Galemys pyrenaicus

Galemys pyrenaicus

Desman des Pyrénées

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Desman des Pyrénées
 Galemys pyrenaicus en la rivière de Balboa,Province de León, Espagne.
Galemys pyrenaicus en la rivière de Balboa,
Province de León, Espagne.
Classification classique
Règne Animalia
Embranchement Chordata
Sous-embr. Vertebrata
Classe Mammalia
Sous-classe Theria
Infra-classe Eutheria
Ordre Soricomorpha
Famille Talpidae
Sous-famille Talpinae selon ITIS
Desmaninae selon MSW
Tribu Desmanini selon ITIS
Genre
Galemys
Kaup, 1829
Nom binominal
Galemys pyrenaicus
É. Geoffroy Saint-Hilaire, 1811
Statut de conservation IUCN :

VU B1+2c : Vulnérable
Schéma montrant le risque d'extinction sur le classement de l'IUCN.

Répartition géographique
Aire de distribution des Galemys pyrenaicus
Aire de distribution des Galemys pyrenaicus

     /   Galemys pyrenaicus subsp. pyrenaicus
     /   Galemys pyrenaicus subsp. rufulus

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Le desman des Pyrénées (Galemys pyrenaicus) est un mammifère de la famille des talpidés qui ne vit que dans les Pyrénées et le nord de l'Espagne et du Portugal. C'est un insectivore semi-aquatique, vivant à proximité des torrents et de mœurs essentiellement nocturne. Il est surnommé rat à trompette à cause de la forme de son museau.

C'est une des 79 espèces animales répertoriées comme vulnérables en France par le World Conservation Monitoring Centre[1],[2].

Le desman des Pyrénées vit dans les torrents et lacs des Pyrénées franco-espagnoles et du nord de la péninsule ibérique[3]. Cest un animal discret, difficile à observer et qui craint peu lhomme. Il se nourrit exclusivement de larves aquatiques sensibles à la pollution : larves de plécoptères, de trichoptères et d'éphéméroptères[4]. Pour cette raison il est considéré comme un marqueur de son environnement.

Le desman ressemble anatomiquement à d'autres animaux tel le rat, la taupe ou la musaraigne :

  • Du rat (Rattus norvegicus), il possède tout larrière-train : des pattes robustes, des cuisses trapues, une longue queue lui servant à se déplacer aisément dans son milieu de prédilection, leau ;
  • De la taupe (Talpa europaea), il possède la partie avant du corps : des pattes griffues servant à creuser la terre pour aménager le terrier, centre déducation pour ses petits et abri indispensable contre ses différents prédateurs ;
  • De la musaraigne (Sorex araneus), il possède une trompe hyper-développée lui servant à repérer les larves dont il se nourrit. Cet organe très perfectionné lui est donc indispensable pour sa survie.

Sommaire

Répartition géographique

Pouvant vivre du niveau de la mer à 2 500 m d'altitude[5], le desman des Pyrénées se répartit dans les régions montagneuses de la chaîne des Pyrénées (du nord au sud et d'ouest en est), de la Cordillère cantabrique et du Système central. On le trouve principalement dans ces zones le long des cours d'eau suivants[2] :

Comme ces cours d'eaux se trouvent de part et d'autre de la ligne de partage des eaux ou ne sont tout simplement pas sur les mêmes bassins versant, la distribution géographique des desmans est par conséquent très segmentée, au point qu'on l'a classée en deux sous-espèces, voir plus, malgré le territoire restreint de la population globale.

Description externe

Détail de la trompe avec organes sensoriels tels que les vibrisses.

Le desman des Pyrénées (Galemys pyrenaicus) est un mammifère insectivore de la famille des talpidé et de la sous-famille des desmaninés. Il fut décrit pour la première fois en 1811 par Étienne Geoffroy Saint-Hilaire à partir de spécimens que lui avait adressés M. Derouay. Cest en fait par hasard que cet animal fut découvert.

