Gnothi seauton

Gnothi seauton
Ruines du temple d'Apollon à Delphes, qui comportait cette inscription sur son fronton.

Gnothi seauton (en grec ancien Γνῶθι σεαυτόν / gnōthi seautón[1], API : [gnɔ:.tʰi se.aw.ton], traduite par Nosce te ipsum en latin[2]) est une expression en grec ancien, signifiant : « Connais-toi toi-même ».

C’est, selon le Charmide de Platon, le plus ancien des trois préceptes qui furent gravés sur le fronton du temple de Delphes. La Description de Delphes par Pausanias le Périégète en confirme l'existence.

Sommaire

Présentation

Mot‑clé de l’humanisme, le « Connais-toi toi-même » socratique assigne à l’homme le devoir de prendre conscience de sa propre mesure sans tenter de rivaliser avec les dieux. L’origine socratique de cette formule est cependant contestable, Héraclite ayant affirmé antérieurement : « J'ai été en quête de moi-même.»[3] et « Il faut s’étudier soi-même et tout apprendre par soi-même »[réf. nécessaire].

Porphyre, dans son « traité sur le précepte connais-toi toi-même »[4], s'interroge lui aussi sur la signification et sur l'origine de cette inscription.

Hegel voit ce « connais-toi toi-même » comme le signe d’un tournant majeur dans l’histoire de l’esprit car Socrate en s’en réclamant fait de « l’esprit universel unique », un « esprit singulier à l’individualité qui se dessine », autrement dit, il fait de la conscience intérieure, l’instance de la vérité et donc de décision. Il y a tournant car, dans la culture orientale, l’Esprit, tel que le conçoit Hegel, était de l'ordre du mystique inatteignable (d’où les Sphinges et les Pyramides d'Égypte que nul ne peut pénétrer) ; ce qu’au contraire augure Socrate (et de la même manière Œdipe) c’est « un tournant de l’Esprit dans son intériorité », c’est-à-dire qu’au lieu d’être inatteignable, l’Esprit est réclamé comme se trouvant dans l'homme lui-même.

Platon définit ainsi la sagesse, laquelle consiste à se connaître en devenant capable de distinguer ce que l'on sait et ce qu'on ne sait pas. Ici la sagesse dont l'Homme est capable est une tâche à accomplir.

Origines

La plus ancienne trace de l'existence de l'inscription « Gnothi seauton » se trouve dans les textes de Platon.

Dans le Charmide, il dit [5]:

« [...] J’irais même jusqu’à dire que c’est précisément à se connaître soi-même que consiste la sagesse, d’accord en cela avec l’auteur de l’inscription de Delphes. Je m’imagine que cette inscription a été placée au fronton comme un salut du dieu aux arrivants, au lieu du salut ordinaire « réjouis-toi », comme si cette dernière formule n’était pas bonne et qu’on dût s’exhorter les uns les autres, non pas à se réjouir, mais à être sages. C’est ainsi que le dieu s’adresse à ceux qui entrent dans son temple, en des termes différents de ceux des hommes, et c’est ce que pensait, je crois, l’auteur de l’inscription à tout homme qui entre il dit en réalité : « Sois sage. » Mais il le dit, comme un devin, d’une façon un peu énigmatique ; car « Connais-toi toi-même » et « Sois sage », c’est la même chose, au dire de l’inscription et au mien. Mais on peut s’y tromper : c’est le cas, je crois, de ceux qui ont fait graver les inscriptions postérieures : « Rien de trop » et « Cautionner, c’est se ruiner. » »

On la trouve aussi dans le Philèbe[6]:

« SOCRATE — C’est en somme une espèce de vice qui tire son nom d’une habitude particulière, et cette partie du vice en général est une disposition contraire à celle que recommande l’inscription de Delphes.

PROTARQUE — C’est du précepte : Connais-toi toi-même, que tu parles, Socrate ?

SOCRATE — Oui, et le contraire de ce précepte, dans le langage de l’inscription, serait de ne pas se connaître du tout. »

ainsi que dans le Premier Alcibiade[7] :

« Allons, mon bienheureux Alcibiade, suis mes conseils et crois-en l’inscription de Delphes : Connais-toi toi-même, et sache que nos rivaux sont ceux-là et non ceux que tu penses et que, pour les surpasser, nous n’avons pas d’autre moyen que l’application et le savoir. »

Diogène Laërce affirme[8] :

« Thalès est l’auteur du fameux « connais-toi toi-même » qu’Antisthène (Livre des Filiations) attribue à Phémonoé, en déclarant que Chilon se l’appropria mensongèrement. »

Cependant, des auteurs contemporains[9] considèrent que les trois maximes étaient plus probablement des proverbes populaires, attribués tardivement à des sages particuliers.

Variantes modernes

Une expression contemporaine du Γνῶθι σαυτόν

Une variante souvent reprise de nos jours, mais d'origine incertaine, ajoute:

« Connais-toi toi-même et tu connaîtras l'univers et les dieux »

Cette variante moderne semble inviter à la recherche de connaissances supérieures par l'introspection alors que les auteurs anciens comme Porphyre de Tyr voyaient plutôt dans la citation d'origine une invitation à l'humilité et à la tempérance:

« Quel est le sens, quel est l'auteur du précepte sacré qui est inscrit sur le temple d'Apollon, et qui dit à celui qui vient implorer le Dieu : Connais-toi toi-même? Il signifie, ce semble, que l'homme qui s'ignore lui-même ne saurait rendre au Dieu des hommages convenables ni en obtenir ce qu'il implore. »

— Porphyre, Traité sur le précepte connais-toi toi-même.

Voir aussi

Notes et références

  1. Ou, par crase, Γνῶθι σαυτόν (gnōthi sautón).
  2. Ou temet nosce.
  3. Fragement DK 101, traduction S. Weill
  4. Porphyre, traité sur le précepte connais-toi toi-même, texte intégral
  5. Platon, Charmide, texte intégral
  6. Platon, Philèbe, Texte intégral
  7. Platon, Premier Alcibiade, texte intégral
  8. Diogène Laërce, Thalès, texte intégral
  9. H. Parke and D. Wormell, The Delphic Oracle, (Basil Blackwell, 1956), vol. 1, p. 389.

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