- Saint Bruno (Chartreux)
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Bruno le Chartreux
Pour les articles homonymes, voir Bruno.Bruno le Chartreux Naissance vers 1030?
Cologne (Allemagne)Décès 6 octobre 1101
Santa Maria della Torre, CalabreCanonisation XVIe s. (autorisation de culte privé étendu à l'Eglise universelle au concile de Trente) Grande-Chartreuse Fête le 6 octobre Saint patron des Chartreux, des fraternités monastiques de Bethléem, de la Calabre Serviteur de Dieu • Vénérable • Bienheureux • Saint Bruno le Chartreux, né à Cologne vers 1030, mort en 1101, est le fondateur de l'ordre des Chartreux. Bien qu'il n'ait jamais été ni canonisé, ni béatifié, il figure au calendrier liturgique catholique en date du 6 octobre et est fêté comme saint.
Sommaire
Sources biographiques
Les sources concernant la vie de Bruno sont rares et lacunaires. Cette carence a donné lieu à une abondante littérature hagiographique sans valeur critique [1]. Sa légende, représentée en 22 tableaux par Le Sueur, ornait le cloître des Chartreux de Paris ; ils se trouvent désormais au Musée du Louvre. Au milieu du XXe siècle, les travaux de première main du chartreux Dom Maurice Laporte, ainsi que ceux de Bernard Bligny, ont ouvert la voie à une nouvelle hagiographie, plus dépouillée et plus soucieuse d'exactitude historique.
Hormis quelques chartes et lettres, ainsi que le rouleau des titres funèbres (connu à partir d'une copie arrangée du XVIe siècle), le plus ancien document historiographique conservé au sujet de Bruno de Reims est une courte notice de 121 mots, contenue dans un catalogue des premiers prieurs de la Grande-Chartreuse, connu sous le nom de "Chronique Magister" écrit par Guigues I, cinquième prieur du lieux:
« Maître Bruno, de nationalité allemande, naquit de parents nobles, dans l'illustre ville de Cologne. Très érudit dans les lettres aussi bien séculières que divines, il fut chanoine de l'Église de Reims dont l'importance ne le cède à nulle autre parmi les églises de Gaule ; puis il y fut maître de l'enseignement. Ayant quitté le monde, il fonda l'ermitage de Chartreuse et le gouverna pendant six ans. Sur l'ordre du pape Urbain II, dont il avait été jadis le précepteur, il se rendit à la curie romaine, pour aider le Pontife de son soutien et de ses conseils dans les affaires ecclésiastiques. Mais il ne pouvait supporter les tumultes et le genre de vie de la curie ; brûlant de l'amour de la solitude naguère abandonnée et du repos contemplatif, il quitta la curie, après avoir même refusé l'archevêché de l'Église de Reggio auquel il avait été élu par la volonté du pape. Il se retira dans un désert de Calabre dont le nom est La Tour. Puis là, après avoir réuni de nombreux laïcs et clercs, il s'appliqua tant qu'il vécut à la vocation de la vie solitaire. Il y mourut et y fut enseveli, onze années environ après son départ de Chartreuse[2]. »Origines et formation
Bruno serait né à Cologne, en Allemagne, d'une famille de haut rang dont le nom est inconnu, probablement un peu avant 1030. Il est d'abord chanoine dans sa ville natale qu'il quitte assez jeune pour continuer ses études à Reims, ville réputée à l'époque pour son école épiscopale. Pendant une trentaine d'années, Bruno demeure à Reims. En 1057, l'archevêque de Reims, Gervais de Belleme, lui confie en remplacement d'Hermann, la direction de l'école dont il avait été l'élève. Il y enseigne les arts libéraux et la théologie. Bruno exerce cette charge pendant 20 ans. Après sa mort en 1101, les titres funèbres recueillis par toute l'Europe font écho à la lettre circulaire rédigée par ses compagnons de Calabre, portée par un messager charger de diffuser la nouvelle. On lui attribue sagesse, douceur et science.
L'archevêque chassé
L'archevêque de Reims, Gervais, meurt en 1067 et est remplacé par un homme sans scrupules, Manassès de Gournay. Celui-ci est plus préoccupé par les biens matériels que par sa charge d'archevêque. Voulant avoir, malgré tout, l'estime du clergé, il nomme Bruno chancelier de la cathédrale et directeur de toutes les écoles de Reims. L'attitude de Manassès devient de plus en plus insupportable, à tel point qu'un concile réuni à Lyon en février 1080, prononce sa déposition. Cette sentence est confirmée par le pape Grégoire VII qui ordonne au clergé de Reims de chasser l'indigne archevêque et d'en élire un nouveau à sa place.
