- Politiquement correct aux États-Unis
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Le politiquement correct (PC), qui nous vient des États-Unis, après être né à Moscou et passé par l'École de Franfort, désigne un langage, des idées, des politiques ou comportements perçus comme recherchant à réduire les possibilités d’offense contre un groupe racial, culturel ou autre. Il est généralement considéré dans le monde anglo-saxon comme propre à leur culture[réf. nécessaire]. Pour lire un article plus général sur le politiquement correct, voir l’article : Politiquement correct.
Aux États-Unis l'expression Political Correctness a une longue histoire. Au XIXe siècle et longtemps au cours du XXe siècle, elle s'appliquait plutôt dans des contextes juridiques ou politiques, et les mots « correct » et « correctness » y avaient l'acception de « correction grammaticale » ou de « correct selon les règles du droit », que ce soit le droit civil ou le droit constitutionnel. Ce n'est que tardivement, dans la décennie 1980, qu'il acquit une nouvelle acception, qu'on peut paraphraser comme « linguistiquement correct au regard des mœurs et des opinions dominantes ».
La réserve, l'understatement [1], le puritanisme, sont dans la nature des Anglo-Saxons. Lorsqu'en 1933, chassé par Hitler, un groupe d'intellectuels juifs justement affairé à mettre au point le Marxisme Culturel s'installèrent aux États-Unis ils transposèrent au marxisme la correctness puritaine.
D'abord utilisé au sein de la gauche américaine pour se moquer des idées trop rigides ou doctrinaires dans leur propre camp, le terme est repris par les conservateurs[1], pour dénoncer une idée qui conduirait à la censure et l'atteinte à la liberté d'expression. Le politiquement correct inspirerait l'évolution du multiculturalisme, de l’identité politique, de la sociologie, il servirait la cause des mouvements progressistes tels que le féminisme.
Cependant, des commentateurs de la gauche américaine soutiennent que l'expression « politiquement correct » a été forgée par les conservateurs américains vers 1980 pour discréditer le progressisme[réf. souhaitée]. Selon ces commentateurs il n’y a jamais eu de « mouvement du politiquement correct » aux États-Unis, et le terme serait utilisé pour détourner l’attention du débat de fond sur la discrimination et les inégalités de traitement basés sur la race, la catégorie sociale, le genre ou les préférences sexuelles[2].
De façon plus générale, l'expression peut servir à désigner n'importe quelle orthodoxie qu'elle soit de gauche ou de droite.
Sommaire
Utilisation
Le principe du PC est que le choix des mots peut encourager, favoriser ou même établir certains rapports sociaux, et que les résultats obtenus bénéficient à la société. Cette observation à l’égard du politiquement correct concerne certains mouvements politiques, notamment le mouvement pour les droits des homosexuels, les féministes, le multiculturalisme et le mouvement des droits civiques. Par exemple, des expressions comme « lineworker » au lieu de « lineman » (« monteur à la chaîne », en anglais, l’ancienne expression contenait le mot « homme »), « chairperson » ou « chair » à la place de « chairman » (la « personne du fauteuil », ou le « fauteuil », à la place de « l'homme du fauteuil », c’est-à-dire le président), ou l’usage systématique de l’expression « Native Americans » plutôt que d’« Indiens » (« Américains natifs ») sont des références pour caractériser les partisans du politiquement correct comme excessivement pointilleux ou même coercitives. Le PC s’applique même aux objets inanimés, ce qui est encore un autre aspect du débat.
Le terme PC, de la manière dont il est utilisé le plus souvent, implique qu’une proportion importante des gens font un choix politique conscient des mots qu’ils utilisent dans leurs paroles et leurs écrits, avec l’intention de répandre cette pratique le plus largement possible, et ainsi, de changer les rapports sociaux ; implicitement, il est entendu que le politiquement correct que ces personnes sont la gauche, ou une partie importante de la gauche ; que ce choix politique des mots est un phénomène unique, qu’on appelle le « politiquement correct » ; et enfin, que l’utilisation de ces mots choisis s’est développé d’une manière à porter atteinte à la liberté d'expression.
