- Première guerre de Succession de Bretagne
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Guerre de Succession de Bretagne
Guerre de Succession de Bretagne Informations générales Date 1341 - 1364 Lieu Duché de Bretagne Issue Traité de Guérande
Victoire de la maison de MontfortBelligérants Maison de Montfort
Bretagne
AngleterreMaison de Blois
Bretagne
France
CastilleCommandants Jean II de Montfort †
Jeanne de Flandre †
Jean III de Montfort
Édouard III d'Angleterre
Jean Chandos
Olivier V de Clisson
Robert KnollesCharles de Blois †
Jeanne de Penthièvre
Charles V de France
Bertrand Du Guesclin
Jean de Beaumanoir
Guy II de Nesle †Guerre de Cent Ans Batailles La Roche-Derrien — Combat des Trente — Mauron — Montmuran — Rennes — Auray La guerre de Succession de Bretagne (1341-1364) — ou guerre des deux Jeanne — est l'une des guerres secondaires qui eurent lieu au cours de la guerre de Cent Ans.
Elle se déclenche en 1341 à la mort du duc Jean III de Bretagne. Jeanne de Penthièvre et Jeanne de Flandre se disputent l'héritage et poussent leurs maris Jean de Montfort et Charles de Blois à revendiquer le duché. Mais la France et l'Angleterre sont en conflit depuis 1337 et Édouard III s'est proclamé roi de France. Ainsi Jean de Montfort lui prête l'hommage lige alors que Charles de Blois le fait pour son oncle Philippe VI de France.
Les Français capturent Jean de Montfort et installent Charles de Blois en 1341, mais Édouard III débarque à Brest en 1342. Alors que Jean de Montfort est incarcéré et que Jeanne de Flandre sombre dans la folie, une trêve est conclue en 1343.
Un statu quo, où les coups de main sans avenir se succèdent, dure jusqu'à la défaite des Français à Auray en 1364. Cette victoire du parti pro-anglais permet de conclure en 1365, le premier traité de Guérande qui établit Jean IV comme héritier légitime. Ce dernier signe alors un traité d'alliance avec l'Angleterre.
Sommaire
Prémices
Le problème successoral
Le 30 avril 1341, le duc Jean III de Bretagne meurt sans descendance malgré trois mariages, avec Isabelle de Valois, Isabelle de Castille et Jeanne de Savoie, et sans avoir désigné son successeur.
On peut tout de même signaler [1], qu'il aurait préféré sa nièce Jeanne de Penthièvre à sa succession, plutôt que Jean de Monfort, car d'après certaines sources, il ne supportait pas sa belle-mère, Yollande de Dreux.
Les prétendants sont, d'une part Jeanne de Penthièvre, fille de son frère Guy de Penthièvre, mariée depuis 1337 à Charles de Blois, parent du roi, et, d'autre part, Jean de Montfort, comte de Montfort-l'Amaury, demi-frère du défunt duc, fils du second mariage d'Arthur II de Bretagne avec Yolande de Dreux, comtesse de Montfort-l'Amaury.
Les alliances
Par sa naissance, Charles de Blois est le neveu du nouveau roi Philippe VI de Valois, choisi pour roi aux dépens des prétentions d'Édouard III d'Angleterre. Par mariage, et selon le droit de représentation propre au droit breton, Charles de Blois hérite des prétentions de la maison de Penthièvre sur le duché de Bretagne. En effet, Jeanne de Penthièvre s'estime héritière des droits de son défunt père Guy de Penthièvre, frère de feu le duc Jean III de Bretagne.
En réaction, Édouard III se rapproche de Jean de Montfort qui sait avoir peu à attendre du roi de France, car il s'est proclamé en mai duc de Bretagne en prenant la ville de Nantes[2], ancien bastion de Jean III. Il ne faut pas oublier qu'Édouard III est un descendant des Plantagenêt, lesquels dominaient l'extrême ouest de la France, formant alors l'empire Plantagenêt. Il est alors aisé de comprendre qu'il désirait sans aucun doute, exercer une quelconque domination sur le territoire armoricain, dans un contexte de guerre contre la France débutée en 1337. En juillet 1341, cette alliance est scellée[2], cependant sans qu'un hommage ne soit rendu au roi Édouard. Elle sera réaffirmée le 20 mai 1345[2] par la reconnaissance d'Édouard III comme suzerain, avec cette fois un hommage lige. En récompense, l'alliance sera assortie du comté de Richemont, fief anglais entrant alors dans le patrimoine des ducs de Bretagne.
