Sefer Torah

Sefer Torah
Un Sefer Torah (ashkénaze) et une yad.
Un sefer torah séfarade se lit verticalement.

Le Sefer Torah (en hébreu: ספר תורה - « livre [de] Torah » ou plus exactement rouleau de Torah (pluriel : Sifrei Torah) est une copie manuscrite de la Torah (ou Pentateuque), le livre le plus saint et révéré du judaïsme. Les conditions standard dans lesquelles il est réalisé sont extrêmement strictes et uniquement livrées à des scribes professionnels (Sofrim). Une fois réalisé, il est entreposé dans l'endroit le plus saint de la synagogue, l'Aron Kodesh (« Arche sainte », en référence à l'Arche d'alliance), une armoire généralement ornée de tentures brodées, ou une section orientée vers Jérusalem, qui est la direction vers laquelle prient les Juifs.

Le texte de la Torah est également fréquemment imprimé (à des fins non-rituelles) sous forme de livre (« classique », non sous forme de rouleau), appelé Houmash (« cinquième », par allusion aux Hamisha Houmshei Torah, les cinq livres de Moïse), avec souvent une traduction ou des commentaires imprimés en marge du texte.

Bien que traité avec révérence, la sainteté des Houmashim n'atteint pas celle d'un Sefer Torah, véritable trésor pour la communauté qui en possède un.

Sommaire

Production d'un Sefer Torah

Scribe transcrivant la Torah dans les années 1930

Selon la Loi juive, un Sefer Torah (plur. : Sifrei Torah) est une copie du texte hébreu des Cinq Livres de Moïse (Pentateuque), réalisée à la main, c'est-à-dire à la plume, sur un gvil ou un qlaf (formes de parchemin, cf. infra). Écrire un Sefer Torah est l'un des commandements prescrits dans le Judaïsme. Tant le gvil que le qlaf doivent être préparés selon la procédure décrite plus bas.

Entièrement écrit en hébreu, un Sefer Torah contient 304 805 lettres, chacune devant être scrupuleusement reproduite par un sofer (scribe accompli), le processus pouvant durer 18 mois. La moindre erreur lors de l'inscription, tant qualitative que quantitative, rend l'entièreté du Sefer Torah passoul (invalide).

Le Talmud, ouvrage compilant l'ensemble de la Loi orale du judaïsme, nous apprend :

  • que les soferim furent appelés ainsi parce qu'ils « comptaient » (lispor) les lettres à l'aide de leur valeur alphanumérique. C'est d'ailleurs cette pratique qui donna naissance à la guematria
  • que tout rouleau doit être écrit sur un gvil traité avec du sel, de la farine et des m'afatsim (un résidu d'enzymes de guêpes et de troncs d'arbres) afin d'être valide. Tout rouleau non traité de la sorte est considéré invalide (Mishneh Torah, Hilkhot Tefillin 1:8 & 1:14). Pourtant, le qlaf est actuellement préféré.

Les Sifrei Torah modernes sont écrits avec 42 lignes de texte par colonne. Des règles très strictes régissent la position et l'apparence des lettres. Plusieurs scripts hébraïques peuvent être utilisés, mais on accorde souvent une préférence aux calligraphies, élégantes autant que complexes.

Le texte hébraïque du Tanakh, et de la Torah en particulier, étant considéré comme saint, jusqu'à la dernière lettre, des traductions ou des transcriptions imprimées sont fort peu considérées pour l'usage rituel, et la transcription manuelle fait l'objet d'un soin particulièrement minutieux. Une simple lettre, « un simple ornement ou symbole » faussé parmi les 304 805 lettres, et le livre est déclassé.

Le Qlaf : un materiel digne d'un Sefer Torah

Qlaf (également Klaf ou K'laf, « parchemin » en hébreu), est le mot consacré pour désigner un rouleau cachère d'une mezouzah ou d'un Sefer Torah.

