Pierre Bayle (philosophe)

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Pierre Bayle (philosophe)

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Pierre Bayle
Portrait de Pierre Bayle par Louis Ferdinand Elle
Portrait de Pierre Bayle par Louis Ferdinand Elle

Activité(s) Philosophe, écrivain
Naissance 1647
Décès 1706
Langue d'écriture Français

Pierre Bayle, né à Carla-le-Comte le 18 novembre 1647 et mort à Rotterdam le 28 décembre 1706, est un philosophe et écrivain français.

Sommaire

Biographie

Il est né à Carla-le-Comte (maintenant Carla-Bayle), près de Pamiers en Ariège, second fils d’un modeste pasteur protestant. Instruit par son père, il apprend le grec et le latin. A cause de la pauvreté de sa famille il doit attendre la fin des études de son frère pour suivre un cursus au petit collège protestant de Puylaurens.

En 1669, il entre à l’université des jésuites de Toulouse, et se convertit au catholicisme. Après dix-sept mois, il abjure et revient au protestantisme, il se réfugie à Genève dans les années 1670, où il apprend les enseignements de René Descartes et entreprend des études de théologie. Il adopte, pour vivre, le métier de précepteur.

Il revient en France et pendant quelques années écrit sous le nom de Bêle et travaille comme précepteur dans diverses familles de Rouen et de Paris. En 1675 sur les instances de son ami Henri Basnage de Beauval, il présente sa candidature à l’Académie de Sedan, où, à l’issue d’un concours et en partie grâce au soutien de son futur ennemi Pierre Jurieu, il est nommé à la chaire de philosophie.

En 1681, l’Académie de Sedan est fermée, mais presque immédiatement après Bayle est nommé professeur de philosophie et d’histoire à l’École Illustre de Rotterdam. Il édite en 1682 ses célèbres Pensées sur la comète et sa critique du travail de Louis Maimbourg sur l’histoire du protestantisme. Sa grande réputation suscite l’envie de son collègue Pierre Jurieu qui écrit un livre sur le même sujet.

En 1684, Pierre Bayle commence seul la publication de son journal de critique littéraire Nouvelles de la république des lettres, qui obtient dans toute l’Europe un rapide succès. En 1690 paraît un Avis important aux réfugiés prônant la liberté de religion et la tolérance, ce qui provoque la colère de Pierre Jurieu et celle de l’évêque de Rieux.

Lors de la révocation de l’édit de Nantes, il combat dans ses écrits l’intolérance de Louis XIV, mais en même temps il compromet par ses attaques toutes les communions chrétiennes. Ses ennemis, à la tête desquels on retrouve Jurieu, le font, après une longue querelle, priver de sa chaire en 1693 au motif d’irréligion et de complicité avec le roi de France.

Cela ne le gêne pas particulièrement pendant la préparation de son Dictionnaire historique et critique, œuvre majeure qui préfigure l’Encyclopédie. Ce Dictionnaire se veut comme la correction des erreurs des auteurs des dictionnaires précédents (en particulier Louis Moréri). Véritable labyrinthe, ce dictionnaire est composé d’articles emboîtés les uns dans les autres, de nombreuses notes et citations. D’une certaine façon Bayle dans ce dictionnaire pratique l’hypertexte. A travers une pensée en apparence errante, le principal enseignement de Bayle est que le monde ne se réduit jamais à une vision manichéenne et suppose le croisement permanent des points de vue et des opinions contradictoires.

Jurieu le dénonce au consistoire comme impie et, au Prince d’Orange, devenu roi d’Angleterre comme ennemi de l’Etat et partisan secret de la France. Mais grâce à la protection de Lord Shaftesbury, il échappe cette fois aux coups de ses persécuteurs. Les dernières années de Bayle sont consacrées à divers écrits, provenant dans beaucoup de cas des critiques faites sur son Dictionnaire, qu’il cherche le reste de sa vie à développer. Il meurt en exil à Rotterdam en 1706.

Bayle est surtout connu comme sceptique. Dans son Dictionnaire, il se plaît à exhumer les opinions les plus paradoxales et à les fortifier d’arguments nouveaux, sans toutefois les avouer pour son propre compte ; par l’incrédulité qui règne dans ses écrits, il a frayé la voie à Voltaire.