Le jugement parisien
Les concurrents se présentent tous deux à Paris pour recevoir l'arbitrage du roi Philippe VI. Jean de Monfort plaida le fait que depuis 1297, la Bretagne était un duché-pairie. La Bretagne se devait donc d'exercer le droit français sur son sol, ce qui permettait à Jean de Monfort d'accéder à la tête du duché. Jeanne de Penthièvre, elle, plaida sa propre cause, au nom du droit de représentation breton[3]. La situation est donc plus que paradoxale :
- Charles de Blois, profrançais, fonde sa légitimité sur le fait qu'il est marié à la descendante la plus proche, ce qui est propre au droit breton.
- Jean de Montfort, breton "pur-jus", s'appuie sur une loi devenue chère au roi de France dans son conflit avec le roi d'Angleterre et devant donc faire jurisprudence.
La chevauchée fantastique de Jean de Montfort
En mai 1341, sentant que le verdict serait en faveur de Charles de Blois, proche parent du roi, Jean de Montfort, poussé par sa femme Jeanne de Flandre prend les devants : il s’installe à Nantes la capitale du duché et s’empare du trésor ducal à Limoges, ville dont Jean III avait été le vicomte. Il convoque les grands vassaux Bretons pour se faire reconnaître comme duc, mais la majorité ne viennent pas (beaucoup d’entre eux ont aussi des possessions en France qu’ils risqueraient de voir confisquer s’ils s’opposaient au roi)[4].
Dans les mois qui suivent (juin-juillet), il effectue une grande chevauchée dans son duché pour s'assurer le contrôle des places fortes (Rennes, Malestroit, Vannes, Quimperlé, La Roche-Piriou, Quimper, Brest, Saint-Brieuc, Dinan et Mauron avant de rentrer à Nantes). Il parvient à prendre le contrôle d'une vingtaine de places[5].
Enfin il se serait rendu en Angleterre, où Édouard III lui aurait promis une aide militaire et l'aurait reconnu comte de Richmond, avant de rentrer fin août à Paris pour une entrevue avec Philippe VI[5].
Cette chevauché « fantastique », contée par le chroniqueur flamand Jean Lebel et reprise par Froissard, ne résiste pas à l'épreuve des faits : durant ces quelques semaines, Jean de Montfort est resté en région parisienne avec ses conseillers juridiques pour élaborer son argumentaire devant le conseil du roi[6].
La condamnation française
Jean de Montfort se présente en septembre à Paris devant la cour des pairs mandatée par le roi de France. Ses contacts récents avec l'Angleterre lui sont reprochés ainsi que sa tentative de forcer la main au roi[7]. Jean de Montfort, s'entourant néanmoins de juristes français, demande l'arbitrage du Conseil des Pairs du Royaume. Péchant par excès de zèle, il plaide donc à l'encontre du droit breton par mimétisme à la récente succession du trône de France. Sa défense est de piètre qualité, les avocats parisiens de Montfort n'ayant qu'une vague connaissance de la Coutume de Bretagne[8]. La cour et le roi tranchent en faveur de Charles de Blois. Jean de Montfort s'enfuit alors de la cour du Louvre. En réaction, par l'arrêt de Conflans, le 7 septembre 1341, Philippe VI accepte l'hommage lige de Charles de Blois[9]. Jean de Montfort se voit confisquer ses fiefs français : le comté de Montfort-l'Amaury, le vicomté de Limoges.