Préparation du Qlaf

Le parchemin peut être fait sur la peau spécialement préparée de tout animal cachère - chèvre, taureau/vache (mais pas bœuf), ou cerf. La peau est faite de trois couches (g’vil, k’laf et doksostus) mais seule la portion charnue de la couche profonde (g'vil) ou la portion externe de la couche poilue (qlaf) sont cachères (propres à l'usage) pour l'utilisation à des fins saintes. Le doksostus ne l'est pas.

La méthode de nettoyage et la préparation de la peau ont changé au cours des siècles :

  • aux temps talmudiques, de l'eau salée et de l'orge étaient épandues sur les peaux, qui étaient ensuite trempées dans du jus d'afatsa (coloquinte). De « l'engrais » de chien pouvait également servir à cet usage.
  • de nos jours, les peaux sont plongées dans de l'eau claire pendant deux jours, après quoi elles sont trempées dans de l'eau calcaire (à vérifier) pendant neuf jours afin d'ôter les poils. Lorsque la surface est devenue glabre, le sofer l'etend sur un cadre de séchage en bois et le gratte jusqu'à ce qu'il soit sec, et que les plis soient repassés avec des presses. Les peaux sont ensuite sablées jusqu'à devenir lisses et planes, prêtes à l'emploi.

Cerains parchemins (souvent de mauvaise qualité) sont barbouillés avec du log, une substance crayeuse blanchissante (quelquefois, d'un seul côté). Cette pratique est peu appréciée des scribes, qui font remarquer que le log forme une barrière entre l'encre et le parchemin.

Du fait que les procédés modernes de préparation du parchemin sont préparés suivant la règle du qlaf, et utilisés de cette manière, c'est-à-dire afin d'écrire sur le côté charnu (le tissu sous-cutané), et non le côté poilu, toute écriture sur le côté poilu est considéré comme invalide, mais il n'en a pas toujours été ainsi.

Préparé « pour les cieux »

Le parchemin doit être préparé « pour les cieux », c'est-à-dire avec l'intention de réaliser un acte divin, et le préparateur doit en faire état dans une déclaration, car on ne peut utiliser un qlaf destiné à un usage de moindre sainteté (kedousha kala) comme les parchemins d'une mezouzah, pour écrire les parchemins des tefillin ou un Sefer Torah, qui sont d'une sainteté plus importante (kedousha 'hamoura).

S'il doit le faire, le sofer doit dire qu'il prépare un parchemin en vue d'un Sefer Torah, mais que cela peut changer s'il le souhaite.

Si l'on ne peut trouver aucun Juif capable de préparer les peaux, un non-Juif peut le préparer, mais ces circonstances sont exceptionnelles, et le non-Juif doit être supervisé par un Juif, qui doit aussi déclarer que cette préparation est « pour les cieux ».

Après la préparation, le sofer doit marquer le parchemin avec une sarguèl (règle), en s'assurant que les lignes-guide sont droites. Seul le guide supérieur est tracé. Les lettres s'alignent par rapport à lui.

« C'est une mitzvah pour chaque Juif d'écrire ou de faire écrire un Sefer Torah pour lui. » (Deut. 31:19).

Histoire

D'après les textes juifs les plus anciens et ayant la plus grande autorité (Mishna Sofrim (200-500 ap. J.-C., l'œuvre gaonique intitulée Halakhot Gdolot (743 ap. J.-C.) et le Mishneh Torah de Maïmonide), le qlaf est la portion profonde (la plus proche de la chair) de la peau animale dépecée (le gvil). Les Soferim utilisaient à l'origine le fond de cette portion pour écrire les phylactères. Les Sifrei Torah étaient également écrits sur ce support, en dernier recours. C'était le gvil qui était le premier choix.

Le Gvil

Un G'vil (souvent prononcé « g'wil ») est une peau animale qui a été préparée (comme support d'écriture) pour servir à rédiger un Sefer Torah ou une mezouza.

