Barh Labourer

Barh Labourer

Loeiz Herrieu

Loeiz Herrieu, ou Louis Henrio comme orthographié à l'état civil, (1879, Lanester, à l'époque en Caudan (Morbihan) - 22 mai 1953, Auray), était un écrivain en breton vannetais. On le surnommait Er Barh Labourér (« Le Barde paysan »). Fils de cultivateur, le vannetais était sa langue maternelle. Il tint lui-même une ferme successivement à Lanester et à Hennebont avant de finir sa vie à Auray.

Sommaire

Biographie

C'est à Lorient que dès 1898 Louis Henrio fréquente l'équipe du Clocher Breton, la revue bilingue littéraire de Madeleine Desroseaux et André Degoul, où il va écrire lui-même à partir de 1902. Commence alors un engagement de toute une vie en faveur de sa langue maternelle et de sa culture. Il n'a aucun diplôme : c'est en autodidacte qu'il se met à étudier (sa bibliothèque compte 4000 ouvrages en 1944), à écrire, à collecter des chants populaires. En 1902, il entre au Gorsedd de Bretagne. Plus tard, il voyage au Pays de Galles et en Écosse pour des rassemblements interceltiques. En janvier 1905, aux côtés de André Mellac, il crée la revue mensuelle Dihunamb, entièrement en vannetais. En 1908 il entre au conseil municipal de Lorient.

En 1910, il épouse Loeiza er Meliner (Louise Le Méliner), qui devient aussi sa collaboratrice, rapportant de ses collectages beaucoup de chansons. Il fait partie de l'Union régionaliste bretonne (URB), mais la quitte en 1912, en même temps que Maurice Duhamel, Émile Masson, Camille Le Mercier d’Erm, François Vallée, pour créer la Fédération régionaliste de Bretagne qui ne survit pas à la guerre.

Sous-officier dans l'infanterie territoriale pendant les cinq ans de la guerre de 1914-1918, il raconte son expérience dans Kammdro an Ankeu. Durant toute cette guerre, il écrit plus d'un millier de lettres à son épouse[1].

Entre les deux guerres mondiales, il poursuit son action : travail de collectage, organisation de concours de breton dans les écoles, et bien sûr reprise de la revue Dihunamb. Il crée les Éditions Dihunamb. Il organise en 1928, avec le barde Jean-François-Marie Jacob et André Mellac, le gorsedd de Locmariaquer.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, il continue ses activités .

Postérité

L'école Diwan Loeiz Herrieu de Lorient

Il est le père de l'abbé Meriadeg Herrieu, auteur d'une méthode et d'un dictionnaire de vannetais. Un autre de ses fils, Armel Herrieu, a participé à la création du Festival Interceltique de Lorient. Ces deux fils, dans les notices qu'ils lui consacrent (l'un dans sa méthode de vannetais, l'autre en préfaçant la réédition des Chansons populaires), ne reviennent pas sur activité durant la Seconde Guerre mondiale, mais cette période ne représente que cinq années d'une active vie militante d'un demi-siècle.

Le nom de Loeiz Herrieu, mainteneur du parler vannetais, a été donné à l'école Diwan de Lorient.

Polémiques

Cet auteur est présenté comme collaborationniste du fait des 31 articles signés[2] dans L'Heure bretonne, journal du Parti national breton

, et de ses opinions sur l'application en Bretagne, par le duc Jean Ier le Roux [3], de mesures discriminatoires contre les Juifs décrétées par l'Église catholique au Concile de Latran (1215).

