Émigration messine à Berlin suite à la révocation de l'édit de Nantes

Émigration messine à Berlin suite à la révocation de l'édit de Nantes

Émigration messine à Berlin suite à la révocation de l'édit de Nantes

L’émigration messine à Berlin est due à la révocation de l’édit de Nantes, ou édit de Fontainebleau, par lequel, le 17 octobre 1685, le roi de France Louis XIV interdit l’exercice du culte protestant dans le royaume.

Cette décision met en péril la communauté protestante calviniste de Metz, et entraîne son exode massif. Ainsi, dans le sillage de David Ancillon, 426 familles originaires de Metz - au moins 1 600 personnes - vont suivre majoritairement leurs pasteurs à Berlin, Francfort-sur-l’Oder, Heidelberg et Kassel. Au total, 40 000 huguenots opteront pour les états allemands, dont 20 000 pour l’unique état de Brandebourg.

Sommaire

Une élite cultivée

L’accueil généreux des huguenots par Frédéric-Guillaume Ier de Prusse, électeur de Brandebourg, n’est pas totalement désintéressé. Au sortir de la Guerre de Trente Ans (1618-1648, l’Allemagne est exsangue et a perdu la moitié de sa population. Berlin ne compte plus que 6000 âmes avant l’immigration. En 1697, elle accueille 4281 réfugiés, dont 27% de Messins. Les protestants français viennent donc combler en partie le déficit démographique. Mais pas seulement ; nombre d’entre eux appartient à une élite cultivée. Ils vont impulser un fort élan intellectuel, économique, militaire. Un modèle français auquel aspireront Frédéric-Guillaume puis Frédéric II de Prusse.

La fondation en 1689 du collège français

La fondation en 1689 du collège français de Berlin, l’ancêtre du Französisches Gymnasium, a contribué fortement à la croissance économique et démographique de Berlin, alors ville de taille très modeste.

Les huguenots avaient pour principe de créer une école partout où se trouvait un temple, car ils étaient très soucieux de l’éducation des enfants. La qualité de l’enseignement dispensé à l’époque fit que bien des familles allemandes envoyèrent leurs enfants au collège français, où l’enseignement était exclusivement dispensé en français. On y enseignait à lire et à écrire, l’arithmétique, les principes de la religion, les Belles Lettres et la philosophie.

Parmi les enseignants, François Bancelin, Paul Goffin, Claude d’Ingenheim, Benjamin de Fériet, Pierre Carita, et Louis Malchar, tous nés à Metz[1].

Les réfugiés implantent des manufactures

Les réfugiés avaient apporté avec eux des métiers encore inexistants à leur arrivée (fabrication de gants, de chapeaux, industrie de la soie, orfèvrerie, horlogerie…).

Pierre de Maizery, alias Pierre Persode, ex seigneur de Maizery et Armand Maillette de Buy, seigneur de Buy (Antilly) ont contribué à l’essor des manufactures en Brandebourg.Ils contrôlaient par exemple la manufacture de Louis Lejeune originaire de Metz, installé à Soest en Westphalie et dont le secteur d’activité était la teinture (le pastel). Le succès des manufactures travaillant la laine fut rapide: deux ou trois ans elles fabriquèrent assez pour fournir le pays en étoffes jusque là importées[1].

Les messins dont tannerie était la spécialité continuèrent en Brandebourg leur métier: Jean Hian, Daniel Claude; Abraham Remy, Daniel Delagarde tous établis à Berlin, tandis qu’Isaac Séchehaye construisait un moulin à tan à Prenzlau.

La présence religieuse et scientifique française s’enracine à Berlin

Sur la place du Gendarmenmarkt, du nom des cavaliers d’un régiment d’élite formé de huguenots, se dresse, symétrique à l’église catholique, l’église française protestante qui a la dimension d’une cathédrale. Située près de la Französische Straße où résidèrent de nombreux huguenots, elle fut édifiée de 1701 à 1705, sur le modèle du temple de Charenton. Les descendants du pasteur messin Ancillon prêchèrent vraisemblablement dans ce temple où les registres furent tenus en français jusqu’à la fin du XIXe siècle.

À proximité se trouve le bâtiment de l’Académie des Sciences fondée par Leibniz en 1700. Dans l’esprit du siècle des Lumières, les débats s’y déroulaient en français. Familier de Leibniz et membre de cette académie qu’il contribue à créer, le Messin Charles Ancillon, fils de David, est à l’origine du Lycée français, encore aujourd’hui prisé par l’élite berlinoise. Son frère, un autre David, occupa une place de premier plan dans l’organisation juridique de la colonie huguenote. Le tombeau des Ancillon figure en bonne place dans le cimetière français sur Chausseestraße, jouxtant la maison du dramaturge Bertolt Brecht, lui aussi enterré dans ce cimetière-jardin.

L’inspiratrice des contes de Grimm

Isaac Pierson né à Metz (1655-1741) fit partie des premières vagues de réfugiés qui gagnèrent la Hesse. Il s’établit dans la colonie de Schöneberg et son arrière petite-fille, la conteuse Dorothée Viehmann, née le 8/11/1755 près de Cassel. Les frères Grimm lui doivent 19 de leurs plus beaux contes. Mais lorsqu’ils menèrent dans la vallée de la Weser leur enquête orale afin de recueillir les contes populaires qu’ils croyaient d’origine et de tradition authentiquement allemandes, et surtout lorsqu’ils se tournèrent vers la conteuse Dorothée Viehman, ils ne se sont pas aperçus que l’essentiel de ce qu’elle leur transmettait était d’origine française[2].

La famille de Maizière

Parmi les noms illustres figure également la famille de Maizière, originaire de Maizières-lès-Metz. Elle compte dans l’Allemagne contemporaine d’éminents personnages comme Lothar de Maizière, premier ministre (1989-1990) de la RDA à avoir été démocratiquement élu; ou, à l’ouest, le général Ulrich de Maizière, inspecteur général de l’armée et un des inventeurs de la conception allemande de l’armée dans une démocracie, connue sous l’appellation du Bürger in Uniforme, du "citoyen en tenue". Son fils Thomas est depuis novembre 2005 ministre fédéral avec attributions spéciales et chef de la Chancellerie fédérale dans le gouvernement d’union dirigé par Angela Merkel.

Notes et références

Bibliographie

Huguenots. De la Moselle à Berlin, les chemins de l’exil’', études réunies et présentées par Philippe HOCH, Metz, Éditions Serpenoise, 2006, 272p.

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