Ce à quoi ceux qui pratiquent de tels choix répondent que l’expression politiquement correct fait partie des attaques contre la justice sociale ou le progressisme politique[3], et que le fait d’exprimer une opinion, ou de débattre publiquement de l’usage de la langue ne peuvent en eux-mêmes constituer de l’intolérance ou de la censure.
Ceux qui utilisent le terme « politiquement correct » pour désigner une mode expriment souvent des craintes sur la possible dilution du discours et l’impossibilité de décrire et de relier entre eux les problèmes sociaux. La critique politiquement correct du langage inhibe l’expression libre, particulièrement celle d’opinions qui risquent de blesser tel ou tel groupe. Ils ajoutent également que le discours politiquement correct protège exagérément des groupes minoritaires, notamment lorsqu’il est utilisé pour éviter de reconnaître toute imperfection ou écart de conduite d’un des membres du groupe.
L’expression est tirée du vocabulaire marxiste-léniniste, où elle qualifie la ligne du parti après la révolution russe de 1917, puis elle est utilisée de manière plaisante dans la gauche américaine au début des années 1980. Dans ce contexte, elle est appliquée à tout engagement excessif pour l’une des causes de gauche, spécialement marxistes et féministes, ainsi qu’à tout ceux qui, concernés par ces causes, se consacrent davantage au discours ou au vocabulaire qu’à l’action.
L’expression redevient populaire au début des années 1990 comme élément de la tentative des conservateurs d’influencer les méthodes d’enseignement et les programmes des universités[4]. Dans cette tentative, la notion de politiquement correct est présentée comme un mouvement de gauche, venu des cercles gauchistes universitaires comme une tentative de créer une nouvelle doctrine sur l’orthodoxie sociale incluant une modification du vocabulaire que certains trouvent offensant.
L’utilisation de l’expression décline à la fin des années 1990, et ne se retrouve plus que dans les comédies, avec une signification incertaine. Elle est toutefois reprise depuis quelques années par des groupuscules ou des écrivains multiculturalistes qui rejettent (ou ignorent) ses origines et ses connotations controversées. Elle est aussi reprise par la gauche pour moquer les clichés conservateurs, comme les « valeurs familiales », le « conservatisme compatissant » ou « Dieu et la patrie ».
Quelques effets significatifs dans les expressions usuelles sont l'expression « salad bowl » remplaçant parfois « melting pot », la règle du « no hyphen » (African American est correct, African-American serait considéré comme insultant) et l'acceptation grandissante en dépit de la grammaire classique de « they » avec un singulier pour désigner : « he or she » de façon à ne pas privilégier l'un ou l'autre genre.
Usages antérieurs
L’expression «politiquement correct » est utilisée bien avant le XXe siècle, ce qui conduit les défenseurs du concept à penser que la sensibilité polotique de certaines expressions n’est pas nouvelle. La plus ancienne utilisation citée est celle de la décision de la Cour suprême dans l’affaire Chisholm vs. Georgia (1793), où il est clairement avancé que l’emploi de certains termes n’est pas correct, dans le contexte politique des États-Unis de cette époque.
Le premier usage au XXe siècle se retrouve au chapitre 1 de l’autobiographie du sénateur Robert La Follette junior, parue en 1912. À propos de son éducation à l’université du Wisconsin, il dit :
« À cette époque, nous n’avions pas d’idées politiques ou économiques correctes, domaines où il n’y avait alors que peu d’enseignements dignes de ce nom, mais ce que nous avons pu tirer de ces enseignements, et particulièrement de celui de John Bascom, est une attitude correcte vis-à-vis des affaires publiques. Et quand tout est dit, cette attitude est plus importante que tous les avis définitifs qu’un homme peut avoir. »
Là encore, l’expression politiquement correct fait expressément référence, dans l’opinion de l’auteur, à des opinions politiquement incorrectes, ce qui est différent de l’usage actuel.
