Charles Despiau

Charles Despiau
Charles Despiau
Charles Despiau
Charles Despiau

Naissance 4 novembre 1874
Mont-de-Marsan Drapeau de France France
Décès 30 octobre 1946 (à 71 ans)
Paris Drapeau de France France
Nationalité française
Activité(s) sculpture
Formation École des Arts décoratifs puis à École nationale supérieure des beaux-arts
Maître Louis-Ernest Barrias
Mouvement artistique Sculpture moderne figurative, chef de file des Sculpteurs Indépendants
Œuvres réputées Buste en marbre de Paulette
Influencé par Auguste Rodin les antiques, la Renaissance
Influença Arnold, Robert Wlérick, Léon-Ernest Drivier, Paul Belmondo

Charles Despiau (4 novembre 187430 octobre 1946) est un sculpteur français originaire de Mont-de-Marsan.

Sommaire

Biographie

Élève au lycée Victor-Duruy, Charles Despiau est remarqué par son professeur de dessin, Louis Henri Ismael Morin,né à Lisieux en 1850 et décédé à Mont de Marsan en 1923 dont il gardera un souvenir reconnaissant. Il s’installe à Paris à l’âge de dix-sept ans, pourvu d'une bourse d'études du département des Landes, et entre à l’École des arts décoratifs puis à l’École des beaux-arts dans l’atelier du sculpteur Louis-Ernest Barrias. En 1904, il épouse Marie Rudel.

Le portrait a la préférence de Despiau - ce qui ne l'empêchera pas, plus tard, de créer aussi des statues - et il expose chaque année au Salon de la Société nationale des beaux-arts. Par leur puissance plastique et leur vérité psychologique, ses portraits sont remarquables, mais fruits d’un très long travail. En 1907, Auguste Rodin lui demande de travailler avec lui. C’est le début de sa période de praticien qui dure jusqu’en 1914, année de sa mobilisation pour la Grande Guerre. Il sera contraint d'abandonner alors la taille dans le marbre que lui avait confié Rodin du Génie du repos éternel, destiné au monument commémoratif au peintre Puvis de Chavannes. Le plâtre, qui mesure deux mètres, avait nécessité la location d'un second atelier, Villa Corot, où Despiau était déjà installé avec sa femme, Marie. Démobilisé après la guerre et Rodin étant mort en 1917, il refusera de terminer la taille dans le marbre du Génie, le Maître n'étant plus là pour superviser son œuvre. Le marbre inachevé est exposé dans la galerie des jardins du musée Rodin à Paris. Engagé au service du camouflage pendant la guerre, Despiau a rencontré beaucoup de peintres et de sculpteurs qui imaginaient les décors propres à tromper l'ennemi. Il fréquentera ainsi, de retour à Paris, ce qu'un jour un journaliste spécialisé dans l'art nommera avec grand succès la « Bande à Schnegg », un groupe de sculpteurs dont Lucien Schnegg, le frère de Gaston Schnegg, est l'élément moteur : Antoine Bourdelle, Robert Wlérick, Léon-Ernest Drivier, François Pompon, Louis Dejean, Alfred Jean Halou, Charles Malfray, Auguste de Niederhausern, Elisée Cavaillon, Henry Arnold, Jane Poupelet, Yvonne Serruys, etc. Après la mort de Lucien en 1909, le groupe continue de se réunir autour de Gaston.

Le plâtre du Génie, donné à Despiau par Auguste Rodin, séjournera à la Villa Corot, puis sera déménagé (1930), lorsque Charles Despiau, qui connait le succès grâce à sa première exposition-vente à New York, fait construire son atelier et sa demeure, dans le même quartier. Héritiers, finalement, de ce plâtre, Alain Kotlar et sa femme, après l'avoir fait nettoyer et restaurer, font don de cet « original » au musée des plâtres de Meudon, en 2001. En 2010, des bronzes de ce plâtre, très peu connus des amateurs et du public sont fondus, avec le titre d'« original ».