Deux sous-espèces du desman des Pyrénées ont été distinguées, bien que cette séparation ne soit pas claire :

  • Galemys pyrenaicus pyrenaicus
  • Galemys pyrenaicus rufulus

La première espèce vivrait exclusivement dans les Pyrénées, la seconde dans la péninsule ibérique. Le desman mesure environ 25 cm, dont plus de la moitié pour la queue, et pèse de 50 à 60 grammes (Geoffroy Saint-Hilaire, 1811).

À terre, son corps sapparente à une petite boule de poils gris bruns, luisants, argentés en dessous, avec une teinte fauve dans la région pectorale, regroupés en petits paquets donnant lillusion décailles. Ces poils garantissent une très grande étanchéité grâce à un toilettage quotidien avec une substance sécrétée par une glande abdominale. La fourrure du desman est parfaitement conçue pour les plongées sub-aquatiques. Elle est composée de deux couches de poils : une couche interne, un duvet bouffant et soyeux qui ne se mouille jamais, et une couche externela jarrefaite de longs poils dinégales longueurs, aplatis comme des bandes. Sous leau, cette combinaison ne forme plus quune épaisseur bien lisse lui permettant déconomiser le maximum dénergie calorifique grâce à un très grand dynamisme. De plus, elle emprisonne une couche dair isolante qui le protège de leau et du froid. Mais cette membrane dair le fait remonter à la surface comme un bouchon de liège. Le desman est donc obligé dêtre continuellement en mouvement pour pouvoir chasser ses proies, ce qui entraîne une dépense calorifique supplémentaire.

Ses yeux minuscules sont cachés sous ses poils. Le desman des Pyrénées est quasiment aveugle, comme la plupart des membres de sa famille, les Talpidae. Il est à peine capable de distinguer les ombres de la lumière. Ses oreilles, dépourvues de pavillons, sont cachées sous sa fourrure. Cet organe auditif se présente sous la forme dune simple perforation de 2 à 4 millimètres. De cette petite boule dépasse, à larrière, une queue robuste au départ qui saffine et se termine par une petite touffe de poils blancs, et, à lavant, une trompe poilue et mobile, décomposée en deux lobes.

Cette trompe est lorgane de perception le plus important pour le desman. C'est à laide de celle-ci quil repère ses proies sous l'eau et qu'il perçoit son environnement aérien et aquatique. En effet, elle est structurée de plusieurs dizaines de poilsou organes dEimerqui lui servent à percevoir son milieu.

À la manière de beaucoup despèces animales possédant une trompe, il serait possible que lappendice nasal du desman lui serve à communiquer avec ses congénères, et notamment à intimider ladversaire lors de la saison des amours. Elle est comme chez les éléphants le résultat de la coalescence des narines et de la lèvre supérieure, mais également un organe très développé qui vaut au desman la réputation de précurseur du radar et de la vision nocturne. Dans leau, son milieu privilégié, son corps devient fuselé, ses pattes avant repliées contre lui, ses pattes arrière robustes, palmées et écartées à 45 degrés, servant de pagaies, sont dotées de vingt griffes pointues comme des aiguilles et lui permettent de sagripper aux rochers lisses malgré la force du courant. Durant ses plongées dune vingtaine de secondes chacune, un clapet ferme ses narines, prouvant ainsi que lévolution l'a équipé des systèmes les plus performants pour une vie aquatique. Le desman des Pyrénées se déplace rapidement dans leau, à la recherche de ses proies favorites.

L'organe de Jacobson, ou organe voméro-nasal, lui sert très vraisemblablement à « sentir » ses proies sous leau. Cet organe se trouve au niveau de lentrée des fosses nasales, qui communiquent avec la bouche au niveau du palais du desman, et possède la forme d'un long poil. Son odorat, très développé, lui permet de repérer les larves à 5 cm sous leau. Cet organe très primitif est le seul odorat des poissons et des amphibiens, mais cest également celui des embryons des mammifères, sans en exclure lHomme. Les mammifères le perdent à la naissance car ils ont développé le sens avec lutilisation des cornets du fond des fosses nasales.

Éthologie

ActivitéActes locomoteursMigration annuelle

Lactivité du desman des Pyrénées est essentiellement nocturne. Cependant, il existe une période de forte activité diurne entre les mois de février et de mai, qui correspond à la saison de reproduction des individus.

