Alessandro Valignano

Alessandro Valignano

Alessandro Valignano, né le 7 février 1539 à Chieti, Abruzzes, Italie et mort le 20 janvier 1606 à Macao, Chine est un prêtre jésuite italien, envoyé en Extrême-Orient par Everard Mercurian, supérieur général de la Compagnie de Jésus. Il y initia une approche inculturée de la foi chrétienne qui transforma le travail missionnaire en Asie.

Le père Alessandro Valignano

Sommaire

Biographie

Jeunesse et formation

Valignano naquit dans une famille illustre de Chieti. Il étudia le droit à l’université de Padoue où il acquit le double doctorat (civil et canonique). Il passa une année en prison, accusé d’avoir pris part à une de ces bagarres qui avaient rendu célèbres les étudiants de Padoue. Parti à Rome en 1565 pour y chercher une belle situation il y rencontra les jésuites et entra dans la Compagnie de Jésus (1566). Études de philosophie et de théologie furent faites au Collège Romain et il est ordonné prêtre en 1570 (il avait déjà 31 ans). Après un bref séjour à Macerata comme recteur du collège jésuite, il est nommé par Everard Mercurian, supérieur général des Jésuites, visiteur des missions en Inde et Extrême-Orient (1573).

Voyages en Inde et Extrême-Orient

Façade de l'église de la Mère-de-Dieu, à Macao

Il quitta Lisbonne et l’Europe en 1574 avec un groupe de 40 missionnaires. En fin d’année il arriva à Goa et commença immédiatement une visite systématique de tous les postes de mission dans le pays. Ensuite ce fut Malacca (1577), Macao (1578) où un poste commercial portugais avait été ouvert depuis peu, et il arriva au Japon en 1579. Il y organisa la première ambassade japonaise en Europe (1582-90) : 4 jeunes chrétiens furent envoyés rendre visite au pape et aux diverses cours européennes. Il s’agissait de faire connaître les missions d’Extrême-Orient en Europe comme de permettre aux jeunes gens de mieux connaître la culture chrétienne. Il avait l’intention de les accompagner à Rome, mais arrivé à Goa il apprit qu’il y avait été nommé provincial : il y resta (1583-1587). Il repartit à Macao (juillet 1588-juin 1590), et, lorsque le groupe fut de retour (1590), voyagea avec eux de nouveau jusqu’au Japon. Comme ambassadeur du vice-roi de l'Inde il eut une entrevue avec le shogun Toyotomi Hideyoshi en 1591, mais sans succès : le christianisme resta interdit et les chrétiens durent faire face à de sévères persécutions. Valignano dut repartir à Macao (octobre 1592-novembre 1594) où il fonda en 1594 le collège Saint-Paul de Macao qui deviendra le centre de formation des missionnaires jésuites pour les langues et cultures de l’Orient (Chine et Japon). Il fit un dernier séjour au Japon de 1598 à 1603[1].

Il passe ses dernières années à Macao et y meurt le 20 janvier 1606. Il est inhumé le même jour dans la crypte de l'église de la Mère-de-Dieu dont seule la façade est encore debout suite à un incendie en 1835.