Le buste en marbre de Paulette sera montré au Salon de 1910 puis acheté par l’État pour le musée du Luxembourg. Aujourd’hui on peut l’admirer au musée de Mont-de-Marsan où il a été déposé par l’État. Modelé d’après le visage de la jeune montoise Paule Pallus surnommée Paulette, il dégage une sérénité intemporelle qui en fait un des plus beaux portraits de la collection. Dans cette veine se situent la Petite fille des Landes de 1904, Cra-Cra (buste de Lucienne Mouveau, sœur de Pierre Mouveau, artiste peintre et fille du décorateur de l'opéra de Paris et co-fondateur de la société Décoration intérieure moderne, Georges Mouveau), de 1917 et le portrait d’Alice Derain de 1922, le buste d'Andrée Basler, (dite Dédé, fille du galeriste Adolphe Basler et Andrée Wernert, dite Nénette, fille du critique d’art Georges Wernert, en 1923). Ces œuvres témoignent de l’influence que Despiau comme Schnegg, Maillol, Bourdelle ou Joseph Bernard ont imprimée à la sculpture moderne qui réagit contre le lyrisme de Rodin et l’académisme des sphères officielles.

Quelques commandes, certaines importantes, telles la Circé (1912), le Monument à Aristobulo del Valle pour Buenos-Aires en Argentine (1914) sont insuffisamment rémunératrices. Érigé par souscription, le Monument aux morts de Mont-de-Marsan (1918-1920) est à l’origine en pierre. Il a été mis à l’abri au musée en 1981 et remplacé au square des Anciens Combattants de Mont-de-Marsan par une copie en ciment-pierre. Après un premier projet allégorique qui prévoyait la glorification d’une Victoire, Despiau établit une composition d’un grand équilibre. Le monument est flanqué, de part et d’autre, de la stèle où sont gravés les noms des victimes, de deux statues monumentales de femmes, la vieille mère et l'épouse tenant dans ses bras un bébé orphelin. Elles sont venues rendre un dernier hommage aux Montois disparus pendant le premier conflit mondial. Les deux femmes aux visages épurés expriment la souffrance dans la retenue et la dignité. La mère joint les mains, courbe le dos, comme épuisée et baisse un visage meurtri. La jeune femme, que certain identifie comme étant Jeanne Kamienska, belle-sœur du peintre Berthold Mahn, appuie doucement la tête sur le mur. L’originalité de la composition vient de l’absence de toute gesticulation anecdotique ou invocation céleste, très à la mode à l'époque, ce à quoi l’artiste se refusera toute sa vie.

En 1923, Despiau est membre co-fondateur du Salon des Tuileries. En 1927, le succès commercial point. Le Réalisateur est le plâtre original d’une statue commandée en 1929 par la veuve de l’industriel luxembourgeois, Émile Mayrisch, fondateur en 1911 du puissant groupe de sidérurgie Arbed. On peut voir la statue en bronze qui en est issue dans le parc du château de Colpach-Bas (Grand-Duché du Luxembourg). Elle domine le tombeau qu’avait dessiné l’architecte Auguste Perret. Elle ne portraiture pas Emile Mayrisch lui-même qui avait un physique à la Armand Fallières, mais, comme d'habitude à cette époque, reflète plutôt la force créative de l'homme qu'était Mayrisch. Mais c'est la grande exposition particulière organisée à New York à la Galerie Brummer, en 1927, à l'initiative de la galerie parisienne Barbazanges, qui lui apporte gloire et fortune et fera de lui un sculpteur très connu aux États-Unis, puis, enfin, en Europe.

Statue Assia à Rotterdam, sculptée en 1937 par Charles Despiau.

À partir de 1932, la rencontre avec Assia Granatouroff, modèle professionnel que nombre d’artistes, de Dora Maar à Germaine Krull en passant par Soutine, font régulièrement poser, permet à Despiau de sublimer le corps de la femme. La jambe gauche avance, légèrement pliée, la jambe droite, porteuse, marque une très légère asymétrie des hanches. La tête est tournée vers le côté, révélant la finesse d'un modelé délicat, les coudes sont un peu pliés et les bras, symétriques le long du corps, dégagent des lignes corporelles très pures, aux proportions idéales, où ombres et lumières mettent en valeur un modelé à la fois de longs muscles affermis par la danse et d'une grâce, d'une finesse idéales. Le visage, pourtant fini, mais volontairement comme oublié, comme les mains et les pieds, dont les proportions affirment la beauté parfaite de l'ensemble, accentuent ainsi la volonté de mettre en lumière les formes et celle de dépouiller le sujet de tout suggestion, particulièrement érotique. Il s'en dégage à la fois la force, la beauté, la sérénité et la simplicité. Assia devient ainsi la moderne Vénus de cette Renaissance italienne, à laquelle, déjà, au début du XXe siècle un journaliste d'art avait comparé l'art de Despiau (le « Donatello du XXe siècle », disait Anatole de Monzie). Assia obéit aux canons de la très belle jeune fille, répondant à la conception que l'on se fait alors de l'idéal féminin. Précédant Assia, l'Ève et L’Adolescente avaient révélé, au cours des années 1920, la même pureté, la même grâce qui conféraient au nu féminin vu par Despiau une beauté délicate et chaste.