Selon Stone (1987), la période diurne, située après 12 heures, se situe entre 10 et 30 % de la longueur du jour. La période dactivité nocturne, quant à elle, occupe entre 70 et 89 % de la durée de la nuit. Lanalyse du graphique nycthéméral montre que lactivité du desman est à son maximum aux environs de 16 heures pour le jour et à son minimum entre 17 et 19 heures.

En revanche, lactivité diurne, qui est la plus intense, atteint son maximum entre 23 heures et 5 heures et son minimum à partir de 7 heures et ce jusquau commencement du second nycthémère.

Il semble évident que le desman privilégie lactivité nocturne, période à laquelle il risque le moins dêtre perçu par ses principaux prédateurs (loutre Lutra lutra, buse Butéo butéo, cigogne blanche Ciconia ciconia, brochet Esox lucius, vison dAmérique Mustela vison, hermine Mustela herminea, chouette hulotte Strix aluco et autre rapaces nocturnes).

Les principaux déplacements du desman seffectuent dans le milieu aquatique au cours de la recherche de la nourriture. Sa nage est très rapide et le mouvement alterné de ses pattes postérieures lui donnerait une nage zigzagante, si sa queue, puissante, nen corrigeait pas les écarts. Ses rares déplacements terrestres sur les berges ou sur un rocher au milieu de la rivière, ne sont que moments de repos consacrés à sa toilette (étanchéité du pelage, débarras des parasites…) ou au séchage de son épaisse fourrure. À terre, le desman se déplace en claudiquant du fait de limportante taille de ses membres postérieurs.

Cependant certains individus erratiques vagabondent le long dun cours deau. Ces spécimens effectuent donc de longs déplacements quotidiens et ont en conséquence un besoin énergétique beaucoup plus important que les individus possédant un territoire.

Il existe, chez ces mêmes individus erratiques, des migrations annuelles qui correspondent à la recherche de partenaires durant les saisons de reproduction.

La recherche de la nourriture

Coupe de la cavité nasale dun embryon long de 28 mm. Lorgane de Jacobson est identifié à droite.

Le desman des Pyrénées repère ses proies et les détecte à laide des sens tactiles et olfactifs.

Les sens de perception siègent principalement dans la trompe du desman. Celle-ci possède trois types dorganes : les vibrisseslui permettant de sonder entre les graviers du fond des cours deauqui contrairement aux apparences ne sont pas de simples poils (ce sont des organes très évolués sur le plan de la sensibilité), lorgane dEimer, des sortes de longs poils détectant les moindres vibrations, et lorgane de Jacobson qui lui permet de « sentir leau et dy distinguer les odeurs de ses proies ». Ces organes jouent un rôle prépondérant dans la détection des objets que ce soit en milieu aquatique ou aérien. Une bonne précision de la localisation dune proie dans leau ne semble être atteinte que pour une distance de 4 à 5 centimètres. Le contact avec le monde extérieur se trouve donc centralisé à lextrémité de la trompe du desman.

Le desman des Pyrénées est cependant incapable de poursuivre une proie qui nage ou que le courant emporte. Il se nourrit donc de larves fixées à des rochers ou dinsectes sapprochant trop près de la surface de leau.

Le desman des Pyrénées émet de petites bulles de manière continue lors de ses déplacements aquatiques. Cette technique de localisation semble très proche de lécholocalisation des proies, à la manière de beaucoup dautres mammifères aquatiques, tels que les Delphinidés. Richard y fait dailleurs allusion dans sa thèse à paraître sur le desman des Pyrénées.

Le territoire et le mode de vie

Le domaine vital du desman, son territoire, semble varier en fonction du lieu (abondance de nourriture ou non, densité de population…) et en fonction du sexe de lindividu. Chaque spécimen connaît son territoire sur le bout de sa trompe. Il a gravé dans sa mémoire, le goût de son eau, lodeur des berges, le circuit familier et immuable de son labyrinthe.