En 1906, une statue en son honneur a été érigée à Pamiers comme « réparation d’un long oubli ».

Publications

Une édition condensée du Dictionnaire historique et critique datée de 1780.

Citations

  • « Presque tous les peuples du monde tiennent leurs femmes dans une espèce de captivité. »[réf. nécessaire]
  • « Il n’est pas plus étrange qu’un athée vive vertueusement qu’il n’est étrange qu’un chrétien se porte à toutes sortes de crimes. » (Pierre Bayle / 1647-1706 / Pensées sur la comète, 1682)
  • pour se faire une idée du contenu du Dictionnaire, voici un court extrait : c'est la première moitié de l'article AGAR qui, dans son entier occupe 3 pages (avec les longs commentaires sur l'origine des informations) sur les 2772 pages que comporte l'ouvrage.

Présentation et orthographe conforme à l'original.

AGAR, servante & puis concubine du Patriarche Abraham, étoit Egyptienne. Il y a quelque apparence qu’il la prit à son service lors qu’il revint d’Egypte, après avoir recouvré sa femme que le Roi Pharaon avoit enlevée. Mais c’est une fable que de dire, comme font les Juifs, qu’Agar étoit fille de ce Roi. Chacun sait que Sara se voyant stérile depuis long temps pria son mari d’essayer s’il pourroit avoir des enfans de cette servante, & qu’Abraham vaincu par ces sollicitations, & faisant même comme quelques uns traduisent, un acte d’obéissance, s’aprocha d’Agar avec tout le succès que sa femme s’en pouvoit promettre, sa femme, dis-je, car c’étoit pour son compte qu’elle souhaitoit que sa servante fit des enfans, & n’en pouvant donner par elle-même à son mari, elle vouloit lui en donner par procureur. Ceux qui trouveront peu conforme aux manières de notre siècle, qu’il ait falu employer de grandes prières auprès d’Abraham pour de telles choses, & surtout que ces prières soient venues de sa propre femme, doivent une bonne fois se bien mettre dans l’esprit,que tous les tems et tous les peuples du monde ne sont point semblables. Quoi qu’il soit Agar se sentant grosse devint si fière, qu’on eût dit qu’elle venoit de faire un très grand exploit ; mais on rabattit bien-tôt son insolence. Sara qui ne put souffrir de s’en voir traitée de haut en bas, la mal-traita de telle sorte qu’elle la contraignit de déserter la maison. Agar n’y rentra qu’après s’être humiliée suivant l’ordre que lui donna un Ange, qui annonça qu’elle accoucheroit d’un fils qui auroit des querelles avec tout le monde. Elle accoucha peu après d’Ismaël qui fut elevé chez son père jusqu’à l’âge de 15 ou 16 ans pour le moins.

