Seconde guerre de Succession de Bretagne

Seconde guerre de Succession de Bretagne

Guerre franco-bretonne (1489-1491)

Guerre franco-bretonne
Informations générales
Date 1489 - 1491
Lieu Bretagne
Issue Victoire française
Belligérants
COA fr BRE.svg Bretagne Blason France moderne.svg France
Commandants
Anne de Bretagne Charles VIII de France

La guerre franco-bretonne[réf. souhaitée] a lieu de 1489 à 1491 et prolonge la guerre folle. Elle se conclut par la défaite bretonne et le mariage de la duchesse Anne de Bretagne avec le roi Charles VIII de France.

Sommaire

Nom

Cette dernière guerre est la conclusion d’une suite de conflits entre le roi de France et les grands féodaux du royaume lors de la guerre folle. Elle est également nommée guerre de Bretagne ou guerre d’indépendance bretonne[Qui ?], en omettant les composantes de guerre interne, et les intervenants extérieurs, car elle implique le non respect par les deux signataires, François II de Bretagne et le roi de France, du traité précédent.[précision nécessaire]

Origines

Les origines de cette guerre viennent tout droit de la volonté du royaume de France de profiter de l'arrivée sur le trône de Bretagne d'une fille de 11 ans, dont les droits peuvent être disputés selon la chancellerie française, ainsi que des maladresses diplomatiques et de la désorganisation du gouvernement breton.

Le premier traité de Guérande (1365) régla la Guerre de Succession de Bretagne. Celle-ci avait vu s’affronter pendant plus de deux décennies deux familles, les Penthièvre et les Montfort. Les seconds finissent par l’emporter. Les droits des deux familles sont cependant reconnus :

  • le duché se transmet de mâle en mâle dans la famille des Montfort ;
  • en cas d’absence de descendant mâle chez les Montfort, il doit passer aux mâles de la famille de Penthièvre.

Ce traité n’exclut pas les filles de la succession, et encore moins de la transmission des droits (il précise que le duché « ne reviendra pas aux femmes tant qu’il y aura des héritiers mâles »). Les Montfort n'avaient guère démontré qu'ils accepteraient de respecter ce traité (Jean IV, François II). Enfin, les Penthièvre avaient perdu tout espoir après leur forfaiture de 1420 (ils avaient enlevé et séquestré le duc Jean V).

Or, à la fin du règne de François II, les deux familles n’ont plus d’héritiers mâles : François II n’a que deux filles, Anne et Isabeau, et les derniers Penthièvre sont également des femmes. Dès lors, peuvent prétendre au trône :

  • du chef des Montfort
    • les sœurs Anne et Isabeau de Bretagne, filles du duc régnant, dernières héritières de la famille venant en premier dans l’ordre de succession du duché, mais elles ne sont pas des hommes ;
    • Jean II, vicomte de Rohan et de Léon, époux de Marie de Bretagne (fille du duc François Ier). Sans le traité de Guérande, sa femme aurait été duchesse à partir de 1469, à la mort de sa sœur aînée Marguerite. Ainsi le mari de celle-ci (François II) aurait-il dû quitter le pouvoir au profit de Jean II. Pour transformer cette rivalité en association, Jean II proposa de faire épouser ses fils François et Jean à Anne et sa sœur Isabeau. François II le refusa contre l'avis de son conseil et contre la logique lignagère. Plus tard, Jean II s'intitulera duc de Bretagne ;
    • Jean de Chalon, prince d'Orange, fils de Catherine de Bretagne (sœur du duc François II). Il est l'héritier le plus proche à la mort de François II avec Anne et Isabeau ;
    • François d'Avaugour, bâtard du duc François II et d’Antoinette de Maignelais. Il renonce devant les États à ses droits hypothétiques.
  • du chef des Penthièvre : (les États avaient privé les Penthièvre de leurs droits après leur forfaiture de 1420) :
    • Jean II de Brosse, comte de Penthièvre (fils de Nicole de Blois-Penthièvre et de Jean Ier de Brosse), mais sa mère avait par deux fois renoncé à ses droits (en 1480 lors de la vente, confirmée en 1485) ;
    • Charles VIII, dont le père Louis XI a acheté le 3 janvier 1480 les droits au duché de Nicole de Blois-Bretagne, comtesse de Penthièvre. Il est reconnu héritier de François II par cinq rebelles bretons au traité de Montargis. Mais les droits au duché se transmettent par succession naturelle et non par achat[réf. nécessaire] ;
    • Alain d'Albret, demi-frère de Françoise de Dinan, veuf de Françoise de Blois-Penthièvre (morte en 1481), elle-même cousine de Nicole de Blois-Bretagne, du chef de laquelle il prétendit sans succès au comté de Penthièvre. Il souhaite épouser Anne, puis lui faire épouser son fils. On lui promet finalement la main d'Isabelle (sœur cadette d'Anne) pour son fils, mais la petite Isabelle meurt avant le mariage.