La guerre
Cette guerre, entrecoupée de trêves, se déroule en trois périodes : fin 1341-19 janvier 1343 / 1345-1362 / 1362-1364
Première phase (Automne 1341- 19 janvier 1343)
Jean de Montfort, ayant pris possession de toutes les places fortes du duché au printemps 1341 et ayant donné l'hommage lige à Édouard III, il faut mettre effectivement Charles de Blois en possession du duché[10]. Philippe VI convoque donc une armée de 7000 hommes renforcée de mercenaires génois à Angers pour le 26 septembre 1341. Le duc de Normandie Jean le Bon est mis à la tête de l’expédition, flanqué de Miles de Noyer, du Duc de Bourgogne et de Charles de Blois. L’armée quitte Angers début octobre 1341, bouscule Jean de Montfort à L’Humeau, puis assiège Nantes où il s’est réfugié. Il enlève la forteresse de Champtoceaux qui, sur la rive gauche de la Loire, verrouille l'accès de Nantes[11]. Edouard III qui vient de prolonger la trêve d’Espléchin ne peut intervenir. La ville capitule au bout d’une semaine, début novembre 1341[12]. Jean de Montfort se rend sur parole au fils du roi de France le 21 novembre et lui remet sa capitale. Il reçoit un sauf-conduit pour se rendre à Paris pour plaider sa cause, mais il y est arrêté et incarcéré au Louvre en décembre 1341[13]. Privé de son chef et du soutien des grandes familles bretonnes, le parti monfortiste devait s'effondrer. Avec l'hiver, le duc de Normandie achève la campagne sans avoir annihilé les derniers obstacles. Pensant avoir réglé l'affaire en s'assurant de la personne de Jean de Montfort, il rentre à Paris. C'est compter sans Jeanne de Flandre, épouse de Jean de Montfort, qui ranime la flamme de la résistance et rallie ses partisans à Vannes. Elle se retranche à Hennebont, envoie son fils en Angleterre et conclut un traité d’alliance avec Édouard III en janvier 1342[12]. Soucieux d'ouvrir un nouveau front susceptible d'alléger la pression française en Guyenne et de limiter le nombre de troupes qu'ils peuvent envoyer en soutien des Écossais, Édouard III se décide à répondre favorablement aux demandes d'assistance militaire de Jeanne de Flandre[14]. Le roi d’Angleterre n’a pas un sou pour payer une expédition: c’est donc le trésor ducal breton qui va la financer. Il ne peut envoyer en avril 1342 que 34 hommes d’armes et 200 archers. Entretemps les Français ont pris Rennes et assiègent Hennebont, Vannes et Auray qui résistent. Charles de Blois est contraint de lever le camp en juin 1342 devant l'arrivée de Wauthier de Masny et Robert d'Artois à la tête de troupes anglaises[6]. En juillet 1342, de forts renforts français arrivent et Jeanne de Flandres doit fuir et se retrouve assiégée dans Brest[15]. Mais le 15 aout, le gros des troupes anglaises arrivent enfin à Brest avec 260 bateaux et 1350 combattants. Charles de Blois se replie vers Morlaix et s’y retrouve assiégé par Robert d’Artois qui espère ouvrir aux Anglais un deuxième port au Nord de la Bretagne. Les Anglais tentent de prendre Rennes et Nantes, mais ils doivent se contenter de saccager Dinan et de mettre le siège devant Vannes[14]. Les Français, qui les attendaient à Calais, avaient retiré leurs forces du fait des succès de Charles de Blois. Le 30 septembre les forces de ce dernier subissent de sérieuses pertes près de Lanmeur [15].
Une armée française aux ordres, une nouvelle fois, du duc de Normandie, est rassemblée pour faire face. Mais Jean de Montfort étant prisonnier et Jeanne de Flandre ayant sombré dans la folie, une trêve est signée à Malestroit le 19 janvier 1343[16]. De fait les Anglais occupent et administrent les places fortes encore fidèles à Jean de Montfort. Une importante garnison anglaise va occuper Brest. Vannes sera administrée par le pape. Le conflit nullement réglé va se prolonger 22 ans et permettre aux Anglais de prendre durablement pied en Bretagne.
Deuxième phase: le statu quo (1345-1362)
Jean de Montfort est libéré le 1er septembre 1343. Aidé par les Anglais, il reprend le contrôle de Vannes. Charles de Blois assiège Quimper en 1344 pour isoler Jean de Montfort de ses alliés anglais. La prise de la ville est sanglante : 2 000 civils sont massacrés[16].
Jean de Montfort meurt le 26 septembre 1345 à Hennebont. Sa femme, Jeanne la Flamme, étant frappée de folie, son fils Jean, qui n'est pas en âge de gouverner, est placé sous la tutelle d'Édouard III[16]. Le conflit franco-anglais se déplace vers la Normandie et le nord. Les défaites françaises à Crécy en 1346, ou Calais en 1347, la grande peste, puis la capture du roi à la bataille de Poitiers neutralisent les Français. Charles de Blois perd petit à petit du terrain sur les capitaines anglais, le souvenir de l'inutile massacre de Quimper ayant nuit à sa popularité[16] et la Bretagne ayant intérêt à être pro-anglaise pour des raisons économiques (les Anglais importent du sel) du fait de sa position stratégique entre Manche et Atlantique. Il est fait prisonnier à la bataille de La Roche-Derrien alors qu'il tente de reprendre la ville qui vient d'être livrée aux Anglais faute d'avoir été secourue à temps[16]. Il est emprisonné pendant cinq ans à la tour de Londres[16]. Les Anglais contrôlent Brest, Quimper et Vannes.
