- Plagiat
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Le plagiat consiste à s'inspirer d'un modèle que l'on omet délibérément ou par négligence de désigner. Le plagiaire est celui qui s'approprie frauduleusement le style, les idées, ou les faits.
Il convient de distinguer entre le plagiat, qui consiste à prétendre qu'on est l'auteur original de ce qui n'est qu'une copie, et la contrefaçon, qui consiste à prétendre que ce qui n'est qu'une copie est en réalité l’œuvre de l'auteur original. Juridiquement, le droit d'auteur ne protège que la forme accomplie d'une œuvre, tandis que l'idée qui l'a inspirée et le style qui l'a mise en forme, ainsi que les informations elles-mêmes, restent « de libre parcours ».
Certains critiques[1] opèrent également une distinction entre le plagiat, emprunt grossier, et le « démarquage », où le texte subit des modifications variées pour brouiller les pistes.
Cependant, la limite entre l'inspiration, l'imitation et la contrefaçon est parfois très difficile à déterminer. La meilleure façon de s’affranchir d’une accusation de plagiaire est de citer systématiquement les sources sur lesquelles son travail est fondé, ce qui est obligatoire quand on s’appuie sur le droit de citation.
Sommaire
Histoire
Les premières attentions portées au plagiat, perçu comme un phénomène préjudiciable, sont issues du monde littéraire. En matière intellectuelle les idées sont de libre parcours : tout le monde peut les reprendre. Mais le plagiat va au-delà : le plagiaire tente d'usurper une gloire indue en s'appuyant sur l'œuvre d'un autre auteur. Il emprunte sans le dire la forme de l'expression.
Le terme plagiaire semble apparaître pour la première fois dans les épigrammes du poète satirique Martial qui se plaint à un ami que ses œuvres ont été appropriées par un autre et sont en servitude pénible, en rappelant quel est le véritable auteur : « tu ramèneras le plagiaire à la pudeur » (impones plagiario pudorem)[2].
Diderot qualifiera d’ailleurs le plagiat comme étant « le délit le plus grave qui puisse se trouver dans la République des Lettres ».
Ce n'est qu'au XVIIIe siècle que le droit d'auteur se forme dans sa conception moderne, et que le plagiat devient juridiquement distinct de la contrefaçon.
Le terme prend son sens au XIXe siècle, et désigne alors les œuvres dont le caractère original n’est pas jugé suffisant pour les faire entrer dans la littérature. Avec le temps et le développement de l’impression à grande échelle, le plagiat n’empiète plus seulement sur les terrains de l’originalité ou de la moralité, mais également sur celui de la propriété.
Le plagiat se retrouve aussi dans les sciences modernes, où il constitue une partie des fraudes scientifiques[3].
Plagiat et fiction
Le plagiat n'est pas seulement une pratique condamnable en littérature, mais aussi un thème régulièrement abordé dans les intrigues romanesques :
- Le roman Mourir à Francfort de Hubert Monteilhet met en scène un écrivain amer plagiant une partie de l'œuvre immense, et pour la plus grande partie méconnue, de l'abbé Prévost, dans le but de ridiculiser son éditeur.
- Tiré à part de Jean-Jacques Fiechter décrit une vengeance subtile dont l'arme est un plagiat.
Plagiat par anticipation
La notion de « plagiat par anticipation » consiste à rejeter l'accusation de plagiat sur un auteur antérieur. Elle a été proposée par François Le Lionnais, membre de l'Ouvroir de littérature potentielle et fondateur de l'Institut de Prothèse Littéraire, qui la justifie ainsi: « Il nous arrive parfois de découvrir qu'une structure que nous avions crue parfaitement inédite, avait déjà été découverte ou inventée dans un passé lointain. Nous nous faisons un devoir de reconnaître cet état de choses en qualifiant les textes en cause de plagiats par anticipation. »[4]. Il ne s'agit pas ici de copier, mais de faire un usage créatif du plagiat, en identifiant dans des textes du passé des possibilités que leurs auteurs n'avaient pas soupçonnées. Une telle pratique avait été explicitement revendiquée par Lautréamont[5]. Marcel Bénabou retrace l'origine de la notion à un vers d'Alexis Piron dans La métromanie: « Leurs écrits sont des vols qu'ils nous ont faits d'avance » (Acte III, scène 7)[6]. La notion de plagiat par anticipation sera ensuite actualisée et développée par Pierre Bayard dans son ouvrage de 2009.