Les desmans vivent soit en couples, soit seuls, errant le long dun cours deau. Le territoire occupe environ pour les femelles 250 mètres linéaires, 450 mètres pour les mâles et 800 mètres pour les couples vivant sur un même secteur (Stone, 1987), le long des ruisseaux oligotrophes à courant moyen à fort, aux eaux parfaitement neutres de toute pollution anthropique. Les membres des couples restent très éloignés lun de lautre. Selon Richard, la femelle occuperait le milieu du territoire et le mâle la périphérie. Les mâles et les femelles vivent donc dans tous les cas dans des terriers différents.

Le terrier est généralement une cavité déjà creusée sur la berge par dautres espèces, ou des anfractuosités entre des racines, entre quelques pierres venant danciennes constructions telles que des moulins, des habitations… (Nous devons noter que nous sommes en présence de la seule pollution tolérée par le desman, ces édifices étant en matériau naturel). De nombreuses expérience réalisées sur des desmans des Pyrénées ont révélé que le terrier était composé dun long couloir dune dizaine de centimètres à lentrée, se terminant par une chambre tapissée de mousse, de branches et dherbe qui sert de nid aux individus.

Les travaux fréquents concernant laménagement de berges en pierre participent à léradication progressive du desman qui désertera toute la zone il ne pourra construire son terrier.

Espérance de vie

Les mâles et les femelles ont une espérance de vie équivalente à trois ou quatre ans. En effet, des animaux marqués lors de recherches ont été recapturés au maximum trois ans après leur capture initiale. De plus, létude de la denture de 87 animaux prouve que la longévité de lanimal dépasse les trois années (Richard, 1976).

Il n'y a jamais eu d'accouplement lorsque lanimal est en captivité. De plus, si laménagement de son enclos ne correspond pas à ses exigences, le desman se laissera dépérir, ce qui prouve qu'il faut respecter au mieux son biotope.

Reproduction et gestationComportement sexuel

La période de reproduction se situe entre les mois de février et mai (voire juin) en fonction de la température, du climat et de laltitude mais il semblerait que les femelles desmans aient leurs chaleurs en permanence (Peyre, 1961). On en déduira donc quil nexiste pas à proprement parler de période de reproduction, mais un pic de reproduction situé dans lintervalle de temps donné précédemment. Le desman attend les beaux jours pour garantir un taux de survie optimale à sa progéniture. Les scientifiques pensent que les femelles peuvent avoir trois portées par an.

Étant donné la durée de vie très courte des desmans, les individus vivant en couples sont fidèles durant toute leur vie. Les contacts entre partenaires nont lieu quau moment dattirances réciproques du mâle et de la femelle (la femelle étant plus grosse que le mâle). En dehors de ces périodes, toute approche à moins de cinq centimètres de deux individus (zone de perception dun desman) entraîne irrémédiablement des combats souvent très violents. Hormis donc ces combats relativement rares, les mâles ayant une partenaire ne participent pas à des actes agonistiques pour obtenir les faveurs dune dulcinée. En revanche, les individus erratiques étant certainement polygames, ils pourraient se livrer à des scènes intimidatrices suivis dune parade pour influencer la femelle dans son choix.

Pour la durée de gestation, les données sur ce point sont absentes. Cependant, le desman appartenant à la famille des taupes (Talpidae), on peut estimer cette durée à 30 jours.

La mise à bas a lieu dans les terriers décrits précédemment. Le nombre de petits par portée est au maximum de cinq. En effet, nous avons pu retrouver une femelle morte avec cinq embryons dans lutérus, mais la majorité des 55 femelles avaient 3-4 embryons (Peyre, 1961). La femelle possède 8 mamelles : 2 pectorales, 2 abdominales et 4 inguinales. La maturité sexuelle est atteinte dès la saison de reproduction suivant la naissance.

Écologie

Lhabitat

Lhabitat caractéristique du desman est composé de cours deau, dit « oligotrophes » de basse, moyenne et haute altitude (cours deau déficients en sels minéraux essentiels à la croissance des plantes donc constitués de peu dalgues).

Les cours deau que côtoie le desman sont neutres de toute pollution anthropique. En effet, les larves dont il se nourrit sont sensibles aux moindres variations dacidité, de température, doxygénation et dopacité de leau. En conséquence, la présence du desman sur une rivière démontre la haute qualité des eaux quelle charrie.

