- Abbaye de Prières
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Il ne reste que quelques vestiges de l'ancienne Abbaye Notre-Dame de Prières, importante abbaye cistercienne située sur la commune de Billiers[1] (actuel département français du Morbihan). Selon Bertrand d'Argentré, son nom proviendrait des prières et des messes qu'on y offrait pour les naufragés. Depuis sa fondation au XIIIe siècle, jusqu'à la disparition de la communauté religieuse en 1790, l'abbaye a connu des périodes de gloire ou de ferveur, comme des épisodes de relâchement et de déclin.
Les marais déserts, proches de l'Océan conviennent aux Cisterciens, ou "moines blancs", qui souhaitent être en retrait de la société. Fille de l'Abbaye de Buzay, la fortune de l'abbaye est liée, dans les premiers siècles de son existence, à sa proximité avec les ducs de Bretagne, qui en sont les fondateurs et les principaux bienfaiteurs. Elle acquiert alors une puissance foncière qui lui assure de larges revenus.
Spoliée par ses abbés commendataires au XVIe siècle, elle retrouve la régularité au siècle suivant et devient un centre d'impulsion de la réforme de l'Ordre de Citeaux en diffusant la stricte observance en lien avec l'abbé de Rancé et la Trappe. La reconstruction de l'église et des bâtiments conventuels aux XVIIeet XVIIIe siècles témoignent de sa prospérité. Cependant, comme beaucoup de ses sœurs, elle peine à recruter et ses édifices sont trop vastes pour les quelques moines qui l'habitent.
Elle est vendue comme bien national sous la Révolution française, utilisée comme caserne puis comme carrière, tandis que ses œuvres d'art et sa bibliothèque sont dispersés. Son nouveau propriétaire au XIXe siècle ne parvient à préserver qu'une petite partie des bâtiments, qui abritent aujourd'hui un centre de réinsertion.
Sommaire
Histoire
Une fondation tardive (XIIIe siècle)
Présents en Bretagne, dès 1130, à Bégard, les Cisterciens y ont fondé une douzaine d'abbayes[2]. La fondation de l'abbaye de Prières est contemporaine de celle de l'abbaye de la Joie Notre-Dame, réservée aux moniales sur l'initiative de la duchesse Blanche de Navarre[Laquelle ?].
Une fondation des ducs de Bretagne =
La fondation de la nouvelle abbaye semble avoir été envisagée dès 1248 ; cependant les moines ne s'y installent qu'en 1252.
Jean Ier, dit Le Roux, duc de Bretagne, avait fait disparaître le prieuré de Saint-Pabu dans son parc de Suscinio. Pour se racheter, il décide de fonder une nouvelle maison[3]. Il obtient, de Cadioc, évêque de Vannes, et malgré ses relations tendues avec celui-ci, une lettre d'approbation datée du 6 janvier 1251 et destinée au Chapitre général de l'Ordre de Citeaux envoyée depuis sa résidence de campagne de Conleau. Jean Ier s'est aussi adressé à Innocent IV qui en avril demande à Cadioc d'accepter la fondation. Commence alors la construction des bâtiments, aux frais du duc, qui sont jugés conformes à la vie cistercienne par les visiteurs de l'Ordre de Citeaux le 1er juillet 1252. Le 31 octobre les moines cisterciens venus de Buzay s'installlent sous la direction de l'Abbé Geoffroy[4].
Quelques jours après l'arrivée des moines, le duc de Bretagne, Jean Ier octroie sa charte de dotation. Les biens donnés à l'abbaye sont pour la plupart rachetés par le duc à des seigneurs locaux:
- Les seigneuries foncières de Bagan, où est établie l'abbaye[5], de Bréhondec (Bréhaudan dans la charte)et de Duen[6] et la terre de Laud.
- Les moulins situés sur l"étier de Billiers, à proximité du bourg,
- Les droits sur le passage de la Vilaine entre la Roche-Bernard et Guédas en Marzan,
- Des vignes, l'une située à Lenclis en Guérande, l'autre en Anjou, près du Port-Thibaud,
- Une partie des salines de Guérande[7].
Sur ces possessions l'abbaye est titulaire des droits de haute, moyenne et basse justice et perçoit les droits et redevances seigneuriales.
L'ensemble des privilèges de l'abbaye est confirmé par une Bulle solennelle d'Innocent IV datée du 28 mai 1254. Le pape accorde tous les privilèges d'exemption et d'immunité ecclésiastique que ses prédécesseurs ont reconnu aux abbayes de l'ordre de Citeaux au cours du XIIe siècle[8]. L'abbaye de Prières est déliée de toute obédience envers la juridiction de l'évêque de Vannes et n'est pas assujettie à la dîme et il insiste sur cette très large autonomie vis-à-vis de l'évêque de Vannes[9].
