- Denys le Chartreux
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Denys le Chartreux (de son vrai nom Dionysius van Leeuw), né en 1402 à Rijkel dans le comté de Looz (aujourd’hui Limbourg belge), et décédé le 12 mars 1471 à la chartreuse de Ruremonde (Pays-Bas), était un religieux prêtre de l'ordre des Chartreux, mystique, théologien et écrivain spirituel de renom. On le surnomma « le docteur extatique ». D'anciens martyrologes le citent comme bienheureux. Il est commémoré (régionalement) le 12 mars.
Sommaire
Biographie
Jeunesse et formation
Bien que né de parents de condition modeste Denys montre, très jeune, des dispositions pour l’étude. Il est de plus attiré par la vie religieuse. Sa première formation se fait comme élève (externe) de l’abbaye de Saint-Trond. Plusieurs fois sa demande d’admission dans un monastère chartreux est refusée, étant donné son jeune âge.
Une crise spirituelle - une crainte maladive et débilitante de Dieu - s’apaise lorsqu’il se trouve, à l’âge de 13 ans, à l’école renommée des frères de la vie commune de Zwolle. Outre un désir plus ferme de vie religieuse il y acquiert une bonne initiation à la philosophie.
En 1421 sa demande d’admission chez les chartreux (de Zelem, près de Diest) est de nouveau refusée : il n’a pas les vingt ans requis. On lui conseille de poursuivre des études à l’université de Cologne : il y reçoit une formation thomiste. Nouvelle, mais courte, crise spirituelle (dont il parle lui-même dans ses écrits). En 1425, alors qu’il a entamé une carrière comme magister artium à Cologne son souhait se réalise enfin : il est admis à la chartreuse de Ruremonde.
Vie intérieure
Denys aime la solitude et sa vie intérieure s’approfondit : méditations de la Passion, prière du psautier, dévotion à la Vierge Marie, lutte contre le péché personnel, même le plus petit, pénitence physique (tout en insistant sur la discrétion en ce domaine). De sa vie chez les frères de la vie commune il garde un grand attachement à la correction fraternelle. De cette époque il laisse un premier ouvrage donnant des détails sur la vie cartusienne : De vita et fine solitarii.
Il considère que le genre de vie le plus élevé est celui qui combine la perfection de la vie contemplative à celui de la vie active (mais non pas n’importe quelle activité). En fait, comme moine chartreux, Denys est atypique.
Écrivain
Vers 1430 il commence à écrire. Procureur de son monastère en 1433, il doit s’interrompre. Mais dès 1434 il reprend son travail et compose, de 1434 à 1440, une première série de commentaires scripturaires. Cependant dans l’ordre cartusien, cette activité est mal comprise et perçue comme contraire à la vocation cartusienne. Il doit s’interrompre et fait appel pour que la décision soit rapportée.
Des années suivantes, 1441 à 1443, datent deux lettres où Denys décrit trois visions qu’il aurait eues. Il distingue les visions spirituelles d’autres dites ‘intellectuelles’, prémonitoires de maux qui allaient bientôt accabler l’Église (en 1454 et 1461). Ses premiers biographes parlent de longues extases qu’il eut, surtout durant la messe conventuelle.
Il continue à écrire, entre autres son traité sur De contemplatione. Mais il est de nouveau en froid avec les autorités de l’Ordre. En 1446 une enquête est ordonnée par le chapitre général des chartreux sur des ‘abus graves’ que Denys, aurait commis avec d’autres. L’épisode n’est pas clair mais il semble être blanchi et peut continuer son travail d’écrivain.
Conseiller de Nicolas de Cuse
Grâce à ses écrits qui circulent Denys a déjà une certaine notoriété. On vient le consulter. Le cardinal Nicolas de Cuse, légat pontifical, le prend comme conseiller pour une mission de réforme religieuse de la région de la Meuse et du Rhin. A la demande du cardinal il compose un Contra perfidiam Mahometi. Mais il n'est pas vraiment à l'aise dans ce genre d'écrit.