Il écrit dans « Dihunamb », n° 384, en août 1943 :

« Au XIIIe siècle, les Juifs avaient pullulé tant et si bien qu’ils s’étaient répandus dans tous les pays d’Europe. En Bretagne, comme ailleurs, ils prêtaient de l’argent aux gens, à mille pour cent. Le Duc Jean le Roux vit aussitôt combien ces gens-là étaient dangereux pour la Bretagne. Et il promulgua une loi visant à les chasser du pays. Comme elle stipulait que nul ne serait puni pour avoir tué un Juif, bientôt il n’en resta plus un seul dans notre pays (p. 272). » Herrieu conclut : « Cela nous montre clairement quel soin ils prenaient de garder leur race sans tache et saine. Avec plus de sagesse et plus de circonspection nous devons prendre exemple sur eux. - Loeiz Herrieu. (p. 265)  »

Ce dernier thème du bon duc Jean est d'ailleurs commun à une partie significative du "mouvement breton de cette période. Pour ceux qui relativisent la gravité de ces propos, il faut faire la part des choses : Loeiz Herrieu, né en 1879, était un paysan autodidacte, profondément catholique et lecteur assidu du quotidien "La Croix", lequel s'était proclamé le journal catholique le plus antisémite de France pendant l'Affaire Dreyfus (Il arrive quelquefois que des historiens omettent dans cette citation le mot catholique. La Croix répliquait ainsi à une polémique d'origine catholique, insinuant que des juifs jouaient un rôle important dans sa rédaction" " écrit Noël Copin dans son livre "Je doute donc je crois", Flammarion - Desclée de Brouwer, 1996). On ne peut donc guère reprocher à Herrieu que d'avoir été de son temps et de son milieu : il professait les mêmes idées sur la « race » et la « patrie » que l'immense majorité de ses compatriotes, qu'ils soient républicains laïcs ou catholiques teintés de maurrassisme, et son amour de la Bretagne s'est traduit par une haine de la France (et de la guerre) qui l'a amené vers des chemins sans issue.

Publications

  • Dihunamb, revue en langue bretonne créée à Lorient par Loeiz Herrieu, publiée de 1905 à 1914 puis, après une interruption, de 1921 à 1944.
  • Eit Farsal, groeit dré er Barh Labourér ; Lorient, Le Bayon, 1900.
  • Ketan Fesken (Première gerbe)... Er flip, Ur fest ; Men Dous. Lorient : impr. de A. Cathrine, 1902. 16 p.
  • Chomamb Breihis. Guerzen en inéanneu ; En Oriant, Le Bayon, 1904.
  • Kerhet de Bariz, pehig hoari é diù loden, groeit aveit er skolieu ; Lorient, Dihunamb, 1906.
  • [Collab. à :] Istoér Breih, pe Hanes ar Vretoned. Lorient, Dihunamb, 1910. 377 p. [Histoire de Bretagne ; ouvrage collectif.]
  • Guerzenneu ha sonenneu Bro-Guéned = Chansons populaires du pays de Vannes, recueillies et publiées avec textes bretons et traduction française... Airs notés [et introduction : vol. 3] par Maurice Duhamel. Paris, Rouart, Lerolle et Cie, 1911, 1912, 1930. 3 vol.
    • Rééd. (intégrale?) : Lorient: Festival interceltique de Lorient, 1997. 1 livre (185 p.) + 1 CD.
  • Le Breton usuel (dialecte de Vannes), ou Manuel français-breton contenant un précis de grammaire, des listes alphabétiques de mots usuels, des conversations. Lorient, Dihunamb, 1912.
    • 2e édition complétée : Lorient, Dihunamb, 1934. 386 pp.
  • Buguléz Kerdored (e Meheuen 1792). Péh hoari e ter loden ar amzér en Dispeah é Lanngedig. Lorient, E. Le Bayon, 1913, 48 pp.
  • Fest e zo ! Fal foéraj ; Lorient, Dihunamb, 1931.
  • Ar bont er Velin ; Lorient, Dihunamb, 1937.
  • Tud brudet hor bro-ni, get en abad Bourser, en abad P. Er Go, en tad P. M. Guilloux, en abad Heneu, en I. Loeiza Herrieu ha Loeiz Herrieu. Hennebont: Dihunamb, 1937. II-216 pp, musique. [Personnages célèbres de Bretagne.]
  • La Littérature bretonne depuis les origines jusqu'au XVIIIe siècle. Conférence faite au Cercle breton de Lorient, le 26 mars 1938. Lorient, Dihunamb, 1938. 32 pp [ébauche de l'ouvrage publié en 1943].
  • De hortoz kreisnoz, filajad en nédeleg skeudennet get Xavier Haas, Xavier de Langlais, Perrin hag en oberour. Lorient, Dihunamb, 1942, XL-305 p., fig., musique.[Nouvelles.]
  • La Littérature bretonne depuis les origines jusqu'au XXe siècle, suivie d'extraits traduits des meilleurs auteurs ; Hennebont, Dihunamb, 1943, 231 pp (en français : Par littérature bretonne, il convient de désigner seulement la littérature de langue bretonne (…) L'auteur, pensant que ce travail pourrait rendre quelques services aux jeunes, n'a pas cru devoir se dérober à leurs instances, malgré le désagrément qu'il éprouve à se servir d'une langue qui n'est pas la sienne.)
  • Dasson ur galon, gwerzenneu. Skeudennet ged Padrig Guérin = Résonances d'un cœur, poèmes bretons. Illustrations de Patrick Guérin. [Av.-pr. de Pier Tual.]. Pontivy, Dihunamb, 1957. XVI-255 pp (éd. bilingue).
    • Autre éd., sans trad. : Brest, Brud Nevez, 1983, 144 pp.
  • Kammdro an Ankou; aozet evit an embann get François Louis, Brest, Al Liamm, 1994. 317 p., ill.
    • Traduction française : Le Tournant de la Mort, par Gabriel Le Mer, Frédéric Le Personnic, Julien Prigent ; [Plessala], Association "Bretagne 14-18", 2002, 250 pp. [Correspondance durant la Première Guerre mondiale ; publ. posthume.]