On peut citer encore un autre usage littéral dans le roman de Morton, Dans les pas de Saint-Paul (paru en 1936) :
Justifications linguistiques
L’un des principaux arguments avancés pour l’utilisation du langage politiquement correct est d’empêcher l’exclusion ou les insultes discriminantes, basées sur des différences physiques ou des handicaps. Un autre repose sur l’hypothèse Sapir-Whorf, qui énonce que les structures grammaticales d’une langue façonnent les idées des orateurs et les actions de tout à chacun. Le but est donc de faire prendre conscience à chacun de ces biais inconscients, pour leur permettre de faire un choix volontaire de leurs mots, sachant ce que les autres personnes trouvent offensants.
Un exemple courant est l’usage de l’expression « mentalement déficient » de préférence à « fou ».
Malgré tout, les critiques avancent que les nouveaux termes sont maladroits ou laids, souvent de simples euphémismes substitués à des termes rigoureux concernant la race, le sexe, les préférences sexuelles, le handicap, la religion ou la tendance politique. Les défenseurs avancent que la modification de la langue et du vocabulaire se justifie par ces quatre points :
- Les droits, possibilités ou libertés de certains sont limités à cause de la catégorisation comme membres d’un groupe frappé d’un stéréotype infamant ;
- Cette catégorisation est largement non-dite, inconsciente, et facilitée par le vocabulaire abondant ;
- En rendant ce vocabulaire problématique, on fait prendre conscience aux gens de la façon dont ils décrivent autrui ;
- Lorsque la catégorisation est volontaire, le mérite personnel d’une personne, plus que son appartenance à un groupe, est plus apparent.
En linguistique, l’hypothèse Sapir-Whorf, dans une formulation stricte, avance que la langue d’une personne limite ses possibilités de pensée et de formulation. Par exemple, un vocabulaire sexiste entraîne des pensées sexistes. La plupart des linguistes penchent pour une version plus modérée, selon laquelle la façon dont nous voyons le monde est influencée par le niveau de langage que nous utilisons. La situation se complique du fait que certains groupes refusent le changement de vocabulaire que d’autres cherchent à imposer. Ainsi, les sourds n’ont jamais considéré le terme comme insultant en lui-même. Le mot « malentendant », qui s’est substitué à « sourd », et qui permet d’inclure dans le groupe ainsi créé les personnes victimes d’une diminution de l’audition à la suite d’un accident, ou du vieillissement, est ainsi plus adapté pour cet usage. Il est cependant considéré comme discriminant par les sourds.
Critique des choix du politiquement correct
Voir l’article principal, les critiques étant les mêmes dans tous les pays : Politiquement correct.
Usage satirique
Les modifications de la langue vers le politiquement correct ont une histoire dans la satire et la comédie. Un des thèmes majeurs de la bande dessinée Dilbert est le vocabulaire abscons de son encadrement, afin de masquer son manque de morale et son incompétence. Un exemple parmi les plus précoces et les plus connus est le livre Politically Correct Bedtime Stories, de James Finn Garner, dans lequel les contes de fée sont réécrits d’un point de vue PC exagéré. Les rôles du bon et du méchant sont inversés, dans le but de montrer que le PC ignore ou inverse la moralité. La satire du politiquement correct est largement déclinée dans les médias américains aujourd’hui.
Citation
Si tous les imprimeurs s’interdisaient d’imprimer tout ce qui pourrait offenser quelqu’un, il y aurait très peu de livres. Benjamin Franklin
Voir aussi
Articles connexes
- Novlangue
- Euphémisme
- École de Francfort
- Langue de la haine
- Kotobagari
- Langue et pensée
- Liste d’exemples de langage politiquement correct
- Propagande
- Incident de Water buffalo
- Womyn
Références
- Hentoff 1992, Schlesinger 1998, Brandt 1992
- Messer-Davidow 1993 et 1994 ; Lauter 1995 ; Scatamburlo 1998
- Messer-Davidow 1993, 1994
- D'Souza 1991 ; Berman 1992 : Schultz 1993 ; Messer Davidow 1993, 1994 ; Scatamburlo 1998
- Switzer, Jacqueline Vaughn. Disabled Rights: American Disability Policy and the Fight for Equality. Washington DC: Georgetown University Press, 2003.