Les populations de desmans vivant sur les rives des lacs dAyous dans le parc national des Pyrénées occidentales ont un mode de vie et dhabitat particulier. En effet, cet ensemble dune dizaine de lacs est profondément gelé 6 mois dans lannée. Les populations se réfugieraient donc dans les rivières souterraines. Une partie des desmans serait donc troglodyte (Combes et Salvayre, 1964).

Le régime alimentaire

Larve de Plécoptère.
Larves de trichoptères.

Suite à plusieurs analyses de contenus stomacaux, dobservations réalisées en captivité et à des analyses de fèces, les scientifiques ont pu déterminer le régime alimentaire du desman[6],(Bertrand, 1987, 1988, 1992)[7].

Le desman des Pyrénées a besoin dingérer au quotidien plus du tiers de son poids en nourriture (20 grammes) pour être en pleine forme. Lanalyse de près de 1500 fèces réalisée par différents scientifiques (Bertrand et Clergue, 1992), montre que son régime alimentaire se compose exclusivement de larves dinvertébrés benthiques, de trois ordres :

Pendant longtemps, on a cru que le desman des Pyrénées était très sensible à la pollution issue des activités anthropiques, mais en fait, ce sont les larves dont il se nourrit qui meurent à la moindre perturbation du courant, de lacidité ou de loxygénation de leau. Il est donc important de déterminer les indices biotiques de lenvironnement aquatique, notamment l' analyse de DBO5 (Demande Biotique en Oxygène), qui correspond au taux doxygène consommé par les bactéries pour décomposer la matière organique présente dans un échantillon deau en 5 jours, permettant ainsi de déterminer une pureté relative de leau.

Le desman des Pyrénées semble privilégier les larves de Trichoptères, à valeur énergétique élevée, quil chasse exclusivement en plongeant de 15 à 20 secondes dans leau. De plus, ces larves sont de taille plus importante, donc plus faciles à capturer et par conséquent d'un grand apport dénergie pour un effort moindre.

Celles-ci seront consommées hors de l'eau, sur la berge, en position assise sur les pattes postérieures. Et c'est à l'aide de sa trompe, une fois encore, qu'il les poussera vers sa gueule.

La consommation de poissons na jamais été remarquée au cours des différents travaux danalyse. Le desman des Pyrénées ne consomme donc, à de rares exceptions près, jamais de poissons. Cette information jouit dune certaine importance quand on sait que lune des causes dextermination du desman est cette réputation établie par des magazines de pêche en particulier.

Les magazines « Univers du vivant » de septembre 1985 et « Pyrénées Magazine » de janvier 1989, épaulés par de nombreux reportages télévisés, ont publié des photographies de desmans ingérant du poisson. Ces photographies ont été réalisées avec des desmans vivant en captivité et prouvent ainsi labsurdité dun tel geste ; si on laisse un animal dans une cage avec comme seule nourriture du poisson, il en est de soi que cet animal dévorera le poisson plutôt que de mourir de faim. Mais cette alimentation imposée par lhomme nest pas le reflet de la réalité constatée dans la nature.

Répartition géographique

Le desman des Pyrénées possède une capacité dadaptation élevée à laltitude : on peut le trouver à partir de 15 mètres au-dessus du niveau de la mer, au niveau de Saint--de-Bigorre dans le bassin de la Nivelle (Pyrénées Occidentales) et jusquà 2021 mètres au niveau des lacs dAyous situés dans la haute vallée d'Ossau (Pyrénées-Atlantiques).

Toutefois, malgré cette grande diversité dadaptation sur le plan altitudinal, il existe dautres facteurs prépondérants, notamment des causes climatiques.

Limite liée à la pluviométrie

Laire de répartition du desman reçoit des taux de précipitations annuelles supérieures à 1000 millimètres. Des travaux effectués dans un laboratoire du CNRS à Moulis en Ariège (09) ont montré que le desman avait besoin de torrents assez profonds (qui amènent beaucoup deau) pour sépanouir[8]. On a pu observé sur le bassin du Salat, en amont de Saint-Girons (Rivière Bouigane, Garbet), que le desman nétait présent que sur les affluents de la rive gauche qui parcourent des secteurs dont la pluviométrie dépasse les 1500 millimètres annuels, alors quil est totalement absent des affluents de la rive droite qui traversent des zones les précipitations annuelles ne dépassent pas les 900 millimètres par an.

