Bouddhisme à Taïwan

Bouddhisme à Taïwan
ONG bouddhiste Tzu Chi, Taïwan

Le Bouddhisme est une religion majeure de Taïwan. Plus de 90% des Taïwanais pratique la religion traditionnelle chinoise qui intègre des éléments bouddhistes et des principes confucianistes à côté d'un fondement taoïste[1] (avec un rôle pour les spécialistes religieux des deux traditions lors d’occasions particulières comme les funérailles). Parmi ceux-ci, un plus petit nombre se réclame plus particulièrement des enseignements et institutions bouddhistes chinois, sans nécessairement se séparer des pratiques folkloriques. Une étude propose que 7 à 15% des Taïwanais sont bouddhistes au sens strict[2]. Le végétarisme est une pratique importante qui distingue cette forme « pure » de bouddhisme.

Les statistiques du gouvernement insistent pour distinguer bouddhisme et taoïsme, ayant pour résultat des nombres presque égaux pour les deux (en 2005, 8 millions et 7,6 millions, respectivement, sur une population totale de 23 millions). Cependant, beaucoup de ces « Bouddhistes » auto-déclarés semblent appliquer le mot de « Bouddhisme » à la religion folklorique. Le bouddhisme peut être aussi confondu avec les croyances syncrétiques locales comme le Ikuan Tao, puisque celles-ci ont tendance à souligner des figures bouddhiques comme Guanyin ou Maitreya, et pratiquent aussi le végétarisme.

Quatre enseignants bouddhistes locaux dont les institutions sont particulièrement reconnues sont assimilés par le peuple aux « Quatre Rois célestes » du bouddhisme taïwanais. Il s'agit de :

  • au nord (Taipei) : Maître Sheng-Yen (聖嚴, décédé en 2009) de la Montagne du Tambour du Dharma (法鼓山)
  • au sud (Kaohsiung) : Maître Hsing-Yun (星雲) du Fo Guang Shan (佛光山)
  • à l'est (Hualien) : Maître Cheng Yen (證嚴) de la Fondation de Tzu Chi (慈濟基金會)
  • à l'ouest (Nantou) : Maître Wei Chueh (惟覺) du Chung Tai Shan (中台山)

Plusieurs de ces figures ont été influencées par le « Bouddhisme humaniste » (人間佛教) du maître Yin Shun (印順), une approche théologique qui distingue le bouddhisme taïwanais. La tradition de Sheng-yen se revendique du bouddhisme zen ; Yin Shun est inspiré par maître Taixu (太虛) qui est moins connu à Taïwan. Leurs écoles ont des branches partout dans le monde. Inversant la relation historique, ces bouddhistes taïwanais ont joué un rôle important dans la résurgence du bouddhisme en Chine.

Sommaire

Histoire

Statue du Bouddha Amitabha au monastère de Fo Guang Shan

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Le nouveau Buddha Memorial Center près de Kaohsiung

Le bouddhisme est apparu à Taïwan pendant la dynastie Ming, introduit par des colons venus des provinces de Fukien et de Kwangtung. Il fut découragé au profit du protestantisme par les colonisateurs venus de Hollande qui contrôlèrent Taïwan de 1624 à 1663, jusqu'à ce que Cheng Cheng-Kung, dit Koxinga, chassa les Hollandais de Taïwan en 1663. Son fils Cheng Ching établit le premier temple bouddhiste de Taïwan.

Quand la dynastie Qing reprit Taïwan au fils de Cheng Ching, Ching Ning, en 1683, de nombreux moines bouddhistes arrivèrent de Fukien et de Kwangtung pour établir leurs temples à Taïwan, et plusieurs sectes bouddhistes différentes se mirent en place. Le bouddhisme monastique, cependant, ne s'établit pas avant le XIXe siècle.

Pendant l'occupation japonaise (de 1895 à 1945), la plupart des bouddhistes de Taïwan étaient affiliés à l'un des trois principaux temples :

  • au nord (Keelung) : la Montagne de Yueh-mei (月眉山) fondée par maître Shan-hui (善慧)
  • au centre (Miaoli) : le temple de Fa-yun (法雲寺) fondé par maître Chueh-li (覺立)
  • au sud (Tainan) : le temple de Kai-yuan (開元寺) également fondé par maître Chueh-li

En tant que colonie du Japon, Taïwan fut influencé par le bouddhisme japonais. Plusieurs temples firent l'objet de pressions pour se déclarer affiliés à des courants bouddhistes japonais, y compris ceux dont le respect du bouddhisme et du taoïsme n'était pas clair. L'emphase sur la religion traditionnelle chinoise était en effet considérée comme une forme de protestation contre le gouvernement japonais. On fit des tentatives d'introduire le mariage chez les prêtres (comme c'était la coutume au Japon). Mais elles restèrent sans effet, et la pratique du végétarisme et du célibat des prêtres devint un autre moyen de protester contre le Japon.

Après la défaite du Japon à la fin de la Seconde Guerre mondiale, Taïwan passa sous le contrôle du gouvernement chinois de Chiang Kai-shek, ce qui donna lieu à de nouvelles pressions politiques. En 1949, de nombreux moines venus de Chine continentale fuirent vers Taïwan avec les forces militaires chinoises, et reçurent un traitement préférentiel de la part du nouveau régime. Pendant cette période, les institutions bouddhistes furent contrôlées par l'« Association bouddhiste chinoise » (中國佛教會) contrôlée par le gouvernement. Originaire de Chine continentale (à Nanjing), elle était dominée par des prêtres « continentaux ». Son autorité commença à décliner pendant les années 1960 quand le gouvernement commença à autoriser des organisations bouddhistes indépendantes, et plus particulièrement en 1987 lors de l'abolition de la loi martiale à Taïwan.