En 1937, Despiau reçoit la commande d’une statue colossale de six mètres de hauteur, Apollon, destinée au parvis du musée d'art moderne de la Ville de Paris pour la grande exposition de 1937. Cette figure occupe tant Despiau qu'il ne la livrera jamais à la Ville. Il travaillera ce sujet jusqu’à la fin de sa vie (avec, ou sans draperie ? faisait partie des questions, par exemple, que se posait Despiau à propos de ce grand nu), sans décision définitive. L’Apollon sera fondu dans le bronze à titre posthume. Une réunion de certains de ses amis artistes proches tels Dunoyer de Segonzac, Paul Belmondo, ses marchands, exécuteurs testamentaires et titulaires des droits, les époux Jacquart, et sa femme, Marie, ont décidé de faire fondre l'état de l’Apollon avec drapé, qu'ils considèrent comme l'état définitif, avant agrandissement. Le musée de Mont-de-Marsan possède un tirage en bronze de ce dernier état mesurant 1,16 m de hauteur et la municipalité a commandé un agrandissement posthume de 2,20 m, « épreuve de musée », autorisé par Madame Jacquart, et exposé en plein air, dans une rue du centre-ville. Apollon aura été une de ses très rares commandes officielles, et il ne l'a pas honorée.

Chef de file des sculpteurs indépendants, modeleur sensible et grand bustier, Despiau connaît le succès à l’étranger, notamment aux États-Unis, où son exposition personnelle à New York en novembre 1927 est suivie d’autres expositions importantes et de divers hommages de 1930 à 1948[1]). Le Japon lui réserve également un accueil enthousiaste et, au début du XXIe siècle, il y fait encore l’objet d’une grande admiration. L'Europe ne sera pas en reste, où il expose et vend dans toutes les capitales. Il participe à l’Exposition internationale des arts et techniques de 1937 à Paris (il siège au comité de sélection des œuvres) et expose, dans une salle qui lui est consacrée exclusivement, cinquante-deux sculptures au Petit Palais.

Il participe en novembre 1941, à un « voyage d’études » organisé à l'instigation d’Arno Breker par Otto Abetz en Allemagne avec des peintres et de sculpteurs français[2], acceptant comme d'autres artistes parmi les plus renommés de partir visiter les hauts lieux de la culture allemande ainsi que des ateliers d’artistes. L’accompagnent dans ce voyage André Dunoyer de Segonzac, Paul Landowski, Henri Bouchard, Louis Lejeune, Roland Oudot, Raymond Legueult,Paul Belmondo, mais aussi des artistes de l’avant-garde tels Kees Van Dongen, Maurice de Vlaminck, André Derain et Othon Friesz.

Despiau refuse d’avoir des élèves, ayant peu de goût pour l’enseignement. Pourtant, tout artiste venant lui rendre visite et solliciter ses conseils recevra toujours un accueil bienveillant et chaleureux. Despiau, pourtant taciturne et effacé, est d'un enthousiasme et d'une fougue intarissables lorsqu'il s'agit de parler « métier ». C'est ainsi qu'on retrouve son influence artistique chez Arnold, Wlérick, Léon-Ernest Drivier ou Paul Belmondo. Beaucoup d'autres artistes aussi, sculpteurs ou peintres, se nommeront ses « élèves ».

