Rodney King

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Rodney Glen King, né le 2 avril 1965 à Sacramento (Californie), est un citoyen afro-américain qui, le 3 mars 1991, a été victime de violences policières suite à son interpellation par des agents de police de Los Angeles. Son passage à tabac par plusieurs policiers fut filmé par un témoin vidéo amateur, George Holliday, qui prit à distance la majeure partie de l'incident. La vidéo qui en fut tirée et le procès qui s'ensuivirent furent largement médiatisés aux États-Unis. L'acquittement des policiers lors d'un premier procès déclencha les émeutes de 1992 à Los Angeles.

Sommaire

Poursuite et arrestation

Le 3 mars 1991 à Los Angeles, Rodney King est poursuivi par des policiers du Los Angeles Police Department (LAPD) suite à un excès de vitesse, il a deux passagers à bord et refuse de s'arrêter. Il a passé la soirée à boire avec ses amis, en regardant un match de basket-ball. Au terme de la poursuite, qui se fera à des vitesses allant d'après la police jusqu'à 190 km/h (117 mph) et sur environ 13 kilomètres[1], il stoppe néanmoins son véhicule. En quelques secondes, trois voitures de police et un hélicoptère sont sur les lieux. Bryant « Pooh » Allen et Freddie Helms, les deux passagers, obtempèrent aux ordres des policiers et sortent du véhicule, ils sont emmenés à l'écart sans incident, mais King refuse de sortir. Un officier de police (Melanie Singer, une femme), pointe son arme sur lui et lui ordonne de sortir et de se mettre à plat-ventre, ce qu'il fait finalement. Quatre policiers tentent alors de le maîtriser mais King, un grand gaillard « musclé » d'1,91 m[2], est ivre et se débat au point qu'ils sont obligés de battre en retraite.

Le comportement erratique du suspect et son regard « vide » font penser aux officiers (à tort, comme l'indiquera l'enquête) qu'il est sous l'emprise de PCP, une drogue qui occulte la douleur et donne à celui qui en est sous l'influence l'impression d'avoir une force surhumaine[1].

Le sergent Stacey Koon utilise alors un Taser, il tire une première fois et King tombe à genoux avant de se relever, Koon tire une deuxième fois, ce qui jette Rodney King au sol. King se relève néanmoins et devant sa résistance, deux policiers (les officiers Laurence Powell et Timothy Wind) le rouent de coups, à l'aide de leurs bâtons. Le passage à tabac, d'une grande violence, dure environ une minute vingt et est filmé de son balcon par George Holliday[3], un habitant du quartier, réveillé par le bruit et la lumière. King sera frappé une cinquantaine de fois, dont un coup à la tête, alors qu'il essaie toujours de se relever. Une vingtaine d'autres policiers sont présents sur la scène et n'interviendront pas.

Après 56 coups de bâton et six coups de pieds, cinq ou six officiers le maîtrisent et le menottent, des cordes sont aussi utilisées pour entraver ses bras et ses jambes. King est alors traîné à plat-ventre vers le côté de la route dans l'attente d'une ambulance[4]. Les deux passagers sont alors relâchés et laissés libres.

À l'hôpital, Rodney King recevra 20 points de suture dont cinq à l'intérieur de la bouche, l'examen médical montre qu'il a la mâchoire fracturée et la cheville droite cassée[4]. Il sera gardé sous les verrous pendant quatre jours, avant d'être relâché après qu'il fut déterminé par un procureur qu'aucune charge ne pouvait être retenue contre lui[4].

La vidéo de George Holliday dure au total neuf minutes et vingt secondes ; elle commence avec des images montrant King se jetant sur l'officier Powell puis l'intégralité du tabassage, le menottage, et ce qui se passe ensuite[3]. Des extraits montrant la brutalité des policiers et leur acharnement seront repris par les chaînes de télévision du monde entier, provoquant une indignation générale.

Procès des officiers

En mars 1992, commence à Simi Valley le procès d'État de quatre des policiers impliqués ; le sergent Koon (qui commandait), Powell et Wind (les deux auteurs de coups de bâton), et Theodore Briseno (auteur d'un violent coup de pied). Ils sont accusés d'« usage abusif de la force » (« use of excessive force »). La défense ayant réfuté les afro-américains, le jury est composé de dix blancs, un asiatique et un latino. La vidéo de George Holliday est versée au dossier et sera examinée image par image par des experts[1].

