- Théorème de Bolzano
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Théorème des valeurs intermédiaires
Pour les articles homonymes, voir TVI.Le théorème des valeurs intermédiaires (TVI) est un théorème important en analyse et concerne des fonctions continues sur un intervalle. Il indique que si une fonction continue sur un intervalle prend deux valeurs m et n, alors elle prend toutes les valeurs intermédiaires entre m et n.
Ce théorème donne dans certains cas l'existence de solutions d'équations et est à la base de techniques de résolutions approchées comme la dichotomie.
Sommaire
Approche intuitive
La 10e étape du Tour de France 2008 était une course cycliste de 156 km de long partant de Pau (altitude : 200 m) et arrivant à Hautacam (1 520 m).
Le profil de l'étape est une fonction définie sur l'intervalle [0;156] et à valeurs réelles. À tout nombre x de [0;156], elle associe l'altitude du point situé à x kilomètres du départ. Puisque les altitudes s'échelonnent de 200 à 1 520 m, il paraît évident que les coureurs ont dû passer au moins une fois par toutes les altitudes intermédiaires. Cependant, cette constatation s'appuie sur deux hypothèses :
- le parcours est un intervalle, ce qui suppose que l'espace est un continuum — les mathématiciens parlent d'espace connexe — c'est-à-dire qu'il n'y a pas de « trou » entre 0 et 156.
- la fonction altitude est continue, ce qui signifie qu'une variation infinitésimale du kilométrage entraîne une variation infinitésimale de l'altitude : en d'autres termes, un coureur de peut pas se téléporter instantanément d'une altitude à une autre.
Le coureur passera ainsi au moins une fois par l'altitude 1 000 m. Remarquons que le raisonnement n'est plus valable si le profil n'est plus défini sur un intervalle, par exemple si l'on ne s'intéresse qu'aux points de contrôle marqués sur le graphique ci-contre : il se peut qu'aucun de ces points, si nombreux soient-ils, ne se trouve à 1 000 m d'altitude.
Le théorème des valeurs intermédiaires formalise ce raisonnement empirique.
Énoncé
Soit f une fonction définie et continue sur un intervalle I et à valeurs dans .
Alors pour tous réels a et b de I, pour tout réel u compris entre f(a) et f(b), il existe au moins un réel c compris entre a et b tel que f(c) = u.
Cas particulier (Théorème de Bolzano): si f(a) et f(b) ne sont pas de même signe, il existe au moins un réel c compris entre a et b tel que f(c) = 0 (car 0 est compris entre f(a) et f(b)).Remarques
- La propriété de la valeur intermédiaire correspond à une notion intuitive: il est possible de dessiner le graphe de la fonction d'un seul trait de crayon. Ou dit autrement, il n'est pas nécessaire de soulever son crayon pour dessiner le graphe de la fonction.
- Cette remarque amène à se poser la question : n'y a-t-il pas équivalence entre la propriété de la valeur intermédiaire et la continuité ? La réponse est malheureusement négative (Théorème de Darboux). Un contre exemple nous est donné par la fonction réelle de la variable réelle définie par si et . Cette fonction n'est pas continue en 0 mais elle satisfait bien la propriété de la valeur intermédiaire pour chaque couple de points dans .
- Ce théorème est essentiel à l'élaboration de la théorie de l'analyse élémentaire, il permet la démonstration du théorème de la bijection et la construction de nombreuses fonctions élémentaires comme la racine carrée.
- Ce théorème est faux sur le corps des nombres rationnels. Il faut nécessairement utiliser les propriété du corps des nombres réels. Par exemple, la fonction f(x) = x2 − 2 de dans est continue sur [0;2], et vérifie f(0) = − 2, f(2) = 2. Cependant, il n'y a pas de nombre rationnel x tel que f(x) = 0.
- Ce théorème met en valeur une propriété topologique des nombres réels. Il se démontre simplement à l'aide de la topologie ou de manière plus délicate si l'on procède manuellement.
- Lorsque l'on cherche à démontrer qu'il existe une solution unique, on regarde si de plus f est strictement monotone. Il est aussi possible d'utiliser le théorème de la bijection.
Applications
- On utilise souvent ce théorème pour montrer que deux fonctions continues sur un même intervalle et dont la différence change de signe dans cet intervalle prennent la même valeur en au moins un point de cet intervalle.
- Exemple : Soient f et g deux fonctions continues sur un intervalle non vide [a ; b] de , telles que g(a) - f(a) et g(b) - f(b) soient de signes contraires. Il existe au moins un réel c compris entre a et b et tel que f(c) = g(c).
- En effet, posons φ = f - g. La fonction φ est continue, et 0 est compris entre φ(a) et φ(b). Il existe donc au moins un réel c compris entre a et b et tel que φ(c) = 0, soit encore f(c) = g(c).
- Dans le cas particulier où g est l'identité sur l'intervalle [a;b] et où f(a) > a et f(b) < b, on obtient un théorème de point fixe (Brouwer en dimension 1).
- Pour tout polynôme P à coefficients réels et de degré impair, il existe au moins une racine réelle, c'est-à-dire un réel c tel que P(c) = 0.
- En effet, on peut supposer (sans perte de généralité) que le coefficient du terme de plus haut degré de P est égal à 1. Alors, comme le degré de P est impair, P(x) tend vers -∞ quand x tend vers -∞, et P(x) tend vers +∞ quand x tend vers +∞. On en déduit qu'il existe a réel tel que P(a) ≤ 0, et qu'il existe b réel tel que P(b) ≥ 0. Comme P est continu, il existe au moins un réel c compris entre a et b et tel que P(c) = 0.