Une seigneurie ecclésiastique
Au XIIIe siècle, le domaine temporel de l'abbaye s'accroît avec l'aide du duc de Bretagne qui lui accorde sur les forêts qu'il fait défricher des dîmes à Sarzeau, Rhuys, Arzon, Liffré avec le droit de recevoir de nouvelles dîmes lors des défrichements ultérieurs sur toutes les forêts du domaine ducal[10].
Il la dote de rentes sur les revenus de Muzillac. Des seigneurs locaux font aussi des dons à l'abbaye : en 1253 Barthélémy de Questembert fonde une chapellenie et la dote de revenus situés en Elven; en 1270, Philippe de l'Ile fait don de la terre de Pellemain en Marzan. L'abbaye bénéficie de dons, achète, échange des droits et des terres à Ambon, Pénerf, Caden, Sulniac, Herbignac, Rezé, Nantes. Toutefois les rapports avec les seigneurs locaux sont parfois conflictuels: en 1274, Eudon de la Roche-Bernard, qui revendique une partie des droits de péage, fait détruire les barques de l'abbaye qui servent à passer la Vilaine; un accord est conclu et Eudon s'engage à remettre les malfaiteurs à l'abbé Rivallon pour qu'ils soient jugés par sa cour[11].Des liens étroits avec la famille ducale
Par dérogation à la règle cistercienne, le pape Alexandre IV, accorde à la duchesse Blanche de Navarre[Laquelle ?], qui a largement contribué à la fondation de l'abbaye, le droit d'y entrer avec dix de ses dames. En 1270, son époux, Jean Ier y est accueilli, avec son fils, lors de son départ pour la croisade. En 1306, Even, abbé de Prières, est exécuteur testamentaire du duc Jean II. Surtout l'abbaye sert de sépulture à la famille ducale. Son fondateur, Jean Ier, y est inhumé en 1286[12]; en 1328, la duchesse Isabelle de Castille est enterrée dans le chœur[13].
L'abbaye semble avoir traversé sans trop d'encombres la guerre de succession de Bretagne. L'abbé, Guillaume Elen, parvient à se faire payer les rentes sur le domaine ducal aussi bien par Charles de Blois que par les Monfort. Son successeur, Henri le Barbu, devient évêque de Vannes et chancelier du duc Jean IV[Lequel ?]. Sans doute est-ce ce qui explique le transfert du corps de Jeanne Holland, seconde épouse du duc, morte en 1383 à Nantes à Prières pour y être inhumé dans l'église[14]. La famille de Monfort ne délaisse pas l'abbaye fondée par ses prédécesseurs.
Puissance et rayonnement (XIVe - XVe siècles)
Les sources ont tendance à privilégier les aspects matériels[15], nous sommes assez peu renseignés sur les moines et la vie de la communauté.
Malgré ses qualités personnelles, le 10e abbé de Prières, Henri Le Barbu, rompt avec la rigueur cistercienne. Entré dès 1378 dans l'obédience du Pape d'Avignon il devient nonce en Bretagne en 1380, évêque de Vannes en 1383, Chancelier du Duc Jean IV. Il meurt à Nantes en 1419.
la Commende
L'abbaye tombe sous le régime de la commende en 1499, lorsque le Pape Alexandre VI impose le notaire Charles du Hangest contre l'élu des moines, le frère Raymond Le Verrier, bien que celui-ci ait été confirmé par l'Abbé de Clairvaux. Mais, en 1606, le prieur, Bernard Carpentier, (mort en 1647) dirige la réforme qui remet l'abbaye sous un gouvernement régulier.
Vers 1692, l'un des moines les plus illustres est Dom Paul-Yves Pezron, docteur en théologie, historien, chronologiste et linguiste du breton.
Description
L'abbaye primitive rassemblait une église abbatiale de style gothique, à trois nefs, flanquée au sud par les bâtiments conventuels qui entouraient le cloître. Au premier étage de ceux-ci, une bibliothèque avait été aménagée. D"autres constructions, non attenantes, abritaient l'hôtellerie, les granges, le four, la forge. Dans l'ancienne abbatiale avaient été inhumés le duc Jean Ier, sa femme, Isabelle de Castille, la duchesse Jeanne de Hollande et les abbés.
