- Fraude scientifique
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Une fraude scientifique est une violation des conventions déontologiques, de l'éthique professionnelle ou du respect dû à la communauté scientifique[1].
La fraude scientifique à proprement parler se présente sous trois grandes formes : le plagiat ; la fabrication de données et l'altération de résultats défavorables à l'hypothèse avancée. À ces fraudes s'ajoutent des comportements qui posent problèmes concernant la qualité des travaux ou plus particulièrement l'éthique, comme ceux visant à augmenter en apparence la production (et par voie de fait la renommée du scientifique) en soumettant par exemple plusieurs fois la même publication en l'ayant un peu modifiée, les défauts de mentions de conflit d'intérêts, les expériences dangereuses, la non conservation des données primaires, etc...
La fraude scientifique est présentée par la communauté scientifique comme marginale, mais il existe peu d'études de grande ampleur pouvant le confirmer. Cependant, la lutte contre cette fraude et par voie de conséquence l'enquête sur tout soupçon de fraude est considéré comme très importante, aussi bien par la communauté scientifique que par les instances politiques.
Sommaire
Types
La fraude scientifique, au sens strict, revêt principalement trois formes [Larivée 1994 1],[SgardMichalowski 2007 1] :
- le plagiat
- la fabrication de données
- l'altération de résultats défavorables à l'hypothèse avancée
La violation des standards et protocoles expérimentaux n'est pas considérée à proprement parler comme une fraude, mais plutôt comme une faute professionnelle (l'expression anglaise scientific misconduct est d'ailleurs bien plus proche de cette idée).
Raisons
David Goodstein relève trois raisons qui pousseraient certains scientifiques à frauder[2] :
- la pression : la science étant un domaine éminemment concurrentiel (illustré par l'expression Publish or Perish), la carrière d'un scientifique est très importante pour ce dernier
- arranger les données d'une expérience dont il croit connaître le résultat : la base de la démarche scientifique est d'établir des théories qui doivent être soumises à l'expérience pour interroger la réalité. Mais la mise au point d'expériences ayant des résultats indiscutables peut se révéler très difficile. Un scientifique persuadé que son hypothèse est exacte et se retrouvant confronté en l'impossibilité d'avoir des résultats expérimentaux conformes à son idée peut en toute bonne foi être tenté d'arranger (autrement dit de falsifier) ses données
- la difficulté à reproduire certaines expériences : la reproduction d'une expérience peut être particulièrement difficile car nombre de choses peuvent interférer avec le milieu expérimental, le scientifique fraudeur peut donc espérer mettre sur le compte de la difficulté à reproduire son expérience sa fraude et ayant ainsi un sentiment d'impunité
Prévalence
La communauté scientifique présente généralement la fraude comme marginale[3],[Larivée 1994 2], mais il existe peu d'études de grande ampleur pouvant le confirmer [Larivée 1994 2].
Les quelques études réalisées sur la prévalence de la fraude scientifique montre que certains domaines sont plus touchés que d'autres. Ainsi, une étude de 1993 sur des articles remontant jusqu'à 1800 montre que ce sont les sciences de la santé qui sont le plus touchées (47%), viennent ensuite les sciences de la vie (17%), humaines (16%), pures (15%) et enfin les Sciences de la Terre (4%) [Larivée 1994 3].
Conséquences
Pour la science
Si la fraude est révélée tardivement, certains scientifiques ont pu utiliser des éléments falsifiés, rendant ainsi caduques leurs recherches [Larivée 1994 4]. Un cas emblématique est celui du paléontologue Viswa Jit Gupta qui durant plusieurs décennies falsifie des centaines d'articles et d'échantillons, mêlant à sa fraude nombre de scientifiques[4].
Pour la science, la fraude scientifique n'est pas que dommageable. Elle peut également contribuer positivement en faisant en sorte que les scientifiques soient plus critiques vis-à-vis du travail de leur pairs, améliorant ainsi la qualité des articles publiés [Larivée 1994 5].
Pour la société
La société a généralement une grande confiance en la science et la fraude scientifique a tendance à ruiner cette confiance et à propager des croyances irrationnelles [Larivée 1994 6]s. De plus, les applications des découvertes scientifiques peuvent se révéler dangereuses, notamment dans le cas de l'élaboration de médicaments [SgardMichalowski 2007 2]. Bien que des instances gouvernementales existent, telles que la Food and Drug Administration (FDA) américaines, et ont pour objectif de donner leur aval ou non avant toute commercialisation de nouveau médicament, il a été démontré en 1985 que nombres d'essais cliniques ont des lacunes dans leur respect des protocoles [Larivée 1994 7].
Lorsque des responsables politiques prennent leurs décisions sur des données scientifiques (ce qui est rarement le cas), la fraude peut avoir un impact important [Larivée 1994 8]. De même que l'utilisation de données biaisées idéologiquement telles que cela a été le cas concernant les discriminations raciales et sexuelles [Larivée 1994 6].
Pour le scientifique et son entourage
La fraude scientifique étant considérée comme très grave, le fraudeur est bien souvent licencié, sa réputation fortement entachée et des doutes apparaissent sur l'ensemble de ses travaux [Larivée 1994 9].
Mais il n'y a pas que le fraudeur de touché, son entourage immédiat tel que ses responsables, les co-auteurs des articles incriminés et enfin l'institution dont il est membre [Larivée 1994 4].
Exemples de Fraudes
Quelques exemples de fraudes célèbres :
- Lyssenko a truqué ses résultats pour étayer sa théorie de la transmission héréditaire des caractères acquis.
- Le crâne de l’homme de Piltdown, représentant à une époque le chaînon manquant entre les singes et les hominidés, était en fait une mâchoire de singe sur un crâne humain.
- le physicien Jan Hendrik Schön alors aux Bell Labs, a publié de nombreux articles sur les nanotechnologies et notamment sur la supraconductivité des molécules de carbone sphériques jusqu'à ce que, en mai 2002, ses travaux fussent contestés et ses résultats dénoncés comme frauduleux.
Références
- Georges Chapouthier et Antoine Danchin, Dossier : Les Fraudes scientifiques. La Recherche, juillet-août l980, N° 113, pp 858-868 Marcel Blanc,
- Conduct and Misconduct in Science » sur California Institute of Technology. Consulté le 10 mars 2009 David Goodstein, «
- (fr) Girolamo Ramunni, « La fraude scientifique », La revue pour l'histoire du CNRS, novembre 2003. Consulté le 9 mars 2009
- (fr) Claude Marcil, « L'affaire Gupta : Des kangourous à Rio et des conodonts en Himalaya », Agence Science Presse, 17 mars 2009. Consulté le 17 mars 2009
- Jean C. Baudet, Curieuses histoires de la science. Quand les chercheurs se trompent, Jourdan, Bruxelles, 2010.
- (fr) La fraude scientifique et ses conséquences, Serge Larivée, 1994. Consulté le 9 mars 2009 :
- page 1
- page 2
- page 13
- page 4
- page 9
- page 8
- page 6
- page 7
- page 3
- (fr) Frédéric Sgard et Stefan Michalowski, « Intégrité scientifique : vers l’élaboration de politiques cohérentes », Troisième trimestre 2007. Consulté le 11 mars 2009 :
- page 2
- page 3
Bibliographie
- William Broad, Nicholas Wade, La souris truquée, enquête sur la fraude scientifique, éd. du Seuil, coll. Science ouverte, 1987. (ISBN 2020217686 et 2020096404).
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