Certains prétendants tentent de s’assurer des soutiens : Charles VIII et Jean II clientélisent une partie de la noblesse bretonne. Divers projets matrimoniaux visent à réunir les droits de deux branches sur la même tête.

Mais pour plus de sécurité devant ces prétentions, François II fait reconnaître ses filles par les États de Bretagne comme héritières du duché, puis Anne est couronnée duchesse à Rennes.

Déroulement

Manœuvres diplomatiques

Le 9 septembre 1488, le duc François II meurt.

Dès le 18 septembre, Charles VIII envoie des messagers en Bretagne, pour revendiquer la tutelle d’Anne de Bretagne, lui interdire de prendre le titre de duchesse, annoncer la formation d’une commission chargée d’étudier la succession, et revendiquer le bail du duché en attendant que cette commission se prononce. Il déclare la guerre en décembre, devant les manquements de la Bretagne et le retour des mercenaires étrangers. Lui même avait refusé d'évacuer comme prévu les places bretonnes que son armée occupait.

Le 10 février 1489, le traité de Rennes est signé entre le duché et l’Angleterre : le roi Henri VII fournit 6000 hommes de la mi-février à la Toussaint, chaque année, à charge pour la Bretagne de solder la troupe et de l’entretenir.

Le 14 février, deux pactes entre l’Autriche et l’Espagne et l’Autriche et l’Angleterre sont signés à Dordrecht, contre la France ; ils sont complétés le 27 mars par un traité anglo-espagnol à Medina del Campo.

Au sein du duché, différentes ambitions s’affrontent. Le maréchal des Rieux, tuteur de la duchesse, est le mieux placé pour recueillir, ou choisir celui qui recueillera l’héritage breton. Alain d’Albret, qui a de maigres droits, et qui surtout tient Nantes depuis 1489, est son allié, ainsi que sa sœur utérine Françoise de Dinan, la gouvernante d’Anne de Bretagne.

Campagnes de 1489-1490

Le vicomte Jean de Rohan (qui prétend hériter du duché du fait de son ascendance et de sa femme Marie de Bretagne) tente de conquérir une partie du duché en commençant par un assaut sur Guingamp en novembre, que le maréchal des Rieux fait échouer. Il recommence en janvier 1489 avec son frère Pierre de Quintin et des renforts français, et réussit, puis s’empare sans difficultés de Hédé, Montfort, Moncontour, Quintin, Quimper, Lannion, Tréguier, Morlaix, Concarneau, et Brest en février avec une partie de la flotte ducale. Seul Concarneau lui demande un siège de 15 jours. Il demande alors la main d’Anne pour son fils Jean. Mais Charles VIII, inquiet de sa progression, le désavoue et l’oblige à se soumettre.

Le chancelier Philippe de Montauban, Dunois, le prince d’Orange, Raoul de Lornay emmènent l’héritière avec eux, d’abord à Redon, puis fuient à Nantes, sans y entrer, la ville étant tenue par le maréchal des Rieux. Finalement, le parti de la duchesse se réfugie à Rennes, et malgré les demandes du roi, le 10 février, Anne est couronnée à Rennes. Cependant, le trésor est vide, les revenus du domaine en baisse : les bijoux sont vendus, la vaisselle fondue. Comme cela ne suffit pas, on procède à des emprunts forcés sur les villes (François II y avait déjà eu recours) ; la chancellerie exige des avances et des prêts (le prince d’Orange donne plus de 200 000 livres, le duc d’Orléans 45 000) ; la dévaluation, commencée en 1472, est amplifiée ; enfin, diverses communautés rachètent leurs impôts (ils versent en une fois cent fois le montant annuel, et en sont libérés par la suite)[1].

Les Autrichiens et les Espagnols envoient des mercenaires en mars et avril (respectivement 1500 et 2000 hommes qui rejoignent Anne de Bretagne), ainsi que l’Angleterre (6000 hommes envoyés à Rieux). Celui s’en sert pour reprendre à Rohan les villes de Basse-Bretagne (Lannion, Tréguier, Morlaix de mai à octobre).

Le 3 décembre 1489, le parti souscrit à la paix de Francfort, signée entre Maximilien d’Autriche et le roi de France le 22 juillet. Celui conserve Brest, plus les places qu’il avait depuis le traité du Verger : Dinan, Fougères, Saint-Aubin-du-Cormier et Saint-Malo. La Bretagne renvoie ses mercenaires. La paix dure un an, mais on s’arme des deux côtés.

Durant l’été 1490, une jacquerie éclate : les paysans de Cornouaille, menés par Jean l’Ancien, se constituent en commune, et pillent la ville de Quimper. Ils sont massacrés par les mercenaires espagnols à Pratanros.

Le 4 juillet, les États de Bretagne sont réunis à Vannes. Ils ratifient les impôts nouveaux, accordent de nouvelles taxes. Ces ressources supplémentaires permettent de payer les ralliements de :

  • Jean de Rieux, fort des places reprises en Basse-Bretagne, qui est absous de sa trahison, et reçoit une prime de 100 000 écus, plus 14 000 de rente ;
  • Alain d’Albret, qui obtient lui aussi 100 000 écus et la main d’Isabeau pour son fils Gabriel d'Avesnes ;
  • Françoise de Dinan, sa demi-sœur.