Selon les prescriptions édictées dans le judaïsme, les anciens Judéens (ainsi d'ailleurs que les Juifs « modernes ») préparaient les peaux avec de l'eau salée, de la farine et des m'afasim (rédisus de guêpe). Tout le processus suivait à la lettre les prescriptions du Talmud, des Gueonim et des Rishonim.

Des fragments trouvés à proximité et à l'intérieur des grottes de Qumrân près de la Mer Morte en Israël confirment l'utilisation de g'vil brunâtre depuis au moins 200 av. J.-C.

Maïmonide écrit que la loi transmise à Moïse sur le Mont Sinaï concernant la rédaction d'un Sefer Torah, est que le Sefer Torah soit écrit sur du g'vil, et que des rouleaux qui ne seraient pas préparés selon la méthode exposée supra ne sont pas valides pour l'usage. (Mishneh Torah, Hilkhot Tefillin 1:14).

Selon le Talmud (Traités Baba Batra 14b), le g'vil existait du temps de Moïse (estimé à 1280 av. J.-C.), puisque le Sefer Torah que Moïse a placé dans l'Arche d'alliance serait écrit sur du g'vil. Dans Guittin 54b, un maître rapporte une tradition selon laquelle les rouleaux de la Torah étaient écrits sur du g'vil. Cependant, il n'est actuellement plus utilisé que par une poignée de Soferim, bien que, selon le centre du G'vil basé à Jérusalem, seul le g'vil permet de n'entretenir aucun doute sur l'usage des parchemins.

L'usage de g'vil, ainsi que de certains types de parchemin, a permis à certains Sifrei Torah de demeurer intacts pendant plus de 800 ans.

Ornementations extérieures

Un Sefer Torah complété sera souvent « revêtu » de plaques ornementales richement et finement ciselées, d'un velours protecteur et, occasionnellement, d'une couronne en argent forgé, ceci afin de marquer le Sefer Torah comme saint, parole vivante du Dieu vivant.

Utilisation d'un Sefer Torah

Sefer Torah

La lecture de la Torah à partir d'un Sefer Torah est habituellement réservée au Shabbat, ainsi qu'à des lectures plus courtes les lundi et jeudi matins et en d'autres occasions festives.

Durant la cantillation, la lecture du texte est facilitée par une yad (main), un pointeur digitiforme en métal ou en bois, qui protège le rouleau en évitant tout contact non nécessaire du parchemin avec la peau (qui, aussi propre qu'elle soit, est souvent remplie de graisse et de sueur).

Le don d'un nouveau Sefer Torah à la synagogue est souvent l'occasion d'une fête joyeuse avec chants, danses et prières. Cet usage remonte au Premier Temple, vers 1000 av. J.-C. : la Bible raconte que les prêtres, et même des rois comme David « dansaient devant l'Arche » ou « devant le Seigneur », ce qui signifie qu'ils dansaient, célébraient et priaient (souvent en exstase) devant l'Arche d'alliance où se trouvait la parole de Dieu.

Il n'est actuellement pas rare que des étudiants avancés ou des Sages (en Hébreu, même le plus grand savant du monde Juif n'est jamais « que » l'élève des Sages, Moïse ayant été le premier d'entre eux, lui-même élève de Dieu) deviennent soferim, et reçoivent un salaire pour rédiger un Sefer Torah sous contrat, à la demande de la communauté ou de particuliers afin de marquer une occasion spéciale ou une commémoration. Ce travail est lourd, et est souvent gratifié d'un généreux salaire.

Sources

  • Fragments trouvés aux alentours et dans les grottes de Qumrân (200 av. J.-C.)
  • Halakhot Gdolot: un ouvrage gaonique rédigé vers 743.
  • Talmud (de Babylone) Sofrim (Qatan), Baba Batra 14b, Guittin 54b (200 ap. J.-C.)
  • Mishneh Torah leha Rambam (1100-1200) : Hilkhot Tefilin (Lois sur les Tefillin), 1er chapitre.

Voir aussi

Liens externes


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