De nombreuses personnes pensent alors à l'intègre Bruno pour remplacer Manassès de Gournay sur le siège archiépiscopal de Reims. Mais celui-ci a d'autres projets en tête, ayant formé le dessein de se retirer dans la prière avec quelques amis. Il refuse donc le siège qui avait été naguère celui de saint Remi, met de l'ordre dans ses affaires et donne tous ses biens aux pauvres. En 1083, avec deux amis, il se rend en Bourgogne, où saint Robert de Molesmes lui ayant remit un ermitage, il s'y retire un moment. C'est là qu'il se sent attiré par une vie d'ermite propice à la recherche de Dieu.
Le fondateur de l'ermitage de Chartreuse
Saint Hugues de Châteauneuf, l'évêque de Grenoble, lui suggère de s'installer dans la solitude sauvage du Massif de la Chartreuse où il resta 6 ans.
Bientôt s'y élève un monastère dont les moines vivent isolés dans des demeures individuelles, y menant une existence austère et laborieuse, ne se réunissant que pour l'office. Ils n'ont pas l'intention de former un ordre.
En 1091, Bruno est appelé à Rome par le pape Urbain II, un de ses anciens élèves de Reims, qui sollicite ses conseils sur les réformes à entreprendre dans l'Église. Mais Bruno ne pense qu'à reprendre sa vie d'ermite. En 1092, il part en Calabre où il fonde d'autres ermitages et se retire dans l'un d'eux, Santa Maria del Bosco, secondé par son bras droit Lanuin et avec l'accord du comte Roger Ier de Sicile qui fait don de terres à la nouvelle fondation calabraise.
La rencontre miraculeuse de Roger en train de chasser et de Bruno en prière est une légende tardive. De même, le diplôme de fondation octroyé par Roger est un faux selon une majorité d'historiens. A l'ermitage de Sainte-Marie est bientôt associé, un monastère de vie cénobitique.
Bruno meurt au monastère de Santo Stefano del Bosco neuf ans plus tard, le 6 octobre 1101.
Dès les dernières décennies du XIe siècle, l'ensemble du complexe monastique passe à l'ordre de Cîteaux, puis tombe en décadence. Il faut attendre le début du XVIe siècle pour que les chartreux viennent relever les lieux et fonder la chartreuse de Santo Stefano del Bosco. Avant cette date, le site de Calabre n'entretient aucun lien institutionnel avec les monastères brunoniens de Calabre.
L'ordre cartusien s'est édifié à partir de son exemple et des Coutumes consignées par le prieur Guigues, quatrième successeur de Bruno à la Grande-Chartreuse, vers 1125.
Écrits
Tous les écrits attribués par le passé à Bruno sont apocryphes, à l'exception de deux courtes lettres écrites en Calabre et de la profession de foi prononcée sur son lit de mort.[3] On lui a attribué à tort des commentaires des épîtres de Paul de Tarse, puis des Psaumes qui sont des œuvres de la fin du XIe et du début du XIIe siècle publiées sous son nom à partir du XVIe siècle seulement (Paris, 1509 pour le commentaire des épîtres pauliniennes, et Paris 1524 pour celui des Psaumes, voir aussi Cologne 1611 et 1640). Elles étaient inconnues des auteurs chartreux du Moyen Âge. C'est à tort qu'on répète encore aujourd'hui que le commentaire des Psaumes a été publié en 1509.[4]
Canonisation
Le fondateur des Chartreux n'a jamais été ni canonisé, ni béatifié. Au début du XVIe siècle, à l'occasion de l'installation des Chartreux sur le site de l'ermitage de Calabre où Bruno était mort, l'Ordre obtint oralement du pape l'autorisation de célébrer le culte de son fondateur, dont les restes venaient d'être retrouvés dans l'église de l'ermitage.
Aucune bulle ou document pontifical conservé ne vient attester cette autorisation annoncée à l'Ordre par le Révérend Père Dom François Dupuis, auteur d'une vie de saint Bruno. L'approbation tacite de l'Église, puis son inscription au calendrier liturgique universel, à l'occasion des réformes du concile de Trente, en constitue une confirmation équivalente. C'est pourquoi les canonistes parlent à son sujet de canonisation équipollente.