Au XVIe siècle cet ensemble est délabré. Le 17 juillet 1553, les commissaires de la sénéchaussée de Vannes dressent un inventaire éloquent à la suite de la mort de l'abbé commendataire. Une grande partie des bâtiments qui entouraient le cloître est effondrée : de la cuisine il ne reste qu'une cheminée, la charpente est tombée dans le grand réfectoire au sud. Dans la seule aile encore habitable, le toit du dortoir, au premier étage est à refaire. Le clocher de l'abbatiale menace de tomber et ses murs sont lézardés[16].
Aujourd'hui, il ne reste pratiquement rien des anciens bâtiments de l'abbaye reconstruite aux Modèle:S-XVII et Modèle:S-XVIII. Les ruines ont été rachetées au Modèle:S-XIX siècle par M. le Masne qui a sauvegardé une petite partie de l'abbatiale de 1726 qui est transformée en chapelle.
Liste des abbés
Abbaye de Notre-Dame de PrièresAbbés réguliers
- 1252-1267 : Geoffroi
- 1270-1271 : Salomon
- 1274 : Riwallon
- 1289 : Tanguy
- mort en 1301 : Judicaël
- 1305 : Even
- mort en 1320 : Rolan de Coatelez
- 1325-1330 : Wiomarc'h
- 1353-1372 : Guillaume Elen
- 1380-1383 : Henri Ier le Barbu
- 1383-1400 : Jean Ier Raoul
- 1405-1415 : Jean II Raoul son neveu ;
- 1439-1453 : Guillaume de Landelle
- 1454-1467 : Olivier de Blanchart
- 1467-1472 : Vincent de Kerleau
- 1475-1498 : Jean Le Verrier
Abbés commendataires
- 1499 : Charles de Hangest
- 1525 : Jean de Rieux , évêque de saint-Brieuc ,
- 1533-1536 Guillaume Car
- 1537-1552 : Guy Drouillart
- 1553-1574 : Charles de Loraine cardinal archevêque de Reims ;
- 1574-1581 : Betrand Guillaudon
- 1581-1595 : Jean de Rieux
- 1607-1630 : Jean Bouchard
- 1630-1631 : Guillaume Jamet
- 1631-1673 : Jean Jouaud
- 1673-1680 : Hervé du Tertre coadjuteur depuis 1637 ;
- 1681-1727 : Melchior de Sérent
- 1727-1741 : Jacques Nouel
- 1741-1764 : Charles Marie de la Fruglaye
- 1764-1766 : Abel Botte
- 1766-1787 : Jean-Louis de Meaux
- 1787-1790 : Prudent Charles de Corcin.
Annexes
Notes et références
- billiers.fr
- Bégard, Le Relecq, Buzay, Langonnet, Saint-Aubain-des-Bois, Boquen, La Vieuville, Lanvaux, Coëtmaloen, Melleray, Carnoët, Bonrepos, Villeneuve
- J. P. Leguay et H. Martin, Fastes et malheurs de la Bretagne ducale 1213-1532, 1982, p. 61
- Jh.-M. Le Mené, Abbaye de Prières, Bulletin et Mémoires de la société polymathique du Morbihan, 1903, p. 8 et sqq.
- qualifié de "villagium" dans la charte, L. Rosenzweig, Dictionnaire topographique du département du Morbihan, p. 297
- Qualifiés de "villa", Rosenzweig, ibid., p 28.
- Le Mené, art. cit. , p. 11.
- Louis J. Lekai, Les Moines blancs, Paris, Seuil, 1957, p. 74.
- Le texte de la Bulle est entièrement publié par Le Mené, art. cit.
- Abbé Piéderrière, Ėtude sur l'ancienne Abbaye de Prières, Bulletin de la Société polymathique du Morbihan, 1862, p. 7-8.
- Le Mené, art. cit., p. 16. et 53
- Le Mené, art. cit. p.44.
- Le mausolée d'Isabelle de Castille, duchesse de Bretagne, à l'abbaye de Prières, in Études et documents sur l'histoire de Bretagne (XIIIe-XVIe siècles), par l'abbé G. Mollat, Paris, 1907 p. 51-53.
- Le Mené, art. cit., p. 41.
- http://recherche.archives.morbihan.fr/Abbaye_de_Prieres_a_Billiers_ordre_de_Citeaux-564036.html?PARAM564036=ModLevel_2&sRef=FRAD056_00000003H&PRESFONDS=1
- Le Mené, art. cit. , p 32-33.
Bibliographie
- Jh.-M. Le Mené, Abbaye de Prières, Bulletin et Mémoires de la société polymathique du Morbihan, 1903, p. 8-80.
Liens internes
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