Ces dons représentent quatre fois le budget annuel du duché, et sont versés par tranches.

Campagne de 1491

Le 2 janvier 1491, Alain d’Albret signe le traité de Moulins avec le roi : la ville de Nantes lui est promise.

Il s’empare du château de Nantes le 19 mars. Le 4 avril, jour de Pâques, le roi de France fait son entrée dans la ville qui n’oppose aucune résistance, ayant été évacuée par le maréchal des Rieux. L’armée royale compte 50 000 hommes. La Bretagne est dès lors considérée par les Français comme conquise : des institutions royales sont créées (administration des finances, avec Jean François de Cardonne nommé Général des Finances ; le prince d’Orange est nommé lieutenant-général). En juillet, le siège est mis devant Rennes, où le parti d’Anne résiste avec douze mille hommes, mais trop peu de vivres.

Le 27 octobre 1491, convoqués à Vannes par Charles VIII, les États de Bretagne conseillent à Anne d’épouser le roi de France. Une entrevue préliminaire à Laval pose ces conditions :

  • l'occupation du duché par l’armée du roi ;
  • le vicomte de Rohan est nommé lieutenant général du roi pour le duché (gouverneur) ;
  • la question du droit au duché est soumise à une commission paritaire de 24 membres ;
  • Anne de Bretagne est autorisée à rejoindre son époux autrichien.

À l’issue du siège de Rennes, le mariage avec le roi de France est accepté le 15 novembre, par le traité de Rennes : il garantit 120 000 livres de rente à la duchesse, et 120 000 livres au trésor du duché, pour payer les mercenaires et en débarrasser le duché. Les fiançailles ont lieu le 23 novembre, à Rennes, et le mariage le 6 décembre au château de Langeais.

Suites et conséquences

Réglement

Le conflit est réglé par divers traités, par lequel le roi de France obtient la renonciation à leurs droits des différents héritiers possibles, et règle divers aspects de la succession, notamment le paiement des dettes du duché.

  1. le contrat de mariage entre Charles VIII et Anne de Bretagne :
    les deux époux se font mutuellement don de leurs droits de succession ;
    Jean de Chalons, prince d’Orange et cousin d’Anne de Bretagne, abandonne ses droits au roi de France pour 100 000 livres; il est nommé lieutenant-général du roi en Bretagne (représentant du roi pour les affaires militaires du duché)
  2. la paix d'Étaples, signée le 3 novembre 1492 avec le roi d’Angleterre : les deux souverains s’accordent sur le règlement des 620 000 couronnes d’or de dettes du duché. Cet accord permet de libérer les villes données en gage.
  3. le traité de Barcelone, signé le 19 janvier 1493, permet le règlement des dettes du duché à l’égard des souverains espagnols, qui détenaient également quelques droits à l’héritage.
  4. Par la suite, Louis XII et Anne de Bretagne engagent des procès aux Rohan, qui furent ainsi dépossédés de leurs droits.
  5. Les privilèges et les droits des Bretons sont confirmés (par exemple : pas de nouvelle loi sans l'autorisation des États de Bretagne, nomination d'officiers civils réservée aux seuls Bretons ou avec leur autorisation, pas de service militaire hors de Bretagne, les Bretons ne pourront être jugés hors de Bretagne, impôts décidés par les États...).

Conséquences

D’un point de vue politique, la Bretagne est dès lors unie à la France, définitivement selon les chroniqueurs du règne de Louis XII (seulement en 1532 selon les auteurs bretons et les auteurs modernes), puis annexée et progressivement assimilée. Elle y perd son autonomie (sous Charles VIII), avant d’en retrouver une partie en 1492 et 1499. Il s'agit alors d'une union purement personnelle[2].

Dans un premier temps,la Bretagne semble globalement satisfaite de ce mariage car la paix est revenue. Peu après, le complot de 1492 (qui regroupe les oubliés du règlement : officiers du duché, capitaines, bourgeois, ambitieux qui espéraient des places, menés par le vicomte de Rohan en liaison avec l’Angleterre) tourne court.

La flotte bretonne, sur ordre d'Anne de Bretagne, combattra du côté de la flotte française, comme le montre l’épisode de la Cordelière en 1513.

Voir aussi

Notes et références

  1. Jean-Pierre Leguay. La poursuite d’un drame, ou la fin du rêve d’indépendance, in Fastes et malheurs de la Bretagne ducale (J-P. Leguay et Hervé Martin coauteurs). Ouest-France Université, 1982. p 407-417
  2. Par cet acte, la Bretagne est associée au royaume, plutôt qu'absorbée en son sein, par une union strictement personnelle des deux souverains. Sorte d'État dans l'État, le duché va bénéficier des avantages d'une ouverture économique sur le royaume, tout en évitant, espère-t-on, les abus de l'"absolutisme" à la française" (Georges Minois, Anne de Bretagne, Fayard, 1999, p.399.
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