Bibliographie
Sources
- Les lettres de saint Bruno, éd. Maurice Laporte, O.Cart., Lettres des premiers Chartreux (Sources chrétiennes 88), éd. Cerf, Paris, 1988
- Chronique Magister : éditée par A. Wilmart, La Chronique des premiers Chartreux, in Revue Mabillon, 1926 (16), p. 77-142 ; traduction française par Dom Maurice Laporte, chartreux, dans Les lettres des premiers Chartreux, SC, n° 88 (App. I).
Etudes
- M. Laporte, Aux sources de la Vie Cartusienne. Éclaircissements concernant la vie de saint Bruno (vol. 1) et Traits fondamentaux de la Chartreuse (vol. 2, surtout le ch. VII : fondations érémitiques, p. 263-344), Grande Chartreuse (dactylographié), 1960.
- G. M. Posada, O. Cart, Maître Bruno, Père des Chartreux, Biblioteca de Autores Cristianos, Madrid, 1980. Traduit de l'espagnol par Roland Quencez in Analecta Cartusiana
- A. Ravier, s.j., Saint Bruno, le Chartreux, éd. P. Lethielleux, Paris, 1981 (2e éd.)
- M. Laporte, éd., Lettres et profession de foi de saint Bruno, dans id. Les lettres des premiers chartreux, Paris, Cerf (Sources chrétiennes).
- B. Bligny, Saint Bruno, le premier chartreux, éd. Ouest-France, Rennes, 1984
- Ange Helly, chartreux, Petite vie de Saint Bruno, éd. Desclée de Brouwer, 1990.
- G. M. Posada, chartreux, San Bruno – Biografia y Carisma, in Biblioteca De Autores Cristianos, 2001.
- A. Ravier, Le premier ermitage de chartreuse juin 1084 - 30janvier 1132, Correrie de la Grande Chartreuse, 2001 (2e éd.)
- A. Louf, Saint Bruno (art.), in Documents-Episcopat (Bulletin du Secrétariat de la conférence des Évêques de France), n° 12, sept. 2001
- Moeris O., De la chaire d'enseignement à l'ermitage - Itinéraire historique et spirituel de saint Bruno, Université catholique de Louvain, mémoire de fin d'étude, 2003
- M. Morard, Le Commentaire des Psaumes et les écrits attribués à saint Bruno le Chartreux : codicologie et problèmes d’authenticité, dans Bruno et sa postérité spirituelle (référence ci-dessous), Salzburg, 2003, p. 21-39.
Voir aussi
Communautés se réclamant de saint Bruno
Depuis le dernier tiers du XXe siècle, la famille des disciples de saint Bruno ne se limite plus à l'ordre des moines et des moniales chartreux. Plusieurs formes de vie nouvelles se réclamant de l'esprit de saint Bruno ont vu le jour. On distinguera avec prudence les formes de vie qui portent la marque d'une tradition monastique continue, enracinée dans l'expérience authentique de la vie cartusienne confirmée par l'autorité romaine, et les communautés nouvelles de droit local qui se réclament du modèle brunonien sans que leurs fondateurs et formateurs aient passé par l'expérience de la vie monastique cartusienne traditionnelle. Elles privilégient les thèmes de la solitude, des tendances liturgiques orientalisantes, l'imitation de la solitude semi-érémitique déclinée selon des formes nouvelles:
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- Communautés issues en ligne directe du monachisme brunonien primitif et fondées par des moines chartreux:
- L'Ordre des Chartreux.
- Les Ermites de saint Bruno (diocèse de Montauban, en France)[5].
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- Communautés nouvelles, se réclamant de l'inspiration de saint Bruno :
- Famille monastique de Bethléem, de l'Assomption de la Vierge et de saint Bruno.
- La chartreuse de Sélignac, ancien monastère de l'ordre cartusien, devenu maison de retraites spirituelles, encadrée par des laïcs sous le patronage de l'ordre cartusien[6].
- Fraternité de la nouvelle Jérusalem[7].
Notes et références
- ↑ On peut citer le Père de Tracy, 1768.
- ↑ Traduction par Dom Maurice Laporte, chartreux, dans Les lettres des premiers Chartreux, SC, n° 88 (App. I) qui dépend du travail fondamental de A. Wilmart, La Chronique des premiers Chartreux, in Revue Mabillon, 1926 (16), p. 77-142
- ↑ Voir texte de ces lettres reproduit sous ce lien : [1]
- ↑ Voir en particulier les interventions lors du Colloque international tenu à l'Institut Catholique de Paris en 2001, cf bibliographie
- ↑ Ermites de saint Bruno
- ↑ Sélignac
- ↑ Fraternité de la Nouvelle Jérusalem
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