Plagiat et éducation
Il est souvent demandé aux étudiants de produire un texte sur un sujet. Par fainéantise, par ignorance, par volonté délibérée de tricher ou par crainte de ne pas faire assez bien, certains d'entre eux sont tentés de chercher un document (en général via un moteur de recherche) et de le rendre directement à l'enseignant sans citer la source. L'enseignant considère à juste titre ce comportement comme une faute assimilée à un plagiat. Un travail plagié peut entraîner une note nulle et la mention PL dans le bulletin. Comme un élève ne copie pas nécessairement l'intégralité d'un texte, il reste difficile de le sanctionner proportionnellement. Ce phénomène a d'ailleurs atteint une dimension qui a entraîné une prise de conscience et une volonté systématique de lutter contre cette pratique[7]. Une autre démarche consiste à partir de ce cas pour construire un cours sur l'usage des citations[8].
Outils pour lutter contre les plagiats
Pour détecter un éventuel plagiat, la première solution consiste à chercher sur un moteur de recherche des mots ou des phrases clés du texte en question, afin de voir si l'on retrouve un texte potentiellement plagié.
Plusieurs logiciels facilitant la détection du plagiat sont en outre apparus ces dernières années.
Plagiaires et défenses
- Patrick Poivre d'Arvor : réutilisation de notes de travail que l'auteur avait prévu de remodeler plus tard.
- Montaigne plagiant Plutarque et Molière plagiant Plaute : il s'agit d'un « emprunt » assumé, d'une « intertextualité » avec clin d'œil aux lecteurs ayant reconnu la prose de leur auteur.
- Marie Darrieussecq : Camille Laurens (Philippe, P.O.L, 1995) accuse Marie Darrieussecq de « plagiat psychique » (Tom est mort, 2007).
- Alain Minc : pour son ouvrage intitulé Spinoza, un roman juif, contrefaçon partielle de l’ouvrage Spinoza, le masque de la sagesse de Patrick Rödel.
- Joseph Macé-Scaron : pour son roman Ticket d'entrée (Grasset, 2011) qui reprent mot pour mot des extraits d'un livre de l'Américain Bill Bryson (American rigolos : chroniques d'un grand pays, 2003).
Notes et références
- Cf. par ex. R. de Chaudenay, introduction.
- Martial, épigrammes, Livre I, LII.
- Georges Chapouthier et Antoine Danchin, Dossier : Les Fraudes scientifiques. La Recherche, juillet-août l980, N° 113, pp 858-868 M.Blanc,
- Oulipo, La littérature potentielle, Gallimard, 1973, p. 21.
- Poésies, p. 2
- Marcel Bénabou, « Les ruses du plagiaire » dans Le Plagiat, sous la direction de Christian Vandendorpe, Les Presses de l'Université d'Ottawa, 1992, p. 17-30. ISBN:9782760303454
- Lutte contre le plagiat, un site de l'UQAM
- Plagiat et Internet, un cours du CTPIC, J.P. Blanc et F. Lo.
Voir aussi
Bibliographie
- Hélène Maurel-Indart, Plagiats, les coulisses de l'écriture, Éd. de la Différence, 2007 ; Du Plagiat, Folio Essais, 2011.
- Roland de Chaudenay, Les Plagiaires, le Nouveau Dictionnaire, Perrin, 2001 ; Dictionnaire des plagiaires, Perrin, 1990.
Articles connexes
- Détection du plagiat
- Contrefaçon
- Propriété intellectuelle
- Droit d'auteur
- Droit de citation
- Copyright
- Copyleft
- Imposture
- Domaine public
- Source primaire, secondaire, et tertiaire
Liens externes
- (fr)Site de sensibilisation au plagiat De l'École centrale de Lille
- (fr)Lutte contre le plagiat Un site de l'UQAM (2001) sur la lutte contre le plagiat avec des références bibliographiques
- (fr)Le plagiat Un site d'étude sur le plagiat avec des ressources bibliographiques
- (ch)Internet Fraude et déontologie
- (fr)La lutte contre les plagieurs Une initiative qui devrait faire causer ... les webmasters se regroupent pour lutter contre les plagieurs et les atteindre là ou cela fait mal : leur référencement.
Catégories :- Plagiat et contrefaçon
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