Il se remet à ses travaux scripturaires qu’il achève en 1457 : l’ensemble comprendra 23 volumes de commentaires de tous les livres de la Bible, Ancien et Nouveau Testament. C’est également à cette époque qu’il compose des guide de réformes de vie personnelle destinés à différentes classes de la société.
Dernières années
En 1465 une fondation se fait à Bois-le-Duc. Denys en est nomme le premier prieur en 1466. Cela ralentit son activité d’écrivain. Cependant cette fondation est un échec et Denys obtient d’en être déchargé (1469). Cela l’a physiquement usé. Il rentre malade à sa chère solitude de Ruremonde. Son dernier ouvrage le De meditatione date de cette année. Infirme, mais serein et recueilli, Denys le Chartreux meurt le 12 mars 1471.
Œuvres
Denys le chartreux est un écrivain prolifique. Ses écrits traitent de la foi chrétienne et de l’expérience religieuse dans des domaines connexes : commentaires scripturaires, traités sur la vie spirituelle, théologie et philosophie. La plupart de ses écrits sont des compilations où la part de l'originalité n'est pas toujours facile à déterminer. Il écrit en latin. Plusieurs de ses ouvrages ont été traduits en français et en néerlandais.
Ses œuvres remplissent 42 volumes d’Opera omnia, publiées d’abord à Montreuil (1896-1901) et ensuite à Tournai (Belgique) (1902- 1913) : Doctoris ecstatici D. Dionysii cartusiani Opera omnia in unum corpus digesta. Cette collection reste une référence, même si, du point de vue critique, elle a vieilli.
Vue d’ensemble
- 14 volumes de commentaires sur tous livres de la Bible.
- Des commentaires sur les théologiens les plus connus de son temps : le Pseudo-Denys, Pierre Lombard, Boèce, Jean Climaque.
- Un compendium de la Summa Theologica de Thomas d’Aquin.
- 21 écrits visant à réformer la vie chrétienne, personnelle, comme de la société et de l’Église.
- Des lettres (de réforme) adressées à des princes et personnages importants leur communicant les prémonitions reçues sur les calamités menaçant l’Église si elle ne se réforme.
- Un écrit polémique: Contra perfidiam Mahometi, et contra multa dicta Sarracenorum.
Théologie mystique
Denys le Chartreux est surtout un maître spirituel et mystique. Il souhaite conduire les âmes à la connaissance de Dieu par la contemplation. Ses écrits principaux relèvent de la théologie mystique. Ce sont ceux auxquels il donne le plus d’attention. Le De contemplatione, vers 1443, (plus théologique) et son dernier ouvrage (en 1469), le De meditatione (plus pratique), couronnement de sa vie d’écrivain (déjà physiquement fort diminué).
A son plus haut niveau, la contemplation est connaissance négative de Dieu : ainsi l’âme arrive à l’union extatique avec Lui. Cela doit passer nécessairement par la connaissance positive de Dieu, Lui attribuant à un degré infini toute perfection découverte dans sa création.
Texte : « O mon âme, tu peines beaucoup parce que tu penses à beaucoup de choses. Laisse là ces choses nombreuses et ne pense plus qu’à l’Unique et ainsi tu ne peineras plus sur beaucoup de choses. Et même, si tu veux, et si tu peux, ne pense à rien de créé et tu ne peineras plus du tout, mais tu seras oisive, te reposant, avec Dieu dans ce silence intérieur qui lui est agréable plus que toute ta peine et tous tes exercices. Choisis donc ce que tu veux, parce qu’il plaît à Dieu que tu restes oisive, nue, pure et libre de tout vice et de toute imagination, et que tu ne penses à rien et que tu ne te fixes sur rien. »[1]
Bibliographie
- Anselm Stoelen : Article Denys le Chartreux, dans Dictionnaire de Spiritualité, vol.III, col.430-449, Paris, Beauchesnes, 1954.
- Christophe Bagonneau (ed): Vers la ressemblance (textes de Denys le Chartreux), Ed. ‘Parole et silence’, Paris, 2003.
Notes et références
- Cité d’après le Dictionnaire de Spiritualité, vol. III ; col. 435.
Lien externe
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