Nouvelle approche culturelle

  • Dès son premier passage en Inde (1575), Valignano recommanda qu’un séminaire fut ouvert pour la formation d’un clergé autochtone. Il libéra de toute tâche Henrique Henriques, un vétéran de la mission et bon connaisseur du tamoul, pour qu’il puisse composer une grammaire, un dictionnaire et des livres de dévotions. Ces premiers livres en langue tamoule furent imprimés sur l’imprimerie nouvellement importée d’Europe à Goa.
  • La même conviction que le christianisme ne survivrait pas à la présence de missionnaires étrangers en Asie si la culture n’était pas prise au sérieux le guida au Japon. Ils ne pouvaient se contenter de quelques adaptations superficielles. Durant 25 ans Valignano fut l’administrateur méticuleux qui formula les éléments d’une politique d’inculturation chrétienne dans des civilisations anciennes dont il admirait la cohérence et la richesse.
  • Quelques-uns de ces éléments sont :
  1. Études de la langue et culture locale
  2. Respect et appréciation de cette culture
  3. Auteurs classiques occidentaux et orientaux enseignés dans les collèges (ouverture, en 1593, du fameux collège Saint-Paul de Macao qui devint le centre de soutien de toute la mission d’Extrême-Orient)[2]
  4. Formation d’un clergé local (première ordination sacerdotale à Nagasaki en 1601)
  5. Développement d’une littérature chrétienne en chinois, japonais et langues indiennes
  6. Adoption des coutumes régionales dans tout ce qui n’est pas contraire à la foi
  • Sa vaste correspondance, dont de nombreuses lettres sont conservées, révèle un homme qui réfléchit à la manière de parler du Christ à des peuples totalement étrangers au monde gréco-latin : 'Comment éviter un eurocentrisme nuisible à la mission, et d’ailleurs sans vrai lien avec la foi'?

Conflits et controverses

Valignano dut faire face à de fortes oppositions, d’une part de ceux qui estimaient qu’il paganisait le christianisme, d’autres part de missionnaires portugais liés au pouvoir colonial qui jugeaient qu’il agissait avec une trop grande liberté vis-à-vis du pouvoir royal, « protecteur » des missions. Et, pour l’anecdotique, il eut également des problèmes avec ses confrères jésuites lorsqu’il tenta d’introduire dans les communautés jésuites des structures de vie et une discipline empruntées aux temples zen japonais…

Évaluation

Il est paradoxal que ce soit un homme peu doué pour les langues (car Valignano ne parla jamais avec facilité le japonais) qui lança un mouvement qui permit l’émergence d’orientalistes de premier ordre, tels que Matteo Ricci, Roberto de Nobili, Alexandre de Rhodes et d’autres. Et plus important : il changea complètement les perspectives missionnaires de l’Église : il n’y a pas d’évangélisation sans la prise en considération de l’histoire, de la culture et des traditions des peuples. Ce qui est maintenant une évidence (Vatican II dans Ad Gentes) fut largement inspiré de Valignano et ceux qui l’ont suivi.

Œuvres principales

  • Historia del principio y progreso de la C.J. en las India orientales (1542-1564), (éd. J. Wicki, Rome, 1944.
  • Sumario de las cosas del Japon (1583), com adiciones al Sumario (1592) (éd. J. L. Alvarez), Tokyo, 1954.
  • Il ceremoniale per i missionari del Giappone, (éd. Schutte), Rome, 1946.
  • Catechismus christianae fidei. Lisbon: Antonius Riberius, 1586 (œuvre très rare; mais réimpression intégrale dans le premier volume de Antonio Possevino, Bibliotheca Selecta Qua Agitur De Ratione Studiorum in Historia, in Disciplinis, in Salutem Omnium Procuranda. Rome: Typographia Apostolica Vaticana, 1593[3].

Bibliographie

  • Joseph Francis Moran, The Japanese and the Jesuits : Valignano in the sixteenth-century Japan, Londres, 1993.
  • Josef Franz Schutte, Valignanos grundsätze für Japan, (2 vol.), Rome, 1951, 1958.

Liens externes

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Notes et références

  1. (pt) John W. Witek, Dicionário Português-Chinês, 2001, 535 p., p. 14 
  2. La façade de son église est un des monuments les plus célèbres de Macao. Voir article : Macao
  3. Voir Urs App, The Birth of Orientalism, Philadelphia: University of Pennsylvania Press, 2010 (ISBN 978-0-8122-4261-4), pp. 18-24, 139-146 sur le rôle important de cet œuvre de Valignano (version incluse dans la Bibliotheca selecta de Antonio Possevino, 1593) dans la réception des religions asiatiques en Europe.

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