Le 29 avril, après sept jours de délibérations du jury, ils seront tous les quatre acquittés.

Émeutes

Article détaillé : Émeutes de 1992 à Los Angeles.

Le 29 avril 1992 à Los Angeles, moins de deux heures après que le jury eut acquitté les quatre officiers de police poursuivis, les émeutes débutent à Los Angeles. En tout, entre cinquante et soixante personnes seront tuées durant ces émeutes. Les émeutes durèrent six jours, bien que les évènements les plus importants eussent lieu entre le soir du verdict et le troisième jour. Finalement, on dénombra entre 50 et 60 morts et 4 000 arrestations[5] et des dommages matériels s'élevant entre 800 millions et un milliard de dollars. Il y eut plus de 3 600 départs de feu, détruisant 1 100 bâtiments. Après un déploiement important de la police et de la garde nationale sur place, plusieurs milliers de personnes furent arrêtées, dont 36 % d'Afro-américains, 52 % d'Hispaniques (Américains originaires d'Amérique latine) et 10 % d'Américains d'origine européenne non-hispanique[6].

Des violences ont aussi eu lieu à Seattle, Oakland, San Francisco, Las Vegas et San Diego pour la côte ouest, New York, Philadelphie et Atlanta pour la côte est, sans toutefois atteindre le degré des émeutes de Los Angeles.

Après les émeutes, procès fédéral

En 1993, les policiers sont finalement re-jugés par un tribunal fédéral, avec un jury comprenant deux noirs, le procès commence le 25 février. Le 9 mars, King est appelé à témoigner et déclare qu'il « essayait seulement de rester en vie »[7]. Le 11 avril, le jury déclare le sergent Stacey Koon et l'officier Laurence Powell coupables et ceux-ci sont condamnés en août à 30 mois de prison[1]. Timothy Wind et Theodore Briseno sont acquittés[1].

Koon et Powell commenceront à servir leur sentence dans des lieux différents en octobre 1993 et seront libérés en décembre 1995[1].

La ville de Los Angeles fut condamnée à verser à Rodney King 3,8 millions de dollars[2], il en utilisa une partie pour fonder un label de musique rap, Alta-Pazz Recording Company[8].

King a été arrêté plusieurs fois depuis le passage à tabac pour des délits liés à la consommation de drogues et d'alcool, violences, et délits routiers[2]. Le 3 mars 2011, soit vingt ans exactement après les événements qui l'ont fait connaître, il est contrôlé au volant de sa voiture pour « conduite erratique »[9],[10].

La vidéo du tabassage est un exemple de sousveillance concernant les pratiques policières. Plusieurs organisations de « copwatch » (littéralement « surveillance de flics ») ont été mises en place au États-Unis à la suite de cet incident.

Références à l'affaire Rodney King dans la culture populaire

En musique

  • La chanson Like a king de Ben Harper (de l'album Welcome to the Cruel World, 1993) lui rend hommage et associe son nom à celui de Martin Luther King dans le premier couplet : « Well Martin's dream has become Rodney's worst nightmare », et le refrain.
  • Le groupe Boo Radley a intitulé une de ses chansons Rodney King sur l'album Giant Steps (the Boo Radleys) (1993).
  • La chanson Ploum Ploum Tralala des Amis d'ta Femme fait allusion à Rodney King.
  • La chanson Pour une poignée de dollars de Ideal J fait allusion Rodney King.
  • La chanson L'État assassine (1995) du groupe Assassin, traitant des bavures policières, mentionne Rodney King dans son refrain en tant qu'exemple de ces débordements.
  • La chanson Who's The King? du groupe Dog Eat Dog, évoque Rodney King dans ses paroles.
  • La chanson Objection Overruled (1993) du groupe de heavy metal Accept fait également référence à l'affaire Rodney king. La chanson critique la décision de justice qui a relaxé les policiers et mené aux émeutes de Los Angeles[11].
  • La chanson 56 in 81 du groupe Eleven Shadows, avec en fond un extrait de la plaidoirie de l'avocat de Rodney King, 56 In 81 (Ich Schleich Umher Betrubt) de la compilation Floribundus (Dr. Death's Volume 6)
  • Dans la chanson Justicier du groupe de rap français Psy 4 De La Rime, le rappeur Soprano évoque Rodney King : « Ma liberté a les bleus de Rodney King ».
  • Le groupe américain Sublime a intitulé une de ses chansons April 29, 1992 (Miami) sur son album Sublime de 1996, en référence à la date de l'acquittement des policiers qui marqua le début des émeutes dans tout le pays.