Limite liée à la nature géologique du terrain

Lanalyse de la nature du sous-sol à partir de cartes géologiques franco-ibérique nous révèle quune très grande majorité du territoire du desman se limite uniquement à un sous-sol composé de roches métamorphiques ou ignées (granite, syénite, basalte, marbre, ardoise, gneiss, schistes...). En fonction de la nature géologique des espaces traversés, les cours deau brassent, en quantité plus ou moins grande, des alluvions qui favorisent la croissance des algues micro- et macroscopiques. Le desman ne vivant, en partie à cause des larves dont il se nourrit et qui sont très sensibles aux perturbation environnementales (notamment à la luminosité), que dans des cous deau dits « oligotrophes », cest-à-dire néant de toute phytobiologie, survivra plus difficilement dans des milieux la quantité de sédiments est importance (rapport indirect).

Évaluation du nombre dindividus

Selon les données géographiques les plus récentes, datant de 1993, le desman serait présent sur 236 zones des Pyrénées françaises (1 zone = environ 71,5 kilomètres carrés, soit sur une carte géographique un rectangle de 0,1 x 0,1 grade de côté) ; ce qui représente une zone dhabitat française de 1 687 400 hectares. Ce chiffre ne montre pas la réalité. En effet, le desman ne vit que sur les cours deau de ces zones, ce qui réduit sensiblement son espace de vie.

Selon les données de densités communiquées par le parc national des Pyrénées (Maison du parc national des Pyrénées à Gabas, magazine « Empreinte », n° 6) le nombre dindividus au kilomètre carré serait de lordre dun seul individu dans une zone établie .

En considérant ces données identiques pour toutes les Pyrénées, la population de desmans sélèverait à moins de 17 000 individus sur la zone française.

Certaines personnes pourront estimer que cette population est suffisante pour garantir un taux de naissance au-delà du seuil de régénérescence de lespèce, et donc augmenter le nombre de spécimens, mais le taux de mortalité augmentant, le nombre dindividus se stabilise. Il ne faudrait pas que cette tendance très « aléatoire » ne sinverse en défaveur du desman des Pyrénées. Or, la pollution anthropique atteignant de plus en plus souvent le dernier sanctuaire de notre petit protégé, lhomme doit agir pour le sauver.

Avenir et protection de l'espèce

En 1811, Étienne Geoffroy Saint-Hilaire écrivait à propos de sa découverte que cet étrange animal ne se trouvait jamais au-dessus de 1000 mètres daltitude. Aujourdhui, on aperçoit des desmans à plus de 2000 mètres daltitude au niveau des lacs d'Ayous. Cette évolution alarmante nous montre que le desman se réfugie de plus en plus haut pour se préserver des différentes pollutions ; il est donc essentiel de protéger très activement ce petit animal.

Lavenir du desman, espèce emblématique des Pyrénées, tant en France que dans la péninsule ibérique, repose à lévidence essentiellement sur la conservation et/ou la restauration de son habitat.

Les populations de desmans semblent sêtre stabilisées depuis plusieurs années ; lespèce semble en danger latent (livre rouge des espèces menacées, Beaufort, 1983).

Une campagne dinformation semble simposer notamment auprès des pisciculteurs. Des brochures sur le desman pourront être données à chaque exploitation aquacole, de façon à ce que les professionnels de lélevage aquatique innocentent deux-mêmes lanimal. Ces brochures pourront, dans certaines zones la cohabitation homme/desman semble très tendue, inciter les pisciculteurs à protéger leur bassin avec une clôture en rondin de bois de vingt centimètres de hauteur. Cette clôture empêchera tout desman de sapprocher trop prés du bassin, lélevage sera donc entièrement protégé. Lhomme est le pire prédateur du desman. Les pisciculteurs tuent, du fait des croyances populaires, des centaines de desmans chaque année. Il doit donc sinvestir dans la sauvegarde dun animal inoffensif ;

Un autre danger, issu également de lexplosion technologique de ces dernières décennies, menace le desman : ce sont les retenues deau. Ces retenues, en effet, font varier le débit du cours deau, ce qui entraîne une modification du niveau, donc par conséquent, une modification brutale de la température. Les pollutions, par des décharges sauvages, influencent également lécosystème aquatique.