Bibliographie

  • Carré (Daniel), Loeiz Herrieu. Un paysan et un militant culturel breton dans la première Guerre mondiale. Analyse détaillée de sa correspondance avec son épouse (thèse de doctorat sous la direction de Jean-Pierre Piriou alias Yann-Ber Piriou, Rennes, 1999, 1993pp, bibliographie, en breton) ; consultable à la B.U. de Rennes 2 (B.U. centrale).

Notes

  1. Présentation de la thèse de Daniel Carré, éditeur d'une partie de sa corespondance : "Une part importante de l'oeuvre de l'écrivain et publiciste breton Loeiz Herrieu (1879-1953) est consacrée à la Grande Gerre : son Journal de guerre - Kambro en Ankeu (le tournant de la mort) - est une des oeuvres maîtresses de la littérature contemporaine en langue bretonne. Cependant, sans délaisser l'écrivain, c'est l'homme privé, peu connu, que cette thèse s'attache à cerner : caractère, êrsonnalité, lens avec les siens, relations avec les autres soldats, mouvement des idées, visions personnelles et leçons de la guerre... Ceci au travers de l'analuse très détailéle de son courrier privé à son épouse (620 lettres) totalement inconnu e, dehors d cercle familial restreint. Au-delà de la sincérité du soldat - largement attestée par la confrontation de son témoignage aux archives militaires, aux récits d'autres combattants proches de lui (origine sociale, niveau d'étude, idées...) et son adéquation parfaite aux critères du <<bon témoin>> selon Norton Cru - l'analyse présente l'homme, l'époux, le père, le catholique, le paysan, le militant culturel breton face à la guerre - qu'il haït car elle dégrade l'homme - et au militarisme au quotidien - qu'il rejette au nom de la morale et de l'honnêteté. Ses lettres révèlent un être hors du commun, animé d'une vie intérieure intense, et qui, pour rester debout, refuse toute compromission avec les valeurs du monde qui l'entoure. Son sens aigu du devoir, sa totale soumission à la volonté divine nourrissent son espérance sans faille de revoir la Bretagne et les siens avec la victoire du Droit et de la Justice, valeurs au nom desquelles il accepte de souffrir". Thèse et documents (corpus de 275 lettres, biographie circonstanciée de Loeiz Herrieu entre 1879 et 1914, documents divers) sont rédigés en langue bretonne
  2. Pierrick Le Guennec, militant du Parti des travailleurs Le relevé
  3. Pierrick Le Guennec, militant du Parti des travailleurs Une solution finale
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