Sous la pression du pape Innocent VI, Anglais, Français et Bretons négocient la paix dans la guerre de Cent Ans et dans la guerre de succession de Bretagne. Le conflit breton est en effet dans une phase de statu quo : Jean de Montfort soutenu par les Anglais est mort et son fils n'a que quatre ans; Charles de Blois soutenu par les Français est prisonnier à Londres et négocie sa rançon. C'est au cours de cette période qu'a lieu le célèbre Combat des Trente, grand moment de la chevalerie. Il oppose trente-et-un Anglo-Bretons à trente-et-un Bretons blésistes (favorables à Charles de Blois) à mi-chemin entre Josselin et Ploërmel, le 26 mars 1351. Au soir les Anglo-Bretons montfortistes qui comptent neuf morts (contre six chez les profrançais) se rendent (fuir serait déloyal car cela retirait aux vainqueurs le gain des rançons): les blésistes, sous les ordres de Beaumanoir, sont donc vainqueurs[17].
Édouard III obtient au traité de Westminster du 1er mars 1353 que contre la reconnaissance de Charles de Blois comme duc de Bretagne, ce dernier s'engage à lui verser une rançon de 300 000 écus et à ce que la Bretagne signe un traité d'alliance « perpétuelle » avec l'Angleterre, cette alliance devant être scellée par le mariage de Jean de Penthièvre (le fils de Jean de Montfort) avec sa fille Margareth[18]. Mais les époux étant cousins, le mariage nécessite des lettres de dispense canonique que le pape n'accorderait qu'avec l'approbation du roi de France. Or Charles de la Cerda, connétable de France et comte d'Angoulême, s'était marié en mars 1352 avec Marguerite de Blois (la fille de Charles de Blois). Favori du roi de France, il a par conséquence son mot à dire dans cette négociation et fait partie des plénipotentiaires[18]. Charles le Mauvais est en revanche soigneusement tenu à l'écart des négociations. Une paix franco-anglaise nuirait définitivement à ses intérêts car, sans la menace d'une alliance anglo-navarraise, il n'a aucune chance de faire valoir ses prétentions sur la Champagne et, a fortiori, sur la couronne de France. Or début janvier 1354, au moment où Charles de La Cerda part pour la Normandie le roi a déjà donné son accord au mariage[19]. Charles le Mauvais décide donc de passer à l'action et fait occire promptement le connétable de France. Suite à cet assassinat, les accords de paix capotent derechef.
Troisième phase (1362-29 septembre 1364)
Jean IV, le fils de Jean de Montfort a été éduqué à la cour d'Édouard III. Il a 22 ans quand le roi d'Angleterre l'autorise à rentrer en Bretagne en 1362. Son retour est conditionné par une alliance, l'engagement à ne pas se marier sans autorisation, la remise en gage de plusieurs forteresses[20]... De fait Jean IV n'apprécie guère son tuteur : à son arrivée en 1363, il compte s'entendre avec Charles de Blois pour obtenir la paix et le partage de la Bretagne[21]. Mais Jeanne de Penthièvre ne l'entend pas de cette oreille et relance le conflit, rejetant Jean IV dans le camp anglais[21]. Guy XII de Laval est aussi sollicité par Urbain V pour ramener la paix entre Jeanne de Penthièvre, duchesse de Bretagne et Jean de Montfort. C'est un fait à relever pour préciser le rôle de Guy XII dans cette longue lutte où sans doute, suivant les instructions du pape, le sire de Laval cherche, mais inutilement, à pacifier les deux partis, 10 décembre 1364 [22].
La guerre reprend donc en 1363 où Charles de Blois, secondé par Bertrand Du Guesclin remporte quelques succès, mais quand son stratège doit le quitter pour se rendre maître des places fortes navarraises en Normandie, son avancée s'arrête : il assiège en vain Bécherel[21]. L'occasion est belle de négocier un accord à Évran, mais Jeanne de Penthièvre fait capoter une nouvelle fois les négociations[21]. Jean IV peut alors s'organiser et en septembre 1364, assiège Auray avec l'anglais John Chandos. Ils vainquent Charles de Blois et Bertrand du Guesclin arrivés au secours des assiégés à la Auray, le 29 septembre 1364[23]. Cette bataille marque la fin de ce long conflit : Charles de Blois y est tué et Jeanne de Penthièvre se retrouvant veuve voit sa cause s'effondrer.