Les variations du courant, de la profondeur, de lacidité et de la teneur en oxygène tuent irrémédiablement les larves de trichoptères et déphéméroptères, qui constituent principalement lalimentation du desman. Ce dernier est donc condamné à périr de faim.

Les retenues deau

La loi du 29 juin 1984 impose le maintien dun débit minimum au niveau des retenues deau. Mais ce débit minimum est-il suffisant? Les scientifiques portugais, espagnols et français ne sont actuellement pas en mesure de pouvoir répondre à cette question.

Cependant, pour vérifier si les barrages et autres installations sur cours deau provoquent un danger réel pour le desman des Pyrénées, des analyses biotiques de leau ont été effectuées en amont et en aval du barrage de Bious-Artigues dans les Pyrénées occidentales, ainsi quen amont et en aval de la papeterie de Saint-Girons en Ariège, source très polluante du Salat.

Après lanalyse au microscope optique, on observe quil y a autant de microparticules essentielles à lalimentation des trichoptères et autres larves appartenant au régime alimentaire du desman en amont quen aval du barrage. Lanalyse de la DBO5 ne révèle aucun changement entre amont et aval du barrage. Les retenues deau ne présentent donc pas de danger pour lalimentation du desman. En revanche, l'aménagement de sites industriels puisant leau dune rivière, telles que des papeteries, provoque un réel bouleversement dans lécosystème aquatique, au point même que le traitement effectué des eaux usées ne suffise plus à rétablir léquilibre originel favorable au desman. Ces installations industrielles doivent remettre en cause lutilisation quelles font de leau sous peine de réduire inexorablement laire de répartition du desman.

De plus, les changements brutaux (courant, température, acidité, teneur en oxygène) quexécutent les retenues peuvent lui être fatal. Une montée des eaux inonde son terrier et le noie, et une baisse flagrante léloigne de sa source dalimentation : le lac. Laménagement dun lac artificiel diminue souvent fortement les possibilités de refuge au niveau des berges. Par exemple, en février 2001, La société de gestion du barrage avait vidé une très grande partie de la réserve deau du lac de Bious-Artigues, le remplaçant temporairement par un ruisseau. Or le desman des Pyrénées est présent sur les rives de ce lac (relevé de féces, nombreux témoignages...), cette perturbation majeure de son environnement a pu tuer plusieurs individus.

Il ne faut en rien perturber l'écosystème qu'intègre le desman. Cet écosystème se compose d'éléments dits « producteurs » (phytoplancton...), de « consommateurs primaires » (larves, zooplancton), de « consommateurs secondaires » (desman, loutre) et de décomposeurs. On comprend donc quune seule perturbation à nimporte quel endroit de ce cycle écologique menace l'espèce. La protection dun animal tel que le desman doit commencer par un respect de son biotope.

Pour de nombreux sites, léconomie industrielle (notamment hydroélectrique) prime sur la protection de lenvironnement et des espèces animales endémiques. Pourtant, quelques mesures simples pourraient protéger le desman et ainsi générer une harmonie entre industries et nature. Ainsi, plutôt que de vidanger les barrages en une seule fois, il serait plus utile de libérer, quand le besoin simpose, de petites quantités deau (par exemple un dixième du contenu du lac), ce qui laisserait au desman, ainsi quau larves aquatiques, une période dadaptation suffisante pour survivre.

Lenrochement des berges

Une étude publiée en 1998 dans la revue du Parc National des Pyrénées[9] montre lévolution des populations de desmans avant et après lenrochement des berges du gave d'Aspe dans la vallée d'Ossau. La modification des berges de ce cours deau avec en loccurrence la pratique de lenrochement a réduit les possibilités de zones de refuges pour lespèce. Ainsi, sur 25 endroits les berges ont été modifiées et historiquement le desman était présent, seuls 6 sont encore occupés en 1998.