Au cinéma et à la télévision

  • Dans le film Dark Blue, le procès des policiers est en arrière fond de l'intrigue du film qui se conclut sur les émeutes de LA suite à l’acquittement des policiers ;
  • Le film américain American History X le mentionne lors de la discussion de famille autour du repas ;
  • Dans le film Airheads, Chaz fait scander à la foule le nom de Rodney King ;
  • Dans le film Training Day, le jeune policier parle de l'« ancienne école de la police », du temps de Rodney King ;
  • Dans le film Une journée en enfer, Zeus mentionne Rodney King en s'adressant à John McClane ;
  • Dans le film comique Spoof Movie, des policiers jouent sur un jeu d'arcade mettant en scène le tabassage de Rodney King par des policiers ;
  • Dans la version française du film Volcano, un des personnages de couleur dit : « Ca y est il va nous refaire le tabassage de Rodney King version volcanique » ;
  • Dans la série The Shield, le capitaine Aceveda mentionne l'affaire Rodney King durant un entretien avec son supérieur hiérarchique Gil Roy (saison 1, épisode 2) ;
  • Dans la série Beverly Hills 90210 (saison 2, épisode 9), le nom de Rodney King est mentionné pour dénoncer le racisme de la police à Los Angeles ;
  • Dans le film Les Rois du désert, on peut voir le capitaine Saïd (Saïd Taghmaoui) regarder les images de l'arrestation de Rodney King à la télévision, dans la scène où les trois soldats entrent dans la pièce secrète où est entreposé du matériel volé.
  • Dans le film Écrire pour exister, le contexte narratif se situe après les émeutes de Los Angeles en 1992, il est fait mention de Rodney King lors d'une conversation qui le compare à Anne Franck.

Dans les jeux vidéo

  • Dans le jeu Grand Theft Auto San Andreas, le procès du sergent de police corrompu Frank Tenpenny et l'acquittement de ce dernier mènent aux émeutes de Los Santos (référence aux émeutes de Los Angeles).

Notes et références

  1. a, b, c, d, e et f (en) An Account of the Los Angeles Police Officers' Trials (The Rodney King Beating Case) - Doug Linder, University of Missouri-Kansas City (UMKC) School of Law, 2001
  2. a, b et c (en) Biography for Rodney King - IMDb
  3. a et b (en) The Holliday Videotape - University of Missouri-Kansas City (UMKC) School of Law
  4. a, b et c (en) Report of the Independent Commission on the Los Angeles Police Department - Chapitre 1, The Rodney King Beating, p.7, 1991 [PDF]
  5. Frédéric Martel, De la culture en Amérique, Paris, Gallimard, 2006, (ISBN 2-0707-7931-9), p.455
  6. Mike Davis (1998), Beyond Blade Runner qui constitue le chapitre 7 du livre Ecology of Fear, Metropolitan Books, Henry Holt, New York. Publié en français sous le titre Au-delà de Blade Runner: Los Angeles et l'imagination du désastre, éditions Allia, Paris, (2006), p.40
  7. (en) Rodney King Testifies on Beating: 'I Was Just Trying to Stay Alive' - The New York Times, 10 mars 2003
  8. (en) Flashback: Rodney King and the L.A riots - BBC News, 10 juillet 2002
  9. (en) Rodney King stopped after traffic violation, police say - Los Angeles Times, 4 mars 2011
  10. (en) Rodney King pulled over by police almost 20 years to the day since his arrest and savage beating sparked riots in LA - Daily Mail, 4 mars 2011
  11. Headbangers Ball : On tour in Germany, MTV, décembre 1992, reportage consacré à Accept à l'occasion de la soirée au Hard Rock Café de Berlin en 1992, célébrant en avant-première la sortie de l'album Objection Overruled. L'émission est présentée par Vanessa Warwick (diffusée en janvier 1993)

Lien externe



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