Richard Simon

Richard Simon
Histoire critique du vieux testament de Simon, 1685 chez Reinier Leers

Richard Simon, le 13 mai 1638 à Dieppe il est décédé le 11 avril 1712, est un exégète français. Il est considéré comme le véritable initiateur de la critique biblique en langue française[1].

Sommaire

Biographie

Un jeune érudit

Richard Simon reçut sa première éducation au collège des Oratoriens de Dieppe. La générosité dun ami lui permit détudier la théologie à Paris, il sintéressa à lhébreu et à dautres langues orientales. Au sortir du collège, comme cétait habituel, il fut envoyé apprendre la philosophie au collège oratorien de Juilly. Mais on le rappela à Paris pour lemployer à la préparation dun catalogue des ouvrages orientaux de la bibliothèque oratorienne. Sa première publication fut son Fides Ecclesiae orientalis, seu Gabrielis Metropolitae Philadelphiensis opuscula, cum interpretatione Latina, cum notis (Paris, 1671), dont le propos était de démontrer que la croyance de lÉglise grecque touchant à leucharistie était la même que celle de lÉglise catholique. Simon fut ordonné en 1670 et, la même année, écrivit le Factum servant de réponse au livre intitulé Abrégé du procès fait aux Juifs de Metz, une brochure pour défendre des juifs de Metz menacés d'expulsion à la suite de l'affaire dans laquelle un commerçant juif, Raphaël Lévy, avait été condamné à mort après avoir été injustement accusé d'avoir assassiné un enfant chrétien[2].

La querelle avec Port-Royal

Peu de temps auparavant, il avait commencé à sattirer lhostilité de Port-Royal, qui devait lui valoir tant dennuis au cours de sa vie. Antoine Arnauld avait rédigé un ouvrage sur la Perpétuité de la foi de lÉglise catholique touchant leucharistie. Les critiques de Simon suscitèrent une indignation durable parmi les amis et les admirateurs dArnauld. Il sattira aussi lhostilité des bénédictins quand, pour aider un ami en procès contre les bénédictins de Fécamp, il composa un mémorandum en termes énergiques. Les moines se plaignirent auprès du nouveau général des oratoriens. Laccusation de jésuitisme fut aussi portée contre lui, du fait que le frère de son ami était un membre éminent de cet ordre.

Grande fut lagitation dans les milieux ecclésiastiques, et lon envisagea sérieusement déloigner Simon non seulement de Paris mais même de France. On lui proposa une mission à Rome, mais il devina lintention et refusa. Il était alors très occupé à superviser limpression de son Histoire critique du Vieux Testament. Il avait espéré, que, grâce à linfluence du père de La Chaise, confesseur du roi, et du duc de Montausier, il lui serait permis de dédier louvrage à Louis XIV, mais le roi était alors en Flandre et, en son absence, le livre ne pouvait être édité avant quil neût accepté la dédicace, même sil avait passé la censure de la Sorbonne et si le chancelier de lOratoire avait donné son autorisation.

Limprimeur du livre, afin de favoriser la vente, avait fait imprimer séparément les différents chapitres et les avait fait mettre en circulation. Ces éditions partielles, voire probablement une copie du travail entier, avaient fini par tomber entre les mains des défenseurs de Port-Royal. Dans lintention de nuire à la vente de louvrage, dont on savait dans le milieu des théologiens que Simon avait mis longtemps à le préparer, les Messieurs de Port-Royal avaient entrepris une traduction en français des Prolégomènes à la Bible polyglotte de Brian Walton.

Lopposition de Bossuet

Pour contrecarrer cette manœuvre, Simon fit connaître son intention de publier une édition annotée des Prolégomènes, et ajouta à lhistoire critique une traduction des quatre derniers chapitres de cet ouvrage, ce qui navait aucunement fait partie de son plan primitif. Cette annonce de Simon empêcha que parût la traduction projetée, mais ses ennemis nen étaient que plus irrités. Ils tenaient maintenant loccasion quils avaient longtemps cherchée. La liberté avec laquelle Simon sexprimait sur divers sujets, et particulièrement ces chapitres il déclarait que Moïse ne pouvait pas être lauteur de bien des passages des Écritures quon lui attribuait, avait particulièrement excité les oppositions. On fit appel à Bossuet, à lépoque précepteur du dauphin et très influent ; le chancelier, Michel Le Tellier, apporta son aide ; on obtint un décret du Conseil dÉtat, et après les intrigues les plus basses, la totalité de limpression, cest-à-dire 1 300 exemplaires, fut saisie par la police et détruite ; lanimosité de ses collègues de lOratoire grandit alors à un tel point contre Simon quils ne le reconnurent plus comme membre de leur ordre. Rempli damertume et de dégoût, il se retira en 1679 à la cure de Bolleville, il avait été récemment nommé par le vicaire général de labbaye de Fécamp.

On lui proposa de republier louvrage aux Pays-Bas, mais Simon sy opposa dabord, dans lespoir de surmonter lopposition de Bossuet en opérant des changements dans les parties contestées. Les négociations avec Bossuet traînèrent pendant un temps considérable, mais finirent par échouer, et l'Histoire critique sortit en 1685 des presses de Reenier Leers à Rotterdam, portant le nom de Simon sur la page de titre. Une édition imparfaite avait précédemment été éditée à Amsterdam par Daniel Elzevier, fondée sur une copie manuscrite dun des exemplaires originaux échappé à la destruction, qui avait été envoyé en Angleterre et dont on avait fait par la suite une traduction latine et une traduction anglaise. Lédition de Leers reproduisait cette première édition, avec une nouvelle préface, des notes, et ce qui avait été publié pour et contre louvrage jusqu'à cette date.