Le premier traité de Guérande
La paix est avalisée le 12 avril 1365 par le premier traité de Guérande qui établit Jean IV comme héritier mais il n'est pas légitimé par la totalité de la population[23],[1]. Il ne repousse pas totalement les prétentions des Penthièvre, puisqu'il établit ainsi la loi successorale en Bretagne :
- le duché se transmettra de mâle en mâle dans la famille des Montfort ;
- en cas d'absence de descendance mâle, il passera aux mâles de la famille de Penthièvre.
En effet, Jeanne de Penthièvre demeure et par l'intermédiaire des accords de l'arrêt de Conflans :
- elle garde l'apanage des Penthièvre, ainsi que sa vicomté de Limoges
- reçoit 10 000 livres de rente annuelle prélevée sur les territoires français de l'ennemi.
Charles V ne s'oppose pas à l'élévation du comte de Montfort, dans la crainte qu'il ne fasse hommage de la Bretagne à Édouard, son protecteur et beau-père. De plus, la France est clairement appauvrie dans un contexte de guerre de 100 ans qui l'oppose à l'Angleterre. Il le reconnaît donc pour duc, reçoit ses serments, sans être dupe ; mais il gagne par cette politique l'amitié de la noblesse bretonne, et Olivier de Clisson passe à son service. En fait, il officialise très habilement deux points:
- en recevant son hommage en décembre 1366 (qui n'est qu'un hommage simple et non un hommage lige) il fait reconnaitre la souveraineté de la France sur la Bretagne, même si dans les faits le duché est très autonome.
- Il consolide l'introduction de la masculinité dans le droit successoral, délégitimant ainsi les prétention d'Édouard III à la couronne de France[23].
Les suites du conflit
Conflit avec Charles V
Si le traité de Guérande clôt le problème de la succession, il ne règle pas le contentieux franco-breton. La noblesse bretonne tend à la neutralité après le long conflit qui a déchiré le duché. Mais, Jean IV, a des accords à respecter et s'il épouse une sœur puis une belle-fille du Prince Noir, il temporise pour accepter le traité d'alliance qui était prévu dès 1362 avec le roi d'Angleterre. Charles V mène une reconquête patiente de tout le territoire français. En 1369, dès le début de la reconquête, des renforts anglais (400 hommes d'armes et 400 archers) conduits par les comtes de Pembroke et de Cambridge débarquent à Saint-Malo et rejoignent le Poitou et la Guyenne après avoir recruté quelques compagnies[24]. L'alliance finit par être ratifiée à la réprobation de la noblesse bretonne alors que 300 archers et 300 hommes d'armes anglais ont débarqué à Saint-Mathieu-de-Fineterre en 1372[24],[25]. Aussitôt une troupe française commandée par deux Bretons (Bertrand du Guesclin et Olivier de Clisson) entre dans le duché provoquant le rembarquement précipité des Anglais[26].
En mars 1373, c'est une véritable armée qui débarque à Saint-Malo: 2 000 hommes d'armes et 2 000 archers sous les ordres du comte de Salisbury[26]. Pour une telle opération l'accord du Duc est indispensable. C'est un casus belli et Charles V donne l'ordre d'attaquer. Son armée entre en Bretagne avec l'appui d'une bonne partie de la noblesse qui s'enrôle massivement sous la bannière de Bertrand du Guesclin. Le connétable avec 14 000 hommes marche droit sur Rennes, Fougères, Dinan, Saint-Brieuc, Morlaix, Quimper, Vannes, Josselin[25]... En deux mois la quasi-totalité du duché est occupée : à la Saint-Jean, les Anglais balayés ne tiennent plus que Brest, Auray,Bécherel et la forteresse de Derval. En disgrâce, Jean IV se voit interdire l'accès de ses châteaux par ses propres sujets[25]. Il quitte la Bretagne dès le 28 avril. Il revient en France avec le duc de Lancastre pour une chevauchée partie de Calais qui, confrontée à la tactique de la terre déserte, se termine en fiasco[26]. Le duché de Bretagne est confié à Louis d'Anjou[25].
En 1375, Jean IV débarque à Saint-Mathieu-de-Fineterre avec 6 000 hommes sous le commandement du comte de Cambridge[27]. Le succès et rapide mais éphémère: à peine la trêve de Bruges signée entre Français et Anglais que les troupes anglaises quittent la Bretagne et que les places bretonnes retournent à la France[27]. Jean IV doit retourner en Angleterre.