Note historique
Il n'est pas nécessaire qu'une fonction soit continue pour que la conclusion du théorème des valeurs intermédiaires soit vraie. En 1875, Gaston Darboux a montré que cette conclusion était vérifiée par les fonctions dérivées, qu'elles soient continues ou non (voir Théorème de Darboux (analyse) ).
Résolution et démonstration
Le théorème des valeurs intermédiaires fait partie des théorèmes dits d'existence. A la question « Existe-t-il un réel c tel que f(c) = k? », le théorème répond « OUI, il en existe ». Il fait naître alors nécessairement la question suivante « Quel est ce réel c ? ».
Deux démonstrations sont données. La première, plus courte et plus simple, s'appuie sur une théorie plus difficile, la topologie. La deuxième démonstration, basée sur la méthode de dichotomie peut, dans une certaine mesure, être mise en œuvre numériquement. Cependant, il n'existe pas de démonstration générale constructive de cette existence.
Démonstration avec la topologie
La topologie fournit une démonstration en quelques lignes de cette propriété :
- Les connexes de sont les intervalles. L'ensemble de départ est donc un connexe. L'image d'un connexe par une fonction continue est un connexe. Donc l'image par f de est un intervalle, ce qui démontre le théorème.
Mais derrière cette apparente simplicité se cachent des résultats qu'il faut avoir démontrés au préalable, comme le fait qu'un intervalle de est connexe, et que les connexes de sont les intervalles, démonstrations moins élémentaires que celle du théorème des valeurs intermédiaires.
Démonstration par dichotomie
Le principe consiste à couper l'intervalle de départ en deux et à conserver l'intervalle où l'on sait que se trouve une solution. On recommence ensuite en coupant en deux l'intervalle conservé, etc. On obtient ainsi des intervalles emboîtés de plus en plus petits dans lesquels on est sûr de trouver une solution. On finit alors par trouver un encadrement « assez fin » de la solution.
On suppose donc que
- la fonction f est continue sur l'intervalle [a , b]
- f(a) < k < f(b) (une démonstration analogue peut se faire pour f(a) > k > f(b)).
La continuité de la fonction f va permettre d'utiliser la propriété suivante :
- si (un) est une suite à valeurs dans [a ; b] convergeant vers L, alors f(un) converge vers f(L).
La méthode de dichotomie consiste à construire une suite d'intervalles In = [an ; bn] tels que pour tout n :
- In+1 soit inclus dans In
- la longueur de In+1 soit la moitié de celle de In
- f(an) < k < f(bn).
On procède de la manière suivante :
- on pose initialement I0 = [a ;b]
- quand à un rang n, l'intervalle In est construit, on note mn son milieu et
- si f(mn) < k , on prend pour In+1 l'intervalle [mn ; bn] et on pose an + 1 = mn et bn + 1 = bn.
- si f(mn) > k , on prend pour In+1 l'intervalle [an ; mn]et on pose an + 1 = an et bn + 1 = mn..
- si f(mn) = k , on s'arrête.
Deux cas se présentent :
- ou bien la suite est finie et il existe n tel que f(mn) = k ; le problème est alors résolu, et on peut prendre : c = mn
- ou bien la suite est infinie.
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- Dans ce cas, les suites (an) et (bn) sont adjacentes : en effet, la première est croissante (au sens large), la seconde est décroissante, et la différence entre les deux suites est égale à la longueur de In,soit qui tend vers 0.
- Ces deux suites convergent donc vers une même limite c. Comme f est continue, les suites (f(an)) et (f(bn)) convergent vers f(c).
- Comme, d'autre part, f(an) < k pour tout n, on obtient f(c) ≤ k par passage à la limite.
- Comme, enfin, f(bn) > k pour tout n, on obtient f(c) ≥ k par passage à la limite.
- Il en résulte que f(c) = k.
Algorithmes
La démonstration par dichotomie se traduit facilement sous forme algorithmique, à l'exception du test f(mn) = k, qu'on ne saurait vérifier exactement alors que l'on procède à des calculs numériques approchés. On préfère lui substituer la condition , où est une erreur donnée à l'avance. L'algorithme fournira alors un réel x tel que , mais cette valeur peut se révéler relativement éloignée de la valeur exacte c de la racine si l'on ne fait aucune autre hypothèse sur f que la continuité.
Dans le cas où f est C1 (c'est-à-dire où f et sa première dérivée sont continues) et qu'on peut trouver un nombre m>0 tel que |f '|>m dans l'intervalle où la méthode de dichotomie est appliquée, alors l'algorithme de la dichotomie converge vers un nombre c tel que f(c) = k. On a de plus, la majoration de l'écart entre la valeur x calculée par la dichotomie et c sous la forme
Par ailleurs, la méthode de dichotomie permet seulement de trouver une seule valeur x. Le fait d'éliminer tout un intervalle à chaque étape risque d'éliminer d'autres solutions.
Enfin, la dichotomie est un algorithme simple, mais n'est pas le plus performant : la précision n'augmente que d'un facteur 2 à chaque itération. On a donc cherché d'autres méthodes permettant une convergence plus rapide. La méthode de Newton ou méthode des tangentes en est un d'une bonne efficacité.
- Article détaillé : Algorithme de recherche d'un zéro d'une fonction
Voir aussi
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