Bibliographie

  • Vie de Bayle, par Pierre Des Maizeaux, 1732
  • Étude sur Bayle, par Lenient, 1856
  • Pierre Bayle, par Hubert Bost, Fayard, Paris, 2006.
  • Bayle philosophe, par Gianluca Mori, Honoré Champion, Paris, 2001.
  • Abel, Olivier et Pierre-François Moreau (dir. publ.). 1995. Pierre Bayle : la foi dans le doute, Genève et Paris, Labor et Fides, 148 p.
  • Bost, Hubert et Philippe de Robert (dir. publ.). 1999. Pierre Bayle, citoyen du monde. De l’enfant du Carla à l’auteur du Dictionnaire. Actes du Colloque du Carla-Bayle (13-15 septembre 1996). Paris, Honoré Champion, 379 p.
  • Bouchardy, Jean-Jacques. 2001. Pierre Bayle : La nature et la « nature des choses ». Paris, Honoré Champion, 349 p.
  • Bernard Cottret. 1990. « Tolérance ou liberté de conscience ? Épistémologie et politique à aube des Lumières ». Études théologiques et religieuses, vol. 65, no 3, p. 333-350.
  • Delpla, Isabelle et Philippe de Robert (dir. publ.). 2003. La raison corrosive : Études sur la pensée critique de Pierre Bayle. Paris, Honoré Champion, 292 p.
  • Delvolve, Jean. 1971. Religion, critique et philosophie positive chez Pierre Bayle, New York : Burt Franklin, 445 p.
  • Dibon, Paul (dir. publ.). 1959. Pierre Bayle : Le philosophe de Rotterdam. Paris, Librairie Vrin, 255 p.
  • Groffier, Ethel et Michel Paradis (dir. publ.). 1991. The notion of tolerance and human rights : essays in honour of Raymond Klibansky. Carleton : Carleton University Press. 174 p.
  • Guggisberg, Hans R., Frank Lestringant et Jean-Claude Margolin (dir. publ.). 1991. La liberté de conscience (XVIe-XVIIe). Actes du Colloque de Mulhouse et Bâle (1989). Genève : Droz S.A., 375 p.
  • Kilcullen, John. 1988. Sincerity and Truth : Essays on Arnauld, Bayle, and Toleration. Oxford, Clarendon Press, 228 p.
  • Élisabeth Labrousse. 1965. Pierre Bayle et l’instrument critique. Paris, Seghers, 190 p.
  • ———— . 1987. Notes sur Bayle. Paris, Librairie Vrin, 158 p.
  • ———— . 1996. Conscience et conviction : Études sur le XVIIe siècle. Paris et Oxford, Universitas et Voltaire Foundation, 299 p.
  • Lennon, Thomas M. 1999. Reading Bayle. Toronto : University of Toronto Press, 202 p.
  • Levine, Alan (dir. publ.). 1999. Early Modern Skepticism and the Origins of Toleration. Oxford, Lexington Books, 282 p.
  • Laursen, John Christian. 2001. « The Necessity of Conscience and the Conscientious Persecutor : The Paradox of Liberty and Necessity in Bayle’s Theory of Toleration » In Dal necessario al possible : determinismo e liberta nel pensiero anglo-olandese del XVII secolo, sous la dir. de Luisa Simonuti, p. 211-228. Milan : Franco Angeli.
  • Magdelaine, Michelle, Maria-Christina Pitassi, Ruth Whelan et Antony McKenna (dir. publ.). 1996. De l’Humanisme aux Lumières, Bayle et le protestantisme, Paris et Oxford, Universitas et Voltaire Foundation, 742 p.
  • Mori, Gianluca. 1997. « Pierre Bayle, the Rights of the Conscience, the « Remedy » of Toleration ». Ratio Juris, vol. 10, no 1 (mars), p. 45-60.
  • Negroni, Barbara de, 1996. Intolérances : Catholiques et protestants en France, 1560-1787. Paris, Hachette, 232 p.
  • Paganini, Gianni (dir. publ.). 2003. The Return of Scepticism. Dordrecht, Boston et Londres : Kluwer Academic Publishers, 486 p.
  • Rétat, Pierre. 1971. Le Dictionnaire de Bayle et la lutte philosophique au XVIIIe siècle. Lyon, Audin, 555 p.
  • Rex, Walter. 1965. Essays on Pierre Bayle and Religious Controversy. La Haye, Nijhoff, 271 p.
  • Sandberg, Karl C. 1966. At the Crossroads of Faith and Reason. An Essay on Pierre Bayle. Tucson : University of Arizona Press, 125 p.
  • Stewart, M. A. (dir. publ.). 1997. Studies in Seventeenth-Century European Philosophy. Oxford, Clarendon Press, 237 p.
  • Zarka, Yves Charles, Franck Lessay, et John Rogers (dir. publ.). 2002. Les fondements philosophiques de la tolérance. 3 t. Paris, Presses Universitaires de France.

Source partielle

« Pierre Bayle (philosophe) », dans Marie-Nicolas Bouillet et Alexis Chassang [sous la dir. de], Dictionnaire universel d’histoire et de géographie, 1878 [détail des éditions]  (Wikisource)

Liens externes

  • Documents numérisés par la BNF :
Projet et fragmens d’un dictionnaire critique
Dictionnaire historique et critique
Avis important aux réfugiés

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