Il revient définitivement en 1378. Les Anglais repoussés par la reconquête menée à bien par Charles V ne contrôlent plus que quelques ports tels Calais, Bordeaux, Bayonne. En revanche, ils gardent le contrôle de plusieurs places fortes en Bretagne et en particulier Brest et d'où ils mènent des attaques répétées sur Saint-Malo. La prise d'un nouveau port est inacceptable pour Charles V. Aussi le roi décide de confisquer le duché par un jugement rendu par la cour des pairs le 18 décembre 1378[28]. Louis Ier d'Anjou est nommé lieutenant du roi en Bretagne[29]. Cette confiscation, qui écarte définitivement la branche des Penthièvre de la succession au trône ducal, s'avère une grave erreur politique pour le roi. En avril 1379, la noblesse bretonne, autrefois divisée entre Montfort et Penthièvre, se constitue en ligues patriotiques à travers toute la Bretagne. Les grands nobles bretons, autrefois aux côtés du roi, rejoignent le parti du duc. Des envoyés bretons partent en Angleterre, pour discuter avec Jean IV et probablement son neveu Jean de Bretagne, toujours emprisonné. Jeanne de Penthièvre elle-même se range du côté de Jean de Montfort[30]. Ils constituent une ligue qui met sur pied un gouvernement provisoire et rappelle Jean IV. Le gouvernement est formé de 4 maréchaux et de 4 responsables des affaires civiles dont la mission prioritaire est de lever des fonds (via une taxe de 1 franc par foyer) pour organiser une armée destinée à défendre le duché[31]. Jean IV débarque le 3 août 1379 sur la plage de Saint-Servant (Saint-Malo étant aux mains des Français), accueilli par une foule enthousiaste[30] [32]. Charles V ne peut que constater la volonté d'autonomie du duché et sait que sans l'approbation de la population, une conquête militaire n'aurait aucun résultat à long terme[29]. Il préfère donc négocier. Il décède avant la fin des tractations et ce sont ses frères qui signent le deuxième traité de Guérande qui reconnaît Jean IV comme duc de Bretagne, contre l’hommage prêté au roi de France, le versement d’une indemnité de 200 000 livres et le renvoi des conseillers anglais, stabilisant les relations franco-bretonnes[30].
Résolution du conflit
Ayant bien perçu que le duché souhaite la neutralité dans la guerre de Cent Ans, Jean IV s'attache à développer un état moderne et fait prospérer la principauté. Il a de meilleurs rapports avec Charles VI et le régent Philippe le Hardi, et gouverne son duché en paix, mais doit faire face à la rébellion d'Olivier de Clisson. Il parvient à racheter la place de Brest aux Anglais en 1397.
Notes et références
- ↑ a et b JP.LEGUAY, Fastes et malheurs de la Bretagne ducale, Ouest France Université, 1997, p 98.
- ↑ a , b et c Y.Gicquel, Le combat des trente, Coop Breizh, 2004, p 16.
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- ↑ a et b Jean Favier, La Guerre de Cent Ans, Fayard 1980, p. 133
- ↑ a et b La querelle de Bretagne, 1341-1364-1381, Jean Christophe Cassard, in Toute l'histoire de Bretagne, Morlaix, 2003.
- ↑ Chroniques de Jean Froissart, Comment le comte de Montfort s’en alla en Angleterre et fit hommage au roi d’Angleterre de la duché de Bretagne, Livre I, partie I, chapitre 152 pages 133-134 BNF et Comment les douze pairs et les barons de France jugèrent que messire Charles de Blois devoit être duc de Bretagne; et comment ledit messire Charles les pria qu’ils lui veuillent aider, Livre I, partie I, chapitre 154 page 134 BNF.
- ↑ M.Planiol, Histoire des institutions de la Bretagne, ed. Floch Mayenne,1981, tome III.
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- ↑ Françoise Autrand, Charles V, Fayard, 1994, p. 817
- ↑ a et b Françoise Autrand, Charles V, Fayard, 1994, p. 821
- ↑ a , b et c Michael Jones, La Bretagne ducale, Jean IV de Montfort (1364-1399) entre la France et l'Angleterre, Presses universitaires de Rennes, 1998
- ↑ Françoise Autrand, Charles V, Fayard, 1994, p. 820
- ↑ Jean-Michel Cauneau et Dominique Philippe Chronique de l'Etat breton, Presses Universitaires de Rennes, 2005, page 411.
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