Le desman des Pyrénées utilise pour son terrier des cavités formées par des murs effondrés, les racines dun arbre, etc. Mais lenrochement des berges effectué de façon artificielle réduit considérablement les possibilités de refuge. Actuellement, cette pratique dembellissement des rivages s'avère s'imposer dans les communes pyrénéennes et étant donné limpossibilité de stopper ces actes nuisibles au desman, il est alors proposé la répartition, sur les cours deau à faible accès des berges, de terriers artificiels en bois, de trente centimètres de long et dune vingtaine de centimètres de largeur, tapissés à lintérieur de mousse naturelle et dune litière de feuilles mortes, le tout fait pour un respect total de lenvironnement (emploi daucun produit industriel polluant, daucune peinture...). Cet abri résistant est placé dans des lieux faciles daccès, très proche de leau. Il a été conçu à partir détudes de véritables terriers de desman. En effet, si lon sait que le desman utilise des cavités déjà formées pour construire son nid, il effectue tout de même un grand nombre de modifications, telles que la diminution du diamètre de lentrée avec des branchages, laménagement dune chambre avec des feuilles mortes

Assurer la protection du desman dans les Pyrénées et dans la péninsule ibérique permet dassurer la conservation de lespèce, dont la précarité a été reconnue par les scientifiques[1],[2]. Les réflexions menées par des équipes espagnoles, portugaises et françaises durant ces dernières années abondent dans ce sens.

Noublions pas que chaque jour, son dernier habitat mondial se réduit. Nous devons nous-mêmes agir en individu responsable pour assurer sa protection car il ne nous a pas révélé tous ses secrets.

Il semble donc quun agrandissement du Parc National des Pyrénées, tant du côté espagnol que français soit nécessaire pour cela, et la réglementation protégeant les animaux en voie de disparition doit être plus stricte. La création dune « zone sanctuaire », ultime refuge aucun être humain ne pourra pénétrer a été proposée.

Protéger son environnement naturel, cest assurer sa sauvegarde. Mais le desman est aussi le témoin dune nature saine et non polluée nécessaire à lhomme et à la survie de notre planète. Il nous incite à réfléchir sur une gestion globale des eaux pyrénéennes, européennes, mondiales.

Notes et références

  1. a et b Base de donnée sur le Desman sur http://www.unep-wcmc.org United Nations Environment Programme (UNEP) - World Conservation Monitoring Centre (WCMC). Consulté le 5 octobre 2009(en)
  2. a, b et c Référence IUCN : espèce Galemys pyrenaicus (É. Geoffroy, 1811) (en)
  3. Voir carte dans l'infobox ou La carte de l'IUCN.
  4. Fiche descriptive sur le Desman sur http://inpn.mnhn.fr/isb/index.jsp Inventaire national du patrimoine naturel français., p31. Consulté le 5 octobre 2009
  5. Palomo and Gisbert, 2002
  6. J. Santamarina et J. Guittian, « Quelque données sur le régime alimentaire du desman (Galemys pyrenaicus) dans le nord-ouest de l'Espagne », dans http://cat.inist.fr Fonds documentaires de l'INIST/CNRS, vol52, no 3, 1988, p. 301-307 (ISSN 0025-1461) [texte intégral (page consultée le 5 octobre 2009)] 
  7. A. Bertrand et M. Clergue, Écologie comparée des populations de Desman des Pyrénées (Galemys pyrenaicus), du Cincle plongeur (Cinclus cinclus) et de lEuprocte des Pyrénées (Euproctus asper). : I. Stratégies alimentaires du Desman et du Cincle., Étude interdisciplinaire du fonctionnement des écosystèmes pyrénéens. Exemple du bassin dOlhadoko, Larrau, Pyrénées-Atlantiques. Rapport SRETIE., 1992, 87 p. 
  8. A. Bertrand, Le Desman des Pyrénées : statut, écologie et conservation, Rapport inédit, Ministère de lEnvironnement, Direction de la Protection de la Nature, 1992, 94 p. 
  9. Revue Empreintes, journal du Parc National des Pyrénées, n° 6, 1998.

Annexes

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Bibliographie


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