- Hyperpaléoethnisme
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L' Hyperpaléoethnisme, expression due à l'historien roumain Neagu Djuvara[1], est un mouvement d'histoire-fiction en Albanie, Bulgarie, Macédoine et Roumanie, et qui vise à "démontrer" que les ancêtres réels ou revendiqués des habitants de ces pays : Illyriens, Proto-Bulgares, Macédoniens antiques ou Daces, existaient avant tous les autres peuples de l'Antiquité y compris les Grecs antiques et les Romains, remontent directement aux anciens Indo-Européens (voire, selon les versions, aux "Aryens" ou à Noé) et disposaient d'une civilisation beaucoup plus élaborée que celles reconnues par les historiens.
Sommaire
Étymologie
Hyperpaléoethnisme signifie en grec "nationalisme de l'ultra-ancienneté".
Contexte
Ces théories sont anciennes mais ont beaucoup profité :
- du succès de l'ouvrage Da Vinci Code ;
- des réactions émotionnelles aux provocations médiatisées de personnages comme Vladimir Jirinovski (qui n'est pas historien) ayant, par exemple, affirmé que les locuteurs des langues romanes orientales proviendraient d'un « mélange de colons italiens venus sur les nefs génoises et de Tziganes danubiens, qui a envahi des terres appartenant légitimement à la Bulgarie, à la Hongrie et à la Russie »[2] ;
- de l'inégalité entre les pays peuplés, industrialisés, puissants et connus depuis longtemps de l'Europe de l'Ouest, et les pays beaucoup moins importants géopolitiquement d'Europe centrale et orientale, ce qui génère parfois des complexes qui nourrissent le nationalisme... y compris en histoire (chaque pays tente de s'approprier le passé en y projetant rétroactivement les nations actuelles et en relativisant ou en niant les apports multiculturels d'autres peuples et surtout des peuples voisins)[3].
Exemples
En Bulgarie, s'appuyant sur les travaux de l'académicien Petar Dobrev, les auteurs d'histoire-fiction, très prolifiques sur internet, affirment que les mots d'origine alane en bulgare (qui est une langue slave) ne proviennent pas des Iasses (des Alains installés au XI-ème siècle en Bulgarie, Hongrie et Moldavie) et que les Proto-Bulgares n'étaient pas des turcophones (comme l'affirment linguistes et historiens) mais que ces mots montrent l'origine iranienne des Proto-Bulgares, descendus conformément à la légende du mont Iméon dans le Pamir, et fondateurs, selon lui, d'une grande civilisation appelée "Bulkh " ("Balkh ") en Bactriane ; une partie d'entre eux auraient rejoint les Balkans dès avant les Thraces, et le mot "Balkan" ("glissant" en turc) viendrait, lui aussi, de Balkh[4] ;
En Roumanie, s'appuyant sur les travaux de l'universitaire roumaine Viorica Enăchiuc, les auteurs d'histoire-fiction utilisent des documents apocryphes, comme le Codex Rohonczi, supposé en alphabet dace[5] pour "démontrer" l'antériorité des Daces sur les civilisations de La Tène et de l'Italie antique, et l'origine dace des Latins[6].
Articles connexes
Notes
- Neagu Djuvara sur [1]
- Vladimir Jirinovski cité sur : [2] et [3]
- Jean-Simon Legascon : L'Europe face au défi nationaliste dans les Balkans in : "Guerres mondiales et conflits contemporains" n° 217, janvier 2005, Presses Universitaires de France sur [www.cairn.info/load_pdf.php?ID_ARTICLE=GMCC_217_0061]
- Petăr Dobrev : Nepoznatata drevna Bălgarija (L'ancienne Bulgarie inconnue), éd. Ivan Vazov, Sofia, 2001, ISBN 954-604-121-1
- http://www.dacica.ro/
- Le rapport de synthèse du Professeur Augustin Deac sur le Codex Rohonczi et sur la validité du travail de Viorica Enăchiuc
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