Un des premiers réseaux privés de centres bouddhistes fut celui de Hsing-Yun, qui se rendit d'abord populaire dans des émissions de radio dans les années 1950. Un autre personnage-clé était Cheng Yen, une nonne bouddhiste ordonnée par le maître Yin Shun et qui fonda le Tzu Chi, la plus grande organisation de charité de Taïwan. On peut difficilement surestimer l'impact de son exemple personnel sur l'image du bouddhisme taïwanais. Tzu Chi dirige plusieurs hôpitaux à Taïwan, ainsi que des organisations d'aide internationales. En 1999, les victimes d'un séisme à Puli remercièrent particulièrement Tzu Chi pour l'efficacité de sa réponse, bien meilleure que celle du gouvernement taïwanais.

Pendant les années 1980, des dirigeants bouddhistes demandèrent au Ministère de l'éducation de Taïwan de relâcher leurs lois empêchant l'organisation d'une université bouddhiste. Finalement, les années 1990 — grâce à des contributions rendues possibles par le « Miracle taïwanais » économique — virent la création non pas d'une, mais d'une demi-douzaine d'écoles, chacune associée à un dirigeant bouddhiste différent. Parmi ces établissements se trouvaient l'Université Tzu Chi, l'Université Hsuan Chuang, l'Université Huafan, l'Université Fo Guang, l'Université Nanhua et l'Univeristé de la Montagne du Tambour du Dharma. Les lois du Ministère de l'éducation taïwanais interdisent à ces universités de requérir de leurs élèves d'être pratiquants ou même croyants, si bien que ces institutions ne sont pas si différentes des autres universités. Les diplômes délivrés par les séminaires bouddhistes ne sont pas reconnus par le gouvernement.

En 2001, le maître Hsin Tao (心道) du Ling Jiou Shan ouvrit le Musée des religions du monde (世界宗教博物館) à Taipei. En plus d'expositions sur des dix plus grandes religions du monde, le musée contient également un modèle du Sūtra Avatamsaka.

En 2009, Taïwan perdit un de ses enseignants bouddhistes les plus influents : Sheng-Yen du monastère de la Montagne du Tambour du Dharma.

Au cours des dernières décennies, le bouddhisme vajrayāna a gagné en popularité à Taïwan, grâce aux visites de lamas tibétains issus des quatre écoles bouddhistes majeures du Tibet (Kagyu, Nyingma, Sakya et Gelug), ainsi que du dalaï-lama Tenzin Gyatso, qui a visité Taïwan en 1997, 2001 et 2009. La « Véritable école de Bouddha » (真佛宗, Zhen Fo Zong) est la plus grande secte bouddhiste vajrayāna à Taïwan, bien qu'au moins sept autres organisations bouddhistes dénoncent la secte comme pratiquant le culte de la personnalité[3],[4].

Évolution récente

Les statistiques du Ministère de l'intérieur indiquent que la population bouddhiste à Taïwan est passé de 800 000 personnes en 1983 à 4,9 millions de personnes en 1995, soit une augmentation de 600% alors que la population globale n'a augmenté que de 12% environ. De plus, dans la même période, le nombre de temples bouddhistes recensés est passé de 1 157 à 4 020, et le nombre de moines et de nonnes s'élevait à 9 300, contre 3 470 en 1983[5]. Cette augmentation peut être attribuée à l'activité de plusieurs maîtres charismatiques comme ceux mentionnés plus haut.

Notes et références

  1. (en) http://www.adherents.com/Religions_By_Adherents.html#Chinese
  2. (en) http://www.nanzan-u.ac.jp/SHUBUNKEN/Publications/miscPublications/I-R/pdf/32-Vermander.pdf
  3. (zh) « 真佛宗是附佛邪教 七大佛團列六不法舉證 », dans Sin Chew Jit Poh, 25 octobre 2007 [texte intégral (page consultée le 2007-10-25)] 
  4. (zh) « 真佛宗是附佛邪教 七大佛團列六不法舉證 (archive) », dans Sin Chew Jit Poh, 25 octobre 2007 [texte intégral (page consultée le 2009-09-09)] 
  5. (en) Diana Lin, « As Buddhism Grows, So Grows Its Impact », Free China Review, 9.

Annexes

Articles connexes

Bibliographie

  • (en) Stuart Chandler. Establishing a Pure Land on Earth: The Foguang Buddhist Perspective on Modernization and Globalization. University of Hawaii Press, 2004.
  • (en) Lawrence Fu-Ch'uan Hsing. Taiwanese Buddhism & Buddhist Temples/ Pacific Cultural Foundation: Taipei, 1983.
  • (en) Charles Brewer Jones, Buddhism in Taiwan: Religion and the State, 1660-1990. University of Hawaii Press, 1999.
  • (en) Richard Madsen. Democracy's Dharma: Religious Renaissance and Political Development in Taiwan. University of California Press, 2007.

Wikimedia Foundation. 2010.

Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Bouddhisme à Taïwan de Wikipédia en français (auteurs)

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