relève fréquemment que le nouveau Code pénal et le Code de la santé publique posent une série d'infractions qui ont pour finalité la protection de l'avortement légalement organisé. Cependant, la législation maintient le principe que l'avortement n'est ouvert qu'à la femme enceinte qui estime que son état la place dans une situation de détresse. Sont prohibées les interruptions de grossesse pratiquées sans le consentement de l'intéressée ou pratiquées en violation des règles posées par le Code de la santé publique.

La loi n° 93-121, du 27 janvier 1993, portant diverses mesures d'ordre social (JO, 30 janvier 1993, p. 1576), a introduit dans le Code de la santé publique l'infraction d'entrave aux opérations d'interruption de grossesse.

La loi du 2 juillet 2004 a autorisé l'utilisation du RU 486 pour un avortement médicamenteux chez le médecin de ville.

Depuis 1994, l'interruption thérapeutique après 12 semaines nécessite l'autorisation des centres de diagnostic pluridisciplinaires qui ont compétence pour décider quelles maladies la justifient ou non.

Le Serment d'Hippocrate, prêté par tout médecin, interdit l'avortement ("je ne remettrai à aucune femme un pessaire abortif") et dut pour cette raison être réformé en 1996, dans une version spécifiquement française.

  • [1] L'IVG dans la loi française (Légifrance).
  • [2] L'IMG dans la loi française (Légifrance).

Chronologie de la contraception et à l'avortement en France

  • 1920 : interdiction de la contraception et de l'avortement, crime passible de la Cour d'assises (3 mois à 6 ans de prison). La propagande en leur faveur est interdite.
  • 1939 : code de la famille. Création de brigades policières chargées de traquer les "faiseuses d'anges".
  • 1941 : les personnes suspectées d'avoir participé à un avortement peuvent être déférées devant le Tribunal d'État.
  • 1942 : Loi du 15 février : l'avortement devient un crime d'État puni de mort. Une avorteuse, Marie-Louise Giraud, est guillotinée l'année suivante.
  • 1955 : l'avortement thérapeutique est autorisé. Mise au point de la pilule contraceptive aux États-Unis.
  • 1956 : fondation de la "Maternité heureuse" par Marie-Andrée Lagroua-Weil et Evelyne Sullerot, qui devient en 1960 le Planning familial
  • 1967 : (28 décembre) la loi Neuwirth autorise la contraception, mais la publicité en sa faveur reste interdite.
  • 1971 : Manifeste des 343 signé par 343 femmes déclarant avoir avorté.
  • 1972 : création des centres de planification et des établissements d'information. Procès de Bobigny.
  • 1973 : introduction de l'éducation sexuelle dans les lycées et collèges.
  • 1974 : la contraception est remboursée par l'assurance-maladie. Anonymat et gratuité pour les mineures et non-assurées sociales dans les centres de planification. Mobilisation féministe pour le droit à l'avortement.
  • 1975 : la loi Veil dépénalise l'interruption volontaire de grossesse[9].
  • 1979 : vote définitif de la loi sur l'IVG.
  • 1981 : arrêt Lahache : la femme est seule juge de la nécessité de recourir à l'IVG.
  • 1982 : remboursement de l'IVG par l'assurance-maladie.
  • 1990 : l'IVG médicamenteuse est autorisée en milieu hospitalier.
  • 1993 : dépénalisation du délit d'auto-avortement et création du délit d'entrave à l'IVG.
  • 2000 : autorisation de la délivrance sans ordonnance des contraceptifs d'urgences ; elle se fait pour les mineures à titre gratuit dans les pharmacies ; les infirmières scolaires sont autorisées à administrer une contraception d'urgence dans les cas de détresse.
  • 2004 : l'IVG médicamenteuse est autorisée en médecine de ville.
  • 2007 : l'IVG médiacamenteuse pourra désormais être délivrée dans les Centres de Planification et d'Education Familiale (CPEF).

Pour en savoir plus

Articles connexes

Bibliographie indicative

Sites internet

Dossiers sociologiques officiels
Dossiers juridiques officiels
  • Légifrance, « Descripteurs > INTERRUPTION VOLONTAIRE DE GROSSESSE (IVG) », législation à jour sur le sujet, legifrance.gouv.fr. [ Lire en ligne ]
  • Cour de cassation, « II.1.1. La législation sur l'interruption volontaire de grossesse », Bulletin d’information de la Cour de cassation, Bulletin d'information n° 526, 15 décembre 2000, Rapport de M. Sargos sous arrêt en assemblée plénière du 17 novembre 2000 (Affaire Perruche). [ Lire en ligne ]

Notes et références

  1. http://www.ined.fr/fr/pop_chiffres/france/avortements_contraception/avortements/
  2. http://www.sante.gouv.fr/drees/etude-resultat/er-pdf/er712.pdf
  3. Données FECONDITE.htm#a01 INSEE pour les données de natalité et de naissance mort-nées, chiffres/france/avortements contraception/avortements/ INED pour les statistiques d'avortement à partir de 1995, estimations d'après Chantal Blayo, « L’évolution du recours à l’avortement en France depuis 1976 », in Population, 3, 1995, pages 779 à 810 (voir le tableau dans publication/1077/publi pdf1 84.pdf publication INED, p. 116) pour les périodes antérieures. Voir aussi pour les estimations antérieures à 1975 (haute et basse) : INED, Cahier n° 117. "La seconde révolution contraceptive. La régulation des naissances en France de 1950 à 1985." 1987.
  4. (fr) INED Numéro 407. Pourquoi le nombre d’avortements n’a-t-il pas baissé en France depuis 30 ans ?
  5. http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/interruption/simone_veil_tribune-1.asp Discours de Simone Veil à l'Assemblée nationale (première séance du 26 novembre 1974).
  6. Arrêt Lahache : Conseil d’Etat, 31 octobre 1980, n° 13028, http://www.rajf.org/article.php3?id_article=1134.
  7. revue Prescrire n° 280 fév 2007 p 134-136
  8. les semaines d'aménorrhée sont comptées à partir du 1er jour des dernières règles ; on retranche généralement deux semaines pour avoir une estimation en semaines de grossesse
  9. WebDoc IEP : Texte intégral de la loi Veil de 1975

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