Défenseurs du politiquement correct
- Dinesh D'Souza, Illiberal Education: The Politics of Race and Sex on Campus New York: Macmillan, Inc./The Free Press, 1991, ISBN 0684863847
- Henry Beard and Christopher Cerf, The Official Politically Correct Dictionary and Handbook, Villard Books, 1992, paperback 176 pages, ISBN 0586217266
- Daniel Brandt, "An Incorrect Political Memoir", 1992
- Nat Hentoff, Free Speech for Me - But Not for Thee, HarperCollins, 1992, ISBN 006019006X
- Diane Ravitch, The Language Police: How Pressure Groups Restrict What Students Learn, Knopf, 2003, hardcover, 255 pages, ISBN 03754148271
- Nigel Rees, The Politically Correct Phrasebook: what they say you can and cannot say in the 1990s, Bloomsbury, 1993, 192 pages, ISBN 0747514267
- Arthur Schlesinger Jr., The Disuniting of America: Reflections on a Multicultural Society, W.W. Norton, 1998 revised edition, ISBN 0393318540
- The Politically Correct Scrapbook by John and Laura Midgley illustrated by Beverley Rodgers (ISBN 0955207800) - a collection of examples of political correctness etc. Available from the Campaign Against Political Correctness [1] and from Amazon [2] etc.
Sceptiques à l’égard du politiquement correct
- Ellen Messer-Davidow. 1993. "Manufacturing the Attack on Liberalized Higher Education." Social Text, Fall, pp. 40–80.
- Ellen Messer-Davidow. 1994. "Who (Ac)Counts and How." MMLA (The Journal of the Midwest Modern Language Association), vol. 27, no. 1, Spring, pp. 26–41.
- Scatamburlo, Valerie L. 1998. Soldiers of Misfortune: The New Right's Culture War and the Politics of Political Correctness. Counterpoints series, Vol. 25. New York: Peter Lang.
- Debra L. Schultz. 1993. To Reclaim a Legacy of Diversity: Analyzing the "Political Correctness" Debates in Higher Education. New York: National Council for Research on Women.
- P. Lauter. 1995. "'Political correctness' and the attack on American colleges." In M. Bérubé & C. Nelson, Higher education under fire: Politics, economics, and the crisis in the humanities. New York, NY: Routledge.
Pour aller plus loin
- Aufderheide, Patricia. (ed.). 1992. Beyond P.C.: Toward a Politics of Understanding. Saint Paul, Minnesota: Graywolf Press.
- Paul Berman, (ed.). 1992. Debating P.C.: The Controversy Over Political Correctness on College Campuses. New York, New York: Dell Publishing.
- The Rise of the Conservative Student Press - college campuses
- Wilson, John. 1995. The Myth of Political Correctness: The Conservative Attack on High Education. Durham, North Carolina: Duke University Press.
Liens externes
- Discusses how Political Correctness is a form of cultural marxism
- An academic project covering for the most part the linguistic aspects of PC
- Frequently Used Words and Phrases of the PC Lexicon - critical satire.
- Tongue Tied - documents alleged ongoing censorship of politically incorrect speech or expression in the United States.
- Possible origins of the term at www.linguist.org
- Global Language Monitor list of the Top Ten Politically (In)Correct Terms of 2004
- The Origins of Political Correctness - Lecture by Bill Lind
- Political Correctness: The Scourge of Our Times - Agustin Blazquez with the collaboration of Jaums Sutton
- An examination of Political Correctness - University of Toronto
- Notes on Inclusive Language, by Warren Forgay
- Campaign Against Political Correctness
- Political Correctness - the awful truth!
- A UK perspective on respect for other people
- The Politically Incorrect Alphabet - an illustrated alphabet of politically incorrect terms as suggested by visitors
- Kalb, Jim. "PC and the Crisis of Liberalism", Pinc [Politically Incorrect], February, 1998.
Catégories :- Tension intercommunautaire
- Expression ou néologisme politique
- Culture des États-Unis
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