L'œuvre de Richard Simon

L'Histoire critique

Louvrage comprenait trois livres. Le premier traitait des questions de critique biblique à proprement parler, comme le texte de la bible hébraïque et les changements quelle avait subis par la suite jusquà lépoque présente, et une discussion sur la question de savoir qui avait écrit les passages attribués à Moïse ainsi que dautres livres de la Bible ; Simon exposait sa théorie particulière selon laquelle il avait existé, pour les événements de chaque période, pendant toute la durée de lhistoire juive, des rapporteurs ou des annalistes, dont les écrits avaient été conservés dans les archives publiques, institution quil attribue à Moïse.

Le deuxième livre étudiait les principales traductions, anciennes et modernes, de lAncien Testament, et le troisième contenait une étude critique des principaux commentateurs. Mis à part la théorie dont nous venons de parler, il ny avait vraiment rien de nouveau quant à la critique de lAncien Testament, car des érudits antérieurs comme le protestant Louis Cappel, ou l'oratorien Jean Morin (en lat. Johannes Morinus) (1591-1659) et dautres avaient déjà fixé un grand nombre de points importants, si bien que la valeur du travail de Simon consistait surtout dans le fait quil rassemblait et présentait dans un ensemble les résultats de la critique de lAncien Testament. Lœuvre suscita une forte opposition, qui ne se limita pas à lÉglise romaine. Les protestants sentaient que leur bastionlinerrance de la Bibleétait menacé par les doutes que Simon faisait naître sur lintégrité du texte hébraïque. Dans son livre Sentimens de quelques théologiens de Hollande, J. le Clerc (« Clericus ») combattit les théories de Simon, et ce dernier lui répliqua sur un ton fort irrité dans sa Réponse aux Sentimens de quelques théologiens de Hollande, sous la signature « Pierre Ambrun » : cétait une constante chez Simon de donner rarement son véritable nom.

Autres travaux

Cérémonies et coutumes parmi les Juifs de Léon de Modène, traduit par Richard Simon, 1682

Une première traduction de l'ouvrage du rabbin Léon de Modène parut en 1674 et s'intitule "Cérémonies et coutumes qui s'observent aujourd'hui parmi les juifs".

En 1689 parut son Histoire critique du texte du Nouveau Testament, qui comprenait trente-trois chapitres étaient discutés lorigine et le caractère des différents livres, en tenant compte des objections portées contre eux par les juifs et par dautres, les citations de lAncien Testament dans le Nouveau, linspiration du Nouveau Testament (il réfutait lopinion de Spinoza), le dialecte grec dans lequel les livres étaient écrits (il combattait cette fois C. Salmasius), les manuscrits grecs alors connus, en particulier le codex D (Cantabrigiensis), etc.

Suivit, en 1690, son Histoire critique des versions du Nouveau Testament, il faisait un exposé des diverses traductions, aussi bien anciennes que modernes, et discutait sur la manière dont beaucoup de passages difficiles du Nouveau Testament avaient été rendus dans les diverses versions.

En 1693, fut édité ce qui à certains égards est ce qui a le plus de valeur dans tout ce quil a écrit, à savoir son Histoire critique des principaux commentateurs du Nouveau Testament depuis le commencement du Christianisme jusques a notre temps. Ce travail montre toute létendue de ses lectures, et les renseignements quon y trouve gardent toujours leur valeur pour létudiant. Le dernier travail de Simon quil nous faut mentionner est ses Nouvelles Observations sur le texte et les versions du Nouveau Testament (Paris, 1695), qui contient des remarques supplémentaires sur le texte et les traductions du Nouveau Testament.

En tant que controversiste, Simon faisait preuve dune aigreur qui ne pouvait quaggraver la polémique. Voué entièrement aux choses de lesprit, dépourvu de toute sentimentalité, il disposait dun talent indiscutable pour les sarcasmes et la satire. Il mourut à Dieppe le 11 avril 1712 à l'âge de 74 ans.

Ses œuvres

Notes et références

  1. Dictionnaire des religions sous la direction de Paul Poupard - PUF 1984
  2. Texte intégral sur Wikisource : s:Factum servant de réponse au livre intitulé Abrégé du procès fait aux Juifs de Metz

Annexes

Bibliographie

sources anciennes

(en) « Richard Simon », dans Encyclopædia Britannica, 1911 [détail de lédition] [lire en ligne]

sources contemporaines

  • Auvray P., Richard Simon (1638-1712). Étude bio-bibliographique avec des textes inédits, Paris, 1974 ;
  • Le Brun J., Sens et portée du retour aux origines dans l'œuvre de Richard Simon, dans XVIIe siècle, 131, 1981, p.185-198.
  • Steinmann J., Richard Simon et les origines de la critique biblique, s.l., 1960 ;
  • Bernus Auguste, Richard Simon et son histoire critique du vieux Testament, édité par Slatkine, 1869 ;
  • Antoine Fleyfel, "Richard Simon, critique de la sacralité biblique", RHPR 2008/4, p. 469-492, lire en ligne : [1]

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