Hommages à Charles Despiau

Il faut attendre 1968 pour que le musée de sa ville natale, Mont-de-Marsan, célèbre sa gloire et celle de son ami Robert Wlérick à travers l’exposition permanente de la collection municipale au musée Despiau-Wlérick. C’est Raymond Farbos, Montois et grand admirateur de Charles Despiau, fondateur de l'Association des amis de Charles Despiau, qui, grâce aux dons de Marie Despiau, est à l’origine d’une collection qui formera ensuite le début du fonds des sculptures du musée montois. Le centenaire de la naissance de Charles Despiau est commémoré en 1974 au musée Rodin par une exposition qui lui est exclusivement consacrée et qui sera présentée l’année suivante dans sa ville natale, au musée Despiau-Wlérick. Cette exposition voit le jour grâce à Marcelle Kotlar (cousine germaine de Marie Despiau) et à son fils, Alain Kotlar, expert de l'œuvre de Charles Despiau pour l’U.F.E. (Union française des experts), qui contactèrent musées, collectionneurs et artistes contemporains du sculpteur, de façon que cette exposition puisse avoir lieu. Le Japon, à Tokyo et Osaka, a honoré aussi, fréquemment, l'œuvre du maître, et organisera encore en 1997-1998 une tournée d'expositions rétrospectives de son œuvre pour le cinquantenaire de sa mort.

Les œuvres de Despiau figurent dans de nombreuses collections particulières, dans le monde entier. Les deux plus importantes collections particulières sont réunies l'une en Australie, l'autre à Paris. Pour ce qui concerne les musées, on trouve ses œuvres particulièrement au Musée national d'art moderne, Centre Georges-Pompidou (legs d'un très important nombre de sculptures et de dessins, fait par sa femme, Marie, à sa mort[3]), au musée d'art moderne de la ville de Paris, au musée des beaux-arts de Bordeaux et au musée de Mont-de-Marsan. De très nombreux musées étrangers, dont le musée national des beaux-arts d'Alger, des musées aux États-Unis et au Japon, possèdent également des œuvres de Charles Despiau.

Notes et références

  1. Voir le site Charles Despiau, section « Les expositions ».
  2. Ibid., section « Biographie ».
  3. La collection du musée national d'art moderne compte 592 œuvres de Charles Despiau.

Sources

  • Alain Kotlar, expert UFE (Union française des experts) pour l'œuvre de Charles Despiau, et Jeanne Renard-Kotlar, co-rédactrice du catalogue raisonné de l'œuvre sculpté de Charles Despiau, à partir des archives de l'atelier Charles Despiau (dont les publications, nombreuses, d'articles, les collections de musées et les collections particulières) et les archives, privées, de sa famille qui ont beaucoup servi à la publication du catalogue général du Musée Despiau-Wlérick de Mont-de-Marsan. Voir, entre autres, le site [1], les archives du musée Georges Pompidou, celles du musée d'art moderne de la Ville de Paris, du musée des Beaux-Arts de Bordeaux, du musée Despiau-Wlérick, à Mont-de-Marsan, du MoMa à New York (États-Unis), celles de Genève et de Bâle, en Suisse, de Bruxelles, en Belgique, du musée d'Alger en Algérie, etc.

Bibliographie

  • L'Art et les Artistes, mai 1908.
  • Léon Deshairs, "Charles Despiau", in Art et Décoration, vol. 26, novembre 1909.
  • Fortunio, alias Wernert, « Charles Despiau », Le National, juin 1910.
  • Georges Delaquys, « Charles Despiau », L'Art et les Artistes, septembre 1910.
  • L'Indépendance, 1911.
  • Revue d'Europe et d'Amérique, novembre 1911.
  • Gazette des beaux-arts, 1912.
  • Art et Décoration, juin 1913.
  • Art et Décoration, rubrique annuelle « La Sculpture aux salons ».
  • Claude Roger-Marx, Les Sculpteurs français nouveaux, Éditions de la N.R.F., Paris, 1922.
  • George Waldemar, Despiau, in Feuillets d'Art, Éditions Lucien Vogel, Paris, 1922.
  • (de) Adolphe Basler, Die neue Plastik in Frankreich, Jahrbuch der jungen Kunst, Leipzig Verlag von Klinkhardt und Biermann, 1922.
  • René Schwob, « Despiau », in Le Salon des artistes décorateurs, L'Amour de l'Art, mars 1922.
  • Léon Deshairs, « Despiau », Art et Décoration, avril 1923.
  • Émile Magne, « Le Sculpteur Charles Despiau », Floreal, 4 août 1923.
  • Élie Faure, L'Art moderne, in Histoire de l'Art, Éditions G. Crès & Cie, 1924.
  • François Fosca, Despiau, in ’L'Art d'aujourd'hui, éditions Albert Morancé, 1924.
  • (en) Watson Forbes, « Charles Despiau - A Sunday Call », The Arts, septembre 1924.
  • André Lewinson, « Sculpteurs de ce temps », L'Amour de l'art, novembre 1924.

Voir aussi

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